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"La loi civile prime sur toute loi religieuse" : le débat sur la laïcité est relancé

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De la revue de presse du service interdiocésain :

Le Soir


p. 1: Les libéraux relancent le débat sur la laïcité 

C’est une petite phrase qui n’a l’air de rien, mais elle rouvre un débat volcanique dans le monde politique. Richard Miller, député fédéral réformateur, propose d’inscrire dans un préambule à la Constitution les mots suivants : « La loi civile prime sur toute loi religieuse. » Par là, et à la suite du chef de groupe VLD Patrick Dewael, il entend relancer le débat sur une laïcité à la belge. … Richard Miller s’explique. Avec cette formulation, il entend permettre à tous de comprendre « que nous évoluons dans un pays où la croyance religieuse ne dicte pas la loi, ceci avec tout le respect que j’ai pour les convictions et les engagements religieux » . Mais la proposition a-t-elle une chance d’aboutir ? Les socialistes sont favorables (les conclusions du Chantier des idées sont explicites) à l’introduction de la laïcité de l’Etat dans la Constitution. Les amarantes de Défi ont également par le passé donné leur aval. Les verts, eux, sont ouverts à la discussion mais craignent un feu de paille, qui ne réglera pas des problèmes plus profonds dans la société. Les centristes-humanistes, eux, se disent ouverts à une révision constitutionnelle sur ce thème. Evidemment, le CD&V est plus réticent, la N-VA faisant preuve de prudence. Les deux partis sont en effet proche du monde catholique au Nord.
 
p. 1 : Laïcité : il va falloir souder et pas diviser 

Edito de Béatrice Delvaux : « … sur le fond, on ne peut que saluer la volonté de Patrick Dewael et de Richard Miller de ressortir le dossier « laïcité » du frigo où il a été placé après les attentats de 2016. D’autres priorités plus directement sécuritaires s’étaient imposées mais, face aux polémiques sur le port de signes religieux dans les endroits publics et la montée des radicalismes, la nécessité de réaffirmer le principe de séparation entre les Eglises, les religions et l’Etat s’était imposée à tous les démocrates, inquiets de voir ces acquis des Lumières mis en cause par de nouveaux intégrismes et fanatismes. … Comment réaffirmer la laïcité de l’Etat et la primauté de la loi civile sur toute loi religieuse ? Le sujet, aujourd’hui sorti des radars politiques et médiatiques, a conservé la même urgence pour une société belge en demande de clarification et de réaffirmation des balises du vivre ensemble. Mais il est important qu’un large consensus politique couvre cette manière de réaffirmer un socle de valeurs communes. Il faut éviter que cette réaffirmation ne passe pour l’exercice d’une suprématie ou l’expression d’un rejet, mais soit vue comme une volonté d’inclusion démocratique. »
 
p. 2: « Une clarification nécessaire mais partielle » 

Vincent de Coorebyter (ULB) : « Personnellement, je trouve que la formulation qui avait été proposée en 2010 par le groupe de travail mis en place par le gouvernement fédéral était particulièrement fine. Il s’agissait d’un nouveau libellé pour l’article 21 de la Constitution : « Hormis les exceptions de conscience dont l’exercice est prévu par la loi, aucun prescrit convictionnel ne peut être invoqué pour se soustraire à une obligation légale. » Ce qui me paraît intéressant, c’est qu’on admet qu’il puisse y avoir des exceptions à l’application uniforme de la loi civile, mais ces exceptions sont elles-mêmes prévues par la loi civile – c’est ce qu’on appelle les « clauses de conscience » permettant, par exemple, à titre individuel, à un médecin de ne pas pratiquer une euthanasie ou un avortement. » … « Je suis effectivement surpris d’apprendre que le MR renoncerait à l’inscription dans la Constitution de ce principe d’impartialité – notion quand même extrêmement prudente : qui demanderait un État partial ? – pour se satisfaire simplement de cette nécessaire clarification autour des prescrits religieux et de leur contradiction éventuelle avec la loi civile. Avec cette proposition, on règle un type de question mais on n’éclaircit pas la philosophie générale des relations entre l’État et les convictions instituées et personnelles… »
 
p. 2 : Trois concepts et trois étages 

Laïcité : En groupe de travail, les parlementaires (de tous les partis) avaient débattu déjà du sujet. Patrick Dewael avait rédigé un rapport intermédiaire en juin 2016. On avait progressé. Mais l’affirmation du concept de « laïcité de l’Etat » ne faisait pas l’unanimité. A savoir, selon le Larousse : « Conception et organisation de la société fondée sur la séparation de l’Église et de l’État et qui exclut les Églises de l’exercice de tout pouvoir politique ou administratif, et, en particulier, de l’organisation de l’enseignement »… / Neutralité : Un étage plus bas, moins « militant », le concept de neutralité de l’Etat avait été accueilli plus favorablement, selon lequel l’Etat doit demeurer neutre par rapport aux religions pour assurer la liberté de religion et de conscience, également pour prévenir toute discrimination fondée sur la religion. / Impartialité : Plus consensuel, peut-être : le concept d’impartialité de l’Etat, un peu plus fourre-tout, moins crispant idéologiquement, avait semblé émerger à la fin. Sans accord, toutefois.

Commentaires

  • Le radicalisme laïciste semble ne pas avoir de limite. Il ne faut pas confondre le port de signes religieux (même dans les endroits publics) et radicalisme prétendument « religieux ». Ce serait un amalgame radical. L'absence de signe est un signe, un signe radical.

  • Qui délimitera l'extension, le champ d'application, des « clauses de conscience » ? Ces clauses de conscience expriment, à la manière d'Antigone, la supériorité et l'antériorité de la loi divine, ou naturelle sur toute loi positive. Mais le législateur n'a jamais été à une contradiction près.

  • La Loi positive exprime toujours une vision particulière de la société et de l'homme. Il est impossible qu'il en soit autrement. La « neutralité » n'existe pas, ce serait l'absence de loi.

  • Ainsi que l'exprime clairement Vincent Peillon, la laïcité est une religion. Elle a (et doit avoir) ses dogmes, ses rites, son clergé, ses fêtes.

  • Une religion qui ne se vit pas dans la vie quotidienne n'est rien. Toutes s’investissent plus ou moins dans les « œuvres charitables », dans l'attention à l'autre et l'assistance. Toutes s'investissent également peu ou prou dans « l'éducation », ne serait-ce que pour se transmettre. Toutes s'investissent également dans la structuration de la « société ». La Laïcité ne fait pas exception, mais peut être plus totalitaire que d'autres.

  • S'il s'agit de s'opposer au radicalisme de l'islam radical, la laïcité, si elle ne veut pas tomber dans le même radicalisme, ne peut offrir que la tolérance chrétienne : « aimez vos ennemis, priez pour ceux qui vous maltraitent », et « rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ». On ne combat pas une idéologie avec des kalachnikov. La guillotine, les stalag ou les goulag n'ont jamais rien résolu.

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