Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • "La vraie mort est celle de l'âme : c'est d’elle que nous devons avoir peur !" (Léon XIV)

    IMPRIMER

    LÉON XIV

    AUDIENCE GÉNÉRALE

    Place Saint-Pierre
    Mercredi 25 juin 2025

    Cycle de catéchèse – Jubilé 2025. Jésus-Christ notre espérance. II. La vie de Jésus. Les guérisons 11. La femme hémorroïsse et la fille de Jaïre. « Ne crains pas, crois seulement. » (Mc 5,36) 

    Chers frères et sœurs, bonjour !

    Aujourd'hui encore, nous méditons sur les guérisons de Jésus comme signe d'espérance. En Lui, il y a une force que nous aussi nous pouvons expérimenter lorsque nous entrons en relation avec Sa Personne.

    Une maladie très répandue à notre époque est le mal de vivre : la réalité nous semble trop complexe, lourde, difficile à affronter. Et alors nous nous éteignons, nous nous endormons, avec l'illusion qu’au réveil, les choses seront différentes. Mais la réalité doit être affrontée et, avec Jésus, nous pouvons bien le faire. Parfois, nous nous sentons bloqués par le jugement de ceux qui prétendent mettre des étiquettes sur les autres.

    Il me semble que ces situations se retrouvent dans un passage de l'Évangile de Marc, où deux histoires s'entremêlent : celle d'une fillette de douze ans, malade dans son lit et à l’article de la mort ; et celle d'une femme, qui saigne depuis douze ans et cherche Jésus pour être guérie (cf. Mc 5, 21-43).

    Entre ces deux figures féminines, l'Evangéliste place le personnage du père de la jeune fille : il ne reste pas à la maison pour se plaindre de la maladie de sa fille, mais il sort et demande de l'aide. Bien qu'il soit le chef de la synagogue, il n'exige rien en raison de sa position sociale. Lorsqu'il faut attendre, il ne perd pas patience et attend. Et quand on vient lui dire que sa fille est morte et qu'il est inutile de déranger le Maître, il continue à avoir foi et à espérer.

    La conversation de ce père avec Jésus est interrompue par la femme hémorroïsse, qui réussit à s'approcher de Jésus et à toucher son manteau (v. 27). Cette femme, avec beaucoup de courage, a pris la décision qui a changé sa vie : tout le monde lui disait de rester à distance, de ne pas se faire voir. Ils l'avaient condamnée à rester cachée et isolée. Parfois, nous aussi, nous sommes victimes du jugement des autres, qui prétendent nous revêtir d'un habit qui n'est pas le nôtre. Et alors, nous sommes malades et nous ne réussissons pas à en sortir.

    Cette femme prend le chemin du salut quand germe en elle la foi que Jésus peut la guérir : elle trouve alors la force de sortir et d’aller à sa recherche. Elle veut arriver au moins à toucher son vêtement.

    Il y avait une grande foule autour de Jésus, tant de gens le touchaient, mais rien ne leur arrivait. Au contraire, lorsque cette femme touche Jésus, elle est guérie. Où se trouve la différence ? Commentant ce point du texte, Saint Augustin dit - au nom de Jésus - : « Les foules se pressent autour de moi, mais la foi me touche » (Sermon 243, 2, 2). C'est ainsi : chaque fois que nous faisons un acte de foi adressé à Jésus, un contact s'établit avec Lui et immédiatement jaillit de Lui sa grâce. Parfois, nous ne nous en rendons pas compte, mais d'une manière secrète et réelle, la grâce nous atteint et, de l'intérieur, transforme lentement la vie.

    Peut-être qu'aujourd'hui encore, beaucoup de gens s'approchent de Jésus de manière superficielle, sans vraiment croire en sa puissance. Nous piétinons la superficie de nos églises, mais le cœur est peut-être ailleurs ! Cette femme, silencieuse et anonyme, surmonte ses peurs en touchant le cœur de Jésus avec ses mains considérées comme impures à cause de sa maladie. Et immédiatement, elle se sent guérie. Jésus lui dit : « Ma fille, ta foi t'a sauvée. Va en paix » (Mc 5,34).

    Pendant ce temps, on apporte au père la nouvelle de la mort de sa fille. Jésus lui dit : « Ne crains pas, crois seulement. » (v. 36). Il se rend ensuite dans sa maison et, voyant que tout le monde pleure et crie, il dit : « L'enfant n'est pas morte, elle dort » (v. 39). Il entre alors dans la chambre où était couchée la jeune fille, la prend par la main et lui dit : «Talità kum», "Jeune fille, lève-toi". La jeune fille se lève et se met à marcher (cf. v. 41-42). Ce geste de Jésus nous montre qu'il ne guérit pas seulement de toute maladie, mais qu'il réveille aussi de la mort. Pour Dieu, qui est Vie éternelle, la mort du corps est comme un sommeil. La vraie mort est celle de l'âme : c'est d’elle que nous devons avoir peur !

    Un dernier détail : Jésus, après avoir resuscité l'enfant, dit aux parents de lui donner à manger (cf. v. 43). Voilà un autre signe très concret de la proximité de Jésus avec notre humanité. Mais nous pouvons aussi le comprendre dans un sens plus profond et nous demander : lorsque nos enfants sont en crise et ont besoin d'une nourriture spirituelle, savons-nous la leur donner ? Et comment pouvons-nous le faire si nous ne nous nourrissons pas nous-mêmes de l'Évangile ?

    Chers frères et sœurs, dans la vie, il y a des moments de déception et de découragement, et il y a mème l'expérience de la mort. Apprenons de cette femme, de ce père : allons à Jésus : Lui il peut nous guérir, il peut nous faire renaître. Jésus est notre espérance !

  • Papes pour la paix : Léon XIV plus en phase avec Pie XII ?

    IMPRIMER

    D'Éd. Condon sur The Pillar :

     

    Papes pour la paix : Léon et François, Pie XII et Jean XXIII

    Léon semble être plus en phase avec Pie XII tandis que François faisait écho à saint Jean XXIII

    Dès les premiers mots de sa première apparition, le pape Léon XIV a appelé à la paix.

    En tant que choix stylistique, saluer la foule sur la place Saint-Pierre avec le traditionnel « la paix soit avec vous » était un point de différence avec son prédécesseur immédiat François, qui avait ouvert la fête par un simple « bonsoir ».

    Le pape Pie XII et le futur pape saint Jean XXIII. Domaine public.

    Mais les premiers mots de Léon XIV en tant que pape n’étaient pas simplement une phrase toute faite, puisqu’il a ensuite exposé la nécessité de la paix comme priorité et mission de l’Église dans le monde, appelant à « la paix du Christ ressuscité ».

    Bien sûr, la paix, en particulier dans l’ordre diplomatique mondial, est une question urgente pour François et maintenant pour Léon.

    En fait, la situation mondiale s’est détériorée depuis l’élection de Léon XIV, avec le conflit au Moyen-Orient qui s’étend désormais à l’Iran, en plus de la guerre en cours en Ukraine, de la violence contre les chrétiens dans différentes régions d’Afrique et des tensions mondiales avec la Chine.

    François a bien sûr placé les efforts diplomatiques au premier plan des dernières années de son pontificat, et Léon a commencé à façonner sa propre approche à une époque de conflit mondial.

    Ce faisant, des différences de langage, de ton et d’accent apparaissent déjà entre les papes dans leurs appels communs à la paix, et reflètent peut-être des différences similaires entre les papes du siècle dernier.

    Alors que l'Église attend la première encyclique de Léon XIV, quelle qu'en soit la date, il semble de plus en plus probable qu'elle fasse de l'appel urgent à la paix son thème central. Si tel est le cas, les signes jusqu'à présent suggèrent que Léon pourrait davantage faire écho à Pie XII qu'à saint Jean XXIII.

    La guerre et la menace de guerre ont dominé une grande partie du XXe siècle et, nécessairement, ont dominé l’attention des papes qui ont régné pendant cette période, le plus évidemment Pie XII, élu à la veille de la Seconde Guerre mondiale, et saint Jean XXIII, qui a vu la période d’après-guerre se transformer en guerre froide et en ère nucléaire.

    Dans leurs encycliques respectives Summi pontificatus, publiées quelques semaines seulement après l'invasion de la Pologne par l'Allemagne en 1939, et Pacem in terris, donnée en 1963 dans les mois qui ont suivi la crise des missiles de Cuba, les deux papes ont cherché à s'adresser à un ordre mondial déterminé à se réarmer et au bord d'une violence catastrophique.

    Les deux papes ont mis en garde contre le sentiment d’inévitabilité d’un conflit armé et ont diagnostiqué un déclin plus large de l’ordre moral qui menace la dignité humaine.

    Dans Summi, Pie XII décrit ses efforts pour « empêcher le recours aux armes et maintenir ouverte la voie à une entente honorable pour les deux parties ».

    « Convaincu que l’usage de la force d’un côté serait répondu par le recours aux armes de l’autre », il écrivait qu’il avait fait tout ce qu’il pouvait pour éviter « les horreurs d’une conflagration mondiale, même au risque que nos intentions et nos objectifs soient mal compris ».

    Moins de 25 ans plus tard, Jean XXIII mettait en garde contre la « croyance commune selon laquelle, dans les conditions modernes, la paix ne peut être assurée que sur la base d’un équilibre égal des armements et que ce facteur est la cause probable de ce stockage d’armements ».

    « Par conséquent, les gens vivent sous l'emprise d'une peur constante », écrit Jean XXIII dans Pacem in Teris. « Ils craignent qu'à tout moment la tempête imminente ne s'abatte sur eux avec une violence horrible. Et ils ont de bonnes raisons d'avoir peur, car ces armes ne manquent certainement pas. »

    Lire la suite

  • Il y a 50 ans, saint Josémaria décédait à Rome

    IMPRIMER

    Du site de l'Opus Dei :

    26 juin 1975 : cinquante ans après

    Il y a 50 ans, saint Josémaria décédait à Rome. Nous proposons une sélection de documents pour commémorer le jour de son départ vers le ciel. Depuis lors, une nouvelle étape a commencé dans l'Opus Dei, où sa vie et son message ont inspiré des milliers de chrétiens déterminés à sanctifier leur quotidien. Il rêvait que cette lumière de Dieu devienne une « grande catéchèse », transmise par la force de l'amitié.

    https://opusdei.org/fr/saint-josemaria/

  • Pourquoi la métaphysique chrétienne est la plus convaincante

    IMPRIMER

    D'Antoine de Montalivet sur 1.000 raisons de croire :

    La métaphysique chrétienne est la plus convaincante

    Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? Cette question conduit à reconnaître l’existence d’un Être premier, éternel, cause de tout ce qui existe. Mais quelle vision du monde correspond le mieux à cette réalité ? Le monisme, en niant le monde matériel, méprise notre expérience concrète ; le matérialisme, en niant l’esprit, prive l’homme de son espérance et de sa dignité. Seule la vision judéo-chrétienne affirme à la fois la transcendance de Dieu et la bonté de la création. En Jésus-Christ, Dieu assume le monde matériel, l’élève et le sauve. Par sa résurrection, il révèle que l’homme et le monde sont appelés à la vie éternelle. Ainsi, la foi chrétienne offre la clé la plus cohérente et la plus profonde pour comprendre le réel.


    Les raisons d'y croire

    • La raison découvre que l’univers ne peut venir du néant : il suppose un Dieu créateur, source de l’être. C’est ce qu’affirme également la foi catholique : il existe bel et bien un Être premier, éternel, cause de tout ce qui est. Devant Abraham puis Moïse, Dieu s’est en effet révélé comme « celui qui Est. »

    • L’homme ne paraît pas être un simple assemblage de matière. Cette dignité unique que nous ressentons profondément révèle une dimension spirituelle chez l’homme. Elle s’oppose à toute réduction matérialiste, mais elle est bien au cœur de l’anthropologie chrétienne. L’homme est une personne, créée à l’image de Dieu, dotée d’une âme immortelle.

    • L’existence humaine est orientée vers l’éternité : l’homme a une aspiration naturelle à l’immortalité, un refus instinctif de voir en la mort la fin de tout. Cette intuition trouve aussi un accomplissement dans la foi catholique, qui annonce la vie éternelle en Dieu.

    • L’union du spirituel et du matériel culmine en Jésus-Christ, en qui la métaphysique trouve son accomplissement. Il est l’unique point où se rejoignent toutes les dimensions du réel ; en lui, l’Être éternel entre dans l’histoire, l’Esprit infini se fait chair.

    • La résurrection du Christ révèle que la matière elle-même est appelée à la gloire. La foi catholique proclame la résurrection de la chair : notre corps, uni à notre âme, est destiné à une vie nouvelle et éternelle, et non à la disparition.

    • La métaphysique judéo-chrétienne apparaît clairement comme la seule capable de saisir toute la complexité du réel, sans rien négliger de ce qui est bon dans le monde matériel, sans nier les réalités spirituelles. Elle dépasse radicalement les métaphysiques alternatives incomplètes pour offrir une réponse pleinement cohérente à notre expérience humaine.

    • Ainsi le monde a un commencement, un sens et une fin en Dieu. L’histoire n’est pas un cycle sans but ni un chaos aveugle : elle est portée par la Providence vers l’accomplissement du dessein divin, ce que l’espérance chrétienne proclame.

    • Ce que la raison perçoit, la foi catholique l’éclaire et l’accomplit. Entre foi et raison, il n’y a pas de rupture : la foi parachève ce que la raison entrevoit. D’ailleurs, l’Église catholique n’a jamais opposé la foi et la recherche philosophique. Bien au contraire, elle a toujours encouragé les efforts de la raison pour mieux comprendre le réel.


    En savoir plus

    Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? Depuis toujours, les grands penseurs se sont accordés sur un point fondamental : « Ex nihilo, nihil fit » – c’est-à-dire : « Du néant, rien ne sort. » Voilà une évidence absolue. L’être ne peut surgir du néant. Les choses n’apparaissent pas spontanément sans cause, elles ont toujours une origine.

    De ce constat, les différentes écoles philosophiques tirent la même conclusion : il doit exister un être premier et éternel, un principe à l’origine de tout, sans lequel rien n’aurait jamais pu commencer à exister. Si tous sont d’accord avec cela, les avis divergent sur les caractéristiques de cet être éternel, et c’est sur ce point précis que les différents courants métaphysiques vont se séparer.

    Lire la suite

  • La diplomatie vaticane à l’épreuve des conflits en Iran et à Gaza. Une opinion à contre-courant

    IMPRIMER

    De Sandro Magister sur Settimo Cielo (en français sur diakonos.be) :

    La diplomatie vaticane à l’épreuve des conflits en Iran et à Gaza. Une opinion à contre-courant

    (s.m.) Je reçois et je publie. L’auteur de cette note, Pietro De Marco, est expert en philosophie, théologie et histoire, il a enseigné la sociologie de la religion à l’Université de Florence et à la Faculté théologique de l’Italie centrale.

    *

    Le Saint-Siège et la conjoncture au Moyen-Orient

    de Pietro De Marco

    1. Médiation et arbitrage

    La suspension des guerres en cours ne passe pas par la mise en œuvre d’un arbitrage classique. En effet, dans aucun des cas de belligérance, de l’Ukraine aux deux fronts du Proche-Orient (Israël-Hamas, Israël-Iran), il ne s’agit de guerres déclarées visant à obtenir « une solution politique par d’autres moyens » dans le but de résoudre un différend, mais bien des guerres de valeurs, qui visent à la destruction d’un ennemi moral et culturel, ou encore des guerres « asymétriques » d’un type nouveau, provoquées et menées par plusieurs sujets et avec une variété de tactiques, par définition non déclarées.

    Dans le cas russo-ukrainien, le caractère idéal et les valeurs invoquées par Poutine sont fictifs et ne sont que pure propagande, et le « casus belli » n’est qu’un prétexte, mais elles demeurent un nœud autour du cou de ceux qui ont initié l’agression.

    Sur la scène du Moyen-Orient, les acteurs agressifs, et par conséquent ceux qui réagissent et s’opposent à eux (Israël, et en partie les États-Unis), se positionnent d’emblée – c’est-à-dire dans la réalité quotidienne des guerres hybrides – hors de l’autorité d’arbitrage des organismes internationaux et du droit international lui-même.

    Ce dernier, en fin de compte, n’est qu’un système sans pouvoir coercitif, et il n’est d’ailleurs pas en mesure de l’obtenir sinon de manière controversée et inefficace. Seul un « dominus » planétaire, seul détenteur d’une coercition légitime, pourrait juger et sanctionner, et donc peut-être prévenir, un conflit entre parties et entre États. Mais il faudrait pour cela qu’il passe d’abord sur le corps de tous les prétendants au trône. Ce qui relève davantage de la dystopie que de l’utopie.

    Nous assistons donc dans les faits à des guerres hybrides de type « guerre révolutionnaire ». Les guerres hybrides sont très étudiées et ne sont pas bien difficiles à identifier ; mais l’opinion publique démocratique, encline à nier que l’Occident puisse avoir des ennemis, réagit encore en condamnant la moindre velléité de puissance de ses opposants. Pareil parmi les juristes.

    L’une caractéristique des guerres hybrides sédimentées depuis longtemps est leur dimension d’endoctrinement capillaire du groupe humain à « libérer », c’est-à-dire à sacrifier en masse le jour où l’on en vient aux armes. L’endoctrinement est en fait la manipulation de l’univers imaginaire des individus pour le peupler d’ennemis moraux à haïr aujourd’hui et à éliminer demain. Un jeune participant au raid du 7 octobre a téléphoné fièrement à ses parents en disant : « Regardez ! J’ai tué pas moins de dix Juifs ! ».

    C’est ainsi que tout à fait ouvertement, dans le projet d’hégémonie chiite au Moyen-Orient, Israël est d’abord et avant tout « inimicus » (l’ennemi moral) et non « hostis » (l’ennemi sur le champ de bataille, l’adversaire), pour reprendre une distinction classique et indispensable. « Inimicus » qui devient aussi « hostis » dans les conflits armés, faisant oublier à certains observateurs que, dans ces guerres atypiques, les hostilités sont en fait l’émergence contingente d’une guerre menée entre deux camps, depuis un certain temps, sous d’autres formes.

    En résumé, les guerres de ces dernières années, ou de ces derniers jours, montrent aussi ce qu’est une guerre hybride « révolutionnaire ». Paradoxalement, l’artisan de paix qui obtiendrait le retrait de l’armée israélienne de Gaza devrait poursuivre à son tour (et comment ?) le travail de liquidation des milices insurgées, sinon il n’y aura pas de paix. La guerre hybride est la condition constante du Sud-Liban, que l’opinion publique ne voit que lorsque les chars israéliens se déplacent.

    Il est donc difficile de se poser en arbitres entre les haines et autres pulsions culturelles non négociables, ou qui ne sont négociables et surmontables qu’entre individus (l’individu juif, l’individu palestinien, l’individu iranien, etc.). Bien sûr, sur le front iranien, il est possible de négocier des contrôles internationaux des sites d’enrichissement d’uranium et de plutonium qui seraient constants et sans entrave. Mais, avec la classe dirigeante iranienne actuelle, ce serait négocier l’impossible. Et s’il est question d’un contrôle extérieur imposé, comme il devra l’être en fin de compte, cela reviendrait à placer sous protection internationale une zone (nucléaire et militaire) de souveraineté nationale iranienne. Ce « vulnus » de souveraineté nécessaire rentrerait alors dans le domaine des interventions préventives obligatoires, relevant de la compétence de l’ONU. Mais la lenteur et la partialité de l’ONU – à tel point que l’on pourrait dire que l’ONU elle-même est partie prenante à une guerre hybride contre Israël depuis des décennies – rend cette organisation internationale peu fiable, incapable de prendre des mesures préventives efficaces, comme cela a été le cas avec le soi-disant confinement du Hezbollah au Sud-Liban.

    Ce contexte confère à l’État juif une grande latitude décisionnelle. Une fois la certitude et l’imminence du risque avérés, cette latitude lui permet d’exercer légitimement la riposte préventive. Même dans le cas de Gaza, on peut soutenir qu’il faille considérer la poursuite de la guerre, après la première réponse de représailles au raid du 7 octobre, comme une prévention légitime contre toute agression analogue dans le futur.

    La légalité de la guerre d’Israël est fortement débattue, particulièrement celle qu’elle vient de déclarer contre l’Iran, tout comme sa vision politique à long terme, avec deux fronts ouverts (qui sont en réalité un même front). Qui vivra verra.

    Selon la doctrine actuelle, la guerre préventive en tant que telle présuppose qu’« il ne peut y avoir de réintégration du droit [dans le cadre international] à travers un processus normal ». Mais cette conviction et ses conséquences portent à légitimer une situation anti-juridique ou pré-juridique (« l’état de nature » de Kant), légalisant de facto ce qui est « ex lege ». Pourtant, il y a des situations limites que le droit reconnaît universellement et qu’il n’abandonne pas à « l’état de nature », mais plutôt à des disciplines : toutes les urgences, et le droit de la guerre tout entier. L’affirmation selon laquelle on ne peut pas être à la fois en faveur de la guerre préventive tout en restant démocratiques dans l’ordre international ne tient pas compte de l’état de nécessité.

    L’action destructrice d’un danger imminent n’a pas et ne peut pas avoir de « stratégie de sortie » en soi. L’urgence étant d’anéantir le danger lui-même, c’est-à-dire l’ennemi en tant que tel. Lorsqu’une guerre hybride émerge comme un combat à proprement parler, la définition de la guerre s’y adapte pleinement. L’élaboration de l’après relève du politique. Le travail des organismes internationaux et des organes politiques devrait se concentrer sur cela, plutôt que sur le cours de la guerre, qui a sa propre logique. Mais, comme on suppose que rien de politique ne se passe à Gaza et qu’il ne s’agit que d’un drame humanitaire, personne ne travaille sérieusement à l’après.

    2. Quelle activité diplomatique pour le Saint-Siège ?

    Dans ce contexte, quel jugement public et quelles actions peut-on attendre du Saint-Siège ? Je parle bien du « Saint-Siège », parce qu’une action aux modalités résolument personnalistes (qui se ferait au détriment de la Secrétairerie d’état et d’autres organismes) comme le faisait le pape François n’était pas et n’est pas destinée à avoir des effets. Pour cesser, les guerres n’ont pas besoin d’une « voix autoritaire » supplémentaire pour prêcher la paix, car il n’y a pas d’énoncés performatifs sans réalités, sans forces, aptes à les mettre en œuvre. Pour cesser, les guerres ont besoin d’une véritable élimination de leurs causes, ou à tout le moins d’une partie nécessaire et suffisante d’entre elles.

    En ce qui concerne le Saint-Siège, à moins d’opter pour un sage silence, la formulation publique d’un jugement « complet » serait quant à elle qualifiante. Pour me faire bien comprendre : je considère par exemple comme incomplète et en fin de compte erronée toute formulation « humanitaire » sur Gaza ne désignant pas explicitement le Hamas comme co-responsable quotidien – et premier responsable – des souffrances actuelles de la population palestinienne.

    Quant au conflit israélo-iranien, on a peut-être entrevu un jugement « complet », même dans le langage de la diplomatie, lors de l’audience jubilaire du 14 juin dernier, au cours de laquelle Léon XIV a déclaré, avec la brièveté qui le caractérise et que nous espérions tant, qu’il n’est pas licite entre les peuples d’attenter à l’existence d’autrui. Dans cet appel, qu’il a intercalé dans les salutations à des groupes de pèlerins, il a déclaré ceci : « Personne ne devrait jamais menacer l’existence d’autrui. Il est du devoir de tous les pays de soutenir la cause de la paix […] en favorisant des solutions garantissant la sécurité et la dignité pour tous ».

    Avec quelques paroles supplémentaires, le Saint-Siège pourrait éventuellement associer d’une manière sans équivoque cette déclaration à la pratique croissante de l’Iran de mener une guerre hybride contre Israël (et indirectement contre les pays arabes) ces vingt dernières années. Prendre position contre, ne serait-ce que par principe, donne de la force et non de la faiblesse à la tierce partie, en l’occurrence à un pape, qui ne se positionne pas en ennemi mais qui montre néanmoins qu’il dispose de critères de jugement.

    Un expert allemand du Moyen-Orient aurait objecté à une observation que le chancelier Merz a laissé échapper (« Israël fait le travail à la place et dans l’intérêt d’un Occident sans défense ») qu’à ce moment-là, ce n’est pas le régime iranien qui était menaçant, mais bien des citoyens iraniens qui étaient menacés. J’ai écrit en son temps que l’intellect occidental contemporain, l’intellect moyen, est en proie à un syndrome le rendant incapable de distinguer le moment empathique du moment rationnel-analytique et qui, en tout cas, privilégie le premier sans discernement. À cause d’une « koinè » philosophique de salon qui, depuis des décennies, fait la part belle au « sentiment ».

    Sinon, comment le « sentiment » de compassion pourrait-il effacer soudainement des consciences le cadre des rapports entre les puissances, les cas de destruction entre les civilisations et l’irréductibilité concrète des guerres à la piété des spectateurs ? Et c’est ce même « sentiment » qui préside chaque jour de manière irrationnelle, à de nombreuses références dilettantes au droit international ou humanitaire ; de manière irrationnelle, non pas parce que la référence à la loi ne serait pas rationnelle, mais parce qu’elle ne peut pas être pensée comme le recours à des formules incantatoires. C’est illusoire et inutile.

    Puisse le Saint-Siège retrouver sa rationalité séculaire et la compassion catholique.

    ———

    Sandro Magister est le vaticaniste émérite de l’hebdomadaire L’Espresso.
    Tous les articles de son blog Settimo Cielo sont disponibles sur diakonos.be en langue française.

    Ainsi que l’index complet de tous les articles français de www.chiesa, son blog précédent.

  • Le célibat des prêtres, un charisme à reconnaître, à protéger et à éduquer, selon Léon XIV

    IMPRIMER

    DISCOURS DE SA SAINTETÉ LE PAPE LÉON XIV 
    AUX SÉMINARISTES DES DIOCESES DES TROIS VÉNÈTIES

    Largo Giovanni Paolo II 
    mercredi 25 juin 2025

    Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Que la paix soit avec vous !

    Chers frères dans l’épiscopat,
    chers formateurs et séminaristes des diocèses de la Tri-Vénétie,

    Je suis heureux de pouvoir vous rencontrer à l'occasion du pèlerinage jubilaire. Je crois que vous  étiez tous présents hier ; c'est donc la deuxième occasion. Votre terre possède de profondes racines chrétiennes, qui nous ramènent à l'antique Église d'Aquilée. Dans cette mémoire de foi et de spiritualité, resplendit le témoignage de nombreux martyrs et saints pasteurs. Nous nous souvenons de l'évêque Cromazio ; de Girolamo et Rufino, exemplaires dans l'étude et la vie ascétique ; ainsi que des bienheureux Tullio Maruzzo et Giovanni Schiavo, missionnaires qui ont répandu l'Évangile auprès de différents peuples, langues et cultures.

    Aujourd'hui, il nous appartient de poursuivre ce travail passionnant. Vous, séminaristes, êtes particulièrement appelés à vous insérer dans cette riche histoire de grâce, à la préserver et à la renouveler à la suite du Seigneur. Ne vous découragez pas si parfois le chemin qui s'offre à vous devient difficile. Comme le disait le bienheureux  Jean-Paul Ier au clergé de Rome , exercez-vous à la discipline d'un « effort continu, long et difficile. Même les anges vus en songe par Jacob ne volaient pas, mais faisaient un pas à la fois ; imaginez-nous, pauvres hommes sans ailes » ( Discours au clergé romain , 7 septembre 1978). Ainsi parlait un pasteur en qui resplendissaient les plus belles vertus de votre peuple : en lui, vous avez un véritable modèle de vie sacerdotale.

    Je voudrais aussi rappeler un passage de la conversion de saint Augustin, tel qu'il nous le raconte lui-même dans ses  Confessions. D'un côté, il était impatient de se décider pour le Christ, de l'autre, il était retenu par les scrupules et les tentations. Profondément troublé, il se retira un jour pour méditer dans le jardin de sa maison ; là, la vertu de continence lui apparut personnifiée, lui disant : « Pourquoi te tiens-tu à toi-même – et ne te tiens-tu pas à toi-même ? Jette-toi en Dieu sans crainte. Il ne reculera pas et ne te fera pas tomber. Jette-toi en paix, il t'accueillera et te guérira » ( Conf.  VIII, 27).

    En tant que père, je vous répète ces paroles, qui firent tant de bien au cœur inquiet d'Augustin : elles ne valent pas seulement pour le célibat, charisme à reconnaître, à protéger et à éduquer, mais elles peuvent guider tout votre chemin de discernement et de formation au ministère ordonné. Ces paroles vous invitent en particulier à une confiance sans limite dans le Seigneur, le Seigneur qui vous a appelés, renonçant à prétendre vous suffire à vous-mêmes ou à tout accomplir seuls. Et cela vaut non seulement pour les années de séminaire, mais pour toute votre vie : à chaque instant, surtout dans les moments de désolation ou même de péché, répétez-vous les paroles du psalmiste : « Je m'abandonne à la fidélité de Dieu, maintenant et pour toujours » ( Ps  51, 10). La Parole de Dieu et les Sacrements sont des sources pérennes, où vous pouvez toujours puiser une nouvelle vie pour votre vie spirituelle et votre engagement pastoral.

    Ne vous considérez pas comme  seuls , ni comme isolés .  Sans aucun doute – comme l'affirme la  Ratio fundamentalis  – chacun de vous « est acteur de sa propre formation et appelé à un chemin de croissance constante dans les domaines humain, spirituel, intellectuel et pastoral » (Congrégation pour le Clergé,  Le don de la vocation sacerdotale , n. 130) ; mais  acteur  ne signifie pas  soliste ! Je vous invite donc à toujours cultiver la communion, avant tout avec vos compagnons de séminaire. Ayez pleinement confiance en vos formateurs, sans réticence ni duplicité. Et vous, formateurs, soyez de bons compagnons de route pour les séminaristes qui vous sont confiés : offrez-leur l'humble témoignage de votre vie et de votre foi ; accompagnez-les avec une affection sincère. Sachez que vous êtes tous soutenus par l'Église, en premier lieu par la personne de l'évêque.

    Enfin, le plus important : gardez le regard fixé sur Jésus (cf.  He  12, 2), en cultivant une relation d’amitié avec lui. À ce propos, le prêtre anglais Robert Hugh Benson (1871-1914) écrivait après sa conversion au catholicisme : « S’il est une chose qui ne laisse aucun doute dans l’Évangile, c’est précisément celle-ci : Jésus-Christ veut être notre ami. […] Le secret qui a fait les saints est tout entier ici : la conscience de l’amitié de Jésus-Christ » ( L’amitié du Christ , Milan 2024, 17). Il demande, comme l’écrit le pape François dans l’encyclique  Dilexit nos ,  « de ne pas avoir honte de reconnaître son amitié avec le Seigneur. Il vous demande d’avoir le courage de dire aux autres que c’est une bonne chose pour vous de l’avoir rencontré » ( n. 211 ). Rencontrer Jésus, en effet, sauve notre vie et nous donne la force et la joie de communiquer l’Évangile à tous.

    Très chers, merci pour cette visite. Bon voyage ! Que la Madone vous accompagne toujours, et que je vous bénisse. Merci !

    [Récitation du Notre Père]

    [Bénédiction]

    Bonne journée ! Merci beaucoup et bon cheminement de foi !