Du blog du Père Simon Noël (moine bénédictin au monastère de Chévetogne) :
Peur de l'enfer et des châtiments ici-bas
J'ai posté sur ce blog, il y a quelques semaines, la vidéo d'une conférence du mouvement Tradition, Famille, Propriété sur les apparitions modernes de la Sainte Vierge, en particulier sur La Salette et Fatima. On y parlait de l'enfer et des châtiments éventuels qui déjà ici-bas punissent les iniquités humaines. Cela a provoqué quelques réactions négatives, dont un ami m'a fait part, et du reste je l'en remercie, car cela me force à réfléchir et à affiner mes conceptions de foi. On peut donc légitimement m'objecter de pratiquer une pastorale de la peur. En fait je ne suis nullement un père fouettard obscurantiste. Mon travail quotidien se situe dans le domaine de l’œcuménisme et du dialogue interreligieux, en tant que chroniqueur à la revue Irénikon. C'est pourquoi je publie ces réflexions comme une introduction théologique aux thèmes abordés dans la vidéo en question.
Apparitions mariales et religion populaire
On peut dire que les apparitions mariales, en particulier celles qui ont été reconnues par l’Église, font partie de ce qu'on appelle la religion populaire. Ce terme n'a rien de péjoratif. La religion populaire est déjà présente dans l’Évangile : tous ces petits qui suivaient Jésus, comme la femme atteinte d'un flux de sang qui pensait qu'elle serait guérie en touchant la robe de Jésus. Jésus a dit que Dieu a révélé ses secrets aux petits alors qu'il les a cachés aux savants. Le pape François a complètement réhabilité cette religion populaire à plusieurs reprises, lui qui l'a vue de près en Amérique latine. Une ouvrière qui prie saint Antoine peut être plus proche de Dieu qu'un prêtre qui a étudié la philosophie et la théologie pendant des années.
Quand Marie parle à de pauvres bergers, comme ceux de La Salette ou de Fatima, elle utilise évidemment les catégories religieuses populaires qui sont les leurs et celles de leur temps. Rien ne nous oblige donc de les prendre aux pieds de la lettre. Par exemple, si de simples enfants ont toujours cru que l'enfer était une mare de feu au centre de la terre, comme on le leur a peut-être dit au catéchisme ou en famille, ils verront ainsi l'enfer dans leurs expériences mystiques. Ces faits mystiques sont réels et authentiques, mais nous avons le droit de les décrypter. Il faut distinguer la substance de la foi de ses revêtements imagés. Je fais une analogie contemporaine. De nos jours beaucoup de personnes, à tort ou à raison, croient aux expériences de NDE. Eh bien, je dirais que la Vierge pourrait utiliser ces catégories d'aujourd'hui, pour nous lancer ses appels à la conversion et à l'espérance.