Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Benoît XVI : de la marmite madrilène au chaudron allemand

IMPRIMER

germania.jpgJean-Marie Guénois, l’envoyé spécial du Figaro à Berlin écrit : « Après la marmite madrilène et ses 39°C de température du mois d'août, Benoît XVI arrive aujourd'hui dans un chaudron théologique agité, où la fougue des JMJ est remplacée par une contestation rugueuse à l'intérieur et à l'extérieur de l'Église catholique.

Le Pape est pourtant sur son propre sol, l'Allemagne, qu'il visite pour la troisième fois depuis son élection en 2005. À 84 ans, il y séjourne jusqu'à dimanche, avec un programme très chargé, assorti de dix-huit discours. Ce qui en fait le voyage le plus dense de son pontificat, avec celui en Terre sainte, de mai 2009 »

Benoît XVI y trouvera, comme partout en Europe, les séquelles théologiques de « l’esprit du Concile »  mais il se dit que le pape n’abordera pas frontalement cette contestation ressassée depuis bientôt cinquante ans. Il sera sans doute plus attentif au dialogue entre catholiques et luthériens qui sont presqu’à égalité dans la population allemande. Enfin, il n’évitera sans doute pas la question des prêtres pédophiles qui, là comme ailleurs, a miné la réputation du clergé et de l’Eglise. Voici le point de vue de Jean-Marie Guénois à ce propos:

 

 

« Trois défis

La veille de son départ, à Rome, la préoccupation majeure ne portait pas sur la santé du Pape ou sur sa capacité à absorber ce voyage, qui a été préparé avec un soin tout particulier, mais sur le contexte peu accueillant de ce déplacement. Ce qui laisse apparaître au moins trois défis aux yeux du Saint-Siège.

Le premier est d'ordre théologique et dépasse les frontières de l'Allemagne, pour épouser, avec la Suisse et l'Autriche, toute la zone germanophone. Les Autrichiens viennent de le vivre avec «l'appel à la désobéissance» lancé par le prêtre catholique Helmut Schueller - suivi par 400 prêtres - qui demande notamment le mariage des prêtres et l'ordination de femmes. Le cardinal de Vienne, Christophe Schönborn, a parlé de «risque de schisme».

L'Église allemande est travaillée au premier chef par ces mêmes questions, portées par le puissant mouvement contestataire «Nous sommes l'Église», au point que le président de la conférence des évêques, Mgr Robert Zollitsch, a lancé un processus de «dialogue national» en juillet dernier à Mannheim. Cet évêque, pourtant orthodoxe en sa doctrine, estime par exemple que la position de l'Église de rejet des divorcés remariés n'est plus tenable.

Il n'y a pas d'Église catholique dans le monde où le débat théologique sur le fond soit aussi ouvert et radical qu'en Allemagne, mais l'entourage de Benoît XVI a déjà prévenu que le Pape, «très informé» de cette contestation, n'aborderait pas de front ces questions brûlantes, car «trop techniques» pour être traitées dans le cadre d'un voyage.

Le second défi est d'ordre ecclésial, puisqu'il touche directement les relations avec le monde protestant. Benoît XVI, qui a beaucoup travaillé ce thème au cours de sa vie, a d'ailleurs souhaité que l'étape «protestante» du voyage, Erfurt, ne soit pas une halte de quelques heures, comme initialement prévu, mais une vraie journée où il va rencontrer les responsables luthériens et protestants allemands. Pas d'annonce fracassante en vue, insiste-t-on à Rome, mais la volonté de ce Pape théologien de cultiver un lien intellectuel et spirituel avec les «frères séparés», qui pèsent presque autant que les catholiques outre-Rhin, estimés à 30% de la population.

Enfin, le troisième défi vu de Rome, peut-être le plus difficile, est d'ordre culturel et politique. Certes, Benoît XVI va soutenir la responsabilité européenne de l'Allemagne, mais ce voyage est décisif quant à l'image de l'Église catholique dans ce pays. Celle-ci a été lacérée, la confiance perdue, après le scandale fracassant, il y a deux ans, de prêtres et religieux pédophiles. C'est d'Allemagne que cette crise était partie, et ses conséquences se font toujours sentir. Notamment par des départs massifs de catholiques qui décident de quitter l'Église. Ce qui est mesurable avec l'impôt cultuel: entre 2009 et 2010, les départs ont augmenté de 40% ! Soit 180.000 par an. Une tendance lourde qui inquiète Rome.

C’est ici : Benoît XVI se rend jeudi pour la troisième fois dans son pays natal. Au moins trois défis l'y attendent. 

Les commentaires sont fermés.