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Philippines : ombres et lumières

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Sans titre.jpgVoici le témoignage d'un jeune couple ami parti aux Philippines en mission humanitaire :

"Foi et culture philippines : Paradis ou Enfer ?

En apparence, les Philippines sont le pays le plus catholique du monde. Les Jeepney portent fièrement des énormes inscriptions “God is Good” (“all the time”), les gens vous parlent ouvertement de la foi, il ne se passe pas un jour sans que l’on croise une procession religieuse quelconque, et même le plus pauvre et le plus ridicule des quartiers possède sa chapelle tandis que Santo Niño veille sur les affaires des magasins dans lesquels il est exhibé (c'est-à-dire tous). Et tout cela pendant que les églises pleines à craquer réussisent le tour de force de réunir un public dont la moyenne d’âge est encore plus jeune que celle de la population philippine moyenne (22-23 ans, la population la plus jeune d’Asie). Qu’il est rafraîchissant par moment d’être entouré de tout plein de petits enfants débordant de vie, et en prière, quand on a été habitué à une société plus âgée, à notre métro si triste et nos églises presque sans vie !

Néanmoins, passé le premier “éblouissement” de cette abondance de ferveur et de piété, le croyant occidental risquera au bout d’un moment d’être assez déçu par la manière dont la foi se traduit dans les faits. Là où il me semble que notre société européenne reste pétrie d'un certain nombre de valeurs chrétiennes très ancrées, mais aussi de plus en plus désincarnées (vécue par habitude sans plus vraiment la foi ni la passion), c'est ici exactement l'inverse : les Philippines sont une société avec une foi fervente et jeune, mais sans que des réflexes élementaires ne soient vraiment ancrés dans les consciences.

Autant nous déplorons la perte des valeurs traditionnelles (et des valeurs morales en général) dans notre société occidentale, autant il nous faut reconnaître que l’occidental a au moins développé une certaine cohérence entre ses actes et son système philosophique, quitte à adapter ce dernier si nécessaire. Or il n’en est pas ainsi chez le philippin.

Le philippin est le plus sincère des croyants. La plupart d’entre eux ont une très bonne connaissance du cathéchisme, et connaissent par cœur un nombre invraisemblable de prières. Ils savent décrire avec force détails ce qui est bien et ce qui est péché (mortel ou véniel, s’il vous plaît). Comme je l'ai déjà dit, leur piété est active, et visible ! Et pourtant, dans les actes tous ces beaux principes semblent tout d’un coup envolés. La violence et le vol sont monnaie courante, la morale sexuelle est, même aux normes occidentales, complètement absente, l’alcool et les jeux de hasard font florès.

Notre première réaction fût de penser que le croyant philippin est hypocrite. A y regarder de plus près, il semble que cela ne soit pas le cas : Leur foi est réellement sincère d’abord, mais surtout ils ne se rendent absolument pas compte de l’incohérence de leur actes (dictés par leur habitudes traditionnelles, la télé et leurs envies) et leurs hautes convictions chrétiennes et morales !

Seules les classes plus éduquées parviennent à comprendre le décalage entre les valeurs et les actes. D’où l’importance de l’éducation pour leur faire comprendre en profondeur ce qu’être chrétien signifie, et les faire accéder à l’unité de vie. En effet, les conséquences de cette inconsistance sont dramatiques. Dans un pays marqué par l’urbanisation galopante, on trouve dans les quartiers pauvres des villes le fatalisme, l’alcool, les maladies vénériennes, la violence, la drogue et toutes les calamités qui sont la conséquence des vices humains. Et elles n’en finissent pas de faire des victimes…

Autre fait marquant, la foi ici est parfois source de fatalisme (“ainsi Dieu l’a voulu”). Un fatalisme peut-être nécessaire pour affronter l’injustice de la vie, mais qui ne les encourage pas vraiment à se bouger pour améliorer leur sort. Et en même temps, la foi est aussi pour eux source d'espérance, d'une force de vie qui émerge... souvent, elle est leur seule vraie motivation à changer leur vie.

On croirait que le pauvre veut s'en sortir et se battre pour assure sa subsistance, mais en fait rien n'est plus faux : il ne vient même pas à l'idée de la plupart d'entre eux que leur vie pourrait être meilleure, et la journée de travail de la plupart d'entre eux est finie dès qu'ils ont trouvé de quoi manger. Si par hasard ils trouvent plus d’argent, ils le dépensent allègrement en chips, coca-cola, GSM et télé, même s'il ne leur reste plus rien pour des médicaments ou des cahiers pour l'école. Quant à leur offrir un “vrai” travail, la plupart d’entre eux ne sont pas motivés et ne se déplacent même pas.

Mais le fait de croire en Dieu et l'action des "brothers" et des "sisters" les poussent à se respecter plus, à envoyer leurs enfants à l'école, à suivre des réflexes de base pour nous (partager, collaborer, respecter sa femme, etc...), mais qui améliorent tellement leur vie...matérielle, mais surtout humaine. C’est lent, c’est peu, c’est insuffisant, cela a si peu d’effet… mais en fait, s’il n’y avait l’Eglise, plus personne ne s’occuperait d’eux. Ils vivraient et mourraient sans doute encore un peu plus mal… et dans l’indifférence générale.

Alors, enfer ou paradis ? En tout cas, une chose est sûre : comme pour tout au Philippines, c’est très contrasté ! Mais surtout, comme chez nous, l’Eglise philippine a ses propres pauvretés, ses propres corruptions, ses propres richesses et ses propres joies, qui ne sont pas les mêmes que l'Eglise de chez nous. Et comme chez nous, elle est en chemin.

Commentaires

  • Je suis assez d'accord avec ce commentaire car j'y ai été et tout ce qui y est raconté m'a été dit par les volontaires sur place.

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