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Quand la France se réveilla

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Et la France se réveilla

de Vincent Trémolet de Villers et Raphaël Stainville, Toucan, 288 pages

La recension de Famille Chrétienne :

Comment, et pourquoi, La Manif pour tous a-t-elle mobilisé ses troupes ? Et quelles leçons peut-on en tirer ? Deux journalistes, Vincent Trémolet de Villers et Raphaël Stainville, répondent dans un essai en forme de rétrospective.

C’est l’histoire d’une des plus grandes mobilisations de l’après-guerre. Une série de manifestations que ni les grands médias, ni les intellectuels, ni les politiques n’avaient vu venir – surtout pas les politiques, qui pour la plupart sont passés à côté. Aujourd’hui que les clameurs se sont tues, deux journalistes, Raphaël Stainville et Vincent Trémolet de Villers, dressent un premier bilan de La Manif pour tous.

Leur livre, bien informé et très vivant, se lit avec plaisir, truffé qu’il est de choses vues et de portraits bien troussés, de Virginie Tellenne, alias Frigide Barjot, à Tugdual Derville (Alliance Vita), de Béatrice Bourges (le Printemps français) à Ludovine de la Rochère (présidente de La Manif pour tous), d’Albéric Dumont (La Marche pour la vie), à François-Xavier Bellamy, philosophe de 27 ans…

Le point de départ du mouvement ? Sans doute la prière du 15 août 2012 du cardinal Vingt-Trois, dans laquelle le prélat demandait que les enfants « cessent d’être les objets des désirs et des conflits des adultes pour bénéficier pleinement de l’amour d’un père et d’une mère ». Sous le ton policé, une bombe. « Avec cette prière, reconnaît Arnaud Bouthéon, qui fut durant neuf mois une sorte de chef de cabinet de Frigide Barjot, le cardinal Vingt-Trois lance sans le savoir La Manif pour tous. »

La France coupée en deux

Puis les grandes étapes s’enchaînent : la « nuit des conjurés » (la réunion des futurs organisateurs) le 5 septembre, la première manifestation du 17 novembre, la tribune de François-Xavier Bellamy dans Libération le 4 décembre, les trois manifestations monstres (13 janvier, 24 mars, 26 mai) ; le refus du Conseil économique et social de prendre en compte « la plus grande des pétitions citoyennes de notre histoire » (700 000 signatures !).

Ce qui frappe d’emblée, à la lecture de ces pages, c’est la coupure de la France en deux. Entre l’« élite » – ne pas oublier les guillemets – et la France d’en bas, qui ose affirmer qu’un homme et une femme ce n’est pas la même chose ; entre un gouvernement aveugle et menteur, qui n’hésite pas à trafiquer les chiffres, et des manifestants toujours plus nombreux, ulcérés par le mépris dont ils sont l’objet ; entre la France qui s’informe au 20-heures de TF1 et celle des réseaux sociaux, branchés en temps réel sur l’actualité ; entre des partis politiques qui essaient de prendre le train en marche (UMP) ou qui refusent de monter dedans (FN) et de simples citoyens qui veulent faire bouger les choses sans savoir à quel saint se vouer…

Le rôle moteur de l’Église

Bref, le fossé entre pays légal et pays réel, pour utiliser une formule qui n’est pas celle des auteurs, n’a jamais été aussi béant. Inquiétant ? Oui, mais en même temps rassurant : on a vu se lever une population – très majoritairement catholique –, mue non pas par la défense de ses intérêts professionnels ou financiers, mais par la volonté de défendre la dignité humaine face à la « dictature du relativisme », dénoncée par Benoît XVI. L’Église y a joué un rôle moteur. Quel syndicat, quel parti politique pourraient en faire autant ?

Ce mouvement, a reconnu le député PS Jean-Christophe Cambadélis, est une « défaite culturelle pour la gauche ». L’ancien militant trotskiste rejoint sans le vouloir Patrick Buisson, l’ex-plume de Nicolas Sarkozy, expliquant que « la France des invisibles est devenue visible. À travers La Manif pour tous, cette France a accédé à une conscience civique et politique. Nul ne peut mesurer l’impact qu’aura cette révolution culturelle. Nous sommes dans cette phase que décrivait Lénine de politisation de catégories jusque-là réfractaires ou indifférentes à l’égard de la chose publique ».

« La question, poursuit-il, se résume ainsi : quels aspects de la vie sociale doivent être préservés de la marchandisation ? La génération Manif pour tous répond : la vie, les relations humaines, le domaine de la personne. » Bref, tout ce qui constitue pour Jean-Christophe Cambadélis « l’identité », y compris celle de la France. 

Charles-Henri d’Andigné

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