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Une blessure et un mépris de la foi

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Une chronique du Père Charles Delhez s.J. sur la Libre :

Le sentiment de ne plus exister

Le silence assourdissant à propos des cultes dans les mesures sanitaires récentes a été ressenti par les croyants comme une blessure et perçu comme un mépris de la foi.

Que la religion apparaisse dès le berceau de l’humanité, qu’elle soit un signe de l’hominisation du primate que nous sommes, voilà qui fait l’unanimité des historiens. Elle semble bien être une dimension anthropologique constitutive de notre humanité, même s’il y en a d’autres. Mais une tendance apparaît de plus en plus de nos jours, celle de la nier, d’en faire une étape dépassée de notre humanisation.

Aujourd’hui, il est de bon ton d’accuser les religions de tous les maux, et particulièrement celle de la majorité au moins relative des Belges, la religion catholique. Sans aucune contextualisation historique ni sens de la mesure et à coups de simplismes affligeants, l’Église est traînée devant le tribunal médiatique ou vilipendée dans la conversation des cafés du Commerce entre la troisième et la quatrième chope. Son héritage est présenté comme négatif et les pages noires sont rassemblées en un seul volume, comme si tous les crimes de l’humanité avaient été commandités par Dieu et perpétrés par ses adeptes. J’exagère, bien sûr, réagissant à une caricature par une autre. Mais tout n’est pas faux ! Il n’est pas juste cependant de réduire l’Église à ses abus sexuels - une horreur aux conséquences dramatiques pour les victimes -, comme si elle en avait le monopole, et de ne considérer que les graves erreurs de son histoire que sont, par exemple, l’Inquisition, les croisades et les guerres de religion, oubliant que ces trois faits relèvent tout autant de l’histoire politique que religieuse, les deux étant hélas trop mêlés à l’époque (et pourquoi n’accuser qu’un des deux partenaires ?).

Une juste autonomie

La religion fut hégémonique dans toutes les civilisations. C’est une étape de notre histoire. Elle était à dépasser, mais sans jeter pour autant le bébé avec l’eau du bain. Il fallait faire droit aux autres dimensions de notre humaine condition qui étaient sous la coupe des institutions religieuses et de leur hiérarchie. Ainsi les dimensions politiques, philosophiques, scientifiques, artistiques, éthiques. La modernité, c’est l’autonomisation des différentes sphères de l’activité humaine. La date symbolique en France pourrait être la loi de séparation de l’Église et de l’État, en 1905. En Belgique, la question avait été traitée dès la Constitution de 1831 en termes de liberté et d’égalité des cultes, État et religions se reconnaissant dans une indépendance réciproque.

De plus en plus, cependant, les croyants, surtout les pratiquants, ont le sentiment de ne plus exister aux yeux de leur propre pays. Le silence assourdissant à propos des cultes dans les mesures sanitaires récentes a été ressenti par eux comme une blessure et perçu, à tort ou à raison, comme un mépris de la foi. Une pétition qui circule dans les milieux chrétiens a déjà recueilli 12 000 signatures. Il n’aura fallu pas moins qu’un arrêt du Conseil d’État, suite à la demande de la communauté juive, pour remédier aux restrictions disproportionnées de l’exercice collectif du culte.

Une approche critique

Sur le plus long terme, la question récurrente des cours de religion en est un autre signe. Il y a une volonté manifeste d’en réduire l’espace sinon de les supprimer. Or, la religion est un fait social, quelle que soit la position de chacun à son propos. Le fait religieux, sans confusion avec le prosélytisme, mérite d’être enseigné comme tout autre fait historique, scientifique ou littéraire. On sait la place qu’il a prise dans l’histoire et qu’il occupe dans l’actualité. L’école devrait en permettre une connaissance sérieuse, accompagner une distance critique et préparer à un dialogue vrai. Cela ouvrirait aussi les jeunes à la dimension spirituelle qui, elle, est une caractéristique première de notre humanité. Les religions en ont été et en sont encore un véhicule important de transmission. L’ignorer risque bien de faire le lit des fondamentalismes et des extrémismes et de nous enfoncer dans le matérialisme consumériste et l’individualisme tant décriés, et à raison.

Lire aussi : Pourquoi nos politiques gomment-ils la dimension spirituelle des citoyens qu’ils représentent ?

Commentaires

  • Disons le : Ce qui est le plus stupéfiant dans cette histoire, c'est l'absence de presque tous nos évêques. D'après ce qu'on m'a dit, Monseigneur Johan Bonny trouve très bien cette jauge à 15 personnes dans sa cathédrale.

    Que s'est-il passé ? Les sacrements dont ils sont les gardiens pour la croissance spirituelle du troupeau dont ils ont la charge ne les intéressent-ils plus ?

    Pourquoi ne réagissent-ils pas non plus quand les hôpitaux psychiatriques catholiques décident, contre l'avis du pape François, d'introduire l'euthanasie dans leurs pratiques ?

  • Merci au R.P. Charles Delhez pour sa très pertinente analyse et à La Libre Belgique pour l'avoir accueillie dans ses colonnes. Reste le silence assourdissant de nos évêques. dont on attendrait qu'ils protestent avec véhémence et une sainte colère contre des concessions ridicules et humiliantes. Mutien-Omer Houziaux.

  • Le silence des Evêques est impressionnant. Je dirais même qu'il suscite la colère. Ils sont nos pasteurs. Quel genre de pasteurs sont-ils, à ne plus nourrir leurs brebis??? L'Eucharistie, ils connaissent?? Un jour Jesus leur dira: vous ne me connaissiez pas, Moi non plus je ne vous connais pas! C'est absolument surprenant.
    Comme dit un de vos intervenants au sujet de l'euthanasie dans certaines institutions 'catholiques', il faudrait aussi que nos Evêques disent quelque chose au sujet des personnes âgées abandonnées dans les homes. Amnesty International a fait un rapport à ce sujet. Et nos Evêques? Les personnes qui souffrent ne les intéressent pas??

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