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Le pape François critique la formation de séminaristes "rigides" et incapables de "discernement"

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De Sandro Magister sur son blog « Chiesa » (extrait) :

 «   […] Il faut avant tout prendre en compte les propos qui ont été tenus par François le 24 octobre dernier lors de sa rencontre avec les jésuites réunis pour l’élection de leur nouveau préposé général, d’après la transcription qui en a été publiée dans "La Civiltà Cattolica" le 10 décembre :

"Le discernement, la capacité de discerner, est l’élément-clé. Et je constate justement qu’il y a un manque de discernement dans la formation des prêtres. Nous courons en effet le risque de prendre l’habitude du 'tout blanc ou tout noir' et de ce qui est légal. D’une manière générale, nous sommes passablement fermés au discernement. Une chose est claire : actuellement, on constate de nouveau, dans un certain nombre de séminaires, l’existence d’une rigidité qui n’est pas proche d’un discernement des situations. Il s’agit là de quelque chose de dangereux, parce que cela peut nous conduire à une conception de la morale qui a un sens casuistique. […]

"J’ai été formé, ainsi que les prêtres de ma génération – ce n’est peut-être pas le cas des prêtres les plus jeunes, mais c’est celui de ma génération et de certaines de celles qui l’ont suivie – à une scolastique décadente. Nous étudiions la théologie ainsi que la philosophie dans un manuel.  […] C’est cette scolastique décadente qui a provoqué le comportement casuistique. Un fait curieux : à la faculté de théologie, la matière 'Sacrement de la pénitence' était enseignée, habituellement – mais pas partout – par des professeurs de morale sacramentelle. Tout le domaine de la morale était restreint à 'il est permis', 'il n’est pas permis', 'jusqu’ici oui et jusque là non'. […] C’était une morale très étrangère au discernement. […] Je crois que Bernard Häring a été le premier qui ait cherché une voie nouvelle pour faire refleurir la théologie morale. Bien évidemment, de nos jours, la théologie morale a beaucoup progressé dans ses réflexions et dans sa maturité ; désormais, ce n’est plus une casuistique".

Comme on peut facilement le constater, les attaques de Bergoglio contre la "rigidité" qui est, selon lui, enseignée encore aujourd’hui dans les séminaires sont étroitement liées à la controverse beaucoup plus importante et plus grave qui divise actuellement l’Église à propos de l'interprétation et de l’application d’"Amoris laetitia" en ce qui concerne la question-clé de l’accès des divorcés remariés à la communion.

Il suffit, pour s’en convaincre, de remarquer la coïncidence - y compris terminologique - entre les propos tenus par le pape lors de cette conversation avec les jésuites et sa non-réponse télégraphique aux cinq "dubia" rendus publics par quatre cardinaux précisément à propos de l'exhortation post-synodale, dans l’interview qu’il a accordée à la revue "Avvenire", publiée le 18 novembre :

"Certains continuent à ne pas comprendre, pour eux c’est ou tout noir ou tout blanc, alors que c’est dans le flux de la vie qu’il faut discerner".

En second lieu, "discernement" est également le mot-clé des instructions destinées aux séminaires qui ont été publiées le 8 décembre.

Le cardinal Stella a souligné ce point dans une interview de présentation de la "Ratio", publiée dans "L'Osservatore Romano" du même jour :

"Le discernement est un don que les pasteurs doivent exercer sur eux-mêmes et, encore davantage, dans le domaine de la pastorale, afin d’accompagner et de comprendre en profondeur surtout les situations de vie les plus compliquées, qui font que, bien souvent, les personnes qui se confient à nous sont marquées, alourdies et blessées".

Et pour que personne ne doute qu’il s’agit là de la principale préoccupation du pape, Stella a poursuivi en reprenant une phrase que François avait prononcée lorsqu’il s’était exprimé devant les jésuites :

"Une chose est claire : actuellement, on constate de nouveau, dans un certain nombre de séminaires, l’existence d’une rigidité qui n’est pas proche d’un discernement des situations".

*

Toutefois le pape a été encore plus explicite et plus rude quand il s’est adressé aux séminaristes et aux supérieurs du grand séminaire de Rome, lors de l'homélie de la messe célébrée le 9 décembre à la chapelle de la Maison Sainte-Marthe :

Il faut en premier lieu signaler que les relations entre François, qui est l’évêque de Rome, et son séminaire n’ont jamais été harmonieuses.

Sous les pontificats de Jean-Paul II et de Benoît XVI une tradition s’était établie : le pape se rendait au moins une fois par an au séminaire afin d’y prononcer une méditation devant les séminaristes, le jour de la fête de Notre-Dame de la Confiance.

En revanche Bergoglio, à peine élu pape, a interrompu cette tradition et supprimé ces visites. Une seule fois, le 9 novembre 2015, il est venu saluer rapidement les séminaristes romains, à la fin de l'ordination épiscopale d’Angelo De Donatis, le nouvel évêque auxiliaire du diocèse, célébrée à Saint-Jean-de-Latran. Et il a tenu à entrer tout seul dans le séminaire pour les saluer, en laissant brusquement à la porte aussi bien le cardinal vicaire Agostino Vallini, qui l’accompagnait, que le recteur et les autres supérieurs, qui s’apprêtaient à lui faire les honneurs de la maison.

François n’a jamais expliqué publiquement quelles étaient les raisons de cette aversion. Il n’a pas non plus souhaité attirer l’attention sur le fait qu’il avait invité les séminaristes et les supérieurs du grand séminaire de Rome – mais hors de la présence du cardinal vicaire et des évêques auxiliaires – à assister à la messe qu’il a célébrée à la Maison Sainte-Marthe le 9 décembre dernier.

Toutefois, au cours de l’homélie qu’il a prononcée ce jour-là, il a fait état de toutes ses préoccupations à propos de la formation qui est donnée actuellement au clergé, sans se soucier du fait qu’il les reversait sur ceux qui avaient la malchance de se trouver là, comme si c’était eux qui en étaient coupables.

Voici quelques passages de cette homélie, tirés du compte-rendu officiel publié dans "L'Osservatore Romano" :

"Pour se donner de l’importance, les prêtres prennent une attitude de rigidité : très souvent, ils sont coupés des gens et ne savent pas ce qu’est la souffrance humaine ; ils oublient ce qu’ils avaient appris chez eux, qui leur avait été enseigné par leur père, par leur mère, par leur grand-père, par leur grand’mère, par leurs frères et sœurs". En oubliant "ces choses, ils deviennent rigides et ils font porter aux fidèles beaucoup de choses qu’eux-mêmes ne portent pas ".

"La rigidité" signifie "avoir le fouet en main vis-à-vis du peuple de Dieu : ceci est permis, cela n’est pas permis". Et "beaucoup de gens qui viennent les trouver en cherchant un peu de consolation, un peu de compréhension, sont éloignés par cette rigidité". Toutefois "la rigidité ne peut pas durer très longtemps, complètement". Et surtout, "fondamentalement elle est schizophrénique : en fin de compte, le prêtre paraît rigide mais, intérieurement, il est dans un état désastreux".

Et "en plus de la rigidité" il y a aussi "la mondanité". C’est ainsi qu’"un prêtre mondain, rigide, est quelqu’un qui est insatisfait parce qu’il a pris le mauvais chemin". Précisément "à propos de rigidité et de mondanité" François a voulu raconter une histoire, "qui a eu lieu il y a longtemps : un vieux monsignor de la curie, qui travaille, un homme normal, un homme bon, plein d’amour pour Jésus, était venu me voir et m’avait raconté qu’il s’était rendu à l’Euroclero [magasin de vêtements ecclésiastiques, à Rome] pour s’acheter deux chemises. Là il avait vu, devant un miroir, un jeune homme – il pensait que celui-ci n’avait pas plus de 25 ans, que c’était soit un jeune prêtre soit quelqu’un qui allait devenir prêtre – qui avait enfilé une cape, grande, large, avec du velours et une chaîne d’argent, et qui se regardait. Ensuite le jeune homme avait pris un 'saturno' [chapeau ecclésiastique romain], s’en était coiffé et s’était regardé dans le miroir : c’était un rigide mondain". Et "le vieux prêtre – un sage, ce monsignor, un homme très sage – a réussi à surmonter sa tristesse par une phrase pleine d’humour sain, puisqu’il a dit : 'Et après cela on dit que l’Église ne permet pas aux femmes de devenir prêtres !'". C’est ainsi "que le métier qu’exerce le prêtre quand il devient un fonctionnaire finit dans le ridicule, toujours".

Un détail curieux : dans la courte vidéo diffusée par le Centre de Télévision du Vatican, on constate qu’aucun des séminaristes romains qui étaient présents à la messe ne portait la soutane, un vêtement "de femme" qui ne plaît pas à Bergoglio :  > Casa Santa Marta, Santa Messa del 9 dicembre 2016

 Lire  tout l’article ici 

JPSC

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