De l'abbé Stéphane Seminckx sur didoc.be :
Des changements dans le discours de l’Eglise sur la contraception ?
Stéphane Seminckx | Publié le .
La publication récente des actes d’un congrès de l’Académie Pontificale pour la Vie a donné lieu à quelques conjectures sur un changement d’attitude de l’Eglise face à la contraception.
Il y a quelques années, le 5 mars 2014, dans une interview au Corriere della Sera, répondant à un journaliste à propos d’une possible révision de la doctrine de l’Eglise sur le contrôle des naissances, le pape François déclarait : « Tout dépend de la manière dont l’encyclique Humanae Vitae est interprétée. Paul VI lui-même, à la fin de sa vie, recommandait aux confesseurs d’être très miséricordieux et attentifs aux situations concrètes. Mais sa génialité a été prophétique, il a eu le courage de se dresser contre la majorité, de défendre la discipline morale, de faire jouer un frein culturel, de s’opposer au néo-malthusianisme présent et futur. La question n’est pas celle d’un changement de doctrine, mais d’un travail en profondeur, qui fasse en sorte que la pastorale tienne compte des situations et de ce que les gens sont en mesure de faire. »
En 1968, Humanae Vitae, l’encyclique de saint Paul VI « sur le mariage et la régulation des naissances, s’exprimait déjà dans le même sens : « Ne diminuer en rien la salutaire doctrine du Christ est une forme éminente de charité envers les âmes. Mais cela doit toujours être accompagné de la patience et de la bonté dont le Seigneur lui-même a donné l’exemple en traitant avec les hommes. Venu non pour juger, mais pour sauver (cf. Jn 3, 17), il fut certes intransigeant avec le mal, mais miséricordieux envers les personnes. Au milieu de leurs difficultés, que les époux retrouvent toujours, dans la parole et dans le cœur du prêtre, l’écho de la voix et de l’amour du Rédempteur. » (n. 29)
Le pape François en appelle donc à un « travail en profondeur » dans le domaine pastoral. Mais « la question n’est pas celle d’un changement de doctrine ».
Ce qui ne peut changer
Dans l’exhortation apostolique Amoris Laetitia, qui a suivi les deux synodes récents sur la famille, au n. 80, il y a une phrase qui est pratiquement passée inaperçue : rappelant le sens de l’acte conjugal, dans lequel union et procréation sont indissociables, le pape François conclut en affirmant que « donc, aucun acte génital des époux ne peut nier ce sens », avec une référence explicite aux nn. 11-12 de l’encyclique Humanae Vitae de Paul VI.
Cette affirmation du pape François confirme l’enseignement de cette encyclique sur un point essentiel : on ne peut jamais, pour aucune raison, dans aucune circonstance, priver de son sens l’acte conjugal. Humanae Vitae le signale au n. 14 : « C’est donc une erreur de penser qu’un acte conjugal rendu volontairement infécond et, par conséquent, intrinsèquement déshonnête, puisse être rendu honnête par l’ensemble d’une vie conjugale féconde. »
C’est un rappel de la pierre angulaire de tout l’agir moral : on ne peut jamais adhérer consciemment et délibérément à une action mauvaise. C’est ainsi qu’on ne peut jamais voler, même si on respecte habituellement la propriété d’autrui. On ne peut jamais tromper son conjoint même si on lui est généralement fidèle. On ne peut jamais mentir, même si on dit d’ordinaire la vérité. De même, on ne peut jamais contrefaire l’acte conjugal, même si on le vit bien la plupart du temps.