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La stratégie amoureuse du pape François

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Un reportage de Jean Mercier sur le site de l’hebdomadaire « La Vie » :

« Assise. Le lieu est mythique, en raison de la figure exceptionnelle de Saint François. En venant lui-même dans ce lieu, le jour de la fête du Poverello, le pape qui a choisi son nom porte à son maximum la cohérence de son identité, quitte à se transformer à une légende vivante lui-même, à l'instar du saint le plus populaire d'Italie, et sans doute du monde.

Le 13 mars au soir, il avait fallu à Jorge Mario Bergoglio un seul « Buona sera » (bonsoir) pour faire chavirer toute l'Italie, laquelle, une demie heure plus tôt, avait déjà reçu comme un (délicieux) coup au cœur la « naissance » d'une lignée papale reliée au saint d'Assise, qui est sans rival dans les coeurs des Alpes à la Sicile. En venant à Assise, le pape a parcouru quasiment tout le chemin de son histoire d'amour avec l'Italie. D'un point de vue symbolique, François incarne désormais pour les Italiens comme un avatar du Poverello, lui même une image du Christ.

Italien lui-même par ses parents, l'argentin Bergoglio a endossé le nom du Poverello en connaissant combien François est le symbole de l'harmonie entre l'Italie et la religion, combien est positive et souriante la figure du frère franciscain dans l'imaginaire de la Péninsule. Dans un livre tout récemment paru, l'historien Sergio Luzzatto, consacré à la figure de Padre Pio, montre combien la figure de ce capucin a mobilisé les foules pendant 50 ans comme une figure « anxyolytique », et notamment à des moments de grande angoisse sociale. Lors du pélerinage du pape à Assise, la forte récurrence du thème du chômage, des difficultés sociales, dans les paroles de salut adressées, sont la preuve que le pape est une référence très anxyolytique, sur fond de paysage politique dévasté et d'une crise d'identité sans précédent.

Sans aucun doute, le pape vit à fond la proximité et l'affectivité franciscaines. Chaque semaine, il embrasse des centaines de gens sur la place Saint Pierre de Rome. A Assise, en moins de 12 heures, il a serré dans ses bras et embrassé des dizaines d'enfants, de femmes et des hommes. Le bonheur qu'il semble retirer de ces contacts furtifs et intenses, face à des gens souvent en pleurs, portant leurs enfants gravement handicapés, est impressionnant. Le pape est tactile comme le fut François en son baiser au lépreux.

L'autre dimension de saint François est qu'il a été le rebâtisseur d'une Eglise en difficulté, initiant une réforme spirituelle sans égal dans l'Histoire de l'Eglise. Le pape est venu à Assise avec ses huit cardinaux membres de son G8, qui incarnent ce chantier, ouvert cette semaine à Rome par une première session de travail. Là encore, la cohérence franciscaine est totale.

Enfin, l'humour et la joie tiennent une place toute particulière dans la spiritualité franciscaine, et aussi italienne. François, depuis le 13 mars, n'a jamais perdu une occasion de faire un mot d'esprit, y compris parfois de façon caustique. On sait aussi que l'humour est une façon de faire sauter les inhibitions, les peurs, et les blocages. Le pélerinage à Assise a été un feu d'artifices en matière d'humour papal et correspond à la stratégie « amoureuse » de François face à l'Eglise (Benoît XVI n'était guère doué pour l'humour face à une foule). Le pape a fait rire la foule lorsqu'il a évoqué les jeunes mariés qui se lancent des assiettes à la figure, mais doivent au moins se réconcilier avant de se coucher. Avec les religieuses clarisses, il a évoqué la vraie joie, qui n'est pas le sourire de l'hôtesse de l'air. Rapportant la conversation qu'il a eue avec une mère de famille qui s'inquiétait que son fils de 30 ans ne parvienne pas à se marier, le pape a lancé ce qu'il lui avait conseillé : « Arrêtez de lui repasser ses chemises », déclenchant l'hilarité générale.

Au sein d'un pays très divisé sur les questions de l'immigration, ou sur la politique, le Poverello représente la part belle de l'Italie, celle qui est fraternelle – par rapport à un racisme rampant – et pure (par opposition à la corruption, ou les frasques sexuelles de Berlusconi). Sans surprise, l'Italie qui veut croire à sa face lumineuse veut profondément s'identifier au pape François, et l'aime passionnément. »

Réf. Le pape : une légende italienne

JPSC

Commentaires

  • L'"humour" de comptoir en question n'est-il pas un peu déplacé dans la bouche d'un Pape? Pour ma part, je préférais l'exquise finesse et le doux sourire de Benoît XVI !

  • De toute façon, pas de problème! Le sourire doux et la finesse du Pape Benoît XVI sont toujours là, dans les cœurs de celles et ceux qui le respectaient, l'écoutaient humblement, et il est agissant auprès du Pape François, son co-équipier actuel; Lui dans la prière et Benoît XVI armé de son bâton de Pèlerin.
    C'est une équipe de choc!

    Cela dit: Facile de parler du doux sourire du Pape Benoit XVI et de sa grande finesse. :-)
    ... après l'avoir frappé mortellement (presque) de balles médiatiques en tout genre! Bien entendu on en a gardé un peu en réserve, afin de "choyer" maintenant son successeur. Que chacun ait droit à sa petite part de gâterie n'est-ce-pas?

    J'aime bien l'humour du Pape François, et je le préfère mille fois mieux à tous les humours lourds, vulgaires, haineux, niais, ... que nous entendons partout autour de nous dans nos villes, à la TV, radio, tant par la parole que par les images (publicités), etc., et émanant d'un monde qui descend de plus en plus bas.

  • @ mcm ... Il faut croire par contre que les Italiens ont apprécié cet humour, qui les concernait directement. On peut supposer que l'humour germanique et l'humour latin sont légèrement différents. Et l'humour britannique, chinois, africain, etc... encore différents. Tant qu'humour rime avec amour charité, c'est tout ce qui importe. Toute activité humaine sera bonne si elle a comme guide l'amour charité.

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