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La foi engendre la morale et non l’inverse

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bienvenue-au-nouvel-eveque-de-lausanne-geneve-et-fribourg_fullview.jpg“ D’abord être avec le Christ, ensuite la vie change ” dit le dominicain Charles Morerod, nouvel évêque de Fribourg, Lausanne et Genève.  Nous avons déjà attiré l’attention sur la nomination par le pape de cette forte personnalité à la tête de l’un des diocèses européens-types où la foi s’est effondrée sous les coups du sécularisme et du melting pot postconciliaire.   Mais il y a beaucoup de Fribourg, Lausanne et  Genève en Europe  et peu de Charles Morerod. Portrait du nouvel évêque par Jean Mercier, hier dans “La Vie”:

“ (…) Le choix, après une longue vacance (suite au décès de Mgr Genoud), de ce dominicain mérite déjà un commentaire. Le pape a préféré dépouiller l'Angelicum (l'Université pontificale dirigée par les dominicains, à Rome) de son recteur pour en faire un évêque. Il a jugé qu'il fallait un homme de grande envergure intellectuelle pour reprendre un diocèse marqué par l'étiolement de la foi et des vocations, alors que d'autres profils, plus « pastoraux » étaient envisageables... (Ratzinger est lui-même devenu évêque de Munich, sur le choix de Paul VI, qui l'a enlevé à l'université de Ratisbonne). Morerod est l'une des chevilles ouvrières de la revue Nova et Vetera, jadis crée par le cardinal Journet. Très bon connaisseur de l'Anglicanisme et du protestantisme, mais opposé à un oecuménisme de type affectif ou stratégique, l'homme incarne, parmi d'autres, le renouveau du thomisme au sein de la jeune génération des théologiens (en particulier des Dominicains, dont la Province de Toulouse édite la Revue Thomiste, de haute qualité).

Le choix d'un homme venu d'un ordre religieux, est aussi important : le pape a voulu un homme indépendant du microcosme diocésain romand. Pour diriger un diocèse, il vaut mieux installer un homme libre et qui ait de la distance par rapport aux uns et aux autres, mais qui néanmoins connaisse les problématiques locales, extrêmement complexes.

Benoit XVI a aussi choisi un Suisse qui était notoirement heureux à Rome. En l'occurrence, Morerod est un peu plus que l'ex-patron de l'Angelicum. Il a été (et reste encore officiellement) secrétaire de la commission théologique internationale. Il a fait partie du trio de théologiens qui a rencontré régulièrement les Lefebvristes dans le cadre des rencontres doctrinales depuis 2009, signe de la confiance que lui fait Benoit XVI. Un suisse romanophile : la perle rare aux yeux du pape, qui connaît le long atavisme de la défiance helvétique envers le Saint Siège (si l'on excepte la Garde suisse!). Ce polyglotte est donc un homme de réseaux, et même s'il n'est pas encore cardinal, on ne peut s'empêcher de penser qu'il jouera un rôle déterminant dans le futur.

Doté d'un humour volontiers caustique et déconcertant, Morerod se situe très loin du modèle du prélat qui ne veut pas faire de vagues. Chez lui, pas de langue de bois ou d'onctuosité. Et tout comme Ratzinger, il n'est aucunement un « dur ». Il l'a fait comprendre très nettement lors de son ordination, lorsqu'il a pris la parole pour résumer l'essentiel de sa vision, commentant sa devise épiscopale : Pour moi, vivre c'est le Christ. J'en reproduis les principaux extraits : « Vivere Christus est » : j'ai trouvé une certaine inspiration et même une inspiration certaine dans le début dans la première encyclique du pape Benoît XVI, que je cite : « À l’origine du fait d’être chrétien, il n’y a pas une décision éthique ou une grande idée, mais la rencontre avec un événement, avec une Personne, qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive. »

On peut commenter un peu en pensant à Noël qui approche : Dieu vient à nous, c'est ça Noël. Dieu qui se fait homme. Pourquoi ? Pour que nous puissions être avec lui. Et c'est le Dieu unique qui le fait et cela s'est produit une seule fois, c'est pourquoi notre calendrier le montre d'ailleurs : c'est vraiment le centre de l'Histoire.

Or quelle a été l'expérience des apôtres que l'on peut voir dans l'Evangile ?
Ils ont rencontré le Christ qui les a appelés non pas parce qu'ils étaient saints, non pas parce qu'ils étaient parfaits - et dans certains cas ils étaient même franchement imparfaits - pensons à Matthieu qui détourne l'argent du contribuable pour lui-même, pour ne rien dire de Saint Paul qui persécute les chrétiens... Le Christ les a appelés, non pas parce qu'ils étaient parfaits, mais pour qu'ils le deviennent. Qu'ils puissent le devenir, s'ils acceptaient d'être avec lui. Et c'est effectivement cela la vie chrétienne.Et c'est pourquoi mon point de départ n'est certainement pas (la morale), et je le dis parce qu'on me pose toujours des questions sur des points de morale. Je comprends bien, ce n'est pas sans intérêt, mais ce n'est pas le point de départ pour moi. D'abord être avec le Christ, et ensuite la vie change. Pas d'abord changer sa vie pour éventuellement devenir chrétien. » (…)

“Morerod, dans son adresse, visait sans doute les catholiques sociologiques qui se sont éloignés de la foi (et qui désormais s'inquiètent des minarets musulmans !) en leur demandant de revenir d'abord à la vie en Christ : c'est à dire la foi, la prière, l'intimité avec Jésus. Mais attention, on est très loin d'un plaidoyer pour un ordre moral avec ses « valeurs ». C'est toute la finesse du positionnement du pontificat actuel : ramener les chrétiens au Christ, et non pas leur faire enfourcher des chevaux de bataille pour la défense d'une idéologie...

C'est aussi le plus difficile. Parce que cela demande une conversion, qui dans un second temps, peut avoir des conséquences dans l'ordre éthique, parce qu'on doit mettre ses comportements en cohérence avec ce que l'on croit”. Tout l’article ici:   Jean MERCIER  

Un nouveau François de Sales au chevet d’une Eglise aussi fragilisée (pour d’autres raisons) qu’au temps de la Réforme au XVIe siècle ? Un bon test, en tout cas.

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