Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Le pape recourt-il trop souvent à des décisions autoritaires (motu proprio) ?

IMPRIMER

C'est l'avis du vaticaniste Aldo Maria Valli (en traduction française sur le site "Benoît et moi") :

"Alors qu’on est sans nouvelles de la réforme de la Curie romaine (le document correspondant, la constitution apostolique Praedicate Evangelium, a désormais disparu des radars), la prolifération des lois émises par décision directe du pape, sous forme de motu proprio, sans l’implication de la curie, est remarquable. Une prolifération qui se heurte au discours constant de François sur la synodalité.

Pour nous limiter à l’année 2021 qui vient de s’achever, voici la liste, à rebours, des lois émises par François sous la rubrique « motu proprio » [MP].

  • Lettre apostolique en forme de « Motu Proprio » par laquelle le Saint-Père institue la Commission pontificale pour la vérification et l’application du M. P. Mitis Iudex dans les Eglises d’Italie (17 novembre 2021)
  • Lettre apostolique en forme de « Motu Proprio » du Pape François Traditionis custodes sur l’usage de la liturgie romaine antérieure à la réforme de 1970 (16 juillet 2021)
  • Lettre apostolique en forme de « Motu proprio » du Pape François Antiquum ministerium instituant le ministère de catéchiste (10 mai 2021)
  • Lettre apostolique en forme de « Motu Proprio » du Souverain Pontife François modifiant la juridiction des organes judiciaires de l’État de la Cité du Vatican (30 avril 2021)
  • Lettre apostolique en forme de « Motu Proprio » du Souverain Pontife François concernant les dispositions sur la transparence dans la gestion des finances publiques (26 avril 2021)
  • Lettre apostolique en forme de « Motu Proprio » du Souverain Pontife François concernant la limitation des dépenses pour le personnel du Saint-Siège, du Gouvernorat de l’Etat de la Cité du Vatican et d’autres entités connexes (23 mars 2021)
  • Lettre apostolique en forme de Motu Proprio du Souverain Pontife François concernant les changements en matière de justice (8 février 2021)
  • Lettre apostolique en forme de Motu Proprio, sur la modification du canon 230 § 1 du Code de droit canonique concernant l’accès des personnes de sexe féminin au ministère institué du Lectorat et de l’Acolytat (10 janvier 2021).

Comme on le voit, un rythme remarquable. Mais huit motu proprio en un an, ce n’est pas un record. En 2016, en effet, François en a émis neuf, tout comme en 2019. En 2020, il y en a eu six, en 2017 quatre. En 2013 et 2015, trois, en 2014 et 2018, deux.

Si l’on compare cette production avec celle de Benoît XVI, la différence est évidente. De 2005 à 2013, le pape Ratzinger n’a émis que treize motu proprio en tout, avec ce rythme : deux en 2005, aucun en 2006, deux en 2007, aucun en 2008, aucun en 2009, un en 2010, deux en 2011, trois en 2012, trois en 2013.

Si nous revenons ensuite à Jean-Paul II, nous voyons que son maximum était de trois motu proprio par an (en 1988, 1994, 1999), mais normalement il se limitait à un ou deux par an, et pendant quatre ans (1990, 1991, 1995, 1996) il n’en a émis aucun.

Geraldina Boni, consultante du Conseil pontifical pour les textes législatifs (un organe que Bergoglio a de facto privé de ses fonctions de révision et de contrôle) ne cache pas son inquiétude face au centralisme et à la surproduction juridique de François. Caractère organiques des lois et sécurité juridique sont des souvenirs lointains. Les règles sont souvent rédigées par des commissions créées par le pape, dans un désordre auto-alimenté car, face aux problèmes d’interprétation, arrivent des changements et des corrections qui produisent une confusion supplémentaire.

Concernant la méthode avec laquelle François gouverne l’Église, des observateurs bien informés n’hésitent pas à parler d’absolutisme monarchique débridé et de Babel juridique. Un style sans comparaison avec les papes qui l’ont précédé.

Mais le synode lui-même, que François exalte souvent et qui devrait représenter le triomphe de la collégialité, est compris par Bergoglio de manière singulière, comme nous l’avons vu dans les deux synodes sur la famille. De plus, le pape, malgré son exaltation (en paroles) de la synodalité, ne convoque plus les cardinaux à un consistoire et n’a donc plus de discussion ouverte avec eux.

Le recours fréquent à l’approbation en forme spécifique de chaque nouvelle norme émise par un dicastère fait également partie du tableau. En fait, la formule exclut toute possibilité d’appel.

Le professeur Paolo Cavana, professeur de droit canonique et ecclésiastique à l’Université libre Maria Santissima Assunta de Rome, en illustrant la situation, n’a pas hésité à parler d’une « dérive » qui « apparaît tout à fait inhabituelle dans l’Eglise catholique ». En effet,

dans la production législative de ce pontificat, le droit tend à être perçu de manière prépondérante comme un facteur organisationnel et disciplinaire, c’est-à-dire comme une sanction, et toujours dans une fonction d’instrumentalisation par rapport à des choix de gouvernement bien déterminés, et non pas aussi comme un instrument fondamental de garantie des droits (et d’observation des devoirs) des fidèles.

https://ilregno.it/attualita/2021/16/francesco-poco-canonico-paolo-cavana

Des mots, il faut le noter, écrits non pas dans une publication hostile à François, mais dans Il Regno [une revue « catho-progressiste », ndt]. Et sous ce titre : François (peu) canonique."

Commentaires

  • Bonjour,
    Merci pour votre site, qui est très riche et intéressant.
    Pourriez-vous nous informer, de façon comparative, sur les différentes formes de textes émis par l'Eglise car je m'y perds : motu proprio, décrets, bulles, lettres, exhortations, constitutions et brefs apostoliques, indults et rescrits, encycliques, etc. ?
    A moins que je ne puisse trouver cela qq. part dans vos archives ?
    Un grand merci, bonne continuation

Les commentaires sont fermés.