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  • Homélie pour la messe en mémoire du pape émérite Benoit XVI: par Mgr Jean-Pierre Delville, évêque de Liège

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    Cathédrale de Liège, ce mercredi 5 janvier 2023 :

     

    « Chers Frères et Sœurs,

    La foi à partir de la grâce

    Faire mémoire de notre pape émérite Benoit XVI, c’est mettre en relief la foi dans le Christ telle qu’il l’a vécue et telle qu’il l’a exposée. Le pape Benoit XVI était animé d’une foi intense. Il était très conscient de la grâce, c’est-à-dire le bienfait, que Dieu nous donne par notre foi. La grâce de Dieu précède notre foi, un peu comme l’amour des parents précède la confiance des enfants. Mais la confiance des enfants leur fait découvrir petit à petit l’amour venant des parents. De même l’être humain découvre petit à petit l’amour venant de Dieu. Comme l’a dit saint Paul aux Romains : « Notre Seigneur Jésus Christ nous a donné, par la foi, accès à cette grâce dans laquelle nous sommes établis » (Rm 5,1-5). Cette grâce, ajoute l’apôtre, c’est que « nous vivons en paix avec Dieu », en cette vie, et que dans la vie future, nous avons « l’espérance d’avoir part à la gloire de Dieu ». Ainsi le pape Benoit a vécu, dans sa vie terrestre, la grâce d’être en paix avec Dieu, et, a vécu « l’espérance d’avoir part à la gloire de Dieu » pour la vie éternelle.

    L’amour, personnel et social

    Dans son encyclique Deus caritas est (Dieu est amour) (2005), le pape Benoit souligne que l’origine de l’amour est en Dieu. La réponse à cet amour divin, c’est la foi de l’homme envers Dieu et son amour pour Dieu et le prochain. L’amour humain, ajoute le pape, est à la fois corporel et spirituel, il est éros et agapè. Dans une deuxième encyclique, Caritas in veritate (La charité dans la vérité) le pape Benoit synthétise, en 2009, la doctrine sociale de l’Église. Il réagit par rapport aux défis nouveaux : la crise financière de 2008 et l’émergence des défis écologiques. Il établit la relation entre l’amour comme engagement personnel du chrétien et la justice sociale, comme engagement communautaire et politique.

    La communauté, minorité créative

    Pour vivre cet amour, il faut être soutenu par une communauté, par l’Église. C’est le message même de Jésus sur la croix, comme nous le dit le quatrième évangile : « Jésus, voyant sa mère, et près d’elle le disciple bien aimé, dit à sa mère : Femme, voici ton fils. Puis il dit au disciple : Voici ta mère » (Jn 19,26). Avant de mourir, Jésus crée une nouvelle famille, avec Marie pour mère et le disciple bien aimé, comme fils de Marie. Ce disciple est l’image de tous les disciples, qui forment ensemble la nouvelle famille des enfants de Dieu. Cette Église, le pape Benoit voulait qu’elle soit formée de communautés rayonnantes, un peu comme un monastère, qui est une communauté qui rayonne dans la région où il se trouve. C’est pour cela que celui qui s’appelait Joseph Ratzinger a choisi comme pape le nom de Benoit, c’est-à-dire de saint Benoit, dont la règle monastique est à la base de toutes les communautés monastiques d’Occident. Un monastère est une communauté fervente, qui rayonne sur monde parfois indifférent. C’est pourquoi le pape Benoit a voulu appuyer les communautés nouvelles dans l’Église. Il croyait dans les minorités créatives.

    La tradition contre la banalité

    C’est pour cela aussi qu’il a favorisé les communautés qui célèbrent la messe en latin dans l’ancien rite romain, parce qu’elles forment des foyers de foi, qui rayonnent en valorisant le patrimoine spirituel, musical et culturel de la liturgie. C’est l’objet de la lettre apostolique Summorum pontificum de 2007. Contre la banalité, le pape Benoit veut susciter une opposition, une alternative. Le courage de la vérité est sa force : pour lui, il peut arriver que l’Église soit moderne en étant antimoderne, c’est-à-dire positionnée contre les dérives de la modernité. Dans ce souci de la tradition, il a dédié de nombreuses catéchèses aux saints de l’Église catholique, en montrant leur actualité. À Liège, on connaît sa catéchèse sur sainte Julienne de Cornillon, qui valorise l’apport de cette Liégeoise du 13e siècle à la vie de l’Église et au sens de l’eucharistie ; c’est la catéchèse la plus complète faite à ce sujet par un pape.

    Les foyers d’amour

    Benoit perçoit les communautés chrétiennes comme des foyers d’amour concret rayonnant sur le monde. En se rendant au restaurant social de la Communauté S. Egidio à Rome en 2009, il a pris le repas avec les pauvres ; à table, il observait  : « Ici, celui qui aide et qui aime son prochain est confondu avec celui est aidé ». En visitant une maison d’accueil pour personnes âgées en 2012, il disait : « Chers Amis, nous faisons l’expérience du besoin quand nous sommes âgés. C’est une grâce que d’être soutenus et aidés. Ici ceux qui aident et ceux qui sont aidés forment une même famille ». Et il ajoutait : « La prière des personnes âgées soutient le monde ». Cette prière, il l’a pratiquée comme pape et comme personne âgée.

    Le pasteur fidèle

    Chaque chrétien, dans sa vie de foi personnelle, est aussi interpellé par le ministère du pape. C’est une richesse qui se vit dans l’altérité et qui fait grandir chacun. Comme l’écrivait le pape François dans Evangelii gaudium, les pasteurs doivent à la fois précéder et suivre leur troupeau, présider et accompagner. Ils doivent guider leur peuple, mais aussi sentir l’odeur du troupeau. Il faut une communion avec le pape, quel qu’il soit, car il exerce un ministère d’unité, pour les chrétiens et même pour tous les peuples. Benoit XVI, comme pape fut un grand croyant, qui a fait de l’amitié avec Jésus, le cœur de sa vie. Son pontificat fut court, ce fut la papauté d’une saison. Mais sa lignée était longue : en s’appelant Benoit, il s’est aussi appelé « XVI », c’est-à-dire avec quinze prédécesseurs du même nom. Il donnait ainsi automatiquement à son ministère une perspective de continuité et de fidélité. Il n’a pas cherché la renommée, mais il a voulu intensifier la foi sur terre. Je ne l’ai pas connu personnellement, quoique ma nomination comme évêque ait été préparée sous son pontificat. Mais mon prédécesseur Mgr Aloys Jousten le connaissait bien, l’appréciait beaucoup et aimait parler allemand avec lui ; dommage qu’il ne soit plus là pour nous raconter cela.

    Que le nom de Benoit XVI reste dans les mémoires comme modèle de croyant, flamme d’amour, cœur de l’Église, courage de la vérité, souci des pauvres et pasteur fidèle, synonyme de gratitude et de bénédiction ! »

    Source: secrétariat de Mgr l'évêque de Liège. Cette homélie sera publiée dans le prochain journal diocésain "Dimanche".

  • Ratzinger, le pape qui a mis en garde contre l'extinction du christianisme

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    De Giovani Maria Vian sur El País via Il Sismografo :

    Ratzinger, le pape qui a mis en garde contre l'extinction du christianisme

    Critique envers l'institution à laquelle il appartient, Benoît XVI a été lucide en prévoyant un avenir minoritaire pour le catholicisme dans un monde occidental où la foi s'éteint. Il a laissé des œuvres importantes, dont la trilogie sur "Jésus de Nazareth", et est resté ouvert, bien qu'il ait été qualifié de traître à Vatican II, puis de grand inquisiteur. En 1999, j'ai rencontré le cardinal Ratzinger pour la première fois à l'occasion du lancement d'une revue sur l'histoire des années saintes que j'avais coordonnée. Je n'ai pas été surpris par la gentillesse et la simplicité avec lesquelles il a accepté de la présenter, car ces caractéristiques lui étaient familières. Nombreux étaient ceux qui, au Vatican, avaient l'habitude de le voir, vêtu comme un simple prêtre avec son béret noir, traverser rapidement la place Saint-Pierre pour se rendre au travail, saluant ceux qui le reconnaissaient d'un léger sourire. À d'autres moments, le cardinal, qui était devenu très romain, s'arrêtait pour regarder d'un air amusé les chats qu'il rencontrait lors de ses promenades autour du Vatican.

    Cependant, lors de cette première rencontre, j'ai été frappé par le fait que le cardinal était resté un professeur, habitué à s'exprimer sans filtre, clairement, animé par la curiosité, comme tout véritable intellectuel. Son langage n'avait rien de clérical, et encore moins de curial, alors qu'il était à la curie depuis près de 20 ans, depuis que Jean-Paul II l'a appelé après qu'il ait survécu à la tentative d'assassinat et qu'il l'a nommé, fin 1981, préfet de l'ancien Saint-Office, c'est-à-dire gardien de la foi catholique. Le théologien bavarois est ainsi devenu le principal conseiller théologique du pontife slave et, bien plus tard, son successeur, lorsqu'en 2005, en moins d'une journée, les cardinaux réunis en conclave ont élu un Allemand pour succéder au pape polonais.

    Ainsi se terminent les suites de la Seconde Guerre mondiale, déclenchée par l'agression de l'Allemagne nazie contre la Pologne (et deux semaines plus tard contre l'Union soviétique). À l'âge de 16 ans, Ratzinger, né dans une modeste famille catholique totalement étrangère au nazisme, a également participé aux deux dernières années de la guerre. Séminariste, il est contraint de servir comme auxiliaire anti-aérien à partir de 1943 et est ensuite envoyé dans un camp de travail. Engagé dans l'infanterie, il déserte et est arrêté par les Américains. Il réagit à son emprisonnement comme un étudiant modèle, composant des vers grecs au crayon dans un cahier. Et c'est au crayon qu'il a beaucoup écrit tout au long de sa vie, dans une écriture minuscule pleine d'abréviations que seules sa sœur Maria et, plus tard, sa secrétaire, Birgit Wansing, pouvaient déchiffrer et transcrire.

    Il a laissé derrière lui des œuvres importantes, parmi lesquelles la trilogie sur Jésus de Nazareth (2007-2012), écrites alors qu'il était déjà pape, mais qu'il considérait comme le fruit de recherches personnelles et donc ouvertes à la critique.

    L'homme que j'ai connu était doux mais direct, habitué à aller à l'essentiel et à toujours parler et écrire clairement, comme le confirme son testament, publié le soir même de sa mort, à la fin de l'année. Un texte qui rappelle les méditations de Marc-Aurèle, lorsque l'empereur philosophe, au début du célèbre livre, remercie ses parents, mais aussi un autre testament papal extraordinaire, celui de Paul VI. Et c'est Montini lui-même, le pape du Concile, qui, un an avant sa mort en 1977, a changé la vie du théologien de 50 ans en le nommant archevêque de Munich et en le faisant cardinal. Ratzinger était déjà célèbre depuis l'époque du Concile Vatican II (1962-1965), où il avait participé en tant que conseiller théologique du vieux cardinal Frings, archevêque de Cologne, l'un des principaux représentants de la formation réformiste et anti-curiale.

    Ratzinger est toujours resté très ouvert, bien qu'il ait été qualifié de traître à Vatican II et plus tard de grand inquisiteur. Il avait une conception radicale de l'Église, alourdie, selon lui, par trop d'appareils et par la "saleté" des abus, qu'il a dénoncés le Vendredi saint 2005, peu avant d'être élu pape. Critique à l'égard de l'institution à laquelle il appartenait, ce théologien doux et inébranlable était lucide en prévoyant un avenir minoritaire pour le catholicisme dans un monde occidental où la foi s'éteint. Fin connaisseur de la tradition chrétienne, Ratzinger l'a toujours considérée comme une réalité en mouvement et ouverte sur l'avenir, et non comme quelque chose d'immobile.

    En 2012, il m'a permis de présenter en avant-première dans l'Osservatore Romano la préface de ses écrits conciliaires, publiée quelques mois plus tard dans ses œuvres complètes. Dans ce texte, le pape décrit un christianisme déjà fatigué, mais que le concile Vatican II, qu'il n'a jamais renié en tant que développement de la tradition, a cherché à revitaliser par sa "mise à jour".

    La gouvernance n'a jamais été le point fort de Ratzinger, et il s'est trop appuyé sur certains collaborateurs qui ne l'ont pas aidé comme ils auraient dû. En revanche, Benoît XVI a été très décisif et efficace dans la gestion du scandale des abus, notamment dans le cas du fondateur criminel des Légionnaires du Christ et en Irlande. Il a assumé des fautes qui n'étaient pas les siennes et a demandé le pardon en tant que chef de l'Église, même après sa démission historique de la papauté.

    *** Giovanni Maria Vian est un expert en histoire de l'Église et ancien rédacteur en chef du quotidien L'Osservatore Romano.

  • Mgr Gänswein : "Je crois que Traditionis Custodes a brisé le cœur de Benoît XVI"

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    D'Enrico Roccagiachini sur le site "Messa in latino" :

    Mgr Gänswein : "Je crois que Traditionis Custodes a brisé le cœur de Benoît XVI"

    Les déclarations de Mgr Georg Gänswein, dernier secrétaire particulier de Benoît XVI, rendues publiques ce matin, sur la réaction de Benoît XVI au Motu Proprio Traditionis Custodes, par lequel son successeur a tenté de contrecarrer la grande libéralisation de la liturgie traditionnelle opérée par le Motu Proprio Summorum Pontificum (voir aussi ici), font le tour du web.

    Les paroles de l'archevêque Gänswein sont tellement frappantes et dérangeantes que nous nous sentons presque coupables de leur donner la place nécessaire et due en ces moments de deuil. Mais, en même temps, nous estimons qu'il est de notre devoir de rendre justice, dès ces premières heures, à la mémoire de Benoît XVI, et de reconnaître la souffrance qu'il a dû affronter face à la tentative systématique de démanteler les actes les plus importants et les plus féconds de son difficile pontificat. Une tentative que la Providence n'a pas permis de mener à bien, comme le montre le grand élan d'affection et de dévotion dont il fait l'objet en ces heures mêmes.

    Pour en revenir à Mgr Gänswein, il a parlé de Traditionis Custodes dans l'interview qu'il a accordée - probablement avant la mort de Benoît XVI - à Guido Horst, rédacteur en chef de l'hebdomadaire catholique allemand Die Tagespost, qui a été publiée aujourd'hui.

    Voici l'extrait qui nous intéresse ; nous vous en proposons ci-dessous notre traduction (artisanale) :

    "Guido Horst : La levée par le pape Benoît des restrictions sur la célébration de la forme extraordinaire du rite romain selon le missel de 1962 n'a pas duré comme il l'entendait : en tant que pape émérite, il a assisté à la promulgation du Motu Proprio Traditionis Custodes du pape François. A-t-il été déçu ?

    Mgr Gänswein : Cela l'a beaucoup affecté. Je pense que la lecture du nouveau Motu Proprio a brisé le cœur du pape Benoît, car son intention était d'apporter une paix intérieure, une paix liturgique, à ceux qui avaient simplement trouvé un foyer dans l'ancienne messe, pour les éloigner de Lefebvre. Et si l'on pense au nombre de siècles pendant lesquels l'ancienne messe a été une source de vie spirituelle et de nourriture pour de nombreuses personnes, y compris de nombreux saints, il est impossible d'imaginer qu'elle n'a plus rien à offrir. Et n'oublions pas que de nombreux jeunes qui sont nés après Vatican II et qui ne comprennent pas pleinement tout le drame du Concile - que ces jeunes, même s'ils connaissent la nouvelle Messe, ont trouvé un foyer spirituel, un trésor spirituel même dans l'ancienne Messe. Pour enlever ce trésor aux gens.... et bien, je ne peux pas dire que je me sente à l'aise avec ça."

    Il s'agit d'une affirmation totalement fiable, non seulement en raison de l'autorité et de la certitude de la source, mais aussi parce qu'elle confirme - en ajoutant la triste référence à Traditionis Custodes - ce que l'on sait déjà depuis 2016, depuis la célèbre réponse à Peter Seewald dans Ultime conversazioni (Milan, Garzanti, 2016, esp. pp. 189-190) :

    Peter Seewald : La réhabilitation de l'ancienne messe est souvent interprétée comme une concession à la fraternité sacerdotale de Saint Pie X.

    Benoît XVI : C'est absolument faux ! Pour moi, il était important que l'Église préserve la continuité interne avec son passé. Que ce qui était auparavant sacré ne devienne pas d'un moment à l'autre quelque chose de mauvais. Le rite doit évoluer. C'est pourquoi la réforme a été annoncée. Mais l'identité ne doit pas être brisée. La Fraternité sacerdotale Saint-Pie X est fondée sur le sentiment que l'Église s'est reniée elle-même. Cela ne doit pas se produire. Mon intention, cependant, comme je l'ai dit, n'était pas tactique : je me souciais de la chose elle-même. Bien sûr, il est également important que le pape, lorsqu'il voit un schisme se profiler, soit obligé de faire tout son possible pour l'empêcher, y compris en essayant de ramener ces personnes à l'unité de l'Église.

    Ainsi, la référence au lefebvrisme est également bien comprise : le souci qu'une juste exigence - faire en sorte que l'Église n'ait jamais à se renier - ne soit pas satisfaite en s'éloignant d'une certaine manière de l'Église elle-même, où, comme l'a enseigné Benoît XVI en une autre occasion, personne n'est de trop. Et cela se fait en veillant à ce que l'identité ne se brise pas, à ce que ce qui était autrefois sacré ne devienne pas faux d'un moment à l'autre : un objectif important en soi, même en dehors du devoir incontournable d'un pape de faire ce qu'il peut pour prévenir un schisme potentiel.

    À la lumière de tout cela, il est facile de comprendre comment le caractère intrinsèquement diviseur et pourri de Traditionis Custodes et, surtout, sa portée idéologiquement anti-traditionnelle, a vraiment brisé le cœur de Benoît XVI. Et elle brise aussi la nôtre, si l'on considère avec quelle et combien d'amertume il a dû vivre les dernières saisons de sa vie terrestre, même s'il savait et voulait offrir efficacement ses souffrances pour que l'Église puisse bientôt sortir, triomphante, de la crise qui la frappe. C'est aussi pour ces raisons que ce que nous avons appris aujourd'hui de l'archevêque Gänswein accroît encore notre gratitude envers le pape émérite.

  • Le pape Benoît XVI bientôt promu "docteur de l'Eglise" ?

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    De George Weigel sur First Things :

    LETTRES DE ROME : #1

    À L'OCCASION DU DÉCÈS DE JOSEPH RATZINGER, PAPE ÉMÉRITE BENOÎT XVI

    3 janvier 2023

    Dans les jours qui ont suivi sa mort le 31 décembre, plusieurs commentateurs ont exprimé l'espoir que Joseph Ratzinger, devenu le pape Benoît XVI puis le pape émérite, soit un jour nommé docteur de l'Église. À la lumière de ces espoirs, j'ai pensé qu'il serait intéressant de revenir sur une conversation que j'ai eue avec le cardinal Ratzinger, alors préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, lorsque je préparais Témoin de l'espérance, le premier volume de ma biographie en deux volumes du pape Jean-Paul II.

    C'était le 20 septembre 1997 et nous avons parlé, comme nous le faisions habituellement, dans le bureau du cardinal au Palazzo Sant'Ufficio. Comme toujours, le cardinal était vêtu simplement d'une soutane noire de maison, sans croix pectorale. Après avoir discuté de plusieurs autres sujets, je l'ai interrogé sur la récente décision de Jean-Paul II de nommer sainte Thérèse de Lisieux, la Petite Fleur, docteur de l'Église, après avoir reçu une pétition en ce sens de la part (si ma mémoire est bonne) de plus de deux mille évêques, dans le cadre d'une campagne menée par un évêque auxiliaire retraité de New York, Patrick Ahern. Cette décision avait suscité une certaine controverse, car ce titre rare était généralement attribué à d'éminents théologiens.

    Lorsque j'ai demandé au cardinal Ratzinger, à brûle-pourpoint, "Pourquoi Thérèse de Lisieux est-elle docteur de l'Église ?", le cardinal a ri (ce qu'il faisait volontiers, malgré les caricatures de sa personnalité) et, s'abstenant de tout commentaire sur la franchise, voire l'impertinence, de ma question, il a commencé à parler - par paragraphes complets, comme il en avait l'habitude. Ce qui suit est une transcription directe de sa réponse, qui, je pense, nous éclaire sur sa propre conception de la sainteté et ses nombreuses expressions :

    Nous avons eu des formes distinctes de docteurs de l'Église, même avant Antoine de Padoue. Nous avons d'une part les grands docteurs scolastiques, Bonaventure et Thomas d'Aquin, qui étaient des professeurs et des académiciens et de grands docteurs au sens scientifique ; à l'époque patristique, nous avions de grands prédicateurs qui développaient la doctrine non pas dans la discussion théologique mais dans la prédication, dans les homélies ; nous avons aussi Ephraïm, qui développait sa théologie essentiellement dans les hymnes et la musique. Maintenant, à notre époque, nous avons de nouvelles formes de docteurs et il est important de relever la richesse des différents moyens d'enseignement dans l'Église. Nous avons Thérèse d'Avila avec ses expériences mystiques et ses interprétations de la présence de Dieu dans l'expérience mystique. Nous avons Catherine de Sienne avec sa théologie expérientielle. Et maintenant, nous avons Thérèse de Lisieux, qui a créé, d'une manière différente, une théologie de l'expérience.

    Il est important, dans notre société à l'esprit scientifique, d'avoir le message d'une expérience simple et profonde de Dieu, et un enseignement sur la simplicité d'être un saint : donner, à notre époque, avec son approche extrêmement orientée vers l'action, d'enseigner qu'être un saint n'est pas nécessairement une question de grandes actions, mais de laisser le Seigneur travailler en nous.

    C'est également intéressant pour le dialogue œcuménique. La doctrine de la justification de Luther a été provoquée par sa difficulté à se comprendre justifié et racheté à travers les structures complexes de l'Église médiévale. La grâce n'arrivait pas dans son âme et nous devons comprendre l'explosion du "sola fide" dans ce contexte : il a finalement découvert qu'il n'avait qu'à donner sa fiducia, sa confiance, au Seigneur, à se remettre entre les mains du Seigneur - et je suis racheté. Je pense que, d'une manière très catholique, cela est revenu chez Thérèse de Lisieux : Tu n'as pas besoin de faire de grandes choses. Je suis pauvre, spirituellement et matériellement, et il suffit de me remettre entre les mains de Jésus. Il s'agit d'une véritable interprétation de ce que signifie être racheté ; nous n'avons pas à faire de grandes choses, nous devons être confiants, et dans la liberté de cette confiance nous pouvons suivre Jésus et réaliser une vie chrétienne. Il ne s'agit pas seulement d'une contribution importante au dialogue œcuménique, mais aussi à notre question commune : comment puis-je être racheté, comment suis-je justifié ? La "petite voie" [de Thérèse] est une redécouverte très profonde du centre de la vie chrétienne.

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  • Tout ce qu'il faut savoir sur les funérailles de Benoît XVI

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    De Catholic News Agency :

    Funérailles de Benoît XVI : Tout ce que vous devez savoir

    3 janvier 2023

    Suite au décès du Pape émérite Benoît XVI, voici les détails que vous devez savoir sur ses funérailles au Vatican.

    Benoît XVI est décédé le 31 décembre à 9 h 34, heure de Rome. Comme l'a confirmé son secrétaire personnel, l'archevêque Georg Gänswein, ses derniers mots ont été "Signore, ti amo !". (Seigneur, je t'aime !) Et il les a prononcés en italien.

    Contrairement à la mort de saint Jean-Paul II en 2005, le décès du pape émérite n'a pas été annoncé sur la place Saint-Pierre et il n'y a pas eu de sonnerie de cloches. La confirmation de son décès a été rapportée par le directeur du Bureau de presse du Vatican, Matteo Bruni.

    M. Bruni a déclaré aux journalistes que "selon la volonté du pape émérite, les funérailles se dérouleront sous le signe de la simplicité", soulignant qu'il s'agira de "funérailles solennelles mais sobres".

    "La demande expresse de la part du pape émérite est que tout soit simple, tant en ce qui concerne les funérailles que les autres célébrations et gestes en cette période de douleur", a-t-il ajouté.

    Après sa mort, le corps de Benoît XVI est resté au monastère Mater Ecclesiae, son lieu de résidence depuis sa démission en 2013. Le petit monastère est situé dans les jardins du Vatican, sur une colline derrière la basilique Saint-Pierre. 

    Le 1er janvier, le Saint-Siège a publié les premières images du corps du pape émérite, un chapelet à la main et gisant au pied de l'autel de la chapelle du monastère. La chapelle est le même endroit où, en plus de la célébration de la messe, les visites publiques du pape François et des nouveaux cardinaux étaient effectuées chaque fois qu'il y avait un consistoire au Vatican. Puisqu'il s'agit toujours de Noël sur le plan liturgique, la chapelle possède encore un petit sapin de Noël et une crèche.

    A côté de la dépouille de Benoît XVI, quelques agenouilloirs ont été placés pour la prière.

    Quelques heures plus tard, des dizaines de personnes, dont des cardinaux, des évêques, des prêtres, des employés du Vatican, des religieuses de différentes congrégations et même des journalistes qui couvrent les activités du Saint-Siège, ont pu entrer dans le monastère pour veiller et prier avec la dépouille du pape avant qu'elle ne soit transférée à Saint-Pierre.

    À 7 heures du matin, le 2 janvier, le corps du pape émérite a été transféré du monastère Mater Ecclesiae à la basilique Saint-Pierre pour commencer la veillée et permettre aux milliers de pèlerins de faire leurs derniers adieux. 

    L'archiprêtre de la basilique, le cardinal Mauro Gambetti, a accueilli la dépouille de Benoît XVI par un acte liturgique qui a duré environ 30 minutes.

    Parmi les participants figuraient Mgr Gänswein, qui était son secrétaire personnel depuis 2003, et le maître des célébrations liturgiques, Monseigneur Diego Ravelli.

    De 9 h à 19 h, les fidèles du monde entier ont été autorisés à entrer dans la basilique Saint-Pierre pour se recueillir devant le corps de Benoît XVI.

    On estime qu'au moins 65 000 personnes sont venues rendre visite au pape émérite le premier jour de sa veillée funèbre. 

    La dépouille de Benoît XVI restera exposée dans la basilique Saint-Pierre jusqu'au mercredi 4 janvier, de 7 h à 19 h (heure de Rome).

    Funérailles de Benoît XVI

    Le Pape François présidera les funérailles de Benoît XVI le jeudi 5 janvier à 9h30 (heure de Rome), sur la place Saint-Pierre.

    Voici les prières et les lectures pour la messe des funérailles du pape émérite Benoît XVI.

    Le Vatican a publié le livret contenant les prières et les lectures pour la messe des funérailles. Les lectures de la messe seront Isaïe 29, 16-19 en espagnol, le psaume 23 chanté en latin, 1 Pierre 1, 3-9 en anglais et l'évangile de Luc 23, 39-46 lu en italien.

    Deux délégations officielles d'État, celles de l'Italie et de l'Allemagne, assisteront aux funérailles du pape émérite Benoît XVI. 

    Le président de l'Italie, Sergio Mattarella, a été l'un des premiers à visiter la chapelle funéraire du pape Benoît XVI. La première ministre Giorgia Meloni, accompagnée d'autres responsables de son gouvernement, s'est également rendue dans la matinée du lundi 2 janvier et a prié pendant plusieurs minutes devant la dépouille du pape émérite.

    De nombreux autres chefs d'État viendront rendre hommage et assister aux funérailles à titre officieux, notamment la présidente de la Hongrie, Katalin Novak, le président de la Pologne, Andrzej Duda, le roi Philippe de Belgique et la reine Sofia d'Espagne, entre autres. 

    Lorsque le cercueil de Benoît XVI sera porté jusqu'à son lieu de sépulture dans la crypte de la basilique Saint-Pierre, le chœur chantera le Magnificat en latin.

    Vous pouvez regarder les funérailles en direct sur KTO ici.