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La communion des divorcés remariés

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De Patrick Kéchichian, écrivain et journaliste, dans le journal « La Croix » (extraits) :

« La question de l’accès au sacrement de l’Eucharistie pour les divorcés remariés revient régulièrement et bruyamment sur le devant de la scène. La blessure et la frustration subjectivement ressenties par certains fidèles – dont ce n’est évidemment pas la sincérité qui doit être mise en doute – se transforment alors en plainte, et la plainte en revendication. Puis le ton monte. On n’écoute plus, tant il devient urgent de parler soi-même. On oublie de penser sa foi, on se contente de l’éprouver comme un sentiment – un sentiment qui, dès lors, commande la pensée. (…)

Tout jugement qui veut s’approcher de la vérité doit s’élever de la sphère de l’opinion à celle de la pensée. Or, il faut aller sans attendre au noyau de la question, appeler un chat un chat et un sacrement un sacrement. Que désigne ce mot ? Un rapport étroit, indissoluble justement, entre, d’une part, un geste, une parole liturgiques et, d’autre part, l’économie du salut, contenue et exprimée dans la Révélation biblique. À la lumière de ce rapport, nos vies se déroulent, dans la solitude et le partage, dans les difficultés, les tourments et les joies, les promesses et les ruptures. Les sacrements, ici ceux du Mariage et de l’Eucharistie, n’ont pas vocation à se mettre sous la dépendance de ces difficultés, ou à se définir par rapport à elles.

En d’autres termes, devant l’autel et devant Dieu, un sacrement reçu l’est absolument. Hors de cette absolue réception, le sens du sacrement tombe, ou au moins s’étiole. À ce sens complexe et dûment réfléchi, on a donc tort d’opposer un droit personnel revendiqué par une conscience propre qui n’est pas juge en la matière, conformément au principe bien connu qui stipule que « personne n’est juge en sa propre cause ». Comme le souligne Mgr Müller, invoquer ici ce droit au nom de la miséricorde divine est une manière de réduire et d’instrumentaliser cet attribut de Dieu, inséparable de sa justice et de sa sainteté. L’expérience vécue n’a pas à entrer en concurrence avec la nature objective de l’acte sacramentaire. Elle n’a pas à lui dicter sa loi.

Cependant, cela ne signifie pas que l’absolu dont il est question plane au-dessus de nos têtes comme une abstraction, un songe idéal… Nous sommes simplement sur deux plans différents. L’amour de Dieu est toujours plus vaste, haut, large et profond que nos sentiments, que notre humaine capacité à aimer. Ces deux dimensions doivent être considérées, mais sans entrer en compétition.

Soutenir que l’Église, en refusant la communion aux divorcés remariés, dans la vie desquels une promesse sacramentaire (le mariage) n’a pas été tenue – quelles que soient les raisons ou motifs de cette rupture qui appartiennent à la conscience et/ou aux circonstances –, exerce une violence, prononce une punition, est tout simplement hors de propos.

Dans l’exhortation apostolique Familiaris consortio de novembre 1981, Jean-Paul II précisait : « En agissant ainsi, l’Église professe sa propre fidélité au Christ et à sa vérité ; et en même temps elle se penche avec un cœur maternel vers ses enfants, en particulier vers ceux qui, sans faute de leur part, ont été abandonnés par leur conjoint légitime. Et avec une ferme confiance, elle croit que même ceux qui se sont éloignés du commandement du Seigneur et continuent de vivre dans cet état pourront obtenir de Dieu la grâce de la conversion et du salut, s’ils persévèrent dans la prière, la pénitence et la charité. »

Ainsi, il est impératif de comprendre – la foi est aussi une intelligence – que la Sainte Eucharistie rassemble autour d’elle, englobe tous les fidèles qui participent à la liturgie, qui forment l’Église, Corps du Christ. Et cela, au-delà de l’acte individuel de la réception eucharistique. La communion des fidèles, mesure visible de la Communion des saints, est, dans son principe même, le contraire d’une exclusion. « Des fils innombrables lient tout être àJésus, (…) toute âme et tout corps au corps de Jésus, tout corps et toute âme à l’âme de Jésus… », écrivait Charles Péguy. Pour lui-même, comme en secret, conscient de la grâce surabondante qu’il recevait au cœur même de ses tourments personnels, il murmurait, au porche de l’Église :« Le corps du Christ est plus étendu qu’on ne pense. »

Réf. La communion des divorcés remariés, par Patrick Kéchichian

François, le pape actuel, a certes écrit dans une récente exhortation apostolique que « l’eucharistie n'est pas un prix destiné aux parfaits, mais un généreux remède et un aliment pour les faibles. Ces convictions ont aussi des conséquences pastorales que nous sommes appelés à considérer avec prudence et audace ».  Mais, de quelle prudence et de quelle audace parle-t-on ? Dans l’Eglise postconciliaire, il est en effet avéré qu'un très grand nombre communie sans trop examiner sa conscience ni guère manifester sa foi dans la présence réelle du Christ dans ce sacrement. On a en tout cas peine à croire qu’il y  existerait une nouvelle menace janséniste. Le danger serait plutôt celui du molinisme. JPSC 

Commentaires

  • Il y a 2000 ans, le Christ a fustigé la répudiation de la femme par l'homme. Il a considéré que cette loi du peuple juif était liée à la dureté du cœur de leurs dirigeants. Or, la répudiation (autre nom du divorce) est en effet quelque chose de très dur, non seulement pour le conjoint répudié, mais aussi pour leurs enfants, ainsi que pour leurs deux familles et toutes leurs relations sociales. Ce ne sont pas que deux individus qui divorcent, ce sont des pans entiers de la société qui sont entraînés à la destruction par ce divorce. C'est donc objectivement un fléau humain, familial et social.
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    Le problème du divorce aujourd'hui est donc bien qu'il ait été rétabli de manière encore plus brutale qu'il y a 2000 ans. C'est aussi bien l'homme que la femme qui peut répudier l'autre, et ce pour les motifs les plus futiles, arbitrairement, selon son bon plaisir pourrait-on dire.
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    Le fléau du divorce trouve donc là son origine, dans la dureté de cœur des autorités civiles actuelles. Or, la multiplication insensée des divorces génère des drames terribles multiples : dépressions, suicides, meurtres, alcoolisme, drogue, échecs scolaires ou professionnels, précarité, sans abris, ...
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    Il faut donc suivre Jésus et accuser plutôt les autorités civiles de tous ces drames qui détruisent les familles et la société. Et il faut se féliciter par contre que l'Église ne suive pas comme un petit mouton la dureté de cœur de ces autorités civiles, en banalisant à son tour le divorce, comme si ce n'était pas grave. L'Église reste la seule institution qui ose encore lutter contre ce fléau destructeur. Ne lui jetons donc pas la pierre et aidons-la dans ce combat.
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    En fait, pourquoi tous ceux qui accusent l'Église ne disent-ils pas un mot de la dureté de cœur et de l'inconscience des autorités civiles, qui facilitent de plus en plus les divorces, et donc tous les drames qui leur sont associés ? Ferment-ils leurs cœurs face aux drames terribles induits par les divorces ? Se résignent-ils à ce fléau moderne, mais qui ne fait finalement que reproduire de très anciennes pratiques humaines ?

  • Du point de vue catholique, du point de vue sociétal, du point de vue familial, le divorce est un fléau.
    D'un point de vue individuel, pour un conjoint injustement abandonné, il peut être aussi une injustice (publique ou intime mais) grave.

    Dès lors, ne peut-on imaginer une procédure qui, au cas par cas, reconnaisse cette injustice ? Et qui, par conséquent, puisse rendre au conjoint injustement lésé son accès à l'Eucharistie.

    On voit bien que cette procédure-là serait difficile à organiser. Et difficile à mettre en oeuvre. Mais, de mémoire, il me semble que le Pape Benoît XVI avait évoqué une piste de réflexion dans cette direction.

  • L’épiscopat allemand n’a pas attendu le prochain synode pour passer aux exercices pratiques sur la question de la communion aux divorcés remariés. C’est du moins ce que rapporte le site « pro liturgia ».

    Tout a commencé avec Mgr Robert Zollitsch, Archevêque de Fribourg-en-Brisgau, qui a décidé d’en finir avec la question des mariages/divorces/remariages des fidèles, en proposant à ces derniers de déterminer eux-mêmes s’ils pouvaient accéder à la communion eucharistique. En réponse, Mgr Zollistch a reçu de Mgr Müller, Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, un message indiquant que l'idée de « bénir » l’entrée en une union civile, non sacramentelle, avec chant d’entrée, lectures de la Sainte Ecriture et cierges, ne pouvait pas être acceptée. Mgr Zollitsch a décidé - décentralisation oblige - de ne pas tenir compte de la doctrine catholique qui lui était rappelée par le Siège apostolique.
    En cela, il a été suivi par Mgr Gerhard Fürst, Evêque de Stuttgart-Rottenburg, qui a annoncé que tout en maintenant le principe de l’indissolubilité du mariage, les catholiques divorcés/remariés pourront recevoir la communion. Et comme c’était prévisible, un autre Evêque a emboîté le pas des deux premiers. Et non des moindres, puisqu'il s’agit du Cardinal Reinhard Marx, Archevêque de Munich et membre du groupe de prélats choisi par le Pape François pour réformer la Curie. A Fribourg-en-Brisgau, le porte-parole de Mgr Zollitsch a déclaré : « Nous avons déjà nos propres directives, et le Pape a désormais clairement signalé que certaines choses peuvent être décidées localement. » Même son de cloche chez le porte-parole du diocèse de Rottenburg-Stuttgart qui considère que les positions des évêques allemands sont « conformes à l’esprit de l’enseignement du Pape ». Plusieurs autres évêques allemands semblent à présent suivre la route qu’on est en train de tracer pour aller vers une nouvelle conception du mariage.

    Prémices d’une joyeuse pagaille ?

  • Autoriser la communion aux divorcés remariés - sous une forme ou sous une autre, la forme "si la personne est subjectivement convaincue de la nullité" étant encore pire que les autres, puisque sapant en outre le principe d'objectivité du droit canonique - serait un double sacrilège : contre l'eucharistie, autorisant l'accès au Corps du Seigneur à des personnes probablement hors de l'état de grâce et objectivement à la vie publique incompatible avec cet accès, et contre le sacrement de mariage.

    Ce serait pastoralement catastrophique : que feront les équipes de préparation au mariage en parlant de fidélité ? Que signifie dès lors l'indissolubilité (indissolubilité sauf si on en a marre ?) ? Qu'est-ce que le fait d'autoriser le conjoint qui l'a quitté pour un autre à communier dit à celui qui est resté fidèle ? Que ce qu'il a vécu - d'après les dires de l'Église elle-même, une union d'une solidité telle qu'elle ne cède à rien en ce bas-monde et est la figure de l'Alliance de Dieu avec son peuple - n'était finalement que comédie ?

    J'ajoute que c'est une des raisons pour lesquelles donner une autorité doctrinale aux conférences épiscopales (au mépris de la constitution divine et des écrits de Jean-Paul II et de Benoît XVI sur le sujet) serait achever l'Église catholique.

  • J'encourage très fortement les quelques catholiques fidèles restant en Belgique à répondre au vrai-faux sondage ou questionnaire envoyé par le Vatican, en l'envoyant à la fois aux évêques de Belgique et au secrétariat du synode au Vatican, pour signifier leur attachement à la doctrine et à la pratique traditionnelle de l'Église relativement au mariage indissoluble, et pour alerter les autorités du grand danger de permettre les communions sacrilèges des divorcés-remariés.

    Si l'Église ne défend pas le mariage, personne ne le fera.

    J'ajoute qu'il est vraiment douteux d'invoquer, comme l'a fait Mgr Baldisseri, l'exemple orthodoxe. Le fait d'avoir "droit à trois essais" (c'est ainsi que les fidèles le présentent) a complètement dévalorisé le sacrement de mariage, son exigence et notamment aussi l'exigence de s'y préparer. Et je connais plusieurs cas de conversion au catholicisme dus notamment à la reconnaissance du plus grand sérieux dudit catholicisme sur cette question.

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