D'Hélène de Lauzun sur The European Conservative :
Défendre la vie et la souveraineté : une bataille européenne
L’ initiative « Ma voix, mon choix » , issue d’une pétition présentée comme « citoyenne et populaire », vise à offrir aux femmes européennes un accès « sûr et accessible » à l’avortement dans les États membres de l’Union européenne. Or, l’avortement ne relève généralement pas de la compétence de l’UE. Derrière cette initiative se cache un consortium d’associations politisées qui défendent un programme progressiste visant non seulement à promouvoir une culture de mort, mais aussi à saper la souveraineté des États.
Le mercredi 26 novembre, une conférence a été organisée à l'initiative du Centre européen pour le droit et la justice et du groupe ECR afin de présenter l'initiative « Ma voix, mon choix », qui devait être officiellement présentée lors d'une audition publique au Parlement européen et débattue en commission parlementaire le mardi 2 décembre.
Enregistrée auprès de la Commission européenne en avril 2024, elle a officiellement recueilli plus d'un million de signatures validées dans toute l'UE le 1er septembre 2025, atteignant ainsi le seuil requis par la législation européenne, selon ses promoteurs.
Dans son discours public du mercredi 26 novembre, le député européen espagnol Jorge Buxade a mis en lumière le soutien officiel et officieux dont bénéficie cette initiative. Derrière ce projet présenté comme « populaire » se cachent en réalité de nombreuses organisations internationales et non gouvernementales aux objectifs philanthropiques variés, financées par l'argent du contribuable.
Leur engagement ne se limite pas à l'avortement, mais couvre de nombreux autres sujets. Pas moins de 254 associations sont enregistrées pour soutenir cette initiative. Derrière ce réseau d'associations se cachent des élites irresponsables qui poursuivent un programme dépassant largement la question du droit à la vie, sapant la liberté des peuples souverains sous couvert de progrès et de défense des droits humains.
Sur ces 254 associations, seules 51 publient des informations financières détaillées et transparentes. Parmi elles, 19 reçoivent des financements européens et 20 sont financées par l'Open Society de George Soros. Le financement des 200 autres reste opaque, ce qui ouvre la porte à de nombreuses manipulations douteuses.
Outre l'Open Society, la branche européenne de Planned Parenthood compte également parmi les financeurs de My Voice My Choice. La ligne défendue est celle promue par le Fonds des Nations Unies pour la population. L'architecture de ce soutien est très cohérente : l'avortement est lié à la promotion de l'immigration de masse. Dans ce contexte, l'activisme politique de My Voice My Choice n'a rien de surprenant : pas moins de huit vidéos contre le parti espagnol VOX ont été publiées par l'association sur les réseaux sociaux. Ces organisations imposent leur point de vue, fortes de leurs financements et de leurs liens étroits avec les institutions. Ce faisant, elles étouffent la voix des citoyens ordinaires : derrière VOX, en Espagne, ne se cachent-ils pas quatre millions d'électeurs ainsi stigmatisés politiquement ?
L'élargissement de l'accès à l'avortement est un combat mené avec détermination par la gauche progressiste. C'est une question qui fait l'objet d'ingérences massives, constantes et répétées dans les politiques nationales. Dans son discours, le député européen András László a évoqué le cas hongrois à cet égard. Bien que le gouvernement n'ait pas profondément réformé la législation hongroise sur l'avortement, le nombre d'avortements est néanmoins en baisse grâce aux effets positifs de sa politique familiale globale. Or, c'est précisément cette politique familiale qui est la cible de certaines des attaques les plus virulentes au sein de l'Union européenne.
Pour comprendre et révéler les véritables enjeux de l'Initiative citoyenne européenne « Ma voix, mon choix », il est important d'établir un parallèle avec une autre initiative, « One of Us » , lancée en 2012. Cette initiative visait à demander à la Commission de mettre fin au financement européen des programmes conduisant à la destruction d'embryons humains (programmes de recherche sur les embryons humains et programmes d'avortement dans les pays en développement). Grégor Puppinck, directeur de l'ECLJ, rappelle que la pétition à l'origine de « One of Us » avait recueilli 2 millions de signatures, soit deux fois plus que « Ma voix, mon choix ». Mais la différence ne se limite pas aux chiffres. « One of Us » était une véritable initiative citoyenne, non orchestrée par un consortium de lobbyistes professionnels. Les signatures ont été patiemment recueillies par des milliers de bénévoles à travers l'Europe, et non par des agences subventionnées. En 2014, la réponse de la Commission européenne fut cinglante : bien qu'il s'agisse de l'initiative citoyenne européenne la plus importante jamais lancée, « One of Us » fut rejetée au motif que la demande ne relevait pas de la compétence de l'UE.
Comme nous l'avons dit, l'enjeu dépasse largement la simple question de la défense de la vie. La souveraineté des États en matière éthique est clairement remise en cause par l'initiative « Ma voix, mon choix » qui, si elle est adoptée, permettra à une femme d'obtenir un financement européen pour avorter dans un autre État membre si la législation sur l'avortement dans son pays lui est défavorable. Par exemple, si une Française souhaite avorter à 20 semaines de grossesse, alors que la loi française l'en empêche après 14 semaines, elle pourra obtenir un financement pour se rendre aux Pays-Bas, où l'avortement est autorisé jusqu'à 24 semaines. Cette initiative institutionnalise le contournement des lois nationales avec l'aval des institutions européennes. On imagine aisément combien l'application de ce principe à d'autres domaines pourrait être dangereuse pour l'équilibre des États : mais lorsqu'il s'agit du respect de la vie, tous les coups sont permis.
L'objectif de cette lutte est à la fois anthropologique et politique : obtenir au niveau supranational ce que certains pays bloquent au niveau national. Les groupes de pression pro-avortement ont multiplié leurs actions ces dernières décennies. La tentative, en 1994, d'obtenir un traité international protégeant le droit à l'avortement lors de la Conférence internationale du Caire sur la population et le développement a échoué. Au niveau étatique, les associations féministes et pro-avortement ont recours à des actions en justice stratégiques : elles exploitent des cas individuels pour obtenir de nouveaux droits. Cette méthode a conduit à l'arrêt Roe v. Wade aux États-Unis (désormais annulé), mais elle n'a pas été couronnée de succès partout. La troisième approche est celle de l'organisation « My Voice My Choice », qui consiste à influencer le droit souple , c'est-à-dire à obtenir des recommandations d'organismes internationaux non contraignantes pour les États, créant ainsi une pression morale de plus en plus difficile à contourner. Au niveau international, les directives de l'OMS sur l'avortement vont dans ce sens : depuis 2022, des recommandations sont adressées chaque année aux États pour les encourager à autoriser l'avortement jusqu'à terme.
Au niveau européen, pour l'instant, seules des résolutions ont été votées, sans aucune obligation juridique. Heureusement, l'offensive lancée après la constitutionnalisation de l'avortement en France , visant à inscrire ce droit dans la Charte des droits fondamentaux, n'a pas abouti . « Ma voix, mon choix » marque une nouvelle étape, s'attaquant directement à la souveraineté des États.
Le 5 novembre , les membres de la commission des droits des femmes et de l'égalité des genres du Parlement européen (FEMM) ont voté en faveur de la création d'un fonds européen destiné à aider les femmes à se rendre à l'étranger pour avorter lorsque cela est impossible dans leur pays. La prochaine étape est l'adoption d'une résolution en ce sens en séance plénière.
Officiellement, comme le souligne Grégor Puppinck, l'UE n'a aucune compétence en matière d'avortement, mais l'article 33 de la Charte des droits fondamentaux stipule que la maternité et la vie familiale doivent bénéficier du soutien de la générosité publique. Or, aucun programme ne concrétise cette déclaration d'intention. Sur le plan politique, la revendication doit rester centrée sur cet objectif : exiger la réorientation des fonds actuellement alloués, d'une manière ou d'une autre, à la promotion de l'avortement vers la maternité et la famille, et rappeler sans cesse que la défense de la vie repose sur la souveraineté des États.