Témoignage de Carlo COSTALLI*
Bien que la guerre et les conflits directs avec l’Ethiopie soient finis depuis longtemps, l’Erythrée vit une situation extrême et préoccupante marquée par la misère qui conduit beaucoup d’habitants à fuir le pays. Des faits récents ont remis en pleine lumière le problème des milliers de réfugiés provoqués par cette situation, dont beaucoup se sont réfugiés au Soudan.
J’ai récemment parcouru l’Eryhrée – pour rendre visite aux initiatives financées là-bas (à hauteur de 0,5%) par le Mouvement chrétien des Travailleurs (MCL), à travers de grandes difficultés, et j’ai assisté personnellement à des situations angoissées et angoissantes d’un peuple vivant des situations extrêmes. Et pourtant, les autorités affirment que la situation approche de l’autonomie alimentaire ! Cela serait possible si, au lieu de faire la guerre, des accords commerciaux avaient été signés avec l’Ethiopie: il est très difficile de comprendre comment il se fait que deux Etats subsahariens, seuls héritiers d’une grande civilisation, ont pu se livrer à une guerre aussi longue et aussi destructrice.
L’Erythrée s’enlise dans une situation de misère inextricable mais, par un inexplicable silence de la part des mass-médias internationaux (dans le pays, les journalistes étrangers ne sont pas admis), presque rien ne filtre de la situation dans laquelle le pays sombre et d’où, par ailleurs, les missionnaires sont expulsés et où les ONG ne peuvent exercer leurs activités.
Les ordres religieux présents en Erythrée, malgré de fortes restrictions, travaillent dans des zones difficiles, que ce soit en raison des conditions géographiques ou du contexte socio-économique ; souvent, ils sont là où personne d’autre ne voudrait se rendre. En-dehors du témoignage de leur vie religieuse, de l’activité paroissiale, de l’assistance spirituelle, ils accueillent dans leurs maisons des centaines d’orphelins et gèrent un vaste réseau d’assistance de promotion sociale, étant donné que deux tiers des Erythréens vivent de l’aide humanitaire.
Les centres de subsistance tenus par les religieux ne réussissent pas à atténuer la demande des besoins alimentaires, due à des périodes de sécheresse récurrente avec les famines qu’elles entraînent. Ce travail est mené par les religieux dans un des contextes socio-politiques les plus désespérants qui soit. Et le flux des réfugiés est en constante augmentation: au Soudan seul, il n’y en a pas moins de 250.000.
Parmi les rencontres particulièrement importantes que j’y ai faites, il y eut celle avec l’ambassadeur d’Italie en Erythrée, Marcello Fondi. Au cours de cet échange, il a été question du drame vécu par les jeunes contraints de laisser leur propre terre pour chercher un futur meilleur et qui, hélas, trouvent souvent la mort dans les déserts ou sur la mer. Le Mouvement chrétien des Travailleurs développera son implication en Erythrée avec « le souhait que la société internationale organise l’accueil des réfugiés et aide l’Erythrée à trouver des chemins de liberté, de progrès, de paix, de justice et de travail pour tous les Erythréens ».
(*) President du Movimento Cristiano Lavoratori
dans la Bussola Quotidiana, 10 février 2011