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Emmanuel Macron accélère les changements législatifs visant à autoriser l'euthanasie et le suicide assisté en France

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D'Hélène de Lauzun sur The European Conservative :

Macron dévoile son plan drastique pour l'euthanasie

Après avoir inscrit l'avortement dans la Constitution française, le président se prononce en faveur du suicide assisté.

11 mars 2024

Après plusieurs mois d'atermoiements, le président français Emmanuel Macron a accéléré les changements législatifs visant à autoriser l'euthanasie et le suicide assisté en France. Il a dévoilé son projet - qui doit être présenté au Parlement et voté d'ici le mois de mai - à la presse le dimanche 10 mars. Après avoir inscrit l'avortement dans la Constitution, il opte à nouveau délibérément pour une culture de mort.

Dans une double interview, publiée à la fois par le journal chrétien La Croix et le journal de gauche Libération, Emmanuel Macron a précisé les contours de son projet de loi tant attendu sur "l'aide à mourir". Le projet est dans les tuyaux depuis de nombreux mois, puisque la réforme de la législation sur "l'aide active à mourir" était l'une de ses promesses de campagne pour son élection en 2022. Jusqu'à présent, le président a donné l'impression d'hésiter lorsqu'il s'agissait de passer à l'action. 

Très inquiétant pour le monde médical français, le contenu de la proposition de loi va très loin dans le sens du lobby pro-euthanasie. Longtemps admirateur du "modèle belge" d'euthanasie, le Président Macron entend proposer un "modèle français de fin de vie", qu'il dit fait de "rassemblement" et de "fraternité".

La loi française, telle que définie en 2016, prévoyait une "sédation profonde et continue" en cas de souffrances intolérables et d'impossibilité d'inverser un pronostic vital gravement engagé. Désormais, il sera possible, selon les termes de Macron, de "demander une aide à mourir dans certaines conditions strictes".

Le président français se félicite de l'existence de garde-fous, mais il est légitime de se demander s'ils seront respectés. L'aide à mourir ne s'appliquera qu'aux personnes en âge de consentir, "capables d'un discernement plein et entier" - ce qui exclut, par exemple, les malades psychiatriques ou ceux atteints de la maladie d'Alzheimer -, souffrant d'une pathologie "incurable" avec "un pronostic vital engagé à court ou moyen terme", et subissant une souffrance "réfractaire" qui ne peut être apaisée.

La décision sera ensuite soumise à un avis médical collégial. Si l'avis est positif, le patient se verra prescrire une substance létale, qu'il pourra s'administrer lui-même ou avec l'aide d'un tiers - médecin ou proche - s'il en est incapable, dans un délai de trois mois, au cours duquel il pourra à tout moment revenir sur sa décision. La procédure pourra se dérouler dans un établissement de soins, à domicile ou dans des maisons de retraite médicalisées. 

Tous les critères sont donc réunis pour légitimer le suicide assisté, mais Macron réfute vigoureusement l'utilisation de ce terme ou celui d'euthanasie, rappelant que le consentement est indispensable et que l'acte est médicalement encadré selon des "critères précis".

Dès l'annonce du contenu de la future loi, de nombreuses associations de santé se sont alarmées de ce qu'elles considéraient comme une proposition extrêmement dangereuse. Dans un communiqué de presse daté du 11 mars, un collectif de soignants a exprimé sa "colère, son désarroi et sa tristesse" face au contenu des annonces présidentielles. Ils dénoncent les conditions dans lesquelles le texte a été élaboré, puisque, malgré la promotion par Macron d'un "processus démocratique", les aidants n'ont pas été consultés depuis plusieurs mois. Le texte a été élaboré sans eux, comme en témoigne la rapidité avec laquelle la loi doit être présentée au Parlement. 

Les associations sont particulièrement inquiètes du caractère extrêmement permissif de la loi à venir, malgré les assurances données par le chef de l'Etat. Toutes les dérives observées dans d'autres pays sont déjà dans les tuyaux. Sur un point particulier, la France invite à un scénario extrêmement dangereux, en autorisant l'administration de la substance létale par un proche du patient, ce qui ne se fait nulle part ailleurs dans le monde, et qui est potentiellement source de dérives extrêmement graves.  

Le projet de loi devrait comporter tout un volet sur les soins palliatifs, mais les associations d'aide aux malades sont très sceptiques car les expériences étrangères prouvent que la mentalité palliative et l'euthanasie sont fondamentalement incompatibles. L'augmentation promise du budget des soins palliatifs est dérisoire au regard des besoins de ce secteur. Enfin, le secteur gériatrique est particulièrement préoccupé par les personnes âgées, qui seront évidemment les premières touchées par la nouvelle loi. Le gouvernement avait promis, à grand renfort de publicité, une "loi sur la vieillesse" destinée à soutenir les personnes âgées et vulnérables. Cette loi ne verra probablement pas le jour et a été "remplacée" par une loi qui pousse inexorablement les personnes âgées et dépendantes vers une mort cliniquement autorisée.

L'annonce de Macron sur la mort assistée intervient deux jours seulement après l'inscription du droit à l'avortement dans la constitution française, confirmée lors de la journée de la femme le vendredi 8 mars. La concomitance de ces deux événements rappelle brutalement la fuite en avant progressive du gouvernement - incapable de s'attaquer aux problèmes structurels de la société et de l'économie françaises - vers un projet mortifère.

Macron a choisi le journal chrétien La Croix pour exposer sa vision de l'euthanasie. Les évêques de France ont pris la parole pour dénoncer l'hypocrisie du président et son manque d'écoute des autorités religieuses. Mgr Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France, s'est également exprimé dans La Croix à la suite de l'interview du Président, dénonçant l'habileté rhétorique malsaine de ce dernier pour habiller un choix résolument mortifère en termes de "fraternité" : 

"Nous, les évêques, demandons que la société aide les gens à vivre et à vivre jusqu'au bout, jusqu'à la mort. Ce qui aide à mourir de façon pleinement humaine, ce n'est pas un produit létal, mais de l'affection, de la considération, de l'attention."

Mgr de Moulins-Beaufort souligne également que les garde-fous voulus par le président ne sont en rien une garantie, puisque le débat aura lieu à l'Assemblée nationale et au Sénat, et que les parlementaires sont tout à fait capables de dépasser les soi-disant lignes rouges fixées par Emmanuel Macron. Il est également révélateur qu'à aucun moment le président n'ait évoqué l'existence d'une clause de conscience spécifique pour ceux qui seront chargés de donner la mort, ce qui est révélateur de la mentalité actuelle, déjà au cœur du débat sur l'avortement. 

L'archevêque a conclu en disant :

"Il vaut la peine que les catholiques encouragent leurs parlementaires à ne pas se laisser emporter par l'émotion ou par la peur d'être traités de conservateurs. C'est un faux progrès que de proposer la mort comme solution."

Interviewé sur France Info lundi 11 mars au matin, l'évêque de Nanterre et ancien aumônier des parlementaires Mgr Matthieu Rougé a eu des mots très durs pour fustiger le projet de société d'Emmanuel Macron et de ses soutiens. Reprenant un slogan cher au président de la République ("La France doit devenir une start-up nation"), il s'est exclamé : "On a l'impression que dans la start-up nation, les improductifs n'ont plus le droit d'être là".

Mgr Rougé est particulièrement préoccupé par la possibilité de suicide assisté dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Ceux-ci sont régulièrement dénoncés comme des lieux où des abus inhumains sont commis lors de la prise en charge de personnes souffrantes, et la proposition de loi ne ferait qu'aggraver la tendance.

Le projet de loi sera présenté au Conseil des ministres en avril pour une première lecture à l'Assemblée nationale en mai. Le processus parlementaire menant à l'adoption finale de la loi devrait durer jusqu'en 2025.

Si la loi finit par être adoptée dans des termes similaires à ceux souhaités par le président, la France sera à nouveau perçue comme un sinistre véhicule des instincts les plus destructeurs d'une société occidentale en perdition.

Hélène de Lauzun a étudié à l'École normale supérieure de Paris. Elle a enseigné la littérature et la civilisation françaises à Harvard et a obtenu un doctorat en histoire à la Sorbonne. Elle est l'auteur de Histoire de l'Autriche (Perrin, 2021).

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