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Belgique : un tiers des demandes d'euthanasie pour souffrances psychiques aboutit

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De Christophe Herinckx sur info.catho.be :

En Belgique, un tiers des demandes d’euthanasie pour souffrance psychique aboutit

Sur 100 patients introduisant, en Belgique, une demande d’euthanasie pour souffrance psychique insurmontable, 35 sont effectivement euthanasiés.

D’après une étude belge, publiée dans le Journal du Médecin et relayée par l’agence Belga, les requêtes d’euthanasie fondées sur des souffrances psychiques inapaisables restent cependant minoritaires: 100 personnes auraient formulé une telle demande entre octobre 2007 et décembre 2011.

L’échantillon se composait de patients de 21 à 80 ans, pour un âge moyen de 47 ans, alors que la moyenne tourne autour des 60 ans pour l’ensemble des demandes d’euthanasie. Quant à la répartition selon le sexe, 77 demandes provenaient de femmes, ce qui « contraste très nettement avec la distribution 50-50 pour les demandes émanant de patients en phase terminale« , selon cette étude.

Nonante personnes présentaient des troubles psychiatriques déjà diagnostiqués, en particulier un état de dépression et/ou un trouble de personnalité.

Quarante-huit pour cent des demandes fondées sur des raisons psychiques étaient recevables mais 35 patients ont effectivement été euthanasiés au cours des quatre années étudiées. Deux personnes se sont suicidées avant les interventions médicales. Onze autres se sont finalement abstenues, dont deux ont retiré leur candidature.

La procédure est généralement décrite dans cette étude comme « un acte calme et digne« . Sur l’ensemble des 35 patients euthanasiés, 30 d’entre eux étaient entourés par leurs proches et 28 sont décédés à domicile.

Une situation interpellante

Les chiffres publiés par l’étude en question nous rappellent d’abord que la loi belge dépénalisant l’euthanasie, telle que votée en 2002, prévoit effectivement la possibilité d’accéder à des demandes d’euthanasie émanant de personnes vivant des souffrances psychiques qu’elles éprouvent comme insurmontables. Selon L’Institut Européen de Bioéthique (IEB), les travaux parlementaires préparatoires à cette loi contenaient une volonté expresse de ne pas accéder à des demandes émanant de tels patients, qui ne sont pas en fin de vie. Par la suite, la loi a néanmoins prévu d’ouvrir la voie à une possibilité d’euthanasie pour ce type de patients.

Toujours selon l’IEB, cet aspect de la loi est particulièrement contestable, car on décide de reconnaître aux personnes concernées la pleine possession de leur jugement et de leur libre arbitre. Alors que, par définition, l’état psychique du patient soigné pour des troubles relevant de la psychiatrie ne permet pas de prise de décision véritablement libre et autonome.

Ne peut-on dès lors pas parler d’une forme de renoncement à soigner les personnes qui vivent des souffrances psychiques intolérables? A quel moment peut-on dire que ce type de souffrance est insurmontable à moyen ou long terme ou, en d’autres termes, inguérissable? La possibilité d’une euthanasie effective pour ces patients, effectivement prévue par la loi belge, ne risque-t-elle pas de mettre un frein au progrès des soins psychologiques ou psychiatriques que l’on peut offrir aux pesonnes qui vivent de telles situations?

Commentaires

  • « un état de dépression et/ou un trouble de personnalité ».

    Je n'ai jamais vu, à ce jour, dans ma pratique et celle de confrères que je connais de dépression incurable, même chez des personnes ayant fait des tentatives de suicide. Mais j'ai rencontré des personnalités dépressives qui après être sortie d'un épisode aigu restaient fragiles et susceptibles de récidives. J'ai aussi connu des suicides « réussis » de personnes en cours de traitement, ce qui heureusement est vraiment fort rare.

    Cela ne me permet absolument pas de mettre en doute si peu que ce soit le diagnostic de confrères et de professeurs éminents, même si j'ai aussi connu des psychiatres signant n'importe quelle demande pour des raisons idéologiques.

    Par contre il est des troubles de la personnalité et des troubles du comportement sexuel plus difficiles à prendre en charge. Mais, comme toutes les pathologies psychiatriques, cela demande du temps, beaucoup de temps, des moyens et une équipe, et une volonté d'accompagnement bien ancrée dans le cœur. Car la psychiatrie est aussi une affaire de cœur, avant d'être une question de technique ou de thérapeutique.

    Mais jamais je ne puis considérer qu'accéder à une demande évidemment pathologique d'un patient soit une forme de traitement, ni sauter en parachute avec lui, ni l'accompagner à Moscou, ni avoir des relations sexuelles, ni le tuer. Soigner n'est pas tuer ; tuer n'est pas soigner.

    Lucas.

  • "une demande évidemment pathologique " cette affirmation me laisse perplexe

  • Merci pour ce témoignage Lucas.

  • Merci Gabriel de poser la question.

    On peut avoir lu tous les livres et passé d'innombrables examens, fonder son expérience sur la rencontre de nombreuses personnes dans de nombreuses situations, on peut utiliser des classifications « reconnues » et « admises », l'inclusion d'une personne dans tel ou tel groupe est, in fine, après un long cheminement rationnel, une question d'« intime conviction ». Il n'y a pas en médecine de certitude ou de choix qui ne puisse être remis en cause. La médecine reste un art.

    Mais, personnellement, je considère qu'il y a des limites « naturelles » ou « absolues » à ne pas franchir. Les relations sexuelles avec un patient en font partie. « Primum non nocere », ne pas nuire est un principe de base, tout n'est pas possible à n'importe quel prix. Et, pour moi, le respect de la vie de mon patient est un absolu.
    Mais je ne m'autorise jamais à condamner quelqu'un, fût-il le plus grand tueur en série, le plus pervers des psychopathes.
    Lucas.

  • Atteinte d'hep. C depuis 1978 ,l'hepatologue qui me suit avec dévouement et haute compétence ,réussit enfin, en nov. 2011, à me proposer un traitement efficace tout nouveau , quoique extrèment lourd d'effets secondaires ( nous sommes en 2011) . J'ai failli renoncer d'innombrables fois . En ce même nov 2011 je reçois, dans ma boite à lettres 29 pages sur " l'euthanasie selon les religions" . Brochure gratuite émanant de la ligue nl de patients atteints d'hep. C . ( sponsorisée par ? suivez mon regard )
    Depuis ( je résume )on constate un refus politique d'enrayer la maladie :on dispose de traitements efficaces à 99%, définitifs et sans effets secondaires mais il n'y a pas l'argent .
    Depuis cette gracieuse invitation à me faire euthanasier avant d'entreprendre ce traitement qui m'a définitivement guérie, je crois que l'euthanasie n'est pas seulement liée à notre culture de mort mais est aussi une affaire de gros sous . Comme Lucas , je ne condamne personne mais autant voir clair . D'ailleurs un parlementaire anglais s'est déjà trahi à ce sujet .

  • Merci Thérèse de votre témoignage.

    L' ADMD (et associations apparentées) ont un "recrutement" très actif dans les hôpitaux, visitant les personnes fragiles et proposant (quelque peu agressivement à mon avis) de mettre fin à leur fragilité.
    Raison de plus pour déclarer à l'avance dans le service communal adéquat ses intentions pour son propre traitement et de porter avec soi une carte de fin de vie comme celle que l'on peut demander à l' IEB (Institut Européen de Bioéthique).

  • ce petit témoignage personnel ne m'empêche pas d' éprouver une immense compassion vis à vis de mes frères d'infortune : les patients dépressifs . Chaque 20 min. , quelqu'un , en Belgique , tente de se suicider ( 4 désespérés , par jour, y parviennent ).
    Bientôt on devra se sentir coupable de ne pas aider les premiers à réussir cettee chose terrible, innomable . Moralement, ça me tue . Je dois m'accrocher à ma foi pour survivre.
    Pardonnez moi, je ne trouve pas les mots .....

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