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François : Quo vadis ?

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Sur son site « Pro liturgia », dédié à l’usage du chant grégorien dans la  liturgie fidèle à la réforme issue du concile Vatican II,  Denis Crouan exprime, au-delà des questions liturgiques, une inquiétude (billet d’humeur peut-être excessive, justifiée ou non, là n’est pas le sujet) qui est loin d’être isolée. Il faut aussi y être attentif car, si l’on perd le centre, où est alors la périphérie ? 

« Une chose est certaine : l’arrivée du Pape François a fait naître deux courants au sein de l’EgliseCelui des admirateurs du style de Jorge Bergoglio, et celui des dubitatifs.

Remarquons que ceux qui admirent le style du Souverain Pontife fonctionnent souvent « à l’affectif » : ce qui leur plaît chez ce Pape, ce sont ses tweets, les coups de fil qu’il donne, sa façon de se faire tutoyer, son goût pour ce qui « fait » simple, sa passion pour le foot... Mais construit-on l’Eglise universelle sur de telles bases fluctuantes ? L’affectif des fidèles les plus versatiles peut-il tenir lieu de théologie ?

De leur côté, les dubitatifs font remarquer que, depuis qu’il a succédé au Pape Benoît XVI, le Pape François multiplie des propos - parfois contradictoires - et lance des quantités d’idées sans qu’on puisse savoir l’objectif qu’il cherche à atteindre. 

De fait, il n’a pour l’instant publié aucun document solide et clair sur lequel les fidèles puissent se baser pour comprendre la ligne pastorale qu’il entend suivre. Tout ce que l’on constate, c’est que le Pape Bergoglio s’emploie obstinément à « détricoter » ce qu’ont fait ses prédécesseurs. Et quand on dit « obstinément », ce n’est pas un vain mot. Car François est obstiné ; et sous des apparences de « pape ouvert » et « à l’écoute », il met peu à peu en place un gouvernement très personnel, pour ne pas dire autoritaire. Ne l’a-t-il pas dit lui-même en créant son Conseil de huit cardinaux ? Il ne veut que des gens qui pensent comme lui... D’où une question qui surgit immédiatement : à quoi servira ce nouveau Conseil dont le rôle se limitera à dire « amen » à tout ce qu’entreprendra le Souverain Pontife ?

Pour le moment, en tout cas, les dubitatifs constatent que le Pape François n’a ni le souci de la liturgie « source et sommet de la vie de l’Eglise », comme l’enseigne le Concile, ni le souci d’encourager les simples prêtres qui font vaillamment leur travail pastoral dans des conditions souvent difficiles, ni le souci d’indiquer clairement aux fidèles la direction à prendre pour se maintenir dans la foi reçue des Apôtres. 

Alors que Benoît XVI comparait l’Eglise à une barque qui prend l’eau de toute part, François affirme qu’au contraire, elle se porte très bien. « Ça commence à nous inquiéter sérieusement », disait un prêtre, curé de paroisse, qui se faisait le porte-parole de ses confrères. Et il ajoutait : « Je crois que cette inquiétude est même partagée par un certain nombre de nos évêques qui, passé le moment d’euphorie qui a suivi l’élection de Jorge Bergoglio, sont de plus en plus silencieux. Ce qui n’est pas trop dans leurs habitudes. » Finalement, c’est vrai, la seule question qu’on aimerait poser au Pape est : « Où nous conduis-tu ? » (Ou bien « nous conduisez-vous » pour ceux qui n’ont pas encore adopté le style bergoglien). La réponse est peut-être dans le fait que le Pape François ne sait mesurer l’Eglise universelle qu’à l’aune de l’Eglise sud-américaine, sans chercher à connaître les mentalités nord-américaines, européennes, africaines, asiatiques... 

Il y a peut-être un moyen de comprendre la « stratégie pastorale » du Pape François. C’est d’aller voir comment se portait le diocèse de Buenos Aires quand Jorge Bergoglio y était Cardinal. C’est ce qu’ont fait certains internautes. Et ce qu’ils ont découvert n’a fait que les inquiéter davantage encore : catéchèse minimaliste, liturgies démantibulées et passablement laides (communion données dans des corbeilles que les fidèles se passent les uns aux autres), séminaire diocésain dont le site internet laisse deviner que les vocations ne sont pas nombreuses. Alors, quelle Eglise veut nous donner François ? Une Eglise éclatée qu'il n’arrivera plus à diriger lui-même tellement il aura voulu la chambouler selon ses seules vues et sans plan clairement tracé ?"

Réf. L'ACTUALITE DU 5 OCTOBRE 2013

Il ne faudrait pas que la célébration du cinquantenaire de Vatican II se clôture par l’ouverture d’un front supplémentaire de dissensions internes.

JPSC

Commentaires

  • Je me demande parfois ce que désirent ceux qui veulent un Pape qui serait comme un général ou un homme d'État, à la politique, à la stratégie et au programme si clairs, qu'on n'aurait plus qu'à les suivre sur une route bien tracée et bien balisée. Je ne me souviens pas que Jésus ait été ce général ou cet homme d'État, au discours si clair que tous ses apôtres l'avaient compris du premier coup et savaient de source sûre où il les menait.
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    Il me semble que notre Pape François est dans la lignée de Benoit XVI, de Jean-Paul II et de tous leurs prédécesseurs, il est d'abord et avant tout un témoin de l'amour charité, en obéissance au commandement du Christ et en imitation de Celui-ci. Mais chacun selon sa personnalité. Ce témoignage ou cet exemple de l'amour charité est la seule et unique chose importante qu'un catholique peut demander d'un Pape, et exiger de lui-même, et cela depuis 2000 ans, malgré toutes les graves turbulences déjà vécues par l'Église.
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    Pourquoi demander au Pape de nous préciser une feuille de route pour ce qu'un petit enfant sent déjà son cœur : aimer Dieu et son prochain, aimer le Créateur et sa Création ? Saint Paul n'a-t-il pas déjà répondu aux Corinthiens que sans l'amour charité, tous leurs grands gestes, toutes leurs belles paroles, ne sont rien ? Saint Augustin n'a-t-il pas déjà répondu à ses fidèles d'Hippone que l'amour charité devait précéder et accompagner tout ce qu'ils font et disent ?
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    L'amour charité n'est pas une science réservée à des érudits en fabrications de feuilles de routes. Cet amour charité est peut-être la seule chose que tout homme peut pratiquer, s'il le veut bien. Quel que soit son âge, son niveau d'études, son état de santé, son niveau social, sa richesse matérielle, son métier. C'est donc sans doute la seule chose dont l'Église doit témoigner sans cesse, dont tous les catholiques doivent témoigner sans cesse, et donc bien sûr le Pape.
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    Savoir établir une politique, une stratégie, un programme, une feuille de route, c'est très bien, c'est une bonne compétence, mais sans l'amour charité ce n'est rien. Tant de politiciens ou généraux dans le monde sont plus compétents dans ce domaine que les catholiques. Mais où en sont tous les États si arrogants et toutes les armées si prestigieuses dont l'Église a croisé la route depuis 2000 ans ?

  • Sur Settimo Cielo, S. Magister rend compte d'une interview qui va dans un sens analogue :

    Un contrepoint laïc intéressant à l'entrevue-interview du Pape François avec Eugenio Scalfari est paru le 3 octobre sur le « Corriere del Trentino », édition régionale du « Corriere della Sera ».

    Le professeur John Fornero en est l’auteur ; Turinois, co-auteur avec Nicola Abbagnano de l’ "Histoire de la philosophie" davantage étudiée dans les écoles secondaires et du "Dictionnaire de la philosophie" consulté davantage dans les universités, il est en outre un chercheur particulièrement attentif à la confrontation entre la pensée laïque et la pensée catholique

    Interviewé par Annalia Dongilli sous le titre « le devoir de clarté » et avec le sous-titre « le dialogue sera constructif s’il est dépourvu d'ambiguïtés doctrinales », Fornero ne ménage pas ses critiques à l’égard de l’argumentaire du pape. En particulier sur deux points.

    Le premier vise le point où François soutient que, même pour ceux qui croient, on ne peut parler de « vérité absolue », car, dit-il, la vérité est « relation », donnant ainsi l'impression de rejoindre le relativiste Scalfari.

    Mais ce n'est pas le cas. Fornero montre que "le 'relationnisme' de François a peu à voir avec le relativisme de Scalfari". Le problème est que "lorsque les deux parties font valoir que la vérité absolue n'existe pas elles donnent à cette expression des significations structurellement différentes".

    Le deuxième point qui selon Fornero est « cause de possibles malentendus » est le discours sur la conscience. IL explique :

    « Francis tient que nous devons obéir à notre conscience propre et que le péché est là quand nous allons contre elle. Écouter et obéir à la conscience, explique le pape, signifie que chacun a sa propre idée du bien et du mal et qu'il doit choisir de suivre le bien et combattre le mal comme lui les conçoit.

    « Que veut dire précisément François avec cette déclaration, que Scalfari a jugé être l’une des plus « courageuses » entendues de la part d’un pape ? Cela veut-il dire peut-être ce que le fondateur de la Répubblica a à l'esprit, à savoir que le sujet, au plus profond de son intériorité, est source du bien et du mal ? Je doute que les choses soient vraiment ainsi et que le pape ait voulu justifier une forme quelconque de subjectivisme éthique.

    "En fait, la doctrine de l'Eglise, dont François se proclame « le fils », soutient que la conscience ne crée pas le bien et le mal, mais les reconnaît. Sur ce point, le Concile Vatican II est explicite: « dans les profondeurs de la conscience, l'homme découvre une loi qu’il ne se donne pas à lui-même, mais à laquelle il doit au contraire obéir. Tout aussi explicite, l’encyclique « Veritatis splendor » rejette la conception de la conscience comme réalité autoréférentielle.

    "Cependant, étant donné que François, dans son effort empathique de se mettre au diapason de son interlocuteur, ne s’est pas appesanti sur ces aspects fondamentaux de la doctrine catholique, son discours risque, à certains égards, d’être incomplet et conceptuellement ambigu. Tant et si bien qu'il apparaît susceptible d'interprétations différentes voire même opposées.

    « En outre, on ne voit pas clairement si le nouveau pape entend être « révolutionnaire » aussi sur le plan doctrinal – comme le croit ou l’interprète Scalfari – ou entend proposer la doctrine de toujours dans une forme plus « miséricordieuse » et proche de la sensibilité moderne ».

  • "Liturgies démantibulées" ? Vous préférez une messe sans enfants ou alors avec des enfants qui doivent se taire, ne pas bouger ??? Les enfants que l'on voit sur la vidéo sont "là" pour mieux percevoir le mystère qui se passe sous leurs yeux !

  • @ yves w... Il est normal qu'un catholique ne prétende pas détenir la vérité absolue sur ce monde et sur Dieu, puisqu'il professe que Dieu seul, comme Créateur de ce monde, peut connaître ce qu'est ce monde et Lui-même en vérité. Si Jésus dit qu'il est le chemin, la vérité et la vie, aucun catholique ne peut dire cela. Un catholique ne peut qu'avoir un point de vue sur la vérité de ce monde et de son Créateur.
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    Je ne sais par contre pas ce que MM. Fornero et Scalfari entendent par ce mot 'vérité'. S'ils ne se réfèrent pas à ce qui a créé ce monde, où peut donc se trouver cette vérité sur notre monde selon eux ? Je sais bien que les libres penseurs de l'ULB, dans leur chant Le Semeur, prétendent détenir la 'vérité', mais de quoi parlent-ils ?
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    Pour la conscience, je suppose que le Pape François se réfère au libre arbitre de tout catholique, qui peut se résumer selon saint Augustin en «Aime et fais ce que veux». Mais donc, ce qui est essentiel pour tout catholique, c'est de discerner la présence de l'amour charité, puisque c'est cela seul qui est source de tout bien. On ne discerne donc pas entre 'choses bien' et 'choses mal' prédéfinies dans une liste ou une loi, mais entre présence d'amour charité ou non.
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    Lorsque le Pape François dit que le péché est là quand nous allons contre le résultat de ce discernement (sa conscience propre) il parle bien de l'amour charité, ou plutôt du manque ou défaut d'amour charité. Le mot 'péché' en français veut dire 'défaut' ou 'manque'. Et pour un catholique c'est le défaut ou le manque d'amour charité. Si l'on relit le dernier catéchisme de l'Église catholique, c'est très clair. Absence d'amour charité = péché.
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    De nouveau, je peux supposer aussi que MM. Fornero et Scalfari font l'impasse sur l'amour charité, c'est-à-dire sur le commandement du Christ, quand ils parlent de conscience. Mais si l'amour charité ne sert pas de garde fou à la conscience, celle-ci peut partir dans n'importe quelle direction. Quel autre garde-fou proposent-ils ?
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    Il me semble donc que le dialogue est fortement réduit ou bloqué, car ces deux hommes ne semblent accepter ni l'hypothèse que notre monde ait été créé, ni l'hypothèse que l'amour charité soit la source du bien voulu pour ce monde par Celui qui l'a créé. C'est à eux à dire maintenant ce qu'ils entendent par 'vérité de notre monde' et par 'examen de conscience des êtres humains', puisqu'ils savent en principe ce que les catholiques entendent par là.

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