Sur le thème de l’existence de Dieu, deux scientifiques Olivier Bonassiés et Michel-Yves Bolloré, ont publié voici peu un best-seller : « Dieu, la science, les preuves », qui connait un franc succès de librairie, dont nous avons parlé ici : L’existence de Dieu prouvée par la science ?
Coïncidence : sur un tout autre registre, un dominicain de la Province de Toulouse , Thierry-Dominique Humbrecht, docteur en philosophie et en théologie, professeur de philosophie à l’Institut Catholique de Toulouse, vient de publier une étude monumentale « Thomas d’Aquin, Dieu et la métaphysique » (1) qu’il relate dans une interview accordée au périodique "La Nef." (note JPSC) :
« La Nef – Vous venez de faire paraître une monumentale étude : Thomas d’Aquin, Dieu et la métaphysique.
T.-D. Humbrecht – Aïe, aïe, la frontière est mince entre un monument et ce qui n’est en effet que monumental… Ce livre affiche, selon un célèbre site de vente en ligne, 1,57 kg… Au poids, il est destiné à peser, mais pour le reste c’est autre chose. J’ai déjà reçu à ce sujet deux avis divergents : 1/ quelle horreur, il ne faut pas écrire de livres comme ça ! 2/ au contraire, le sujet l’imposait, y compris pour les débats actuels sur le statut de la métaphysique…
Tentons de croire que ce match nul permet d’avancer sans trop se troubler.
Pourquoi écrire un si gros livre de 1432 pages ?
On peut visiter le Louvre en une heure ou bien en une semaine, et Thomas en un jour ou bien en une vie. Le résultat est à la hauteur : l’imprégnation n’est pas la même.
Oh, si vous y tenez, tout peut être raconté en trois lignes : la métaphysique de Thomas d’Aquin entend se développer de façon autonome par rapport à la théologie, mais pas de façon indépendante. Il y a des interactions, et ce sont les interactions qui sont passionnantes. Elles respectent les différences de méthode, tout en les franchissant parfois aussi.
J’en suis arrivé à constater que Thomas a différentes façons de faire de la métaphysique, en philosophie et aussi en théologie, jusqu’à cette expérimentation à nulle autre pareille qu’est la Somme contre les Gentils, qui entend manifester « la vérité de la foi catholique et réfuter les erreurs contraires », et cela avec des raisons : un luxe de raisons vraies, contre les raisons fausses des philosophes païens ou bien des hérétiques, surtout ceux des temps passés. Ni tout à fait théologie, ni pure philosophie : du jamais vu.
La métaphysique de saint Thomas n’est-elle pas déjà archiconnue ?
Bien sûr que si, et il n’y a pas de manuscrit retrouvé, comme parfois pour d’autres Médiévaux, mais il faut le lire avec fraîcheur. Bien des années passées dans les textes m’ont rendu hypersensible à sa façon de dire les choses, et donc aussi aux présentations courantes qui en sont faites, parfois pertinentes, souvent plaquées, parce que paradoxalement modernes.