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Mgr Marc Aillet : « Il y a un réveil religieux incontestable en Russie »

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L’évêque de Bayonne, Mgr Marc Aillet effectue avec une petite délégation un voyage d’études de cinq jours en Russie, à l’invitation du Patriarcat de Moscou. Aymeric Pourbais l’a interwiewé  pour l’hebdomadaire « Famille chrétienne » :

Quel est l’objectif de ce voyage ?

La promotion de la famille et l’accueil de la vie humaine sont au cœur des préoccupations de l’Église catholique, notamment dans la perspective du prochain Synode. Dans ce cadre, il m’a semblé intéressant d’observer ce qui se passe actuellement dans l’Église orthodoxe et en Russie plus généralement. Récemment ces questions familiales ont pris une importance considérable dans le débat public. Le communisme a détruit la famille, l’avortement était devenu endémique (deux avortements pour une naissance). Cela a entraîné une prise de conscience et des mesures actuelles qui ont permis de réduire ce chiffre de moitié.

Quels enseignements tirez-vous de ce voyage ?

D’abord qu’il y a un incontestable réveil religieux dans ce pays, depuis une quinzaine d’années. Nous avons participé à la Divine liturgie à la cathédrale Saint-Sauveur de Moscou, détruite sous Staline et reconstruite en 2000 par le gouvernement russe. Le nombre de fidèles, dont beaucoup de jeunes, pendant les trois heures d’office, en pleine semaine, est un signe incontestable de ce réveil. De notre côté, nous avons eu le sentiment que nos différents interlocuteurs au sein de l’Église orthodoxe ont été très intéressés par ce qui se passe dans l’Église catholique, notamment tout ce qui concerne la pastorale de la famille. Je pense notamment à la préparation au mariage, à la défense de la famille composée d’un homme et d’une femme, aux actions en faveur du respect de la vie… Chez eux, on sent que ce ne sont que des balbutiements, même si nous avons été impressionnés par la rencontre avec la Commission Famille du patriarcat, composée d’un prêtre et de laïcs très engagés dans l’action pastorale et publique. Avec notamment une forte implication dans la préparation du Congrès mondial des familles qui devrait se tenir à Moscou en septembre prochain, et qui rassemble plusieurs traditions religieuses.

Les catholiques ont-ils quelque chose à apporter aux orthodoxes russes dans ce contexte ?

Sans doute que le réveil religieux en Russie a besoin d’être catéchisé, par une évangélisation des personnes, plus nombreuses qu’auparavant, qui demandent le baptême, des funérailles ou le mariage chrétien. Notre expérience en matière de nouvelle évangélisation et de première annonce pourrait en effet être une aide. Nous avons été encouragés en ce sens par le nonce apostolique ainsi que par l’archevêque catholique de Moscou, Mgr Paul Pezzi.

L’actualité internationale a-t-elle été évoquée lors de votre voyage ?

Notre rencontre avec le métropolite Hilarion, sorte de ministre des affaires étrangères du patriarcat, n’a pas donné lieu à un échange sur l’Ukraine et la Crimée. Nous avons évoqué plutôt le drame des chrétiens de Syrie, qui fait l’objet d’une indifférence quasi générale des médias occidentaux, avec encore récemment le drame des Arméniens chassés et tués par les islamistes. Nous avons aussi parlé de l’ultralibéralisme en Occident, qui effraie et affecte aussi beaucoup la Russie. Le métropolite s’est enfin dit sensible aux manifestations sans précédent qui ont eu lieu en France pour défendre la famille et le mariage.

Le rattachement de la Crimée à la Russie a-t-il parasité votre démarche ?

Il ne s’agit pas d’un voyage politique ou même idéologique, mais bien d’une démarche informelle, à vocation pastorale, et de coopération entre deux confessions chrétiennes. Ensuite, ce voyage avait été prévu bien avant l’affaire de la Crimée. Il semble enfin que le patriarcat de Moscou ne soit pas exactement sur la même ligne que Vladimir Poutine sur cette question. Même si Église et État peuvent par ailleurs être alliés dans la défense de la famille.

L’approche des droits de l’homme est-elle divergente entre Orient et Occident ?

La politique de Vladimir Poutine est en effet très décriée en Occident. Mais il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’un pays en reconstruction, après soixante-dix ans de communisme : régime qui a totalement nié les droits de l’homme, sans que cela soit toujours dénoncé en Occident… Par ailleurs, la promotion de la vie est partie intégrante de la défense des droits humains et on ne peut pas l’exclure, comme l’a rappelé le pape François dans son exhortation Evangelii gaudium. En Russie, si sur ce terrain, les choses sont encore en gestation, il y a indéniablement une politique favorable au respect de la vie. En Occident, en revanche, on ne peut pas dire que nous soyons en progrès sur cette question. Car comme le souligne le pape, « ce n’est jamais un progrès que de résoudre les problèmes en éliminant une vie humaine » (EG 214). Notre voyage n’avait pas pour but de créer une quelconque alliance des moralismes, mais il nous a permis de constater que le respect des droits humains n’est pas qu’une question de morale individuelle, mais aussi de justice sociale. »

Réf  Mgr Marc Aillet : « Il y a un réveil religieux incontestable en Russie »

Mgr Marc Aillet (54 ans) a été formé par le « scoutisme d’Europe » et fut ordonné prêtre au sein de la communauté Saint-Martin. Ancien vicaire général de Mgr Rey,  évêque de Toulon Fréjus, il a été nommé évêque de Bayonne, Lescar et Oléron par Benoît XVI en 2008.

JPSC 

Commentaires

  • Plutôt que de « réveil religieux », ne pourrait-on plutôt parler de « ré-évangélisation » ?
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    Il me semble que la « religiosité » est inscrite dans le cœur de tout homme, que c'est le propre de l'homme. Tout homme cherche à savoir, consciemment ou non, comment il est « relié » au monde et donc aussi à ce qui a créé ce monde.
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    Mais cette « religiosité » est souvent détournée vers des idoles. Le peuple russe a vu sa religiosité détournée de force vers l'idéologie marxiste, le matérialisme, le rationalisme, et même les César que furent Lénine puis Staline. Pour beaucoup de gens aujourd'hui, le communisme est encore vécu comme une quasi religion, même si c'est une religion païenne, un paganisme adorateur d'idoles.
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    Et le capitalisme n'est-il pas lui-même qu'une religion païenne, un paganisme adorateur d'idoles assez proches de celles du communisme ?

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