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La piété populaire, un fonds mal exploité ou délibérément méprisé ?

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Fruit de nombreux siècles de civilisation chrétienne, la piété populaire est inscrite plus profondément que l’on ne le croit dans la mentalité collective. En témoignent, les succès de foule dans les sanctuaires, les dévotions persistantes à l’égard de l’Enfant Jésus de Prague, du Sacré Cœur, de la Vierge, de saints comme Rita, Antoine, Don Bosco, Vincent de Paul, devant lesquels brûlent constamment force bougies et luminaires.

Il suffit qu’un prêtre intrépide ose convoquer les fidèles d’une cité réputée déchristianisée pour qu’un millier de fidèles répondent à son appel et témoignent de leur attachement au Christ en participant à un chemin de croix dans les rues de la ville. Ou encore, comme hier, jour de Pâques, dans mon église paroissiale bondée et exultante, tout simplement parce que les membres de la chorale avaient généreusement invité les gens du quartier à se joindre à eux pour la messe et une réception conviviale. L’excellence de l’accompagnement choral mais aussi le soin apporté par le célébrant à officier avec dignité, recourant à la symbolique de l’eau, des cierges allumés, de l’encens, ainsi que la profondeur de son homélie, ont fait de cette messe un grand moment de grâce. Les « miracles », pour peu qu’on veuille bien les susciter, ne se produisent pas qu’à Marseille dans l’église du Père Zanotti-Sorkine !

Après des décennies d’enfouissement, il serait grand temps d’en appeler à ce fonds que représente la sensibilité religieuse des gens. Ceux-ci se sont éloignés d’églises où l’on a voulu promouvoir des formes liturgiques, soi-disant adaptées à notre temps, mais en réalité terriblement pauvres et peu susceptibles de développer une piété qui parle aussi aux sens, aux sentiments, à l’affectivité. Notre religion est une religion de l’incarnation, avec tout ce que cela comporte. Une religion rabougrie et desséchée, bavarde aussi, ne peut satisfaire cette attente complexe du cœur et de l’esprit.

Le sacré a aussi ses exigences : de recueillement mais également de soin, d’application, de préparation, et  de beauté surtout. On ne peut concilier avec lui n’importe quelle forme d’expression. Ces banderoles ou ces montages en carton qui envahissent les podiums de nos églises durant les campagnes d’avent ou de carême, censés nous sensibiliser aux injustices du monde, sont souvent laids et offensent le caractère consacré du lieu. Ou encore, ces interventions multiples qui, avec des intentions louables, interrompent le déroulement de la liturgie. On ferait bien d’envoyer nos « animateurs » en stage prolongé chez nos frères orthodoxes qui les initieraient à la dimension mystique de la liturgie qui unit le ciel à la terre.

Ces propos sont forcément sommaires mais ils nous sont inspirés par ces expériences récentes qui montrent qu’il ne faut pas désespérer mais oser en appeler à un "sens" religieux encore bien présent et - malheureusement - souvent inexploité. Encore faut-il qu'on s'y applique sans tarder car l'usure du temps et la prégnance du matérialisme ambiant pourraient bien avoir raison de ces ressources "dormantes"...

Commentaires

  • Merci de ce sujet où se croisent tant de questions sur le sens du sacré, de la liturgie, la conversion de notre coeur et de notre intelligence avec et par la piété populaire.
    A ce sujet je pense souvent à la louange de Jésus au retour des disciples de mission
    "Je te bénis Père d'avoir caché cela aux sages et aux savants et de l'avoir révélé au tout petits"
    Notre regard de catho instruit (et assuré par notre catéchisme) nous fait parfois regarder avec condescendance le côté superficiel voire superstitieux de ces pratiques de pèlerinage, cierges ou autres neuvaines... Pourtant, comme vous dites si bien, elles montres aussi ô combien Dieu prend au sérieux le mystère de l'incarnation.
    Et, soyons honnêtes, elles font du bien à l'âme et au corps procurant un sentiment d'appartenance tellement vital en ces temps où l'individualisme règne en maître.

    Par contre, je ne crois pas que la piété populaire doit être liée au soin accordé à la liturgie...
    Il est possible que cette dernière nourrit le sens du sacré qui nous fait accueillir et rechercher la beauté dans la liturgie...
    Alors que le regard imbibé de l'esprit critique des Lumières et d'un intellectualisme de bon ton a, sans doute conduit à dépouiller la liturgie des gestes et signes qui en faisaient une oeuvre majestueuse et belle pour Dieu pour la rapprocher d'une prédication rituelle quasi calviniste. c'est sans doute ce m^me regard de savant-pharisien qui est porté sur la piété et la religiosité populaire...

    Je me réjouis de ces petites perles où nous vivons une conversion de nos préjugés en la matière...

    Ce n'est pas toujours évident de garder la bienveillance et la vigilance vis à vis des manifestation populaires de la religion... tout comme c'est exigent de célébrer avec toujours le même soin et la même intériorité tant pour le prêtre que pour les fidèles... il faut amour et foi pour que l'habitus ne devienne pas routine..

    Que les ruptures de routines soient pour le beau d'un chant qui fait vibrer à l'unisson ou d'une naïveté un peu simpliste de panneaux de cartons colorés... Soyons sûrs que Dieu voir le coeur plus que le ressenti et qu'Il BENIT et se réjouit...dans sa grande bonté...

  • Il est en effet sidérant de voir des endroits où le prêtre bannit quasiment le culte des saints (la mémoire de leur vie, leur représentation), mais en même temps promeut le culte d'idoles en bois, carton ou papier mâché, symbolisant on ne sait quoi ni quelle idée, mi-chrétienne mi-païenne.

    On cherche donc à faire oublier la vie exemplaire, et parfois le martyre, de nos ancêtres dans la foi catholique, pour les remplacer par n'importe quoi sorti de l'imagination du prêtre ou des enfants. C'est un peu comme dans ces écoles où l'on se refuse à enseigner quoi que ce soit aux enfants, où ils devraient tout re-découvrir par eux-mêmes.

    C'est donc la piété populaire qui a raison. Il faut encore et toujours cultiver (culte) la mémoire de ceux qui ont su imiter au mieux le Christ, parfois jusqu'à donner leur propre vie. Si l'Église nous a donné des saints patrons et saintes patronnes, ce n'est pas pour n'importe quoi, c'est très important. Le terme 'patron' signifie 'modèle', en français. Ce sont donc pour nous des 'modèles' de vie selon le Christ, et nous devons cultiver leur mémoire. Une religion sans mémoire est une religion sans avenir.

  • La piété populaire reste bien vivante par endroits heureusement. Par exemple à Ath, un sanctuaire est dédié à s. Antoine de Padoue. La dévotion est telle que, depuis les années 1930, une revue, "La Charité", assure aussi bien l'instruction des fidèles (par le moyen d'articles divers - Bible, spiritualité, pèlerinages, initiation théologique) qu'une chaîne de prière et un relais d'informations sur les activités éducatives d'une école en Inde. J'ai la chance d'y collaborer depuis 8 ans. Site de la revue : http://www.indiamed.be/

  • A la suite de ces commentaires j'ajouterai mon témoignage qui peut sans doute démontrer l'importance de la piète populaire. Nous avons eu la chance de vivre en notre paroisse un triduum pascal vivant, animé d'un profond sentiment d'amour fraternel et de partage. Soutenus et encouragés par notre vicaire l'abbé J.J Mauc nous avons en très petit groupe (6 personnes) appris et répétés pendant plusieures semaines des nouveaux chants afin d'animer les différentes célébrations. Nous avons modifié la disposition de l'autel et des sièges afin que chacun aie l'impression d'être assis autour d'une grande table. Nous n'avons pas ménagé nos efforts pour décorer par des montages floraux le pied du cierge pascal et l'autel. Le jour de Pâques une chorale patentée est venue parachever nos efforts et un mini concert a clôturé la célébration. Des invitations avaient été distribuées bien à l'avence. C'est ainsi que notre petite église qui d'habitude accueille, quand tout va bien, une cinquantaine de fidèles, s'est vue envahie par plus de cent cinquantes personnes. Ce fût notre récompense et la preuve que la foi peut déplacer des montagnes!

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