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  • « Dans Humanae vitae, Paul VI a dit la vérité sur l’amour et la contraception »

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    De Samuel Pruvot dans l’hebdomadaire « Famille chrétienne » :

    Humanae vitae 1230167386.jpg« Le 25 juillet 1968, Paul VI publiait l’encyclique Humanae Vitae quitte à essuyer l’incompréhension. Un texte qui se révèle plus que jamais prophétique aujourd’hui. Le frère Francesco revient sur la session consacrée par l’abbaye de Kergonan les 4 et 5 août prochains (voir le lien en rouge ci-dessous)

    L'abbaye de Kergonan organise une session à l'occasion des 50 ans de Humanae vitae. Pourquoi cette encyclique a-t-elle été aussi mal comprise par les catholiques à l'époque ?

    Certains, il s’agit de le rappeler, ont reçu cette encyclique avec gratitude et l’ont transmise à leurs enfants comme un trésor. Beaucoup en effet, laïcs ou clercs, ont été désarçonnés. Dans les difficultés inhérentes à la vie de famille et propre à la modernité, ils ont pensé trouver dans les moyens de contraception une solution confortable, pour une aspiration au plaisir. Depuis le péché originel, on court après une harmonie perdue. Le rappel de la vérité interne de l’acte conjugal et de son lien avec la transmission de la vie a semblé rude. Paul VI exprimait par la non-dissociation entre union et procréation, la sollicitude de l’Église pour ses enfants. Il a prédit des désordres qu’aujourd’hui nous voyons. Avec 50 ans de recul, on peut dire que la contraception, généralisée, ne rend pas les couples plus solides, les familles plus soudées, l’accueil de l’enfant plus généreux et plus aimant, le rapport à la Création plus respectueux... au contraire ! On confond désir et amour, on attrape à la place de recevoir, on perd le sens de la féminité comme de la masculinité.

    50 ans après sa publication, la présence du cardinal Sarah à Kergonan est-elle le signe que les nouvelles générations sont plus réceptives à cette sainteté qui passe notamment par la chasteté ?

    Les jeunes générations savent que la contraception ne résout pas les problèmes relationnels. Le perfectionnisme parental face à l’enfant, qui doit être parfait et doit tout avoir, finit par être un poids pour les jeunes parents. On semble leur dire : « Vous avez voulu un enfant, vous vous débrouillez ». Les hommes politiques ne leur disent plus merci de la part de la société, les clercs oublient quelquefois de le dire de la part de l’Église. Les jeunes aspirent pourtant toujours à la vérité et à l’harmonie, ils peuvent se rendre compte qu’on a menti à leurs parents. Paul VI non. Paul VI, et ses successeurs leur ont dit la vérité.

     Dans votre programme vous faites largement appel aux témoignages des couples. En quoi est-ce si important ?

    Parce que cette vérité contenue dans Humanae vitae se reçoit d’abord par l’exemple. Cela aussi Paul VI l’a dit de façon prophétique et providentielle . C’est aux foyers qui ont reçu, qui ont découvert ce message d’amour qu’il revient d’être « guides et apôtres » d’autres foyers. Ils doivent trouver dans le cœur et les paroles du prêtre l’écho de la voix du Rédempteur, la compréhension de leur ministère d’époux. Le prêtre, le moine aussi ont besoin de ces témoignages de couples. Comme les couples ont besoin du pape, du préfet de la congrégation pour le culte divin, des évêques et des prêtres pour avoir ensuite la force de rendre visibles à tous les hommes la douceur d’Humanae vitae. »

    Ref. « Dans Humanae vitae, Paul VI a dit la vérité sur l’amour et la contraception »

    Toutes les infos sur cet événement sur le site https://kergonanhumanaevitae.fr/

    JPSC

     

  • Italie : l'obole du citoyen à l'Eglise a connu des hauts et des bas avec les trois derniers papes

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    De Sandro Magister, vaticaniste à l'Espresso, en traduction sur diakonos.be :

    L’obole du citoyen à l’Église. Des hauts et des bas avec les trois derniers papes

    Chaque année, l’État italien consacre 8 pour mille de son propre revenu fiscal aux confessions religieuses qui ont établi une convention pour pouvoir en bénéficier.

    Parmi celles-ci, l’Église catholique se taille la part du lion. L’État italien lui consacre environ un milliard d’euros par an.  C’est beaucoup mais il faut garder à l’esprit qu’en Allemagne, l’Église catholique, qui est moitié plus petite que l’Église italienne, reçoit de l’État chaque année cinq fois plus, grâce au « Kirchensteuer », la taxe sur les affiliations religieuses en vigueur dans ce pays.

    En Italie en revanche, la répartition du montant du 8 pour mille entre les différentes dénominations religieuses est décidé chaque année par les contribuables qui sont libres d’indiquer ou pas, par une signature, à qui ils souhaitent que leur contribution soit versée. Et, depuis 1985, date à laquelle ce mécanisme a été introduit, jusqu’à aujourd’hui, les signatures en faveur de l’Église catholique constituent une écrasante majorité qui en 2005, année record, ont presque atteint les 90% des signataires, 89,82% pour être exact.

    Or 2005, c’était la dernière année du Pape Jean-Paul II. Et plusieurs commentateurs avaient alors associé le pic atteint par le 8 pour mille à sa popularité.

    Tout comme en 2013, la dernière année de Benoît XVI, il fut facile d’attribuer à l’impopularité de cet autre pape la chute à 80,91% des signatures en faveur de l’Église catholique.

    Mais aujourd’hui, après cinq année de pontificat du Jorge Mario Bergoglio, à nouveau très populaire, où les choses en sont-elles ?

    Après une timide remontée à 81,23% des signatures en 2014, la suite n’a été qu’une longue descente :

    • 81,09% en 2015 ;
    • 79,94% en 2016 ;
    • 79,36% en 2017, dernières données disponibles et record négatif historique du 8 pour mille.

    Mais attention. Si au lieu des pourcentages on analyse les chiffres absolus, c’est-à-dire le nombre de signatures en faveur de l’Église catholique, c’est une toute autre histoire.

    On découvre, par exemple, que le record absolu du nombre de signature a été atteint non pas pendant le pontificat de Jean-Paul II mais pendant celui de Benoît XVI, c’était en 2011, avec 15.604.034 signatures.

    Et cela ne s’arrête pas là. En tout, pendant les six dernières années du pontificat de Benoît XVI, les signatures en faveur de l’Église catholique ont dépassé les 15 millions, ce qui n’était jamais arrivé au cours du pontificat de Jean-Paul II.

    Pareil au cours des deux premières années de François. Ensuite, on a par contre assisté à une chute nette et continue 

    • 14.437.694 en 2015 ;
    • 13.944.967 en 2016 ;
    • 13.762.498 en 2017.

    Il serait hasardeux de déduire de ces chiffres le succès ou non d’un pontificat. Il n’est pas davantage évident de lier ces données à la progression générale de la sécularisation dans un pays étiqueté « catholique » comme l’Italie.

    Par contre, les faveurs recueillies par les Églises méthodistes et vaudoises, qui occupent la seconde place parmi les différentes dénominations religieuses dans la répartition du 8 pour mille, sont singulières avec un nombre de signatures douze fois supérieur à leur présence réelle dans le pays :

    • 469.071 en 2015 ;
    • 523.504 en 2016 ;
    • 515.829 en 2017.

    Les signatures en faveur de l’Union bouddhiste italienne sont également en croissance continue ces dernières années :

    • 125.786 en 2015 ;
    • 173.023 en 2016 ;
    • 164.934 en 2017, auxquelles il faut ajouter les 52.777 signatures pour les bouddhistes Soka Gakkai, qui ont eux aussi fait leur entrée dans la répartition.

    Les contributeurs peuvent également signer pour qu’une partie du 8 pour mille revienne à l’État italien. Et ces signatures sont depuis quelques années elles aussi en légère augmentation :

    • 2.493.431 en 2015, soit 15,03% des signatures ;
    • 2.535.404 en 2016, soit 14,54% ;
    • 2.576.882 en 2017, soit 14,86%.

    On retrouvera les données détaillées du mécanisme du 8 pour mille en Italie sur cette page web du Département des Finances du Ministère de l’économie :

    > Analisi statistiche 8 per mille, serie storiche

    Quant à la provenance du 8 pour mille pour l’Église catholique et à sa destination, il y a le site « ad hoc » de la Conférence épiscopale italienne, riche de détails et des comptes rendus constamment mis à jour :

    > 8 per mille. Chiesa cattolica

    Un article de Sandro Magister, vaticaniste à L’Espresso.

  • Humanae Vitae : l'histoire d'une encyclique incomprise

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    D'Yves Semen sur aleteia.org :

    Humanae vitae : histoire d’une encyclique incomprise

    50 ans après sa publication, l’encyclique Humanae Vitae est toujours incomprise. Sans doute les normes morales qui y sont énoncées ne sont pas suffisamment présentées comme des exigences d’une pleine réalisation de la personne dans le don d’elle-même. L’enseignement de la théologie du corps de Jean Paul II aide à y trouver cependant les grandes lignes de la spiritualité chrétienne de la vocation et de la vie conjugales.

    En cet anniversaire de la publication, le 25 juillet 1968, de l’encyclique Humanae vitae sur la régulation des naissances, il n’est pas inutile de revenir sur ce qui a conduit le bienheureux pape Paul VI à promulguer cet enseignement magistériel que Jean-Paul II a confirmé et étayé par sa théologie du corps et dont François nous invite à redécouvrir le message1.

    Mise au point aux USA au début des années 1950 par le dr Gregory Pincus, la pilule anovulatoire a été mise sur le marché en 1957, d’abord à des fins thérapeutiques pour remédier à certains troubles menstruels et aux fausses couches répétitives, puis à partir de 1960 à des fins contraceptives. Cette découverte n’a pas manqué de susciter des interrogations dans l’Église : pouvait-elle être considérée comme une nouvelle conquête du dominium de l’homme sur la nature ? Devait-elle être vue comme un heureux moyen de maîtriser le don de la vie qui jusque-là échappait le plus souvent au contrôle de l’homme ? En même temps, n’y avait-il pas là une remise en cause de la discipline traditionnelle de l’Église qui a toujours vu dans la contraception un désordre moral grave ?

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  • Rome : quand les restaurateurs mettent en évidence la beauté originelle de la Scala Santa

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    De Carol Glatz sur présence-info.ca :

    1700 mètres carrés de fresques

    À Rome, les restaurateurs révèlent la beauté d'origine de la Scala Santa

    Francesca Cencia note les détails de la restauration d'une fresque de Jésus crucifié le 10 juillet 2018 à la Scala Santa, à Rome.

    Francesca Cencia note les détails de la restauration d'une fresque de Jésus crucifié le 10 juillet 2018 à la Scala Santa, à Rome.   (CNS Photo/Paul Haring)

    De grandes feuilles de contreplaqué bloquent l'accès du public à l'escalier de la Scala Santa, à Rome. Une femme touche une grande photographie en couleur de l'escalier, fait un signe de croix, en priant la tête baissée, puis passe son chemin.

    Pendant des siècles, les fidèles ont gravi à genoux les 28 marches en priant.

    Mais cette dévotion populaire patiente depuis un an. La grande affiche représentant l'escalier est tout ce que le public peut voir tandis qu’une équipe de restaurateurs du Vatican termine la phase finale de vingt ans d’efforts pour réparer le sanctuaire du Saint Escalier et nettoyer ses 1700 mètres carrés de fresques.

    Selon la tradition, l’escalier est celui que Jésus a monté lorsque Ponce Pilate l'a amené devant la foule et l'a remis pour être crucifié. La mère de Constantin, sainte Hélène, aurait apporté l’escalier à Rome depuis Jérusalem en l’an 326.

    En 1589, le sanctuaire fut construit et décoré par le pape Sixte V. Il recouvre notamment l'escalier et abrite quelques-unes des plus anciennes reliques des premiers martyrs chrétiens de Rome, ainsi qu'une image byzantine du Christ.

    Sixte V voulait que le sanctuaire conserve les reliques importantes, mais qu’il puisse aussi exprimer l'essentiel de la foi à travers une abondance d'images vives et colorées décrivant les événements clés de l'Ancien et du Nouveau Testament, explique Mary Angela Schroth, la conservatrice d’une galerie d'art de Rome qui a été impliquée dans le projet de restauration.

    «Puisque les fidèles ne savaient souvent ni lire ni écrire, les histoires prenaient vie à travers des images», dit-elle. Ainsi, «chaque centimètre carré» du sanctuaire – ses deux chapelles, ses cinq escaliers, ses plafonds voûtés et ses larges murs hauts – étaient couverts de fresques et d'art décoratif.

    «Cela devait étonner et attirer le public», souligne-t-elle.

    Restauration colossale

    Mais au cours des siècles, ces illustrations flamboyantes ont progressivement disparu sous la saleté, la crasse et des dégâts d'eau. Des techniques de restauration primitives ou agressives ont parfois décoloré les œuvres originales. Ajoutez à cela un mauvais éclairage et l'espace ténébreux ne faisait plus ce pour quoi il avait été conçu: être une expérience physique et spirituelle totalement immersive avec des repères visuels accompagnant les fidèles dans leur démarche vers le Sancta Sanctorum, a déclaré Paolo Violini, le meilleur expert des Musées du Vatican en matière de restauration de fresques.

    Avec l'aide initiale de la Fondation Getty en 2000, puis grâce à la générosité des Patrons of the Arts des Musées du Vatican, les chapelles Saint-Laurent et Saint-Sylvestre, ainsi que les quatre cages d'escalier – deux ensembles de chaque côté de la cage d'escalier centrale des escaliers sacrés – ont été entièrement restaurés.

    La restauration de l'escalier central devant être achevée d'ici la fin de l'année et l'atrium avant fin 2019, il aura fallu près de deux décennies à onze restaurateurs pour redonner vie à ce que quarante artistes ont créé en moins de deux ans au XVIe siècle. Mais le soin apporté à la restauration a porté ses fruits, permettant aux visiteurs d'aujourd'hui de voir, après 400 ans, la beauté décorative originale que les peintres du pape Sixte avaient conçue, a dit Violini.

    Les gens regardaient à peine les surfaces sombres avant la restauration, dit Schroth, mais maintenant avec «ces couleurs glorieuses» et un éclairage approprié, les visiteurs font plus que simplement regarder, «ils observent et étudient ces histoires» et se souviennent de leur signification.

    Redécouvrir la narration visuelle

    Le recteur du sanctuaire, le père passioniste Francesco Guerra, a déclaré que l'art chrétien dans les espaces sacrés n'est pas seulement un artifice, mais un moyen aussi puissant que les mots, créé pour expliquer et partager la foi et inciter les fidèles à entrer dans une relation plus profonde et plus étroite avec Dieu.

    Le sanctuaire, qui est confié aux soins et à la protection des pères passionnistes, est comme un catéchisme visuel qui existe dans tant d'églises et de sanctuaires, mais qui a besoin d'être «réévalué» et ré-accentué aujourd'hui, croit-il.

    Paul Encinias, directeur de Eternal City Tours, basé à Rome, confirme que lorsqu'il emmène des groupes à la Scala Santa, ils se concentrent sur leurs prières individuelles et leurs intentions, alors qu'ils gravissent chaque marche à genoux.

    «Les pèlerins catholiques du XXIe siècle sont très éloignés des narrations artistiques», a-t-il dit, et ils ne sont «pas habitués à ces indices visuels» qui les entourent, alors le but et la signification de ces œuvres devraient probablement être expliqués.

    Néanmoins, certains des visiteurs que M. Incinias amène prier à la Scala Santa ont souvent une expérience «émotionnelle forte» lorsqu'ils prient et réfléchissent sur les problèmes ou les épreuves de la vie.

    «Nous avons généralement peur de souffrir», et la plupart des homélies ne s'y attardent pas, dit-il. Mais parce que l’expérience encourage les gens à se connecter à la Passion du Christ, «ça touche quelque chose de profond» et les gens réalisent que «Christ est toujours avec nous, même dans nos souffrances».

    Même si les escaliers sont fermés, le sanctuaire a offert un escalier latéral pour la même pratique dévotionnelle de les gravir à genoux. En moyenne, environ 3000 personnes visitent le sanctuaire chaque jour.

    Le père Guerra a dit que le pape François a souligné l'importance des dévotions traditionnelles et populaires et des pèlerinages dans les sanctuaires et les lieux sacrés. Les gens sont constitués d’«esprit et d'intellect, mais aussi de chair, d’émotions et de sentiments», dit-il.

    Dans la Bible, quand Jésus accomplit un miracle, «il touche la personne, il met ses doigts dans les oreilles de l'homme sourd» et prend la main d'une fille morte pour la ramener à la vie, a dit le prêtre.

    Ce contact physique, qui est une partie inséparable de notre humanité, est une caractéristique clé de la Scala Santa, rappelle-t-il. En grimpant l'escalier à genoux et en réfléchissant à la passion du Christ, «les gens se sentent unis à Jésus, ils se sentent compris par Jésus, ils se sentent aimés par Dieu».

    Carol Glatz

  • Libres propos au sujet des murs et des ponts

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    De Joël Hautebert sur le site de l'Homme Nouveau :

    Libres propos sur les murs et les ponts

    La muraille de Chine et autres tracés de frontières attirent chaque année d’innombrables visiteurs. Au-delà de la prouesse architecturale et de leur beauté, ces vestiges transmettent une stratégie. Pour protéger leurs cités, pays ou empires, des envahisseurs, nos ancêtres édifiaient des murs. Notre époque, ayant opté pour les ponts du mondialisme, construit désormais des murs de verre ou de béton.

    Les grandes civilisations ont-elles pu prospérer sans le soutien de remparts protecteurs ? Parmi les grands témoignages de la présence de l’homme sur cette terre légués par l’Histoire, les enceintes défensives occupent une place de premier choix, demeurant aujourd’hui encore des lieux de visite particulièrement appréciés. La muraille de Chine est classée parmi les sept merveilles du monde. Il paraît même qu’il s’agit de l’unique construction humaine visible depuis l’espace. Le voyageur qui traverse l’Angleterre pour se rendre en Écosse croise immanquablement sur sa route le fameux mur édifié par les légions romaines sur ordre de l’empereur Hadrien. Ces mêmes Romains construisirent un autre mur aux frontières de l’est, à l’initiative de Trajan cette fois-ci, dont il reste également de beaux vestiges. C’est ainsi que se maintint la pax romana à l’intérieur des limes de l’Empire. D’autres murailles célèbres sont encore visibles aujourd’hui, comme celles de Constantinople, élevées et progressivement améliorées à partir de la création de la ville. Elles permirent à la cité de faire face aux invasions venues de l’est jusqu’en 1453, date de la prise de la ville par les Turcs, qui scella la disparition de l’Empire byzantin.

    Les autorités qui ordonnèrent l’édification de ces murs poursuivaient un objectif similaire : assurer ainsi la paix à l’intérieur de la cité en la protégeant contre de potentiels envahisseurs. On peut le dire sans honte, les murs sont effectivement un symbole, celui de la volonté de poursuivre l’Histoire commune de la cité et d’assurer sa prospérité. Ces murs démontrent un grand réalisme politique de la part des gouvernants. Les murs extérieurs rendaient inutiles les murs intérieurs. Si l’analogie entre le biologique et le politique a ses limites, elle n’est pas nécessairement dénuée de fondement. Existe-t-il un corps sain sans moyen immunitaire de défense ? Une cité peut-elle durer sans la protection de solides défenses naturelles ou bâties par l’homme, soutenues par des troupes aguerries ? Dans une société ordonnée, on jette des ponts sur les cours d’eau quand la solidité des frontières le permet. Quand l’ennemi franchit ces dernières, les autorités civiles et militaires font sauter les ponts pour limiter la progression de l’envahisseur. Pas de murs, pas de ponts.

    Il existe aussi, il faut le préciser, des murs construits à des fins contraires. Le mur de Berlin et les barbelés du monde communiste eurent (et parfois ont toujours) une surprenante originalité qui restera sans doute dans les annales de l’Histoire. Il ne s’agit pas prioritairement de dissuader les éventuels agresseurs de pénétrer dans l’enceinte, mais d’empêcher les habitants d’en sortir. Dans son roman Une journée d’Ivan Denissovitch, Soljénitsyne raconte avec beaucoup de finesse que les prisonniers du Goulag chargés de bâtir la cité du socialisme commencent par ériger les barbelés qui doivent l’entourer, avant d’entamer toute autre construction ! Ce type de configuration atypique demeure exceptionnel. Les choses ont bien changé de nos jours. La doxa médiatico-idéologique actuelle martèle à l’envi que les murs symbolisent le mal. Prétendre en construire un dévoilerait des intentions malsaines que l’on n’ose prononcer : le repli, la peur de l’autre, la haine, tout le contraire de la société ouverte à tout vent, de la diversité universelle et du vivre ensemble commercial mondial fondé sur la constante mobilité. Construire des murs suppose effectivement l’hypothèse de l’existence d’ennemis. Or, notre monde occidental, paraît-il, n’a pas d’ennemis extérieurs. Tout va bien. Ces ennemis sont à l’intérieur, les populistes de Hongrie de Pologne, d’Italie et d’ailleurs, c’est-à-dire ceux qui, comme chacun sait, ont construit des barrières dans leurs têtes à force de stigmatiser l’«autre». À ces gens malsains, s’ajoutent tout de même les pauvres malades que sont les radicalisés et les déséquilibrés.

    Mais est-il exact que l’on ne construit pas de murs en France aujourd’hui ? Rien n’est moins sûr. Ou plutôt, tout indique le contraire. Ainsi, un mur de verre vient d’être mis en place autour de la Tour Eiffel pour limiter les risques d’attentat. De même, plan vigipirate oblige, les services de sécurité recommandent l’érection d’enceintes fermées autour de certains bâtiments. Par exemple, les directeurs d’école doivent veiller à clôturer totalement leurs établissements, à augmenter la hauteur des murs, à poser des barrières et à doter les bâtiments de fenêtres plus solides. À quand des fenêtres blindées dans les écoles ? Il y a aussi les gros blocs de bétons, autant de petits murs, mis en place devant les lieux publics les plus fréquentés, à l’entrée des rues piétonnes, des quartiers commerciaux, tous les lieux de prédilection de l’homo festivus et du touriste occidental, sans oublier les grands axes de circulation sur lesquels il faut veiller. Peut-être qu’un jour il conviendra de mettre de tels murs devant les ponts, à défaut de recréer des ponts-levis. Quoi qu’en dise le discours officiel, aujourd’hui nous construisons des murs, plein de murs, et partout.

    Comme nous n’avons plus le souci de protéger la cité, parce que nous avons perdu le sens du commun, l’obligation qui pèse sur l’État d’assurer la conservation des citoyens consommateurs bardés de droits rend inéluctable la multiplication des murs dans nos villes. À force de ne plus reconnaître d’ennemis et d’ouvrir nos portes à tout le monde, la communauté progressivement dissoute subit les feux de plus en plus réguliers d’une guerre civile en devenir. Les attentats islamiques se multiplient en Europe et ne font plus la une des journaux.

    À force de prétendre jeter des ponts vers les plus lointains, nous voici obliger de supporter l’édification de murs au plus près des citoyens. Tout un symbole de l’échec cuisant d’une politique menée depuis cinquante ans. Il est encore temps de dresser des murs solides à l’extérieur et de jeter des ponts à l’intérieur pour restaurer ce qui unit au sein de la cité. Sans quoi, il faudra peut-être revenir au temps des châteaux forts.