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  • "Loin de sortir de la crise doctrinale, nous nous y enfonçons..."

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    De Philippe Maxence sur le site de l'Homme Nouveau :

    Après Traditionis Custodes…

    Notre quinzaine : Après Traditionis Custodes…

    Le mois de juillet aura été celui d’un profond bouleversement. Par le motu proprio Traditionis Custodes (16 juillet 2021), le pape François a annulé l’esprit et les dispositions pratiques de Summorum Pontificum de Benoît XVI (voir ici et ici). Que stipulait ce texte de 2007 ? Voulant mettre un terme à des décennies de guerre liturgique, Benoît XVI avait rappelé que l’ancien missel n’avait jamais été abrogé et qu’il existait donc deux formes – l’une ordinaire (missel de 1969), l’autre extraordinaire (missel de 1962) – du seul rite romain. Il organisait aussi les aspects pratiques de la coexistence des deux missels. Jamais, à aucun moment, la forme dite extraordinaire n’avait été rendue obligatoire et la très grande majorité des catholiques avait continué à fréquenter la forme ordinaire. En revanche, petit à petit, des communautés cléricales spécialisées dans la célébration de la forme extraordinaire et de tout ce qui l’accompagne (pédagogies traditionnelles, catéchisme, scoutisme, etc.) s’étaient développées, attirant un nombre non négligeable de vocations.

    Cette réalité est donc profondément remise en cause. François affirme qu’il n’existe qu’une forme du rite romain – le missel de Paul VI – et il gèle tout développement des lieux de culte célébrant dans la forme extraordinaire (interdiction de nouvelles paroisses dites personnelles, interdiction de célébrer dans les paroisses territoriales, etc.). Il remet à la discrétion des évêques le soin de gérer l’héritage antérieur au regard des nécessités pastorales.

    Raisons et paradoxes

    Il n’est un secret pour personne que ce texte a été perçu comme extrêmement dur. Même en dehors des milieux concernés, de nombreuses voix se sont élevées pour dire leur incompréhension et ce jusqu’à l’extérieur de l’Église. Le cas le plus emblématique étant certainement celui du philosophe athée Michel Onfray publiant dans Le Figaro une tribune montrant la portée profonde de cette décision, non seulement pour l’Église mais pour la civilisation et la culture. Un certain nombre d’évêques ont par ailleurs manifesté leur souci pastoral en indiquant qu’ils conservaient leur confiance aux prêtres célébrant la forme extraordinaire et qu’ils maintiendraient la situation antérieure.

    Si le pape François a pris une telle décision, c’est qu’il estime qu’il y a un risque de constitution d’une Église parallèle et une remise en cause croissante de Vatican?II. Soulignons toutefois que ces mesures ne concernent pourtant pas la Fraternité Saint-Pie X fondée par Mgr Lefebvre, à laquelle François a accordé un tel nombre d’autorisations qu’elle se trouve de fait comme reconnue au sein de l’Église. Or, c’est en son sein que continue d’être portée une critique constante de Vatican II. La sévérité à l’égard des catholiques à l’intérieur des structures ecclésiales et la modération à l’égard de ceux qui sont à l’extérieur ne laissent pas d’interroger.

    Fin de la paix liturgique ?

    Le motu proprio de François arrive au bout de quatorze ans d’existence de Summorum Pontificum. Quatorze ans, seulement ! C’est oublier que les guerres civiles, et plus encore les guerres civiles religieuses, sont extrêmement longues à cicatriser. Il y faut plusieurs générations. En un mot, il aurait fallu laisser du temps au temps comme disait François Mitterrand, là où la précipitation risque d’être une mauvaise conseillère.

    Nous pourrions croire que seule une partie de l’Église est concernée. Ce n’est pas le cas ! D’abord parce qu’il s’agit d’un acte universel du souverain pontife. Ensuite parce que Benoît XVI avait rendu à la liturgie romaine classique son rang de bien commun alors qu’elle était devenue de fait le bien d’une partie seulement. Enfin parce que des questions doctrinales se posent. Si, contrairement à ce que pensait Benoît XVI, la messe traditionnelle ne peut être la lex orandi (la loi de la prière) de Vatican II, à l’instar de la messe de Paul VI, alors ceux qui critiquent ce concile comme une rupture radicale avec la Tradition se trouvent fondés dans leur approche. Nous sommes donc dans une situation qui remet en cause non seulement Summorum Pontificum de Benoît XVI mais aussi son discours de décembre 2005 sur les deux herméneutiques. Loin de sortir de la crise doctrinale, nous nous y enfonçons. Et cette situation concerne tous les catholiques, pratiquants ou non de la forme extraordinaire. L’heure est donc à la prière pour le pape, les évêques et la paix surnaturelle entre catholiques.

  • Qui sont les catholiques anti-vaccin ?

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    D'Héloïse de Neuville sur le site du journal La Croix :

    Qui sont les chrétiens opposés à la vaccination obligatoire ?

    Une petite partie des chrétiens sont opposés, à l’instar d’autres Français, à la vaccination obligatoire et au passe sanitaire. Leur contestation peut quelquefois trouver racine dans leur foi, mais s’explique surtout par des motifs culturels et sociologiques.

    29/07/2021 

    Les modérateurs du groupe ont fini par clôturer la section des commentaires. C’était peut-être la plus sage décision à prendre, tant le débat devenait passionnel et clivant. Et menaçait d’acter, au sein d’une communauté rassemblée par une foi fédératrice, des différends irréconciliables.

    → À LIRE. Covid-19 : entre pro et anti-vaccins, un dialogue électrique

    Sur le groupe Facebook « Little Catho » qui réunit en ligne 7 400 catholiques français, comme dans de nombreuses familles et paroisses ces dernières semaines, les avis autour de la pression vaccinale ont enflammé les discussions. Rien n’indique que les catholiques sont plus sensibles aux théories du complot ou qu’ils sont plus hostiles à la vaccination que la population générale. Pour autant, il existe chez certains de ces croyants des marqueurs et des prédispositions particulières sur ces questions.

    « Que pensez-vous de la vaccination obligatoire des soignants ? Je la refuse, on dit qu’elle est faite – au moins pour certains vaccins de cellules de bébés avortésEst-ce que certains soignants catholiques l’ont fait ? », interroge par exemple Marie (1) lançant ainsi la conversation virtuelle qui a vu s’opposer sur « Little Catho » des fidèles aux positions tranchées.

    « Ces catholiques ont perdu confiance en l’État pour réguler la science »

    Las, la discussion n’a pas donné lieu à des retournements d’opinion, tant les arguments avancés sont devenus des convictions indéboulonnables. Qu’ils s’expriment sur les réseaux sociaux ou qu’ils soient physiquement présents dans les manifestations contre le passe sanitaire, les catholiques venus grossir les rangs des Français opposés aux nouvelles mesures gouvernementales sont dans leur grande majorité, soit des fidèles traditionalistes, soit des catholiques observants ayant l’habitude de se mobiliser sur les enjeux de bioéthiques.

    « Depuis l’adoption des lois de bioéthique comme le mariage pour tous et la PMA pour toutes, ces catholiques-là ont perdu confiance en la capacité de l’État à réguler les poussées scientifiques. Ils considèrent que les gouvernements successifs repoussent opportunément les barrières éthiques qu’ils sont censés fixer, à chaque fois qu’une expérimentation supplémentaire sur le plan médical semble nécessaire. Il est probable que cette mémoire conflictuelle et cette perte de crédit de l’État à leurs yeux sur ces questions jouent un rôle dans le scepticisme vis-à-vis des vaccins contre le Covid-19 », observe le sociologue historien du catholicisme Yann Raison du Cleuziou.

    Une question morale ?

    Si les oppositions à la stratégie sanitaire du gouvernement ont toutes leur légitimité à s’exprimer dans le débat démocratiqueun certain type de défiance – plus partisan – est alimenté par des circuits d’informations fabriqués souvent hors des médias traditionnels. Là encore les mobilisations sur les lois de bioéthiques ont constitué un point de rupture pour des catholiques, selon Yann Raison du Cleuziou: « Pendant la Manif pour Tous, beaucoup de fidèles observants se sont sentis caricaturés de manière outrancière par les médias dominants. Ils sont donc allés chercher les informations correspondant mieux à la représentation qu’ils ont d’eux-mêmes sur d’autres canaux, sur des sites comme le Salon Beige et les réseaux sociaux. Cette mise à l’épreuve médiatique leur a fait prendre confiance dans de nouveaux médias, où l’information n’est pas toujours vérifiée. »

    → À LIRE. Covid-19 : la nébuleuse des militants anti-vaccins

    De fait, des références dans les milieux catholiques à des figures jugées complotistes ou non fiables par les médias traditionnels sont souvent brandies. « Personnellement, j’écoute la généticienne Alexandra Henrion-Caude, le professeur Montagnier, prix Nobel de médecine, et le docteur Raoult, qui est l’un des infectiologues les plus réputés au monde. Ils sont contre un vaccin en essai en phase deux ; je ne suis pas un cobaye de laboratoire et mon médecin sait très bien soigner le coronavirus comme beaucoup d’autres médecins. Bon courage ! », commente l’un des internautes du groupe « Little Catho », citant là trois figures médicales controversées, dont les propos sont le plus souvent rapportés sans recul par des sites d’informations alternatifs.

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  • Pourquoi il faut prendre le projet antispéciste au sérieux

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    De  sur le site de la Revue des Deux Mondes :

    Paul Sugy : « Il faut prendre le projet antispéciste au sérieux »

    Dans « L'Extinction de l'Homme : Le projet fou des antispécistes » (Tallandier, 2021), Paul Sugy fait un tour d'horizon de la pensée antispéciste et alerte sur le péril anthropologique qu'elle constitue.

    Paul Sugy : C’est une idéologie qui a été forgée par des militants afin de servir la cause de la libération animale. Cette idéologie s’oppose à ce qu’elle appelle le « spécisme », autre néologisme qui désigne la discrimination des espèces et la préférence accordée aux humains par rapport aux autres formes de vie. L’antispécisme s’oppose à cette discrimination, en se calquant sur le modèle de la lutte contre le racisme ou le sexisme, et considère que tous les animaux sensibles ont un intérêt vital à ne pas souffrir. Par conséquent, pour eux, faire souffrir des animaux pour notre bien-être, pour notre consommation personnelle, correspond à une forme d’injustice et à une discrimination. Pour eux, c’est parce que les cochons ne sont pas des humains que nous nous permettons de les tuer.

    L’antispécisme prône une plus large inclusion des animaux sensibles dans notre société, pour mettre fin à ce qu’ils appellent « l’oppression spéciste ». On peine évidemment à mesurer les conséquences politiques et juridiques que cela pourrait avoir, puisque cela supposerait de changer du tout au tout notre rapport aux animaux.

    Revue des Deux Mondes : Quelles sont les racines intellectuelles de ce mouvement ?

    Paul Sugy : L’antispécisme prolonge la très longue histoire du végétarisme, qui a au fond toujours existé. Depuis que les civilisations humaines ont fait de la viande non seulement un objet de consommation mais aussi un objet culturel et parfois, à l’époque, un objet religieux, il y a eu des contestations de ces traditions. Par exemple, le végétarisme antique a poussé Pythagore à s’en prendre très violemment à la consommation de viande, quasiment de manière blasphématoire puisqu’il remettait en cause les sacrifices d’animaux. Plus récemment, on a retrouvé cette critique chez les Lumières, précisément chez Voltaire qui prônait la fin de l’anthropocentrisme. Ce décentrement prépare l’arrivée au XIXe siècle de penseurs moralistes qui vont opérer un tournant radical dans la morale en décrétant que le bien correspond au plaisir et au bien-être, tandis que le mal correspond à la souffrance : c’est l’utilitarisme de Jeremy Bentham.

    Peter Singer, l’un des initiateurs de la cause antispéciste, reprend à son compte cette philosophie en 1975 dans son livre La Libération animale. Il en fait le fondement de ce qui deviendra le mouvement antispéciste. Et aujourd’hui, l’antispécisme, après le stade moral et philosophique qu’il a passé ces dernières décennies, est rentré dans un stade politique, c’est-à-dire qu’il veut faire aboutir sa réflexion dans un projet de société révolutionnaire qui mènerait à la libération animale et à un nouveau système qui serait « zoopolitique », dans lequel les droits et les devoirs des animaux seraient garantis par la loi.

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  • Bruxelles (UCL), 4 octobre : conférence internationale "Bioethics & Conscience"

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    https://www.ieb-eib.org/en/conference/

  • Les USA lancent une guerre froide idéologique sous l’égide de l’ONU

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    De Ludovic Lavaucelle sur La Sélection du Jour :

    Les Etats-Unis lancent une guerre froide idéologique sous l’égide de l’ONU

    La gauche américaine attendait l’élection de Joe Biden à la Maison Blanche pour lancer une nouvelle offensive. Le 16 juillet, le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a envoyé une missive à toutes ses ambassades qui sonnait comme une mobilisation générale. Il exhortait ses troupes à maintenir une pression maximale dans leurs échanges avec les pays tiers, en vue de soutenir le modèle démocratique et le respect des droits de l’Homme. La realpolitik est abandonnée. La première puissance mondiale doit être le fer de lance d’une nouvelle croisade pour le bien de tous, alliés comme rivaux… Le Président Biden a été explicite sur ce sujet : le 21ème siècle sera une période charnière pour déterminer qui doit l’emporter, des démocrates ou des autocrates. Si la Russie et la Chine sont des ennemis désignés, les « populistes » en Amérique et en Europe sont aussi visés. L’écrivain et essayiste N.S. Lyons (voir son article en lien ci-dessous sur son blog) prévient que cette guerre idéologique est bien différente de celle qui a permis au monde libre de vaincre l’URSS.

    Antony Blinken a aussi déclaré que l’administration américaine s’était fixé la priorité de combattre les injustices raciales partout dans le monde et sur son territoire. Joignant l’acte à la parole, il a pris l’initiative de demander au rapporteur spécial de l’ONU sur le racisme d’analyser le « racisme systémique » aux États-Unis. Il réagissait à la déclaration de la Haute Commissaire aux Droits de l’Homme, Michele Bachelet, qui, le 26 juin, avait tancé les pays occidentaux accusés de ne pas faire suffisamment pour déraciner le racisme et les discriminations de leurs lois et institutions. Les démocrates au pouvoir aux États-Unis veulent être les porte-étendards de cette croisade. Ils ont par exemple encouragé leurs ambassades à arborer un drapeau aux couleurs du mouvement Black Lives Matter. Dans un autre registre, l’USAID, l’Agence Nationale U.S. pour l’Aide et le Développement, a lancé une campagne sur les réseaux sociaux pour mobiliser la communauté homosexuelle et transgenre de la province ukrainienne du Donbass (que les Russes convoitent)…

    Le 23 juin, les États-Unis, soutenus par 20 pays, ont créé un nouveau groupe sous l’égide de l’ONU dédié au combat contre les violences faites aux transsexuels. Un « expert indépendant » a déjà remis une feuille de route. Un nouveau devoir doit s’imposer à tout État de droit : garantir que l’être humain a un droit absolu à définir son identité. Cet « expert indépendant » a rédigé une nouvelle table des commandements : 1/ la décision appartient à l’individu ; 2/ le processus administratif pour changer de « genre » doit être simple ; 3/ personne ne doit être soumis à des obligations comme une ordonnance médicale ; 4/ l’accès au changement de « genre » doit être exhaustif et prendre en compte toutes les options « non-binaires » ; 5/ les mineurs doivent profiter de ce nouveau droit sans aucune contrainte. L’ONU n’est plus seulement le « machin » vilipendé par le général de Gaulle mais une nouvelle église en charge d’édicter des normes pour créer un « homme nouveau ».

    Le monde entier n’est évidemment pas prêt à embrasser cette nouvelle foi. Mr. Madrigal-Borloz, l’expert désigné par l’ONU, a donc publié un rapport dénonçant les « pratiques d’exclusion ». Les choses sont claires : les populistes et réactionnaires se cachent derrière des expressions comme la défense d’une « prétendue loi naturelle » et des « valeurs traditionnelles ». Ce rapport doit être adopté par l’ONU lors de l’assemblée de septembre 2021. Il ne suffira plus d’avoir des institutions démocratiques pour appartenir au camp du Bien. Il faudra aussi adopter avec ferveur les nouveaux dogmes progressistes. Sus aux hérétiques ! Un mauvais esprit penserait à la résurgence d’un impérialisme porté par la sainte alliance États-Unis/ONU.

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  • Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) : un nouveau rapport de l'ECLJ prouve des atteintes à l’indépendance de nombreux experts de cette institution

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    Du site de l'European Centre for Law & Justice :

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    Après avoir mis en lumière les conflits d’intérêts entre certaines ONG et des juges de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), l’ECLJ a poursuivi ce travail d’enquête auprès d’une autre institution internationale basée à Genève : le Conseil des droits de l’homme des Nations unies.

    L’ECLJ est fier de publier aujourd’hui un nouveau rapport prouvant des atteintes à l’indépendance de nombreux experts de cette institution.

    Dans son précédent rapport, l’ECLJ avait démontré l’existence de conflits d’intérêts touchant des juges de la CEDH. L’exactitude de ce premier rapport a depuis été reconnue par les ambassadeurs du Conseil de l’Europe[i]. Cette fois, l’ECLJ s’est attelé à étudier méticuleusement pendant plusieurs mois les déclarations publiques de financement des experts de l’ONU. Nous avons ensuite tenu à les interviewer pour avoir leur avis sur ces questions. L’ECLJ a pu réaliser plus de 25 entretiens avec ces experts des Procédures spéciales de l’ONU. Ce qui en ressort est édifiant.

    La principale conclusion de ce rapport est que des fondations privées financent directement des experts de l’ONU pour que ceux-ci rédigent des rapports allant dans le sens voulu par ces fondations privées. Ces rapports sont ensuite promus comme des recommandations indépendantes émanant de l’ONU, et repris par des gouvernements et des juridictions internationales pour soutenir ou justifier leurs décisions. Ceci est en contraction flagrante avec le code de conduite des experts et les résolutions du Conseil des droits de l’homme. Les experts devraient être indépendants, non seulement vis-à-vis des États mais aussi vis-à-vis des fondations privées qui veulent aligner l’agenda des experts sur le leur.

    Un exemple parmi d’autres tiré de notre rapport : Juan Méndez, Rapporteur spécial sur la torture entre 2010 et 2016 a été en même temps membre du conseil d’administration de l’Open Society Justice Initiative[ii]. L’Open Society Foundations lui a fourni un financement sur deux ans de 200 000 USD pour financer son centre de recherche l’Anti-Torture Initiative qui l’assiste dans la rédaction de ses rapports[iii]. En 2015, Monsieur Méndez a reçu 90 000 USD de la Fondation Ford, pour organiser une consultation d’experts sur le thème du genre et de la torture[iv], puis pour engager un assistant de recherche en vue de la rédaction d’un rapport sur le genre et la torture et pour en faire la promotion[v]. Le rapport officiel de l’expert sur le genre et la torture fut publié par l’ONU le 5 janvier 2016 et promeut l’avortement dans les mêmes termes que les fondations qui l’ont financé[vi]. À aucun moment le Rapporteur ne fait référence à la générosité de la Fondation Ford ou de l’Open Society Foundations.

    On observe à nouveau que l’Open Society et ses fondations affiliées figurent parmi les plus généreux pourvoyeurs de fonds auprès des experts du Conseil des droits de l’homme, aux côtés de la Fondation Ford.

    Il ressort également de notre enquête que la situation des experts varie grandement. Certains ne sont pas financés, d’autres résistent aux propositions ou démissionnent et sont donc très heureux que le travail d’enquête de l’ECLJ voit le jour. D’autres encore semblent accepter les financements privés sans réellement comprendre en quoi cela serait problématique et d’autres enfin acceptent avec plaisir les centaines de milliers de dollars pour promouvoir des causes qu’ils partagent avec les fondations, quand bien même ces combats idéologiques iraient au-delà de leur mandat.

    Dans son rapport, l’ECLJ s’attache à expliquer les causes de cette faille dans la protection de l’indépendance des experts ; pourquoi des fondations privées investissent massivement dans les Procédures spéciales de l’ONU ; pourquoi ce sont bien souvent les mêmes qui agissent auprès de la CEDH et quelles solutions seraient envisageables pour éviter cette « capture » des experts onusiens.

    L’ECLJ se réjouit que Valeurs Actuelles ait consacré cette semaine sa couverture et un dossier de 12 pages à cet important travail d’enquête. Les données et conclusions de ce rapport se fondent en effet sur les déclarations officielles disponibles librement sur le site internet du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, sur les sites internet des fondations finançant les experts et sur les affirmations directes de certains de ces experts des Procédures spéciales.

    Avec ce deuxième grand rapport pour favoriser l’indépendance réelle des institutions internationales, nous vous encourageons à participer à notre engagement en lisant ce rapport et en le partageant le plus largement possible.

    Télécharger le rapport sur le financement des experts de l'ONU

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    [i] Grégor Puppinck, « Le Conseil de l’Europe admet la véracité du rapport sur les ONG et les juges de la CEDH », Valeurs Actuelles, 16 avril 2021.
    [ii] OSF, Torture: It Can Happen Anywhere, February 13, 2014, https://www.opensocietyfoundations.org/voices/torture-it-can-happen-anywhere
    [iii] ONU, A/HRC/31/39 Annexe X - p.51.
    [iv] Ibid.
    [v] Ibid.
    [vi] ONU, « Perspectives de genre sur l’interdiction de la torture et des traitements cruels, inhumains et dégradants », A/HRC/31/57.

  • Unifier la liturgie ?

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    De Louis Manaranche sur Aleteia.org :

    « Traditionis Custodes » : un appel à l’unification liturgique

    Au fil des siècles, la liturgie s’est toujours fixée dans l’Église à l’aune de l’expérience et des usages du Peuple de Dieu. Pour l’historien Louis Manaranche, une intégration renouvelée des trésors de la tradition dans la liturgie ordinaire pourrait consolider la communion.

    Depuis la publication du motu proprio Traditionis Custodes, l’Église de France revit des débats qui semblent tout droit venus des années 1970 et 1980. À l’exception des questions à proprement parler doctrinales, qui restent discrètes, recommence une discussion sans fin sur la manière de lire le concile Vatican II, entre « herméneutique de la continuité » et « Pentecôte nouvelle » ou « disruptive » comme on dirait aujourd’hui, à travers le prisme de la liturgie. Celle-ci, que l’on appelle dans la tradition occidentale la lex orandi (loi de la prière), qui exprime la lex credendi (loi de la foi) de l’Église, a été profondément réformée dans le contexte de ce grand événement. 

    On mentionne toujours la possibilité de célébrer en langue vernaculaire et face au peuple mais on devrait peut-être évoquer d’abord deux autres caractéristiques notables : la liturgie de la Parole plus déployée avec un nouveau lectionnaire profondément renouvelé et une variété considérable de prières eucharistiques (treize si on inclut des prières assez peu usitées), en lieu et place de l’ancien et unique canon romain devenu la prière eucharistique numéro I. 

    L’expérience liturgique du Peuple de Dieu

    Force est de constater que cette messe dite de Paul VI nourrit depuis plus de cinquante ans la foi, l’espérance et la charité du Peuple de Dieu, qui en goûte tout particulièrement la plus grande intelligibilité et l’accès renouvelé à la Parole de Dieu. En outre, cette messe a progressivement pris une forme stabilisée avec trois prières eucharistiques largement privilégiées et une disparition progressive — et inégale — des tentatives de créativité malheureuses. Cette évolution nous rappelle combien, selon l’expression conciliaire, le Peuple de Dieu est l’acteur qui célèbre la liturgie.

    C’est avec cette conviction qu’il faut aussi considérer la messe tridentine. Fixée par le pape Pie V dans le contexte d’un concile de Trente de réforme interne de l’Église catholique en réponse à la Réforme, cette messe entérinait et codifiait ce que contenait depuis au moins un siècle la messe romaine. Ainsi, ce missel s’appuyait déjà sur l’expérience liturgique du Peuple de Dieu et a été la norme de celle-ci pendant encore quatre siècles. Sans entrer dans le débat sur l’abrogation ou non de l’ancien missel après 1969, il convient de bien percevoir que sa pratique n’a en réalité jamais été interrompue, en premier lieu parce qu’elle répondait à l’attente de certains catholiques. Son sens du sacré, de la continuité exprimée par le latin et le chant grégorien, l’accent net mis sur la messe comme sacrifice ont, parmi d’autres éléments, été au cœur de la vie liturgique, sans interruption, de nombreux chrétiens.

    Renouveau et tradition

    Sans non plus entrer dans la controverse sur la pérennité de deux missels dans le même rite latin, nous pouvons lire l’appel du Saint Père vers une unification liturgique à l’aune de cet état de fait. Si tant d’éléments ont « survécu » à la réforme liturgique et surtout à une application parfois radicale de celle-ci, n’est-il pas envisageable que le missel jadis dit « ordinaire » puisse intégrer plus explicitement des modalités de célébration qui permettent de proposer à tous tant le renouveau vécu par la masse des chrétiens que les trésors de tradition que certains ont voulu maintenir intacts ?

    On objectera que bien des éléments, du latin au canon romain en passant par le chant grégorien ou même l’orientation sont déjà possibles et c’est exact. Toutefois, en le formulant de manière renouvelée et le permettant dans des lieux plus nombreux, dans le plus grand respect de la sensibilité des fidèles et des prêtres, de vivre la messe ainsi, un chemin de paix et de communion plus profonde pourrait apparaître…

  • "Cancel culture" : les nouveaux iconoclastes

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    De Guillaume Bonnet sur le site de France Catholique :

    La «  cancel culture  », des États-Unis à la France

    Les nouveaux iconoclastes

    19 mars 2021

    Inconnue il y a encore quelques mois, l’expression «  cancel culture  », importée des États-Unis, s’est imposée dans l’actualité. Cette «  culture de l’effacement  » entend reformater les esprits, pour les couler dans une idéologie dont le seul moteur semble être le nivellement des consciences. Au prix d’un déracinement systématique.

    Difficile de ne pas songer à la «  novlangue  », le sabir inventé par Orwell dans 1984 pour asseoir la domination totalitaire de Big Brother, quand on considère l’afflux de néologismes, d’acronymes et d’anglicismes – façonnés dans les universités, les salles de rédactions et les ONG – qui trouvent leur terreau dans les réseaux sociaux.

    Déjà, ils s’épanouissent dans le discours public et ne tarderont peut-être pas à s’imposer dans l’intimité des foyers. Dans le camp du bien : les «  wokes   » (comme «  éveillés  »), les «  SJW   » («  social justice warriors  » ou combattants de la justice sociale), les décoloniaux, le mouvement #MeToo…

    Dans le camp du mal : le système patriarcal, l’hétéronormativité, le «  male gaze  » (regard masculin dominateur), les «  Karen   » (les femmes blanches d’âge mûr complices du système-hétéronormé-et-du-racisme-systémique)… Vous ne comprenez rien à ce jargon ? C’est normal. Et tout est fait pour interdire le moindre débat. Le «  Wokistan   » – surnom péjoratif donné à cette nébuleuse idéologique, militante et sentencieuse – a mis au point un outil très efficace pour imposer sa vision du monde : la «  cancel culture  » qui vise à retrancher du paysage, de l’histoire et des cerveaux toute survivance d’un passé honni et tout individu vecteur de schémas archaïques.

    L’horizon indépassable ? Un «  espace de sécurité  » global, d’où serait bannie toute «  micro-agression  », c’est-à-dire toute parole et tout geste qui pourraient blesser telle ou telle communauté – ethnique, sexuelle et autre. Un cauchemar digne de la pire des fictions totalitaires ? Il est déjà réalité dans les universités anglo-saxonnes et le phénomène commence à poindre en France, avec les «  espaces non mixtes  », réservés à seulement à ceux qui peuvent s’estimer ciblés par une «  phobie  » quelconque…

    Les États-Unis en première ligne

    Pas un seul jour sans que l’on n’apprenne un nouvel «  effacement  ». C’est aux États-Unis que se déroulent les opérations les plus spectaculaires. Fin janvier, une commission de San Francisco a décidé de débaptiser 44 établissements qui portent le nom de personnalités supposées avoir «  pratiqué l’esclavage, opprimé les femmes, empêché le progrès social, mené des actions ayant conduit à un génocide  ».

    Dans le collimateur de la commission, non pas d’affreux séides du Ku Klux Klan ou des nostalgiques de la ségrégation, mais Washington, le père de la démocratie américaine, accusé d’avoir possédé des esclaves. Ou Lincoln, qui a aboli l’esclavage mais a ordonné la pendaison de 38 Sioux en 1862. L’univers du sport connaît des purges lexicales majeures, en particulier celui du base-ball avec deux équipes mythiques, les Redskins de Washington et les Indians de Cleveland, rebaptisées car leurs noms étaient jugés offensants pour les populations indiennes.

    L’univers marketing n’est pas en reste. La marque de riz Uncle Ben’s n’a pas manqué d’en faire les frais. Exit l’attachant grand-père noir qui l’incarnait, véhiculant avec lui l’atmosphère des grandes plantations du Sud. Mars, l’actionnaire de la marque, l’a rebaptisée Ben’s Original, et s’est engagé à financer un programme de soutien aux communautés afro-américaines du Mississippi…

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