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Un retour à l'abstinence du vendredi pour lutter contre le réchauffement climatique ?

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De Marguerite de Lasa sur le site du journal La Croix :

Pas de viande le vendredi pour les catholiques, un geste pour le climat ?

Explication

Selon une étude publiée le 1er novembre par des chercheurs britanniques, les catholiques pourraient contribuer à la baisse des émissions mondiales de gaz à effet de serre en évitant de manger de la viande le vendredi. Des résultats qui questionnent le sens spirituel de l’abstinence.

02/11/2022 à 10:26

Le « maigre » du vendredi pourrait-il devenir un nouveau geste Laudato si’ ? Selon une étude publiée le 1er novembre par des chercheurs de l’université de Cambridge, les catholiques pourraient contribuer à la baisse des émissions mondiales de gaz à effet de serre en reprenant l’habitude de ne plus manger de viande le vendredi. Autrefois, ne pas manger de viande le vendredi, jour de la mort du Christ, s’inscrivait dans une démarche de pénitence.

Shaun Larcom, chercheur en économie de l’agriculture à l’université de Cambridge et coordonnateur de l’étude, a ainsi estimé dans un communiqué qu’avec plus de 1 milliard de fidèles dans le monde, l’Église catholique était « très bien placée » pour contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique.

« Une source majeure et peu chère de réduction des émissions »

Dans cette étude, les chercheurs ont évalué l’impact d’un appel lancé en 2011 par les évêques catholiques d’Angleterre et du pays de Galles aux fidèles pour qu’ils s’abstiennent de manger de la viande le vendredi. Si seulement un quart d’entre eux environ ont changé leurs habitudes alimentaires, cela a néanmoins permis d’économiser 55 000 tonnes de carbone par an, selon l’étude, soit le nombre d’émissions évitées si 82 000 personnes de moins prenaient un vol Londres-New York en une année.

« Si le pape réinstaurait l’obligation de ne pas manger de viande le vendredi au niveau mondial, cela constituerait une source majeure et peu chère de réduction des émissions » de gaz à effet de serre, et cela « même si une minorité de catholiques se pliaient à l’injonction », a ainsi déclaré Shaun Larcom.

La formulation de cette étude interroge toutefois sur le sens de l’abstinence. Peut-on considérer une pratique spirituelle comme un outil de lutte contre le réchauffement climatique ? Pour Xavier Gravend-Tirole, théologien, aumônier dans les hautes écoles en Suisse et cofondateur du mouvement Détox’ la terre (1), si l’abstinence a de fait un impact positif sur le climat, ce n’est pas pour autant le fondement de la démarche. « En tant que chrétiens, nous cherchons d’abord une connexion à Dieu », souligne-t-il. Et ce faisant, pour lui, l’abstinence réinterroge effectivement notre rapport à la création.

« De quoi ai-je réellement faim ? »

« Jeûner, c’est reprendre contact avec son désir intérieur et se demander “de quoi ai-je réellement faim ?” », explique-t-il. « C’est aussi reconnaître que tout ce qui nous permet de vivre dans la nature est don de Dieu. » Par cette pratique, nous prenons ainsi conscience que nous sommes « reliés avec l’ensemble de la création, jusque dans ce que nous mangeons ».

La conversion écologique commence ainsi, selon lui « par la prise de conscience de cette interdépendance dans cette grande famille du vivant dans laquelle nous sommes investis, engagés ». Et cette prise de conscience, appelle, de fait, au soin de la création.

Pour autant, quitte à se passer de viande, le théologien recommande plutôt une alimentation végétarienne, plus respectueuse de l’environnement que la consommation de poisson qui, autrefois, se substituait à la viande le vendredi. S’il reconnaît aussi que la régularité peut aider, il est critique du formalisme de la règle : « Faut-il que tous les catholiques sur terre adoptent la même régularité, de la même manière ? », interroge-t-il. D’autant que, rappelle-t-il, « ce n’est pas dans les pays pauvres que l’on mange de la viande à chaque repas ». Davantage qu’une injonction à ne plus manger de viande, Xavier Gravend-Tirole préfère donc parler d’un « appel », partant de « l’amour pour la création ».

L’obligation du « maigre » le vendredi a été supprimée en janvier 1967. Les évêques français l’avaient décidé à la suite de la parution, quelques mois plus tôt, de la Constitution apostolique Paenitemini. Dans un souci de « réduire le formalisme de la pratique des œuvres de pénitence », lors des conférences épiscopales, le pape Paul VI y conférait la possibilité de « remplacer, pour des raisons valables, les jours de jeûne et d’abstinence par d’autres formes de pénitence, et surtout par des œuvres de charité».

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