Les JMJ de Madrid commencent donc aujourd'hui. On attend un et peut-être deux millions de participants. Elles font la une depuis plusieurs jours permettant aux journalistes de prendre le pouls des jeunes venant de partout, de mener leur enquête sur "la situation réelle" de l'Eglise, d'interviewer évêques et organisateurs, de faire aussi du mauvais esprit en entretenant des polémiques sur leur coût ou en comparant cette fête de la foi avec un quelconque "Woodstock". (cliquer sur "lire la suite")

Rendant visite à un vieux prêtre en fin de vie qui a vu son église se vider et les jeunes déserter les célébrations paroissiales, je l'ai vu s'étonner lorsque je lui faisais part des chiffres prévus pour la participation des jeunes à Madrid, et je l'ai entendu répéter plusieurs fois : "je ne comprends pas".

On peut comprendre cette perplexité lorsque l'on examine les chiffres donnés par les journalistes sur les croyances religieuses, sur la pratique des jeunes, sur les rares vocations, etc. Et il est vrai que l'arbre plein de vie des JMJ ne doit pas cacher la réalité de la déforestation religieuse et spirituelle de nos sociétés. C'est, par exemple, la première fois que, depuis sa construction, l'église de ma paroisse a vu s'interrompre durant cet "été" la célébration de la messe dominicale, un dimanche sur deux. Et que dire de tous ces camps des mouvements de jeunesse autrefois catholiques où la participation à une messe n'était pas au programme? Et de toutes ces écoles chrétiennes où Dieu est absent des préoccupations et des coeurs?

Les JMJ font penser à cet embrasement d'enthousiasme qui a accompagné l'entrée du Seigneur à Jérusalem le Dimanche des Rameaux et qui contraste avec le tout petit nombre des disciples qui l'accompagneront dans les jours noirs de son procès, de son chemin de croix et de sa mise à mort.

Et pourtant, c'est le Christ Lui-même qui a voulu cette entrée triomphale, a donné des consignes précises sur les modalités de son organisation, a foulé le sol jonché de manteaux et de tuniques, a vu s'agiter les rameaux qu'agitait la foule qui l'acclamait, s'est prêté à ce triomphe royal. Alors, ne boudons pas ces évènements où la foi s'affiche dans l'allégresse mais ne nous laissons pas aveugler par l'illusion. Il ne suffira pas que nos enfants ou des jeunes que nous connaissons soient allés à Madrid pour que refleurissent la foi dans nos églises, les vocations, la pratique sacramentelle, le sens de l'engagement, etc. Au contraire, nous verrons sans doute le ciel s'obscurcir davantage avec le renforcement d'une persécution qui ne dit pas son nom, avec des églises que l'on ferme et que l'on songe à détruire, avec une perversion des valeurs morales qui gagne du terrain chaque jour et s'inscrit dans nos législations...

Tout cela nous détermine à relayer ici des échos de ce qui se passera à Madrid durant les jours à venir, mais sans succomber à une obsession jmjiste qui nous ferait oublier tout le reste : les persécutions (en Irak, au Pakistan, en Egypte...) les provocations antireligieuses, l'immoralité ambiante, les abus de l'économie néolibérale, la perte du sens du bien commun (en Belgique particulièrement), etc.

Laissons-nous donc gagner par la joie et l'enthousiasme communicatif des jeunes, mais sans oublier le sens des réalités, et de rester vigilants. Ensuite, il faudra oeuvrer avec ces jeunes revenus de Madrid pour que ces Journées Mondiales de la Jeunesse soient autre chose qu'un moment de surchauffe, d'émotion collective, de feu de paille sans lendemain.