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Récit de la conversion de Magdi Cristiano Allam baptisé à Pâques 2008

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C'était il y a trois ans; le jour de Pâques, Magdi Cristiano Allam était baptisé à Rome par Benoît XVI.

Mais avant, voici la version intégrale de la lettre qu’Allam a adressée au directeur du “Corriere della Sera“ pour raconter sa conversion. Seule une partie de la lettre avait été publiée par le quotidien:

"Benoît XVI nous dit qu’il faut vaincre la peur"

par Magdi Cristiano Allam

Cher directeur, ce que je vais te raconter concerne une décision de foi religieuse et de vie personnelle que j’ai prise. Elle ne vise en aucune façon à impliquer le “Corriere della Sera“, dont j’ai l’honneur de faire partie depuis 2003 comme directeur adjoint “ad personam“. Je t’écris donc à titre privé, en tant que personnage de cette histoire.

Hier soir, veille de Pâques, je me suis converti à la religion catholique, renonçant ainsi à mon ancienne foi musulmane.

Par la grâce divine, la lumière est finalement apparue au fruit sain et mûr d’une longue gestation vécue dans la souffrance et la joie, entre la réflexion profonde et intime et l’expression consciente et manifeste.

Je suis particulièrement reconnaissant envers Sa Sainteté le pape Benoît XVI, qui m’a administré les sacrements de l’initiation chrétienne – Baptême, Confirmation et Eucharistie – en la basilique Saint-Pierre, au cours de la célébration solennelle de la Veillée Pascale. J’ai pris le nom chrétien le plus simple et le plus explicite: “Cristiano“. Depuis hier soir, je m’appelle donc Magdi Cristiano Allam.

Pour moi, c’est le plus beau jour de ma vie. Pour un croyant, recevoir le don de la foi chrétienne de la main du Saint Père le jour de la fête de la Résurrection du Christ est un privilège sans égal et un bien inestimable.

A presque 56 ans, c’est, à ma modeste échelle, un fait historique, exceptionnel et inoubliable, qui marque un tournant radical et définitif par rapport au passé. Le miracle de la Résurrection du Christ s’est reflété sur mon âme, en la libérant des ténèbres d’une prédication où la haine et l’intolérance à l’égard du “différent“, condamné sans examen comme “ennemi“, l’emportent sur l’amour et le respect du “prochain“ qui reste toujours et en tout cas une “personne“. De la même manière, mon esprit s’est affranchi de l’obscurantisme d’une idéologie qui légitime le mensonge et la dissimulation, ainsi que la mort violente, ce qui conduit à l’homicide et au suicide, la soumission aveugle et la tyrannie. J’ai ainsi pu adhérer à la religion authentique de la Vérité, de la Vie et de la Liberté. A l’occasion de ma première fête de Pâques comme chrétien, j’ai découvert non seulement Jésus mais aussi, pour la première fois, le vrai et unique Dieu, qui est le Dieu de la Foi et de la Raison.

Ma conversion au catholicisme est l’aboutissement d’une méditation intérieure progressive et profonde. Jamais je n’aurais pu m’y soustraire, étant donné que, depuis cinq ans, je suis contraint de vivre enfermé, avec une surveillance continue de ma maison et une escorte de carabiniers pour chacun de mes déplacements. Cette situation est due aux menaces et aux condamnations à mort que m’adressent les extrémistes et les terroristes islamiques, d’Italie ou de l’étranger.

J’en suis venu à m’interroger sur le comportement de ceux qui ont publié des fatwas – des sentences juridiques islamiques – en me traitant, moi qui étais musulman, d’“ennemi de l’islam“, “hypocrite parce chrétien copte faisant semblant d’être musulman pour nuire à l’islam“, “menteur et diffamateur de l’islam“. Ils justifient de cette façon ma condamnation à mort.

Je me suis demandé comment il était possible que quelqu’un qui – comme moi – s’est inlassablement battu avec conviction pour un “islam modéré“, prenant la responsabilité de s’exposer directement en dénonçant l’extrémisme et le terrorisme islamique, ait fini par être condamné à mort au nom de l’islam et sur la base d’une justification coranique.

J’ai donc dû prendre acte du fait que, au delà de la situation caractérisée par la domination du phénomène des extrémistes et du terrorisme islamique au niveau mondial, la racine du mal se trouve dans un islam qui est physiologiquement violent et historiquement conflictuel.

Parallèlement, la Providence m’a fait rencontrer des catholiques pratiquants de bonne volonté qui, à cause de leur témoignage et de leur amitié, sont peu à peu devenus un point de référence sur le plan de la certitude de la vérité et de la solidité des valeurs. Tout d’abord mes nombreux amis de Communion et Libération, en tête desquels le père Juliàn Carròn; mais aussi de simples religieux comme le père Gabriel Mangiarotti, sœur Maria Gloria Riva, le père Carlo Maurizi et le père Yohannis Lahzi Gaid. Ma redécouverte des salésiens, grâce aux pères Angelo Tengattini et Maurizio Verlezza, a culminé dans une amitié renouvelée avec leur recteur majeur, le père Pascual Chavez Villanueva. J’ai enfin reçu le soutien de hauts prélats d’une grande humanité comme le cardinal Tarcisio Bertone, Mgr Luigi Negri, Mgr Giancarlo Vecerrica, Mgr Gino Romanazzi et surtout Mgr Rino Fisichella, qui m’a suivi personnellement dans mon parcours spirituel d’acceptation de la foi chrétienne.

Mais, sans aucun doute, la rencontre la plus extraordinaire et qui a le plus influé sur ma décision de me convertir, c’est celle du pape Benoît XVI. Lorsque j’étais musulman, je l’ai admiré et défendu pour sa capacité à faire, du lien indissociable entre foi et raison, le fondement de la religion authentique et de la civilisation de l’homme. Comme chrétien, j’y adhère pleinement pour m’inspirer d’une nouvelle lumière dans l’accomplissement de la mission que Dieu m’a réservée.

Mon itinéraire a commencé quand j’avais quatre ans. Ma mère, Safeya, était une musulmane croyante et pratiquante. Par le premier d’une série de “hasards” qui se sont révélés non pas fortuits mais intégrés dans le destin divin auquel chacun de nous est appelé, elle m’a confié aux soins pleins de tendresse de sœur Lavinia, de l’ordre des comboniennes. Elle était convaincue que je recevrais une bonne éducation chez ces religieuses catholiques italiennes, installées au Caire, ma ville natale, pour témoigner de leur foi chrétienne à travers une œuvre tendant à contribuer au bien commun.

C’est ainsi que j’ai commencé mon expérience de la vie scolaire, effectuée chez les salésiens de l’Institut Don Bosco pour le collège et le lycée. Tout compte fait, on m’y a transmis non seulement un savoir mais surtout la conscience des valeurs. C’est grâce aux religieux catholiques que j’ai acquis une conception profondément et essentiellement éthique de la vie. Selon cette conception, la personne créée à l’image et à la ressemblance de Dieu est appelée à remplir une mission qui s’insère dans un dessein universel et éternel visant à la résurrection intérieure de chaque individu sur cette terre et à celle de l’humanité entière le Jour du Jugement Dernier. Cette conception, fondée sur la foi en Dieu et sur la primauté des valeurs, est axée sur le sens de la responsabilité individuelle et du devoir envers la collectivité. A cause de cette éducation chrétienne et parce que j’ai partagé l’expérience de la vie avec des religieux catholiques, j’ai toujours eu une foi profonde en la transcendance et j’ai toujours recherché la certitude de la vérité dans les valeurs absolues et universelles.

A un moment donné, la présence aimante et le zèle religieux de ma mère m’ont rapproché de l’islam. Je l’ai pratiqué périodiquement sur le plan cultuel et j’y ai cru sur le plan spirituel. J’en faisais une interprétation qui à l’époque – les années Soixante – correspondait en gros à une foi respectueuse de l’homme et tolérante envers le prochain. Le contexte était celui du régime de Nasser, avec une prédominance du principe laïque consistant à séparer la sphère religieuse de la sphère séculière.

Mon père, Mahmoud, était tout à fait laïc. Sur ce point, il était semblable à une majorité d’Egyptiens qui prenaient l’Occident comme modèle en matière de liberté individuelle, d’usages sociaux et de modes culturelles et artistiques. Malheureusement le totalitarisme politique de Nasser et l’idéologie belliqueuse du panarabisme, qui visait à l’élimination physique d’Israël, ont conduit l’Egypte à la catastrophe et ouvert la voie à la redécouverte du panislamisme, à l’arrivée au pouvoir des extrémistes musulmans et à l’explosion du terrorisme musulman mondialisé.

Les nombreuses années passées à l’école m’ont aussi permis de bien connaître, de près, la réalité du catholicisme ainsi que celle des femmes et des hommes qui ont consacré leur vie à servir Dieu au sein de l’Eglise. Dès cette époque, je lisais la Bible et les Evangiles et j’étais particulièrement fasciné par la figure humaine et divine de Jésus. J’ai pu assister à la sainte messe et il m’est même arrivé, une seule fois, de m’approcher de l’autel et de recevoir la communion. Ce geste manifestait évidemment mon attirance vers le christianisme et mon désir de me sentir inclus dans la communauté religieuse catholique.

Par la suite, quand je suis arrivé en Italie au début des années Soixante-dix, dans les fumées des révoltes étudiantes et les difficultés d’intégration, j’ai vécu une période où un athéisme affiché me tenait lieu de foi, tout en restant fondé sur la primauté des valeurs absolues et universelles. Je n’ai jamais été indifférent à la présence de Dieu, même si c’est seulement maintenant que je sens que le Dieu de l’Amour, de la Foi et de la Raison se concilie pleinement avec le patrimoine de valeurs qui sont enracinées en moi.

Cher directeur, tu m’as demandé si je ne craignais pas pour ma vie, parce que je serais conscient que ma conversion au christianisme m’attirera certainement une énième – et beaucoup plus grave – condamnation à mort pour apostasie.

Tu as tout à fait raison. Je sais à quoi je m’expose mais j’affronterai mon destin la tête haute, sans courber l’échine et avec la solidité intérieure de celui qui est sûr de sa foi. Et je le serai encore plus après le geste historique et courageux du pape qui – dès qu’il a connu mon désir – a tout de suite accepté de me conférer personnellement les sacrements d’initiation au christianisme.

Sa Sainteté a lancé un message explicite et révolutionnaire à une Eglise qui a été jusqu’à présent trop prudente dans la conversion des musulmans, puisqu’elle s’est abstenue de faire du prosélytisme dans les pays à majorité musulmane et n’a rien dit de la réalité des musulmans convertis dans les pays chrétiens. Par peur. Peur de ne pas pouvoir protéger les convertis contre leur condamnation à mort pour apostasie. Peur des représailles exercées sur les chrétiens qui vivent dans les pays musulmans.

Aujourd’hui Benoît XVI nous dit, par son témoignage, qu’il faut vaincre la peur et ne pas craindre d’affirmer la vérité de Jésus y compris aux musulmans.

Pour ma part, je dis qu’il est temps de mettre fin aux abus et à la violence des musulmans qui ne respectent pas la liberté de choix en matière de religion.

En Italie il y a des milliers de convertis à l’islam qui vivent sereinement leur nouvelle foi. Mais il y a aussi des milliers de musulmans convertis au christianisme qui sont obligés de cacher leur nouvelle foi par peur d’être assassinés par les extrémistes musulmans cachés parmi nous. Par un de ces “hasards” qui laissent entrevoir la main discrète du Seigneur, mon premier article dans le "Corriere della Sera", le 3 septembre 2003, était intitulé: “Les nouvelles catacombes des musulmans convertis”. C’était une enquête sur des nouveaux chrétiens en Italie qui dévoilaient leur profonde solitude spirituelle et humaine, due à la défaillance des institutions de l’Etat, qui ne veillent pas à leur sécurité, et au silence de l’Eglise elle-même.

Et bien, je souhaite que le geste historique du pape et mon témoignage les persuadent que le moment est venu de sortir des ténèbres des catacombes et d’affirmer publiquement leur volonté d’être pleinement eux-mêmes.

Si nous sommes incapables, ici en Italie, berceau du catholicisme, de garantir à tous la pleine liberté religieuse, comment pourrions-nous l’être quand nous dénonçons la violation de cette liberté dans d’autres pays du monde? Je prie Dieu pour que ce jour de Pâques spécial voie la résurrection spirituelle de tous les fidèles au Christ qui ont été jusqu’à maintenant dominés par la peur. Joyeuses Pâques à tous.

Commentaires

  • Le plus beau résultat du travail de milliers de religieux et religieuses dans les écoles et institutions catholiques.
    Le travail de la grâce du Seigneur qui s'adresse aussi aux musulmans.
    Ils attendent quelque chose de nous. Il faut se libérer de la peur et rendre ces condamnations caduques.

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