Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Le courrier de Tucho Fernandez : le chemin de l'hérésie est pavé de dubia

IMPRIMER

De Tommaso Scandroglio sur la Nuova Bussola Quotidiana :

Le courrier de Tucho : le chemin de l'hérésie est pavé de dubia

Sous l'ère Fernández (préfet du Dicatère pour la Doctrine de la Foi), les évêques sont de plus en plus nombreux à poser des questions sur la foi et la morale. Les réponses vont toutes dans le même sens : dans les mots, on ne touche pas à la doctrine, dans la pratique, c'est le contraire qui est clair.

19_12_2023

L'angle du courrier du cardinal Fernandez devient de plus en plus obtus, en ce sens qu'il s'élargit chaque semaine au fur et à mesure que le nombre d'évêques qui lui posent des questions sur la foi et la morale augmente. Cette fois, c'est au tour de Mgr Ramón Alfredo de la Cruz Baldera, évêque de San Francisco de Macorís (République dominicaine), de dénoncer le fait que certaines mères célibataires "s'abstiennent de communier par peur du rigorisme du clergé et des dirigeants communautaires". De plus, il y aurait des prêtres qui ne baptisent pas les enfants nés hors mariage. La réponse donnée par le cardinal Fernandez est essentiellement correcte : si elles reçoivent l'absolution sacramentelle pour leurs péchés, comme toute personne baptisée, ces femmes peuvent s'approcher de la Sainte Eucharistie. En ce qui concerne le baptême des enfants nés hors mariage, un passage d'un discours de l'ancien cardinal Bergoglio est cité dans lequel il stigmatise le comportement des prêtres qui refusent d'administrer le baptême à ces enfants.

Il y a cependant quelques lacunes. La première : on ne sait pas exactement qui est l'objet de la question (la lettre complète de l'expéditeur n'est pas indiquée). Il est question de filles célibataires, c'est-à-dire de mères élevant seules leurs enfants, puis de mères ayant conçu un enfant hors mariage. Deux catégories de personnes différentes. Par ailleurs, il y a une ambiguïté sur le courage de mener une grossesse à terme, sujet abordé à la fois par Fernandez et par un discours du Pape cité par ce dernier. Il semble que toute femme qui mène à terme une grossesse non planifiée soit une héroïne. Ce n'est pas le cas. Bien souvent, aucune pression psychologique insurmontable ne pèse sur les femmes, aucune situation d'extrême pauvreté, aucune difficulté sociale particulièrement dure n'oblige à faire preuve de courage pour mettre un enfant au monde. Il est évident qu'aucune de ces conditions ne peut légitimer l'avortement.

Nous avons mentionné que la boîte aux lettres du Card. Fernandez est de plus en plus remplie ces derniers temps. Cette dubiamania semble suspecte. Comment est-il possible qu'avant Fernandez, les questions adressées au Dicastère de la Doctrine de la Foi étaient rares et restaient généralement sans réponse et qu'aujourd'hui elles soient beaucoup plus fréquentes et toutes dignes d'une réponse ? En effet, depuis le mois de juillet de cette année, nous en avons compté pas moins de six, sans compter la déclaration Fiducia supplicans publiée pas plus tard qu'hier. On peut légitimement soupçonner que ces dubia sont dopés. En d'autres termes, on est amené à penser qu'on veut aborder certaines questions ou envoyer certains messages et on charge donc un certain Monseigneur d'écrire au Dicastère. Attention : il ne s'agit que de dubia, pas de certitudes.

Mais au-delà de la genèse de cette dubiamania, il apparaît sans doute, pour rester dans le sujet, que le Magistère ordinaire a trouvé une nouvelle stratégie d'interprétation du munus docendi pour saper la doctrine. Il enseigne ainsi une certaine nonchalance dans l'interprétation de la Révélation et dans les bénédictions des couples homosexuels tant que ces bénédictions ne conduisent pas à une mauvaise interprétation du sens du mariage (thèse officialisée dans le dernier document du Dicastère), de l'Église comme réalité essentiellement synodale, de l'indiscutabilité du concept de "définition définitive" en ce qui concerne le sacerdoce des femmes, la validité de la confession pour certaines personnes même si elles n'ont pas exprimé leur repentir en paroles mais par un comportement concluant, il suffit de s'approcher du confessionnal pour l'exprimer, la possibilité pour les divorcés remariés d'accéder à la communion, la malice non intrinsèque de l'homosexualité et de la transsexualité, et la diminution du caractère sacré des dépouilles mortelles. En cinq mois et demi de travail, les résultats sont remarquables.

Le protocole dubia rappelle, dans sa structure, les systèmes juridiques de common law. En simplifiant grandement, nous pourrions dire que dans les systèmes juridiques de droit civil, le magistrat applique la loi à des cas concrets. Dans les systèmes de common law, ce sont les cas concrets qui font la loi, en ce sens que les précédents jurisprudentiels sur des cas spécifiques créent une ligne directrice qui, une fois établie, servira de paradigme pour décider des futurs cas similaires. En bref, on ne cherche pas une règle concernant l'affaire à juger, mais le juge se réfère aux précédents. Mgr Fernandez imite cette approche : si un certain comportement est répandu, il n'est pas jugé par l'instrument de la doctrine, mais simplement légitimé. Les précédents dans la société sont reconnus simplement parce qu'ils existent. Ainsi, la norme de l'Église, comprise comme un dogme ou un principe défini de foi et de morale, est dépassée par la pratique qui s'en écarte. C'est l'historicisme ou l'éthique phénoménologique.

Le stratagème est astucieux : dans les mots, du moins pour le moment, la lettre de la loi n'est pas touchée (le mariage reste indissoluble et exclusif et on ne peut pas parler de mariage homosexuel, les femmes ne peuvent pas devenir prêtres, l'Église est hiérarchique, la vérité révélée est immuable, etc.), mais dans la praxis pastorale indiquée par les responsables du Dicastère, la doctrine est plus qu'écornée.  C'est donc la casuistique qui dicte la loi. Le particulier annule la norme, qui est toujours générale.

De plus, le protocole dubia semble plus efficace que l'instrument synodal : on n'a pas besoin d'attendre des temps bibliques pour arriver au but, de plus il contourne le problème des dissidents et celui de la recherche d'une synthèse partagée. Un doute à la fois et nous arriverons à de nouvelles certitudes hérétiques.

Commentaires

  • Pendant l'année qui nous sépare de la deuxième partie du synode, Tucho va nous distiller toutes sortes de dispositions nouvelles, toutes signées par son âme soeur Francisco, qui nous auraient scandalisés il y a dix ans. C'est la phase "grenouille dans l'eau de plus en plus tiède". Vous verrez que les catholiques seront ravis, sauf quelques personnes qui pensent. En octobre 2024, les coups de massue tomberont sur un public déjà anesthésié et bien préparé, à moins que...

  • Entre la fin des années 1920 et l'annonce du Concile Vatican II par Jean XXIII, fin janvier 1950, il y a eu tout un travail de pré-configuration des esprits, une pré-configuration anti-tridentiniste effectuée par des philosophes et des théologiens catholiques, dont des Dominicains et des Jésuites, si bien que, quand le Concile a eu lieu, bon nombre d'évêques, mis en présence de thématiques banalisées et légitimées, n'ont pas vu le caractère potentiellement hétérodoxe des expressions et des omissions présentes dans certains documents du Concile.

    De même, à partir de la fin des années 1980 (cf. la Déclaration de Cologne de janvier 1989) puis du début des années 1990 (cf. les débuts de la non réception du Catéchisme de l'Eglise catholique et surtout de Veritatis splendor), il y a eu toute une entreprise intellectuelle anti-conservatrice qui a été menée contre le recentrage partiel, plus officiel qu'effectif, incarné par Jean-Paul II et par Benoît XVI, du fait d'intellectuels catholiques, dont des Dominicains et des Jésuites, si bien que beaucoup de clercs ne voient pas l'ampleur du caractère extrêmement problématique du pontificat actuel, ou ne le voient que depuis l'année 2022-2023.

    Ce qui, pour les fidèles catholiques fidèles aux fondamentaux du christianisme catholique, constitue une dynamique d'asservissement ininterrompu à l'esprit du monde, constitue au contraire, pour des catholiques qui se veulent "ouverts", une dynamique d'affranchissement à l'égard de stéréotypes dépassés, porteurs de discriminations dépourvues de "discernement évangélique"...

Écrire un commentaire

NB : Les commentaires de ce blog sont modérés.

Optionnel