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L’effet Ratzinger : un nouvel épiscopat se met en place au Québec

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Lu sur le site de la revue québécoise « Egards » (n°35, printemps 2012), sous la signature de Luc Gagnon (extraits) :

« Ecclesia semper reformanda : l’Église, tout en étant de nature divine, doit continuellement se réformer et se convertir pour mieux accomplir sa mission, transmettre la foi chrétienne et la vie divine aux hommes en vue de leur salut. L’Église du Québec, depuis le concile Vatican II, semblait être entrée dans une voie de « démission », selon le mot du cardinal Jean Daniélou, de dissolution dans la société désenchantée issue de la Révolution tranquille. On ne voyait plus clairement la distinction entre l’Église et le monde. Résultat ? Les Québécois se disent catholiques, tout en rejetant des éléments essentiels du dogme, comme la résurrection du Christ, l’immortalité de l’âme humaine, le péché originel, la transsubstantiation.

Le cardinal Paul-Émile Léger représente parfaitement ce catholicisme démissionnaire. Lui-même a littéralement démissionné de son poste d’archevêque de Montréal en 1967 pour se lancer dans une activité caritative auprès des lépreux d’Afrique, où il fut plutôt mal reçu.(…). Les évêques qui ont suivi le cardinal Léger n’ont pas été à la hauteur du défi de la laïcisation accélérée. La plupart ont été tétanisés par cette société radicalement incroyante, indifférente à la foi et à la culture chrétiennes.(…).Dans le mystère du salut, l’Église du Québec devait probablement faire son voyage au bout de la nuit pour renaître, elle devait être guidée par des pasteurs aveugles jusqu’au bord de l’abîme.

Heureuse surprise : le parachutage, en 2002, de Mgr Marc Ouellet au poste d’archevêque de Québec. Stupéfaction au sein de l’ENQ (Église nationale du Québec), où règnent le néogallicanisme et la complaisance en face de l’apostasie générale : ce prélat n’avait été coopté ou recommandé par aucun évêque du Landernau québécois, il ne faisait pas partie, semble-t-il, de la terna des candidats proposée à Rome par l’épiscopat québécois et le nonce apostolique.(…). C’est probablement l’intervention de son ami Joseph Ratzinger, héritier théologique, comme lui, de Hans Urs von Balthasar et collaborateur de la revue Communio, qui créa ce revirement dans l’histoire de l’Église du Québec; le préfet Ratzinger était connu comme faiseur d’évêques à la fin du pontificat de Jean-Paul II. L’archevêque québécois résista courageusement dans le Québec antichrétien, jusqu’à sa nomination à Rome en 2010 au poste-clef de préfet de la Congrégation des évêques.(…)

Alors que l’AECQ se réjouissait avec l’élite médiatico-politique du départ de la brebis galeuse, elle n’a pas vu que la fin de sa dictature progressiste approchait à toute vitesse; elle allait bientôt être décapitée par celui-là même qu’elle avait traité froidement et privé d’appui – malgré son statut d’archevêque de Québec et de primat de l’Église canadienne –, dans le dossier de l’enseignement de la religion à l’école, entre autres.

Les récentes nominations des évêques québécois renouvellent totalement l’esprit de cette Église et rompent avec son passé capitulatoire postconciliaire. On y voit clairement l’esprit du cardinal Ouellet et du Pape Benoît XVI. Le nouvel archevêque de Québec, Mgr Gérald-Cyprien Lacroix, qui a inauguré son ministère épiscopal le 25 mars 2011 sous la présidence du cardinal Ouellet, présent à Québec pour l’occasion, se situe nettement dans l’esprit de la nouvelle évangélisation. Il ne craint pas les défis colossaux qui l’attendent. Dans la jeune cinquantaine, il est d’une autre génération que les capitulards des années 1960.(…). Mgr Lacroix possède une expérience internationale, loin de l’asphyxiante Église provinciale, et surtout du diocèse « tricoté serré » de Québec. Il a vécu aux États-Unis, dans son enfance, et en Amérique latine, en tant que missionnaire. De plus, il fait partie de l’Institut séculier Pie X, fondé en 1939 par le Père Henri Roy, et fut ordonné prêtre après une longue expérience de laïc consacré. Son parcours ne ressemble en rien à celui du clergé de Québec, imbibé de provincialisme et de progressisme. Il a manifesté dès le début de son mandat son ouverture aux nouvelles communautés religieuses, alors que ses prédécesseurs, avant 2002, repoussaient avec acharnement toutes les initiatives qui ne venaient pas du clergé local Le nouvel archevêque ne manie pas aussi facilement la science théologique que Mgr Ouellet, mais il va poursuivre son œuvre.

Le nouvel évêque de Trois-Rivières, Mgr Luc Bouchard, qui a chassé, fort heureusement, le timoré Martin Veillette, a lui aussi passé une partie de sa vie loin du néogallicanisme de l’ENQ. Il est né en Ontario français en 1949, a étudié à Rome et à Jérusalem et fut évêque de Saint-Paul, en Alberta. Il se situe dans le nouvel esprit missionnaire de Benoît XVI. Il a appuyé à plusieurs reprises la cause pro-vie, contrairement aux évêques québécois qui ont toujours refusé de participer à la Marche nationale pour la vie – exceptés, bien entendu, le cardinal Ouellet et son successeur, en mai 2011.

(…) Le sacre de Mgr Christian Lépine au titre d’archevêque de Montréal doit être salué. Mgr Lépine a été l’aumônier de l’intrépide Association des parents catholiques du Québec (APCQ), qui s’est battue durant plus de quarante ans pour conserver l’enseignement catholique au Québec, sans le soutien des évêques, à l’exception du cardinal Ouellet. Quel héroïsme ! Âgé de soixante et un ans, le nouvel archevêque partage l’esprit de Benoît XVI et du cardinal Ouellet et il a souffert comme ce dernier au sein de l’ENQ. Il a étudié à Rome et à Paris, oeuvré au sein de la curie romaine, enseigné durant une vingtaine d’années la philosophie et la théologie au Grand Séminaire de Montréal et fut curé de paroisse : une complète et parfaite expérience sacerdotale en vue de l’épiscopat. Il voudra assurément, dans un climat différent de celui de l’ENQ, réévangéliser avec énergie ce diocèse si diversifié et exorciser le défaitisme des Canadiens français.(…).

La voie semble enfin se dégager pour la nouvelle évangélisation du Québec. Les vieillards de la capitulation et de l’apostasie tranquille quittent un après l’autre la direction de leurs diocèses délabrés, en état de désolation spirituelle : c’est la « Desolate City », expression qu’Anne Roche Muggeridge utilisait pour qualifier l’Église canadienne des années 1970-1980. Mais cette époque est terminée, grâce à la lucidité et au courage du Pape Benoît XVI, appuyé prudemment par le cardinal Ouellet, qui a tant souffert dans l’AECQ et dans ce Québec hystérique et anticatholique. Évidemment, tout est à refaire, mais les fondements sont solides; c’est la foi des Apôtres, récapitulée dans le Catéchisme de l’Église catholique, qu’il s’agit de transmettre aux Québécois. Lourde mission, mais les évêques vont dorénavant oeuvrer et avancer dans la bonne direction, le cœur rempli d’espérance et de joie, la joie de rebâtir l’Église du Christ dans un Québec désenchanté.

Tout l’article ici : Le siècle, les hommes, les idées. La conversion de l’épiscopat québécois (texte intégral)

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