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Abbé Jean Pateau OSB : « Oeuvrer pour l'unité ne signifie pas oeuvrer pour l’uniformité »
5 mai 2025
Abbé de Fontgombault : « Je dirais même que l’imposition de l’uniformité nuit à l’unité… Telle était, me semble-t-il, la perspective de Benoît XVI. » Entretien sur la liturgie dans le rite extraordinaire. Par Lothar C. Rilinger
L'abbaye de Fontgombault a été fondée en 1091. Après une histoire mouvementée, le complexe monastique roman, qui présente également une valeur exceptionnelle du point de vue de l'histoire de l'art, appartient à nouveau à l'Ordre bénédictin, plus précisément à la Congrégation de Solesmes. La communauté religieuse de Fontgombault maintient la liturgie sous la forme extraordinaire ; L'abbé Jean Pateau OSB explique le contexte de cette affaire dans une interview avec l'avocat Lothar C. Rilinger.
Lothar Rilinger : Vous célébrez la messe dans votre monastère selon l'ancien rite. Pensez-vous que ce genre de célébration pourrait mettre en danger l’unité des fidèles ?
Abbé Jean Pateau OSB : Tout d’abord, je vous dois quelques éclaircissements. La messe monastique dans l'abbaye n'est pas célébrée selon le Missel de 1962, appelé Vetus Ordo ou rite ancien, mais selon le Missel de 1965. Bien que ce Missel soit le résultat de la mise en œuvre de la réforme demandée par le Concile le 4 décembre 1963, il reste étroitement lié au Missel de 1962 et conserve l'offertoire et la plupart des gestes. De plus, nous avons décidé d'utiliser le calendrier actuel pour le sanctuaire. Nous avons conservé l'ancien ordre temporel, qui comprend le temps de la Septuagésime, l'Octave de la Pentecôte et le Quatembre, mais nous célébrons le Christ-Roi avec l'Église universelle le dernier dimanche de l'année. Tout cela contribue à une approximation du Missel actuel de 1969.
Pour répondre plus directement à votre question sur l’unité ecclésiale, je voudrais rappeler que Benoît XVI. Dans sa lettre aux évêques à l’occasion de la publication du Motu Proprio Summorum Pontificum, il a examiné deux craintes qui ont fait obstacle à la publication de ce texte :
- de diminuer l’autorité du Concile Vatican II et de mettre en doute la réforme liturgique.
- conduire à des troubles et même à des divisions dans les paroisses.
Quant à la remise en cause de l'autorité du Concile Vatican II, il faut rappeler que l'archiabbé de Beuron a remis à saint Paul VI une lettre de remerciements. a envoyé un exemplaire de l'édition postconciliaire du Missel Schott quelques mois après la publication de l'Ordo Missae de 1965. Le 28 mai 1966, le cardinal secrétaire d'État Cicognani adressa une lettre de remerciements à l'abbé au nom du pape, dans laquelle il déclarait : « Le trait caractéristique et essentiel de cette nouvelle édition révisée est qu'elle représente l'aboutissement parfait de la Constitution liturgique du Concile. »
En ce qui concerne le deuxième point, je pense qu’il faut se méfier des caricatures simplistes. Il y a des endroits où il y a eu et où il y a des pauses. Il y a aussi des endroits où tout est paisible. Beaucoup seraient surpris d’apprendre que la majorité des jeunes qui choisissent d’intégrer les communautés dites traditionnelles ne sont pas des jeunes issus à l’origine du contexte des communautés traditionnelles. Je suis moi-même un exemple de cela.
Quant aux jeunes qui s'approchent des communautés traditionnelles, ils sont très libres dans leur pratique liturgique et ont depuis longtemps quitté leur paroisse d'origine.
L’unité dans l’Église n’est pas l’uniformité. L’Église d’Orient en est un exemple.
Travailler vers l’unité ne signifie pas travailler vers l’uniformité. Je dirais même que l’imposition de l’uniformité nuit à l’unité. La question est de savoir comment œuvrer pour l’unité. Telle était, me semble-t-il, la perspective de Benoît XVI.