Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

L'avortement marque l'effondrement de la médecine, la leçon de Jérôme Lejeune

IMPRIMER

D'Ermes Dovico sur la NBQ :

L'avortement marque l'effondrement de la médecine, la leçon de Lejeune

Le droit à la vie n'est pas donné par les gouvernements, pour continuer à exister la civilisation doit se conformer à la morale naturelle". Le "père de la génétique moderne" et découvreur de la cause de la trisomie 21, Jérôme Lejeune, sera rappelé lors d'un congrès international de bioéthique à Rome les 17 et 18 mai. La Bussola interroge Aude Dugast, postulante à la cause de canonisation.

26_03_2024

Dans quelques jours, le 3 avril, sera célébré le 30e anniversaire de la mort de Jérôme Lejeune (1926-1994), grand généticien et pédiatre français, dont l'Eglise a reconnu les vertus héroïques. Pour célébrer cet anniversaire, une conférence internationale intitulée "Jérôme Lejeune et les défis de la bioéthique au XXIe siècle" se tiendra à Rome les 17 et 18 mai. Partant de la pensée de Lejeune, la conférence abordera certaines des réalisations (pour le meilleur et pour le pire) de la médecine moderne, les principaux aspects éthiques de la génétique, de la biotechnologie et des neurosciences, du diagnostic prénatal aux embryons à "trois parents", des traitements hormonaux de la dysphorie de genre au transhumanisme.

L'éventail des intervenants est large et de haut niveau : bioéthiciens, professeurs d'université, philosophes, juristes, médecins et chercheurs. Un débat pluridisciplinaire donc, mais "uni" par l'héritage scientifique et moral de Lejeune. La Bussola a interviewé la philosophe Aude Dugast, postulante à la canonisation de Lejeune et l'une des organisatrices du congrès.

Aude Dugast, commençons par le thème général du congrès : pourquoi est-il important de redécouvrir la pensée de Jérôme Lejeune pour faire face aux défis de la bioéthique au XXIe siècle ?

Parce que Lejeune était un grand scientifique, catholique, avec un regard véritablement prophétique sur la science et la médecine. Ce regard prophétique lui venait du plus haut niveau scientifique, d'une excellence académique reconnue dans le monde entier, et d'un grand amour pour les patients et leurs familles. Lorsque nous lisons ses conférences, ses articles, nous constatons qu'il semble parler d'aujourd'hui. Par exemple, lorsqu'il parlait de l'euthanasie il y a 40 ans, il semble décrire ce qui se passe aujourd'hui en France et dans le monde, dans les médias, dans la politique, dans la médecine. Il a compris avant tout le monde l'effondrement de la médecine et de la société. Il disait : "L'avortement, c'est l'interruption d'une vie qui dérange. L'âge n'a rien à voir là-dedans. Les personnes âgées sont autant exposées que les jeunes". Il est parti d'un discours de raison, compréhensible par tous : il est parti du serment d'Hippocrate, donc 400 ans avant la naissance de Jésus-Christ, arguant que tous les médecins, croyants ou non, sont liés par ce serment qui empêche de donner la mort.

Le Parlement français a inscrit le droit à l'avortement dans la Constitution et il existe un risque que d'autres pays suivent cet exemple. Lejeune était un fervent opposant à l'avortement. Combien une telle figure manque-t-elle à la France et au monde ?

Après le vote de la loi Veil, un journaliste a demandé à M. Lejeune s'il s'agissait de sa défaite. Il a répondu : "Ce n'est pas ma défaite, c'est la défaite des enfants de France. C'était très triste parce que c'était quelque chose de très concret, qui signifiait la mort de millions d'enfants. C'était une douleur très incarnée et très concrète. Mais il n'a pas baissé les bras, il a appelé à l'action. Il a dit : "Le droit à la vie n'est pas donné par les gouvernements. Les gouvernements n'ont donc pas le pouvoir de retirer ce droit à qui que ce soit. Pour que la civilisation continue d'exister, la politique devra nécessairement se conformer à la morale : à la morale qui transcende toutes les idéologies parce qu'elle est inscrite en nous par le décret impénétrable qui régit à la fois les lois de l'univers et la nature de l'être humain".

Lejeune a découvert la cause du syndrome de Down. Mais en tant qu'homme et pédiatre, qu'est-ce que cela a signifié pour les enfants atteints de ce syndrome et pour leurs parents ?

Cette découverte a été une révolution : la première découverte au monde d'une maladie d'origine chromosomique, un pas de géant pour la génétique. En fait, Lejeune a été appelé "le père de la génétique moderne". Mais la révolution la plus importante est humaine : un changement total pour les familles. Lejeune a voulu changer le nom de cette maladie, il l'a appelée trisomie 21, pour laisser derrière lui la stigmatisation et les idées fausses qui accompagnaient le mongolisme, comme on l'appelait auparavant. On pensait qu'il s'agissait d'une maladie contagieuse ou d'une "vengeance de Dieu" pour les péchés des parents. Ainsi, non seulement les familles avaient un enfant handicapé, mais elles subissaient la pression de la société qui les regardait de haut. Grâce à Lejeune, le regard de nombreux parents sur leurs enfants a totalement changé, ainsi que le regard de la société. J'ai eu tellement de témoignages de parents, de frères et sœurs qui ont vécu cela et qui m'ont dit que cela avait tout changé, qu'ils étaient passés d'un sentiment de honte à un sentiment d'espoir, grâce au professeur Lejeune qui aimait tellement leurs enfants trisomiques. Elles ont été frappées par le regard qu'il portait sur leur enfant, avec un amour inconditionnel. Par son regard, il a aussi appris aux parents à aimer leurs enfants. A tel point que le jour de ses obsèques à Notre-Dame, un jeune trisomique, Bruno, a traversé la cathédrale de Paris pour prendre le micro et dire aux 2000 personnes présentes : "Merci, Professeur Lejeune, pour ce que vous avez fait pour moi. Grâce à vous, je suis fier de moi".

Grâce aux études de Lejeune, des progrès ont été réalisés en matière de guérison ?

Pour recueillir son héritage scientifique et culturel, la Fondation Jérôme Lejeune a été créée. Aujourd'hui, à Paris, nous avons une clinique ambulatoire qui accueille 12 000 patients, la plus grande clinique d'Europe pour ces patients. Nous avons également ouvert une clinique en Espagne et une autre en Argentine. Et, comme Lejeune, nous faisons aussi de la recherche : de la recherche clinique avec les patients et de la recherche fondamentale, et nous travaillons donc avec de nombreux laboratoires dans le monde qui, grâce à notre aide financière, ont recommencé à travailler sur la trisomie 21.

La génétique progresse rapidement, mais pas toujours dans un sens vraiment humain. Que pensait Lejeune des tests prénataux effectués dans le but d'éliminer les enfants "imparfaits" ?

Cette élimination des enfants imparfaits était pour lui un déchirement, car sa découverte et sa recherche devaient être au service des enfants, pour essayer de les guérir, mais il y avait ceux qui les utilisaient contre eux. Il avait l'habitude de dire que "le racisme chromosomique est aussi horrible que toutes les formes de racisme" et que "la médecine pour l'avortement, c'est l'avortement de la médecine". Lorsque certaines personnes lui demandaient "mais pourquoi ne faites-vous pas de tests prénataux ?", il répondait qu'un test prénatal pour aider la famille à accueillir un enfant différent est très bien, mais il savait que, malheureusement, dans la plupart des cas, cet accueil n'avait pas lieu. Et ce n'est pas le cas.

Concernant le lien entre science et foi dans Lejeune, vous avez parlé du "caractère sacré de l'intelligence". Pourquoi ?

En étudiant la cause de canonisation de Lejeune, j'ai été frappé par cette sainteté de l'intelligence. La foi est la vertu de l'intelligence qui s'attache à la vérité. Et on le voit vraiment chez Lejeune parce qu'il est toujours resté fidèle à la vérité. Il a toujours compris qu'il n'y a pas de contradiction entre la foi et la science, parce que la foi nous donne la vérité révélée et la science nous fait comprendre comment fonctionne le monde : le monde créé par le Créateur ; la vraie science ne peut pas nous donner des conclusions différentes sur ce que Dieu a fait. Lorsqu'il semble y avoir une différence entre les conclusions de la science et celles de la foi, il disait qu'il fallait alors regarder plus scientifiquement parce qu'il y a sûrement quelque chose qui nous échappe, que nous n'avons pas bien compris. Et lorsque son intelligence lui montrait la voie à suivre, même si elle était escarpée, comment défendre publiquement la vie de ses patients et risquer des attaques violentes, il n'avait pas peur : il la suivait. Il a défendu héroïquement la vérité de la médecine. La vérité, associée à la charité, était sa boussole. Et son exemple a fait des miracles.

Des miracles ?

Oui, au sens de conversions. Je connais au moins deux exemples de médecins qui, après avoir entendu l'un de ses discours, se sont convertis et ont changé de vie, abandonnant des pratiques telles que l'avortement et l'insémination artificielle.

Le lien entre saint Jean-Paul II et Lejeune sera également abordé lors de la conférence. Le pape Wojtyła tenait Lejeune en haute estime. S'il devait rappeler un aspect de cette estime, lequel mettrait-il en avant ?

Il y avait une amitié et une communion spirituelle très profondes. Lejeune ne s'est pas qualifié d'ami du Saint-Père parce qu'il était trop humble. Jean-Paul II disait plutôt que Lejeune était un grand ami. En fait, chaque fois que Lejeune se rendait à Rome, Jean-Paul II l'invitait à assister à une messe privée au Vatican. Le Saint-Père lui a également demandé de créer l'Académie pontificale pour la vie, dont Lejeune a rédigé les statuts et la Déclaration des "Serviteurs de la vie", qui lie tout nouveau membre. Puis, en 1994, le pape l'a nommé premier président de l'Académie, que Lejeune n'a pu diriger que pendant 33 jours, car le matin de Pâques de cette année-là, le 3 avril, il a rendu son âme à Dieu.

À qui s'adresse idéalement votre conférence ?

Elle est ouverte à tous : chercheurs, médecins, scientifiques, philosophes, juristes, enseignants et en général à tous ceux, comme les jeunes, qui ont besoin d'avoir les idées claires sur tous les défis de la bioéthique aujourd'hui.

Commentaires

  • Depuis le décès de Jérôme Lejeune, la situation ne s'est pas améliorée, au contraire.
    La loi de tolérance pour l'avortement est devenue un droit qui vient d'être constitutionnalisé en France, en sorte qu'un doute plane même sur le maintien de l'objection de conscience. Plus la science fait apparaître l'humanité de l'embryon, plus l'acharnement à le détruire par les procédés les plus barbares s'intensifie.
    A l'autre bout de la vie, l'insécurité n'est pas moindre, avec l'extension des revendications d'euthanasie. Le serment d'Hippocrate, malmené depuis longtemps, est désormais frappé d'obsolescence.
    L'Académie pontificale pour la vie est maintenant présidée par un homme dont le comportement et les prises de position font scandale. Ses membres fidèles à l'inspiration originelle ont été écartés et remplacés par des envoyés de Davos. Elle semble se préoccuper davantage de la vie des arbres que de celle des personnes.
    Ces dernières années, la sagesse de Jérôme Lejeune nous aurait été bien utile pour faire la distinction entre soignants et marchands de peur, entre remèdes et poisons. Mais Dieu lui a épargné le spectacle du discrédit de sa corporation enchaînée à la corruption, auxiliaire du despotisme, complice du mensonge médiatique.
    Il y a un demi-siècle, Jérôme Lejeune dérangeait déjà. Aujourd'hui, il serait incarcéré. Mais sa voix traversant les murs porterait toujours avec autant de clarté.

Écrire un commentaire

NB : Les commentaires de ce blog sont modérés.

Optionnel