D'Ed. Condon sur The Pillar :
La femme préfète de François : la quadrature du cercle de la gouvernance ecclésiastique élargie ?
6 janvier 2025
Le pape François a ouvert une nouvelle voie ecclésiastique lundi en nommant la première femme à la tête d'un dicastère curial en promouvant Sœur Simona Brambilla, I.S.M.C., de secrétaire du Dicastère pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique à son nouveau préfet. En même temps, François a pris la décision inhabituelle de nommer un pro-préfet pour le dicastère, le cardinal Angel Fernández Artime, S.D.B.
Si la nomination d'une femme à la tête d'un dicastère est une nouvelle en soi, la nomination de Fernández Artime, parallèlement à celle de Brambilla, pourrait s'avérer tout aussi significative, indiquant peut-être le règlement d'un débat canonique de longue haleine au cours de la papauté de François sur la portée et les limites de la gouvernance élargie dans l'Église et sur la nature de la curie romaine.
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Immédiatement après l'annonce de la nomination de Mme Brambilla, l'attention des médias s'est concentrée sur le caractère historique de cette nomination : succédant au cardinal João Bráz de Aviz, Mme Brambilla est la première femme à occuper un poste aussi élevé dans l'Église.
En effet, à moins que François n'ait l'intention d'écrire une nouvelle page d'histoire dans les mois à venir en modifiant la loi de l'Église et en lui donnant un chapeau rouge, Mme Brambilla sera le premier préfet du département à ne pas être ou devenir cardinal depuis sa création en 1908.
Des rumeurs romaines sur la nomination imminente d'une femme préfète à la Curie circulent depuis la fin de l'été dernier, et les spéculations vont bon train sur le département qui pourrait être doté d'un nouveau chef.
Si ces spéculations portaient en partie sur les cardinaux curiaux susceptibles d'être remplacés - Soeur Brambilla remplace le cardinal Aviz, âgé de 77 ans -, les discussions ont également porté sur les dicastères qui pourraient accueillir un préfet non évêque pour diriger leurs travaux et sur ceux qui pourraient avoir besoin d'un évêque pour pouvoir exercer certaines fonctions de gouvernance ecclésiastique.
Cependant, derrière ces discussions se cache un débat plus large et plus profond sur la nature de la gouvernance ecclésiastique et son lien avec les ordres épiscopaux, qui a été une conversation vivante tout au long du pontificat de François.
La décision du pape de nommer un cardinal pro-préfet aux côtés de Soeur Brambilla semble éluder ce débat et pourrait marquer la fin d'un mouvement en faveur d'une vision plus radicale du pouvoir et de la coopération des "laïcs" (ici, d'une religieuse, càd une laÏque consacrée ndB) dans l'Église.
Traditionnellement, les papes ne nomment que les pro-préfets des départements curiaux qu'ils dirigent eux-mêmes nominalement - pendant des siècles, le pape a dirigé légalement le Dicastère pour la doctrine de la foi, avec un cardinal pro-préfet qui dirigeait le département pour lui au jour le jour. Plus récemment, François a utilisé le même arrangement pour le dicastère pour l'évangélisation, dont il a pris personnellement la tête lors de sa réforme de la curie romaine en 2022.
Dans le cas de la nouvelle direction de DICLSAL, il semble possible, sinon probable, que la nomination de Fernández Artime lui permette de jouer une sorte de rôle d'exécuteur canonique, en signant officiellement certains actes de gouvernance aux côtés de Brambilla, et en contournant ainsi les questions concernant les actes qui, le cas échéant, nécessitent une consécration épiscopale pour être mis en œuvre.
Ce faisant, François a peut-être mis un terme à l'une des réformes les plus radicales qui ont vu le jour sous son pontificat.
La mesure dans laquelle les laïcs peuvent, selon les termes du droit canonique, « coopérer » à l'exercice du pouvoir de gouvernance fait l'objet d'un débat animé dans l'Église depuis plusieurs années.
En 2022, François a promulgué Praedicate Evangelium, sa nouvelle constitution sur les structures et la gouvernance de la curie romaine. Ce texte comprenait une réforme clé qui stipulait que « tout fidèle peut présider un dicastère ou un bureau », ouvrant ainsi la voie aux laïcs, hommes et femmes, pour servir aux plus hauts niveaux de l'appareil administratif du Saint-Siège, pour la première fois.