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Medjugorje : l'authenticité des apparitions et la question de la vérité

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De Manfred Hauke sur le Tagespost :

Authenticité des apparitions
Medjugorje : la question de la vérité

Le dicastère de la foi a donné son feu vert aux pèlerinages à Medjugorje. Mais qu'en est-il de l'authenticité des apparitions présumées de la « Gospa » ? Un commentaire sur les aspects dogmatiques.

11.10.2024

Le 19 septembre, le Dicastère pour la Doctrine de la Foi a publié une « note » qui commence par la phrase suivante : « Le moment est venu de clore une histoire longue et complexe autour des phénomènes spirituels de Medjugorje ». Mais cette intervention, ainsi que le document publié le 17 mai sur les « Normes pour la procédure d'évaluation des phénomènes surnaturels présumés » du Dicastère pour la Doctrine de la Foi, sont-ils vraiment en mesure de clore le débat « autour des phénomènes spirituels de Medjugorje » ?

Par « conclusion », on peut tout au plus entendre ici la prise de position officielle du Saint-Siège, car les apparitions présumées de la Vierge ne sont pas encore terminées. La note elle-même stipule que le visiteur apostolique pour la paroisse de Medjugorje doit « soumettre à un examen » les messages futurs et les messages antérieurs non encore publiés (n° 39).

La question de la vérité reste sans réponse

Un véritable « point » n'aurait été possible que si le dicastère s'était posé la question de l'authenticité des phénomènes en question ; une prise de position positive sur l'origine surnaturelle est déjà réservée dans les « normes » de mai au Saint-Père qui, selon le préfet de la foi, le cardinal Victor Manuel Fernández, n'a aucune intention de faire une telle déclaration à propos de Medjugorje (ou de tout autre phénomène présumé).

La question de la vérité reste donc sans réponse. Une solution simplement « pastorale » est toutefois problématique à long terme, car sans clarification de la vérité, l'orientation pour le comportement pratique fait défaut, et d'autres conflits sont ainsi programmés.

Le scepticisme à l'égard de l'intervention surnaturelle de Dieu (et de celle, extra-naturelle, du diable), qui apparaît clairement dans les « normes », contraste singulièrement avec la pratique actuellement très généreuse des béatifications et des canonisations (du moins en comparaison avec les époques précédentes).

L'origine surnaturelle des apparitions présumées n'est pas établie

Depuis 1980, il y a eu (selon le cardinal Fernandez) 3 159 béatifications. La reconnaissance d'un miracle est toujours nécessaire, mais elle ne joue pas un rôle central dans l'examen des apparitions présumées selon les nouvelles « normes ». Pour les révélations prophétiques, l'authentification par des prophéties et des miracles est certes importante, tout comme pour la crédibilité de la révélation achevée en Jésus-Christ.

Les apparitions de la Vierge à Fatima en sont un exemple classique : le 13 juillet 1917, la Vierge a prédit qu'un grand miracle se produirait dans trois mois, le 13 octobre, au même endroit et au même moment (le miracle du soleil).

Lors de ladite conférence de presse du 19 septembre, le secrétaire de la section doctrinale du dicastère de la foi, le prélat Armando Matteo, a évoqué les enquêtes qui avaient déjà été menées. La commission du diocèse de Mostar-Duvno (1986) et la déclaration de Zadar de la Conférence épiscopale yougoslave (1991) ont toutes deux conclu que l'origine surnaturelle des apparitions présumées n'était pas établie.

Des enquêtes insuffisantes ?

L'évêque Ratko Perić, qui a dirigé le diocèse de Mostar pendant 27 ans (1993-2020) et qui connaît parfaitement la situation, était en revanche fermement convaincu que l'origine n'était sans aucun doute pas surnaturelle (constat de non supernaturalitate). La commission présidée par le cardinal Camillo Ruini (2010-2014) partageait le scepticisme à l'égard des apparitions actuelles, mais considérait que les sept premières apparitions étaient surnaturelles.

Le rapport final de cette commission présidée par le cardinal Ruini a été publié deux fois en 2020 par des indiscrétions en Italie (Saverio Gaeta, David Murgia). Il en résulte le fait regrettable que les premières apparitions présumées à Medjugorje n'ont pas du tout été étudiées en profondeur.

Déjà la référence aux « sept premières apparitions » ne correspond pas aux faits historiques connus par les procès-verbaux des entretiens avec les voyants au début des événements, entre-temps publiés à trois reprises (en français et en anglais, pas en italien, ce qui n'a probablement pas favorisé le travail de la commission Ruini. Une étude détaillée à ce sujet : Forum Katholische Theologie 2018, p. 262-289 : gratuit sur https://fkth.org ; cf. aussi la monographie de Donal Anthony Foley, all. 2011, angl. dernière 2021).

Un « nihil obstat » surprenant

Le prélat Armando et le cardinal Fernandez mentionnent que la Congrégation pour la doctrine de la foi a demandé, après la commission Ruini, deux avis différents qui attribuaient l'origine des apparitions à l'action d'esprits mauvais (donc des apparitions oui, mais pas de la Vierge). La note du Dicastère pour la Doctrine de la Foi parle systématiquement d'apparitions « présumées », ce qui correspond à un « non constat de supernaturalitate ».

Le classement dans la catégorie « nihil obstat », à savoir le niveau d'appréciation le plus élevé, est certes surprenant : les fidèles peuvent « recevoir une incitation positive pour leur vie chrétienne » et pratiquer la vénération publique de la « Reine de la paix » ; « aucun effet négatif ... ne se serait répandu dans le peuple de Dieu » (n. 38).

Au vu des nombreux aspects problématiques des messages, dont certains sont également mentionnés dans la « note » du dicastère de la foi (nr. 2, 27-30, 35-36), on aurait plutôt pu s'attendre, dans la perspective des « normes “, à une classification plus profonde, allant jusqu'au jugement ” constat de non supernaturalitate “, comme le Dicastère l'a constaté pour les apparitions présumées de la ” Dame de tous les Peuples “ - dont les messages ne sont probablement pas plus problématiques que ceux de Medjugorje - ou pour les prétendues apparitions mariales de Trevignano Romano, lors desquelles une statue de la ” Gospa » de Medjugorje aurait versé des larmes de sang.

Personne n'est obligé de croire aux apparitions présumées

La représentation selon laquelle il n'y aurait presque que de bons fruits est également surprenante. L'importance du témoignage de vie des voyants (qui apparaît bien dans les « normes » : n° 14f) est relativisée (n° 3, 5, 41) ; qu'en est-il des problèmes du mensonge, de la désobéissance et des avantages économiques ? Plus grave encore est l'inconduite des franciscains Vlasić et Zovko, censurée par l'Église, qui est étroitement mêlée au phénomène des apparitions.

Face à ces problèmes, il faut saluer les indications de l'actuel évêque du lieu, Mgr Petar Palić, qui a souligné, dans le décret du « Nihil obstat » qui lui a été demandé, que personne n'était tenu de croire aux apparitions présumées. Le lendemain, lors de la conférence de presse, il a souligné qu'il n'avait pas l'intention d'élever formellement la paroisse de Medjugorje au rang de sanctuaire marial au sens du droit canonique.

L'auteur est professeur de dogmatique à la Faculté de théologie de Lugano, spécialisé en mariologie.

Commentaires

  • Merci pour cet article très utile dans le fait qu’il comble les stupéfiantes lacunes de la commission Ruini dont il apparaît qu’elle n’a pas du tout fait son travail sérieusement et qu’elle a rendu des conclusions stupéfiantes et incohérentes qui ne peuvent qu’égarer les gens et les détourner de la vérité et de la réalité.

    Selon Wikipedia,
    https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Apparitions_mariales_de_Me%C4%91ugorje
    (Voir rubrique ”Avis personnel” - ”Le mariologue Manfred Hauke” )
    Manfred Hauke est membre de l'Académie pontificale mariale internationale, président de la Société allemande de mariologie et professeur de dogmatique à la Faculté de théologie de Lugano. Dans un entretien accordé en août 2018 au journal catholique allemand Die Tagespost, il déplore que la commission présidée par le cardinal Ruini en charge de se prononcer sur les phénomènes de Medjugorje n'ait pas pris connaissance des transcriptions des entretiens enregistrés sur cassette aux premiers jours des apparitions entre les voyants et les franciscains de Medjugorje, ces transcriptions n'étant disponibles alors qu'en anglais et en français57,58.

    Dans une étude publiée en 2018 par la Revue théologique de Lugano, Manfred Hauke a étudié en détail ces transcriptions qui consignent les propos des voyants entre le 27 et le 30 juin 1981 et une partie du journal personnel de la voyante Vicka Ivanković couvrant la période du 24 juin au 6 septembre 1981. À l'analyse de ce matériau historique, il considère qu'il est impossible, comme le fait la commission Ruini, de limiter le phénomène originel aux sept premières apparitions durant les dix premiers jours. En effet, il dénombre durant cette période dans les témoignages des voyants 17 ou 18 apparitions. Questionnant leur origine surnaturelle, il note un certain nombre de points problématiques : dans les enregistrements sur cassette les voyants déclaraient le 30 juin 1981 que "la Gospa" leur avait annoncé qu'elle apparaîtrait seulement encore trois jours, or les apparitions se poursuivent au-delà du 3 juillet, ce qui aux yeux du théologien constitue une « fausse prophétie ». Par ailleurs, on ne distingue pas de message particulier dans les déclarations des voyants aux premiers jours de l'apparition. « Ce n'est que plus tard que la "Gospa" a diffusé une quantité interminable de "messages". »

    Manfred Hauke relève aussi un certain nombre d'aspects insolites dans les témoignages immédiats des voyants, absents selon lui dans les apparitions mariales authentiques : le tremblement des mains de l'apparition qui couvre et découvre l'enfant qu'elle tient ; sa disparition répétée lorsque son voile est "piétiné" ; la couleur grise de la robe sans ceinture ; la dissimulation des pieds ; l'impression de toucher de l'acier à son contact ; l'évanouissement de trois voyants quand ils l'aspergent d'eau additionnée de sel bénit ; leur course extatique du 25 juin à travers la montagne (qui évoque des faits observés dans les apparitions mariales de Garabandal, non reconnues par l'Église catholique, et dans des cas de possession diabolique). Manfred Hauke conclut, à la suite du religieux français François-Marie Velut (Michel de la Sainte-Trinité) et de l'expert anglais de la mariophanie, Donal Anthony Foley, que « de la phénoménologie de l'apparition elle-même émergent également des aspects très étranges qui, mis ensemble, paraissent indiquer une présence préternaturelle (c'est-à-dire démoniaque)”

    La Dame que voient les visionnaires de Medjugorje n’est pas du tout la Très Sainte Vierge Marie que les petits pastoureaux de Fatima ont pu voir. Mais cette dame là ne vient certainement pas pour rien.
    Et selon Joachim Bouflet, le phénomène Medjugorje serait à l'origine de plus de 400 (fausses) apparitions dans le monde, principalement aux États-Unis.
    Mais surtout, dans la suite de ces faussetés démoniaques, la note de Tucho Fernández risque bien de tourner les apparitions authentiques en dérision. C’est aux résultats obtenus qu’on reconnait l’objectif poursuivi.
    https://www.benoit-et-moi.fr/2020/2024/09/28/apparitions-mariales-fatima-dans-le-collimateur/

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