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13 prêtres et une religieuse assassinés depuis le 1er janvier : qui sont-ils ?

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De Pierre Jova sur le site de La Vie :

Qui sont les 13 prêtres et la religieuse assassinés depuis le 1er janvier 2022 ?

Les meurtres de ces consacrés catholiques sont survenus dans des pays où percussions et violences règnent, en Afrique, en Amérique latine et en Haïti.

12/08/2022

C’est un décompte macabre qui inspire la tristesse et la révolte. Depuis le 1er janvier 2022, 13 prêtres catholiques et une religieuse ont été assassinés dans le monde : sept en Afrique, cinq en Amérique latine, un au Vietnam, et une sœur en Haïti.

Ces meurtres sont-ils tous le fait des persécutions antichrétiennes, qui toucheraient, selon l’ONG protestante Portes ouvertes, près de 360 millions de personnes dans le monde ? Pas si simple… Par exemple, le prêtre dominicain Joseph Tran Ngoc Thanh, poignardé le 29 janvier 2022, alors qu’il entendait des confessions dans l’église de Dak Mot, au centre du Vietnam, a été la cible d’une personne présentant des désordres psychologiques. Son agresseur, issu d’une famille catholique, souffrait de paranoïa et battait son entourage.

Une partie de ces meurtres relèvent cependant de persécutions, en particulier au Nigeria, qui a vu quatre prêtres trouver la mort entre avril et juillet 2022. Le pays est miné depuis des décennies par un conflit sanglant entre les États du Nord et ceux du Sud, qui mêle des causes agraires, tribales et religieuses.

Ces dernières années, des bandes armées mafieuses, qui se parent souvent de l’islamisme, se sont spécialisées dans les enlèvements de chrétiens contre rançon. Dans l’État de Kaduna, dans le nord-ouest du pays, 140 lycéens d’un pensionnat baptiste ont été enlevés en juillet 2021, puis relâchés au compte-gouttes jusqu’en janvier 2022, en échange d’une forte somme.

Enlèvements et assassinats en Afrique

C’est dans cet État que trois prêtres ont été assassinés : Joseph Aketeh Bako, 48 ans, enlevé en mars 2022, puis exécuté en captivité entre le 18 et le 20 avril 2022 ; Vitus Borogo, 50 ans, mis à mort le 25 juin 2022 ; et John Mark Cheitnum, tué le 19 juillet 2022, alors que lui et un confrère, Donatus Cleophas, tentaient de s’évader après leur enlèvement. Ce dernier est parvenu à s’échapper et retrouver les siens. Le quatrième prêtre nigérien à avoir perdu la vie est Christopher Odia, 41 ans, assassiné le 26 juin 2022, le jour de son kidnapping dans l’État d’Edo.

Le 30 juin 2022, en marge des funérailles du père Borogo, l’archevêque catholique de Kaduna, Matthew Man-oso Ndagoso, élevait vers le ciel une lamentation digne des pages les plus sombres de la Bible : « Nous n’avons plus les larmes aux yeux parce que la source de nos larmes s’est tarie à cause des pleurs constants. Nous avons aussi perdu nos voix parce que quand vous parlez, personne ne vous écoute. Vous pleurez, personne n’entend votre cri mais nous ne perdrons pas espoir. Un jour, Dieu essuiera nos larmes. »

Ailleurs en Afrique, deux prêtres ont trouvé la mort en République démocratique du Congo. Richard Masivi Kasereka est tombé le 2 février 2022 par des hommes armés à Vusesa, dans le Nord-Kivu, une région dans l’est du pays en proie à une guérilla du groupe rebelle M23, soutenu par le Rwanda voisin.

Quant à Godefroid Pembele, il a été criblé de balles dans la nuit du 6 au 7 août 2022, à Kikwit, dans la province du Kasaï, dans le sud du pays, par des bandits qui avaient attaqué son église. Bien que les assaillants aient emporté des objets de valeur, ce meurtre survient dans une région marquée par la guerre civile, entre 2016 et 2019, opposant les autorités congolaises à la milice Kamwina Nsapu. Celle-ci avait recours à la sorcellerie pour recruter des enfants-soldats, et s’en prenait aux églises catholiques.

La sorcellerie est aussi derrière la mort du dernier prêtre tué sur le continent africain. Disparu près de Mbeya, dans le sud-ouest de la Tanzanie, Michael Mawelera Samson, membre de la société des Missionnaires d’Afrique, originaire du Malawi, a été retrouvé sans vie au bord de la rivière Meta, le 11 juin 2022. Son corps démembré atteste qu’il a été l’objet d’une pratique occulte, selon l’archevêque Gervas John Mwasikwabhila Nyaisonga. « Habituellement, pour les rituels de sorcellerie, des parties du corps de la victime sont retirées », a-t-il indiqué à l’agence de presse pontificale Fides.

Triste bilan en Amérique latine et centrale

L’Amérique latine a été le théâtre du meurtre de cinq prêtres. Au Honduras, José Enrique Vásquez, 44 ans, dans le diocèse de San Pedro Sula, a été abattu dans la nuit du 2 au 3 mars 2022, alors qu’il venait de célébrer l’office du mercredi des Cendres dans sa famille. La police a arrêté deux suspects : des individus de l’entourage du prêtre, qui auraient planifié de le voler.

En Bolivie, le 16 avril 2022, au soir de la vigile pascale, le franciscain Wilberth Daza a été tué dans le couvent Saint-François de Santa Cruz, par des individus qui cherchaient à cambrioler le monastère.

Plus complexes sont les assassinats de trois prêtres mexicains, dans un pays où la guerre fait rage entre le gouvernement et les cartels de la drogue, depuis le milieu des années 2000. Certains de ces criminels déguisent leurs forfaits sous un syncrétisme païen, dont la figure dominante est Nuestra Señora de Santa Muerte (« Notre-Dame de la sainte mort »), héritage d’une déesse précolombienne. Son culte s'est largement répandu au Mexique, bien qu’il ait été condamné à mots couverts par François, lors de sa visite en 2016 : « On ne peut dialoguer avec le diable parce qu’il gagnera à tous les coups. »

Par ailleurs, d’autres narcotrafiquants, convertis au protestantisme évangélique, affichent un anticatholicisme virulent. L’Église catholique est aussi attaquée par les gangs de passeurs, qui profitent de la misère de ceux qui partent clandestinement aux États-Unis.

En une décennie, une trentaine de prêtres catholiques ont été mis à mort au Mexique. Enlevé le 15 mai, José Guadalupe Rivas a été retrouvé sans vie dans une hacienda à Santa Verónica, non loin de la frontière américaine. Président de la Casa del Migrante (« maison des migrants »), le prêtre a été torturé avant d’être exécuté.

Le 20 juin 2022, toujours au nord du Mexique, à Cerocahui, deux jésuites d’un âge avancé, Javier Campos Morales, 78 ans, et Joaquín César Mora Salazar, 81 ans, ont été tués alors qu’ils défendaient Pedro Palma, un homme poursuivi par deux mafieux et qui s’était réfugié dans l’église Saint-François-Xavier.

D’après le quotidien Libération, l'un des meurtriers, après avoir ôté la vie aux trois hommes sous les yeux d’un autre jésuite lui aurait demandé de l’entendre en confession. Ce blasphémateur serait, selon la police, José Noriel Portillo, alias El Chueco (« l’escroc »), un parrain local du crime organisé. Les deux prêtres avaient consacré une partie de leur vie au peuple indigène des Tarahumaras.

Le désespoir et la mort en Haïti

En Haïti, sœur Luisa Dell’Orto, une religieuse italienne de la congrégation des Petites sœurs de l’Évangile, suivant la spiritualité de Charles de Foucauld, a été assassinée le 25 juin 2022 à Port-au-Prince, capitale de l'État. Elle aurait résisté à un voleur qui tentait de la dépouiller.

Âgée de 65 ans, missionnaire dans le pays depuis une vingtaine d’années où elle enseignait l’histoire et la philosophie, elle animait un lieu d’accueil pour les enfants des rues. Luisa Dell’Orto refusait de quitter le pays, ballotté par les révolutions de palais et les catastrophes naturelles depuis plus de 30 ans, et qui s’enfonce dans une guerre des gangs sans merci.

« Si quelqu’un de sa famille est malade, ce n’est pas le moment de le laisser seul. C’est à ce moment-là qu’on est le plus proche des gens. Ce peuple devient notre grande famille, la famille aussi des enfants de Dieu, et dans cette famille on partage les joies et les souffrances », avait-elle confié à Radio Vatican, en 2013.

Le pape François a qualifié sa mort de martyre, car « Sœur Lucia a fait de sa vie un don pour les autres. » De son côté, l’archevêque de Milan, Mario Delpini, a fait le lien entre la religieuse et Charles de Foucauld, assassiné lui aussi dans le cadre d’un vol à main armé, en 1916 : « Ils ne vont pas chercher les dangers, mais les signes du Royaume de Dieu qui vient, parmi les pauvres, parmi ceux qui n’ont d’importance que pour Dieu et sont ignorés de tous. » Face au mystère du mal, les consacrés catholiques ayant péri jusqu’à ce jour en 2022 ont répondu par une disponibilité totale à Dieu et aux autres, jusqu’au don ultime de leur vie.

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