Opinion de Emmanuel Hirsch, professeur d’éthique médicale à l’université Paris Sud, parue sur le site du journal La Croix le 19 février :
Mourir par sédation ou l’idéologie du « bien mourir »
Notre société fait le choix de légaliser une autre approche du mourir. À défaut d’être en capacité – comme certains y prétendaient hier – de « changer la mort », voir de la « maîtriser ». Il convient désormais d’intégrer le modèle d’une « bonne mort », d’un « bien mourir » opposé à cette conception du « mal mourir », figure emblématique de l’inacceptable, de l’insupportable que l’on se contente de fustiger. Car il est plus avantageux d’ériger des symboles que de s’investir au quotidien pour qu’évoluent les mentalités et les pratiques contestées depuis plus de trente ans par ceux qui assument la responsabilité politique de l’humanité du soin jusqu’au terme de la vie.
Les postures compassionnelles et les résolutions incantatoires imposent leurs règles. La discussion est close. Un dernier espace est concédé pour peu de temps aux disputations sémantiques attachées à ne pas encore assimiler la sédation profonde et continue à l’euthanasie. Le souci de la forme ne dissimule pas pour autant les intentions de fond. Il n’est pas convenable aujourd’hui d’entacher du moindre soupçon un consensus acquis après des années de concertations dont notre pays, affirme-t-on, sort « apaisé » et bénéficiaire de « nouveaux droits » (directives anticipées opposables, sédation profonde et continue).