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Remplacer des vitraux de Notre-Dame de Paris par du contemporain ?

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D' sur le site du Figaro Vox :

Didier Rykner: «Remplacer les vitraux de Notre-Dame par du contemporain serait du vandalisme»

FIGAROVOX/ENTRETIEN - Le directeur de La Tribune de l’art s’inquiète de la tentation d’éradiquer l'héritage de Viollet-le-Duc à l’intérieur de cathédrale, visible dans le projet de l’archevéché de Paris qui envisage un mobilier contemporain.

20 novembre 2020
Didier Rykner est journaliste et historien de l’art français. Engagé pour la défense du patrimoine, il publie régulièrement ses enquêtes et analyses sur le site La Tribune de l’art.

FIGAROVOX.- Selon plusieurs sources, l’archevêché de Paris réfléchit à aménager l’intérieur de la cathédrale Notre-Dame abîmé par l’incendie de façon plus moderne, en y installant notamment des vitraux contemporains. Que vous inspire cette initiative?

Didier RYKNER.- Je suis heureux que Le Figaro ait pu se faire l’écho de cette démarche inquiétante. J’enquête moi-même depuis plusieurs semaines sur ce projet de l’archevêché. Ce qui en a filtré dans la presse et dont j’ai eu vent par plusieurs personnes auxquelles le projet a été présenté m'apparaît d’ores et déjà comme scandaleux et inacceptable. On va me répondre qu’il ne s’agit là que d’un projet et qu’on peut discuter de tout. Et bien non, car dès le départ le cahier des charges impose qu’on ne touche pas à un patrimoine protégé. Le fait de vouloir remplacer certains vitraux décoratifs du XIXème siècle par des vitraux contemporains est inenvisageable. Certains sont historiés (NDLR: décrivent une scène de l’Ancien Testament ou de l’Evangile) d’ailleurs, comme celui de l’arbre de Jessée, signé de Didron.

Vitral de l'arbre de Jessé

De nombreuses églises ou cathédrales possèdent des vitraux contemporains très réussis. En quoi cela poserait il problème à Notre-Dame?

Je ne suis pas opposé en soi aux vitraux contemporains, il y a des exemples très réussis comme dans la cathédrale de Reims mais là-bas les vitraux de Chagall ont pris la suite de vitraux brisés pendant la guerre. Là il s’agirait de remplacer des vitraux existant, qui ont été miraculeusement épargnés par l’incendie. En vérité on veut se livrer par préjugé à l’éradication de l’héritage de Viollet-le Duc. La flèche a heureusement été sauvée, mais le délire postmoderne continue et s’attaque à l’intérieur.

La flèche a heureusement été sauvée, mais le délire postmoderne continue et s’attaque à l’intérieur.

Que vous inspire le fait que l’église elle-même cède à la tentation du contemporain? Le clergé français a-t-il un problème avec son patrimoine?

C’est évident. Le clergé français a dans les années 1960 interprété le concile Vatican II en mettant en œuvre un vandalisme inédit depuis la révolution française au nom d’un modernisme douteux. C’est ainsi qu’il s’est débarrassé de chaires, de maitres-autels de tables de communions innombrables. C’est tout un patrimoine qui a disparu, et ça continue.

Faut-il selon vous s’interdire toute nouveauté et reproduire exactement à l’identique? Qu’attendez-vous de l’Etat?

On peut admettre que l’arrangement de Notre Dame avant l’incendie était un peu erratique, avec de nombreuses chapelles fermées, mal éclairées, et une circulation difficile. Que les travaux de rénovation soient l’occasion d’un nouveau départ, cela se conçoit. Mais n’oublions pas que tout ce patrimoine (mobilier, tableaux, vitraux) est protégé d’un point de vue légal. Et que la souscription levée pour les travaux l’a été fait pour la restauration, et pas pour l’innovation: elle ne saurait être utilisée pour installer du mobilier contemporain. Une cathédrale gothique est un ensemble à l’architecture spécifique, il faut faire avec l’histoire. Le ministère de la Culture peut tout à fait mettre son véto au projet de l’archevêché.

Commentaires

  • Il va falloir protéger Notre-Dame du mauvais goût et de l'ignorance artistique du clergé ! Un comble ! Vouloir imposer un mobilier contemporain sans consulter les fidèles est du cléricalisme! J'espère qu'on remplacera l'ancien affreux autel par une véritable oeuvre d'art en consonnance avec l'architecture.

  • Ceux qui ont vécu les années 60/70 savent à quels errements lamentables la corporation cléricale a pu se livrer.
    Petits exemples : vendre du patrimoine paroissial comme des ornements liturgiques ou des flambeaux de procession pour se faire de l'argent de poche.
    C'étaient - a-t-on prétendu - des vieilleries qui "évidemment" ne serviraient plus à rien.

  • Un certain art "contemporain" fait courir les snobs, mobilise les budgets mais rarement les foules: la démarche est trop souvent élitiste, marginale, coûteuse...et finalement peu "pastorale".

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