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S'interroger sur notre posture

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Ces dernières semaines ont été dominées par la question du « mariage pour tous » et par la mobilisation qui a abouti à la très grande manifestation du 13 janvier sur le Champ de Mars à Paris. Il s’agit de défendre l’institution du mariage et de la famille contre la menace que feraient peser sur elles des lois permettant à tous, quelles que soient leurs orientations sexuelles, d’accéder au mariage et à la parentalité en recourant aux techniques de procréation assistée, y compris le recours aux services des mères porteuses. On met en avant le droit des enfants à bénéficier d’un père et d’une mère et l’on dénonce très légitimement la revendication du droit à l’enfant à tout prix qui en fait un objet répondant à une logique de désir peu soucieuse du bien objectif de cet enfant. On insiste également sur le brouillage des repères, sur la menace pesant sur la filiation, sur la dégradation anthropologique, etc.

En Belgique, tout cela ne se discute plus puisque c’est inscrit dans la loi depuis belle lurette, et bien d’autres choses y compris le suicide médicalement assisté comme on vient de le voir récemment avec l’euthanasie de jumeaux de 45 ans. Certains nous disent : « qu’est-ce que cela peut vous faire ? N’êtes-vous pas libres de vivre selon vos valeurs ? Pourquoi vouloir empêcher d’autres de faire d’autres choix ? » Effectivement, le discours sur les points non négociables, sur la loi naturelle, sur le bien et le vrai, a beaucoup de mal à passer dans une société qui valorise au maximum l’exercice des droits individuels et l’empathie compassionnelle. Pourquoi refuser aux uns (homosexuels) ce que l’on accorde aux autres (hétérosexuels) ? Pourquoi refuser à un couple hétéro ou homo d’avoir un enfant en recourant aux possibilités offertes par les techniques médicales actuelles ? N’est-ce pas un comble de refuser à des couples qui le désirent vraiment un enfant alors que tant d’autres couples traitent si mal les enfants qu’ils n’ont peut-être même pas désirés ? Ces arguments, ne les avons-nous pas tous entendus ? Et bien sûr, nous avons peaufiné un contre-argumentaire solide comme un catéchisme, sans toujours percevoir tout ce qui pouvait se cacher derrière le discours que nous réfutons.

Et pourtant, ne sommes-nous pas tous en contact avec des réalités bien éloignées des principes que nous proclamons ? Ne sommes-nous pas amenés à fréquenter et accueillir, même au sein de nos familles, des couples vivant ensemble sans s’être mariés, des couples homosexuels, des personnes divorcées, des familles qui ont eu recours à des techniques de procréation assistée, etc. Et que faisons-nous alors ? Leur fermons-nous la porte ? Leur tenons-nous des discours intransigeants ? Et si nous ne leur manifestions ni compréhension, ni tendresse, ni amour, pourrions-nous encore prétendre être disciples de Jésus ? Lui-même ne s’est-il pas fait accueillant à tous en commençant par ceux qui étaient bien éloignés du respect de la loi ? Et comment a-t-il traité ceux qui revendiquaient une stricte soumission à tous les préceptes de la loi, les pharisiens ? On me répondra, comme si nous ne le savions pas, que le Christ n’est pas venu abolir la loi (même pas un petit iota) et qu’il demande au pécheur qu’il se convertisse. Mais tout, dans l'Evangile, ne commence-t-il pas par la rencontre, l’accueil, le respect, le dialogue…

C’est pourquoi certaines attitudes et certains discours nous posent question parce qu’ils manifestent d’abord un attachement doctrinaire à des principes au lieu de marquer une attention prioritaire à l’égard des personnes (notre "prochain") pour les aider véritablement. Le christianisme n’est pas une idéologie et nous ne sommes pas d’abord des militants. Il y a fort à craindre que nous n’apparaissions comme des personnes intraitables dépourvues de sensibilité si nous ne déployons pas autant d’énergie pour aller au-devant des détresses que nous en dépensons pour proclamer des principes. Derrière les slogans et les revendications auxquels nous ne pouvons évidemment pas souscrire, pouvons-nous rester sourds à ce qu'ils expriment souvent : de profondes souffrances et un besoin bien réel d’aimer et d’être aimé ?

Le danger d’enfermement dans une posture de réactionnaire ronchon existe bel et bien. N’est-il pas trop facile de s’arrêter à quelques slogans extrêmes et à certaines attitudes extravagantes pour toujours dénoncer et condamner ? Est-ce en assénant nos certitudes ou en témoignant de la joie de croire et d’aimer en vérité que nous serons le plus crédibles ? 

Commentaires

  • Dans son pamphlet « Le paysan de la Garonne » (publié chez Desclée De Brouwer en 1966, alors que la crise issue du concile Vatican II divise déjà les esprits et les coeurs) Jacques Maritain parlant de la mission de libération de l’intelligence propre à la philosophie écrit : « Il faut avoir l’esprit dur et le coeur doux, or combien n’ont que le coeur dur et l’esprit mou ! »…À relire.

  • Il me semble qu'il faille surtout s'interroger sur notre posture de grenouille catholique, non pas de bénitier, mais plongée dans un chaudron infernal où la température monte de plus en plus. Car les attaques contre le mariage et donc contre les enfants (la raison d'être du mariage) ne datent pas d'aujourd'hui. La température a commencé à monter progressivement, avec la banalisation de l'adultère, du divorce, de la contraception, de l'avortement. Et, si l'on veut bien réfléchir, ce sont à chaque fois les enfants qui en ont été les principales victimes, non protégées par des adultes inconscients ou indifférents à leurs souffrances.

    Le Christ aussi vivait dans un monde réel, il était confronté aux mêmes inconsciences ou indifférences que nous. Or, il a eu des paroles très sévères contre ceux qui ne respectaient pas les enfants et leurs droits. Il vivait déjà dans une société qui avait autorisé le divorce (la répudiation par l'homme). Il a sermonné ses contemporains en leur disant que c'était la dureté de leur cœur qui avait permis à leur société d'édicter cette loi. En déduira-t-on que le Christ n'était qu'un « réactionnaire ronchon » ? Lorsque notre société a banalisé l'adultère puis a rétabli le droit de répudiation (par n'importe lequel des conjoints) ne peut-on voir que nos cœurs se sont aussi endurcis, et que la température est montée d'un cran dans le chaudron ? Et qu'avons-nous dit ou fait à ce moment-là ?

    Une société qui ne met pas au premier plan de ses préoccupations ses enfants et leurs droits, qui ne leur donne pas tout l'amour et toute la protection auxquels ils ont droit, n'est pas une société selon le Christ, car c'est une société désespérée et désespérante, sans avenir. Une société qui veut refléter la foi, l'espérance et la charité ne peut pas ainsi manipuler et maltraiter ses enfants, qui sont son propre avenir. Arrêtons de nous disputer sur nos prétendus droits d'adultes, redonnons surtout des droits à nos enfants, et contentons-nous d'assumer nos devoirs d'adultes à leur égard. Quoi qu'il nous en coûte.

  • Il se fait que j’étais à Paris hier et que, par hasard, pour reprendre le métro au jardin du Luxembourg, avec mon épouse, nous avons du remonter la manifestation. À un moment, mon épouse s’était penchée pour ranger une carte dans sa valise. Un manifestant homo avec pancarte est alors arrivé « mimant » des gestes obscènes. Partout dans la manif des slogans réclamant l’adoption, la PMA ou la GPA et hostiles à l’Eglise. On pouvait voir, entre autres, des travestis déguisés en nonnes. J’ai du mal en ces circonstances à « témoigner de la joie de croire » pour reprendre votre expression.

  • @ lw ... Pour lire un échantillon des slogans utilisés, voir sur :
    http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2013/01/27/01016-20130127ARTFIG00179-les-pro-mariage-gay-mobilisent-moins-que-les-anti.php
    C'est effectivement un mélange d'obscénités, d'exigence de procréation assistée et de cathophobie. Cela ressemble à une foule désemparée, sans bon berger pour la guider. Comment faire pour les sortir de cette détresse où ils sont plongés ? Par nos propres moyens et nos seuls efforts, pourrions-nous jamais y arriver ?

  • Votre questionnement répond tout à fait à mes propres questions...
    Qui sommes-nous pour donner des leçons?
    Je ne le formule sûrement pas aussi bien que vous!
    Je crois que nous devons nous battre contre ces mauvaises lois, et donc ici nous pouvons aussi relayer le message des Français et les soutenir.
    Une fois que c'est devenu légal, c'est souvent perçu comme normal et même correct. Combien de fois ne devons-nous pas dire que des lois sont iniques et amorales. Je crois fort à une résistance à ces lois avant qu'elles ne passent. Une fois passée, nous devons oser dire et redire qu'elles ne sont pas juste, mais sans stigmatiser les personnes. Oui, nous devons à la fois être doux, disciple du Christ, pleins de compassions envers les personnes, mais intransigeant sur les actes.
    Équilibre si difficile à tenir...surtout en tombant ni dans l'aigreur ni dans la déprime.
    Une main de fer dans un gant de velours ?

  • En tant que chrétien catholique, je crois qu'il est important de garder à l'esprit que ce qui fait la source de nos valeurs est la foi en Dieu. Ce n'est que celle-ci et notre ferveur qui doivent servir de guide à nos actions futurs, y compris concernant les mutations présentes dans nos sociétés.

  • Ceux qui sont le plus à plaindre ce sont les chrétiens sincères qui un jour ont compris qu'ils étaient attirés par des personnes du même sexe à l'insu de leur plein gré. Ils se retrouvent coincés entre leur foi, la doctrine de l'Eglise et la "culture gay" avec ses revendications parfois ses outrances (gay prides) et son communautarisme.

    Ces chrétiens là, ceux qui veulent le rester en dépit des difficultés et du regard des autres, doivent recevoir le soutien, l'amitié de leurs frères et soeurs et l'assistance spirituelle du clergé. Ce qui ne veut pas dire qu'il faut tout accepter et certainement pas la PMA et les mères porteuses. Mais à cela les homos réellement croyants ne pensent même pas. A la TV on ne montre que des extrémistes style Act Up qui adorent la provocation.

  • Merci beaucoup pour ce billet! Je vous invite à lire ceci;

    http://voixdemomes.wordpress.com/2013/01/15/antoinette/

    "Il y a fort à craindre que nous n’apparaissions comme des personnes intraitables dépourvues de sensibilité si nous ne déployons pas autant d’énergie pour aller au-devant des détresses que nous n’en dépensons pour proclamer des principes."
    Le risque est même de devenir des personnes intraitables dépourvues de sensibilité!

    "Est-ce en assénant nos certitudes ou en témoignant de la joie de croire et d’aimer en vérité que nous serons le plus crédibles ? "
    C'est en faisant les deux.

  • La réponse à ce dilemme apparent me parait simple : Nous devons aimer les pécheurs mais haïr le péché. A nous Chrétiens de montrer, par notre joie de vivre, que de suivre le chemin de Jésus rends heureux finalement alors que de vivre dans le péché n'offre qu'un simulacre de bonheur bien superficiel et éphémère.

    J'ajouterai encore que tout ce qui est légal n'est forcément moral, l'Histoire en donne de nombreux exemples. Par ailleurs, les lois des hommes changent selon le temps et la mode du moment, alors que les lois de Dieu sont éternelles comme la Vie Eternelle qui est à la portée de tout humain qui se met à l'écoute de Dieu.

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