France : une mobilisation massive pour défendre la famille (Radio Vatican)
Entretien - En France, la « Manif pour tous » a rassemblé des dizaines de milliers de manifestants contre des mesures gouvernementales jugées « familiphobes ». A Paris, ils étaient 80 000 selon la police, 500 000 selon les organisateurs. A Lyon, entre 20 et 40 000 personnes à défiler.
Dans une atmosphère sereine, une mobilisation massive de personnes de tous les âges, de familles catholiques ou musulmanes. Que pouvait-on lire sur leurs banderoles ? « Famille : éducation, solidarité, dignité », « Stop à la familiphobie », « un père un mère, c’est élémentaire ». Certains ont scandé : « Hollande, ta loi, on n’en veut pas ! », en référence au projet de loi Famille qui devrait être présentée en avril.
A plusieurs reprises ces derniers jours, la ministre française de la Famille a assuré que ce texte ne prévoit ni l'ouverture de la procréation médicalement assistée, ni la gestation pour autrui, mais les manifestants craignent des amendements en ce sens.
Tugdual Derville est le porte-parole de la « Manif pour tous » :
« Nous manifestons à Paris et à Lyon en foule immense aujourd’hui pour dire au gouvernement que nous ne pouvons pas passer sous silence la façon dont Madame Bertinotti laisse planer le doute sur la PMA pour deux femmes. Elle n’a pas voulu répondre lorsque nous lui avons demandé si un amendement serait voté pour l’accès pour deux femmes à la procréation médicalement assistée. Elle n'a pas voulu répondre sur ce que le gouvernement ferait. Et donc, plane sur les enfants à venir la menace d’être privés délibérément et tout à fait légalement en France de toute origine paternelle, de toute filiation paternelle. Et vous le savez aussi, par ricochet et par logique, cela aboutirait à la gestation pour autrui privant cette fois des êtres humains de filiation maternelle.
Et puis deuxièmement, il y a eu ce scandale cette semaine du genre à l’école. On découvre que dans toutes les académies sont expérimentés sur les enfants, sans l’avis des parents et sous prétexte d’égalité, de liberté, de fraternité, qui sont de très beaux mots (…) on introduit dans l’esprit des tout jeunes enfants un trouble sur leur identité sexuelle, en laissant croire que hommes et femmes sont interchangeables. Et là nous demandons au gouvernement de suspendre immédiatement ces expérimentations et, au lieu d’être dans un grand déni assourdissant, de faire la vérité notamment par une commission d’enquête sur la façon dont certains idéologues tentent de modifier la culture, la civilisation par le biais des enfants, sans l’aval des parents.
Le ministre français de l’Intérieur a mis en garde les manifestants contre des débordements. Comment avez-vous accueilli ses propos et dans quelle ambiance se déroule le cortège lyonnais dans lequel vous vous trouvez ?
Manuel Valls n’en est pas à son premier coup. On connait la chanson. C’est une mise en garde qu’il a faite à chaque fois, notamment en tentant de dissuader les familles de manifester alors que justement nous avons prouvé depuis plus d’un an que notre mouvement social - le plus grand que la France ait connu depuis plus de 20 ans- est des plus pacifiques.
Nous savons par ailleurs que la « Manif pour tous » et, plus globalement, le courant de pensée qui vise à restaurer une anthropologie où homme et femme sont vus comme complémentaires et non interchangeables, doit durer et dépasser les manifestations, qui sont indispensables, et doit construire une autre culture et donc ça prendra des années, mais c’est ça qui moi me réjouit de voir des dizaines de milliers de jeunes qui désormais s’engagent pour le bien commun et sans céder aux intimidations du pouvoir en place.
On qualifie néanmoins certains manifestants de réactionnaires. On lie la manifestation de ce dimanche avec celle de la semaine dernières, jour de colère. Comment prenez-vous cela ?
De manière très détendue. Je crois que nous avons démontré que nous avions comme souci le bien-être des enfants, et non pas notre intérêt personnel et c’est cela qui fait peut-être que le pouvoir en place, ou en tout cas un certain nombre de politiques, n’ont pas le logiciel pour nous comprendre. Ils voient tout en rapport de force. Ils voient même la société en un grand conflit entre deux classes, les hommes et les femmes, pour aboutir à ce que Didier Eribon appelle de ses vœux « un genre universel ». Donc, ils ont un système de pensée qui est fait sur la lutte et la fracture de la société et nous, nous avons simplement un témoignage à donner qui est que, le plus vulnérable et le plus faible doit être au cœur de la société comme protégé dans ses droits fondamentaux, à commencer par celui de ne pas être privé de l’altérité sexuelle entre un homme et une femme dans son engendrement. Et cela, c’est paisible. C’est même l’écosystème de base qu’est la famille. Il doit être protégé de tous ceux qui veulent le dénaturer, qui veulent l’abimer. C’est un langage de bon sens que les Français comprennent.
Donc en tout cas vous n’avez pas peur que le rapport de force qui peut s’être déjà engagé avec le gouvernement ne radicalise certains catholiques en France ?
En tous cas nous avons continué de prôner cette non-violence et cette ténacité paisible. C’est essentiel. Alors c’est vrai que lorsqu’il y a des provocations, il y a toujours le risque que certains y cèdent, mais ce serait de toute façon, hors du champs de nos manifestations. Et c’est étonnant d’ailleurs de voir le décalage entre les messages d’alerte du ministre de l’Intérieur, qui joue au pompier pyromane, et la réalité de nos marches qui sont paisibles et porteuses d’une grande espérance pour notre pays.
Lors de différents rassemblements, aucun débordement n’a été constaté. 2 500 membres de forces de l’ordre avaient été déployés. Ce samedi, le ministre de l'Intérieur avait mis en garde les manifestants : « Croyez-moi, avait assuré Manuel Valls, le gouvernement, l'Etat, les forces de police et la justice seront d'une très grande sévérité, face à tous ceux qui s'en prennent à nos institutions et nos valeurs ».