De Johan A. Monaco sur The Catholic World Report :
Que signifie être "en communion" aujourd'hui ?
L'idée de "communion" est bien trop précieuse pour la vie de l'Église pour qu'on la lance sans réfléchir et à des fins idéologiques. Mais c'est exactement ce qui se passe.
2 octobre 2022
Il y a quelques mois, un évêque catholique de Porto Rico a été démis de ses fonctions par le pape François, dans un geste dont certains ont remis en question l'opportunité. Le 9 mars, l'évêque Daniel Fernández Torres a été relevé de ses fonctions apostoliques dans le diocèse d'Arecibo. Son crime ? Selon l'évêque lui-même, on lui reproche de ne pas avoir "été obéissant au pape" et de ne pas avoir apparemment "suffisamment communié avec mes frères évêques de Porto Rico".
La prudence nous dicte d'attendre de plus amples informations sur cette situation particulière. Mais en l'état actuel des choses, il semble que cet évêque se soit distingué pour un certain nombre de raisons : il a refusé d'envoyer ses séminaristes au nouveau séminaire interdiocésain de Porto Rico, il a refusé de signer de multiples déclarations de la conférence des évêques (y compris celles qui restreignaient sévèrement la messe traditionnelle en latin), il a déclaré que les catholiques avaient le droit d'avoir une objection de conscience aux vaccins COVID et il a plaidé contre l'idéologie du genre. À ce jour, Mgr Fernández reste un évêque sans siège, son remplaçant a été nommé, et sa demande d'audience papale n'a pas encore été accordée.
L'armement de la "communion
Trop souvent, des mots spécifiques populaires dans le discours catholique prennent une vie propre, ou plutôt, sont manipulés pour correspondre à un sens spécifique, que ce sens soit justifié ou non par la signification du mot lui-même. Des mots tels que "accompagnement", "rencontre", "dialogue" et "rigide" fonctionnent comme des sifflets à chiens ecclésiaux. Ils signifient exactement ce que l'orateur souhaite qu'ils signifient, ni plus ni moins.
Par exemple, nous pouvons entendre dire que les catholiques doivent "accompagner" les politiciens pro-avortement alors qu'ils essaient de prendre la décision apparemment difficile de soutenir ou non l'infanticide. Un tel "accompagnement", cependant, se réfère apparemment à leur tenir la main dans la file d'attente pour recevoir la Sainte Communion, et jamais à les "accompagner" jusqu'au confessionnal le plus proche. Dans le même ordre d'idées, la "rencontre" - qui a été le mot à la mode du pontificat du Pape François - a été définie comme permettant aux personnes marginalisées de "faire partie de la vie de la communauté sans être gênées, rejetées ou jugées".
On ne voit pas très bien comment le pontificat actuel est capable de promouvoir simultanément cette définition de la "rencontre", tout en interdisant aux paroisses d'énumérer les moments où la messe traditionnelle en latin est proposée. On nous dit de "dialoguer" avec les adeptes d'autres religions, mais dès que le dialogue se transforme en tentative de convaincre le non-catholique de la vérité de la Foi, il semble que nous ayons raté le coche. "Rigide" semble toujours faire référence à ceux qui sont attachés aux formes traditionnelles de culte, mais jamais à ces personnes inflexibles et insistantes qui affirment que les décisions prises dans les années 1970 sont irréversibles.
Pour en revenir au cas étrange de Mgr Fernández, nous trouvons un autre mot qui, malgré son importance pour la vie de l'Église, a été instrumentalisé par certains camps idéologiques. Il s'agit du mot "communion". Comme un enfant suffisant qui cherche des louanges, ces camps saisissent toute occasion d'accuser leurs adversaires de ne pas être en "communion" suffisante avec le pape. Lorsque quatre cardinaux ont soumis un dubia au pape François afin d'obtenir des éclaircissements sur Amoris Laetitia, un archevêque a qualifié cette démarche de "très grave scandale", susceptible de les priver de leur cardinalat, et a déclaré que remettre en question le pape François revient à "douter du Saint-Esprit". Les pom-pom girls papales tambourinent au rythme de Lumen gentium §25, qui parle du devoir de "soumission religieuse d'esprit et de volonté" au magistère papal. Cette "soumission religieuse" (obsequium religiosum) est ensuite utilisée comme une épée contre quiconque n'est pas d'accord avec tout ce que dit ou fait le Saint-Père, y compris les interviews papales en avion, souvent déroutantes.