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  • Le Soudan et la faillite morale de la gauche moderne

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    D' sur The European Conservative :

    Le Soudan et la faillite morale de la gauche moderne

    Pour l'Occident progressiste, la souffrance n'acquiert de sens que lorsqu'elle peut être attribuée à la culpabilité. Sans ce lien, l'empathie s'avère impuissante.

    À Al-Fashir, au Soudan, les islamistes ont perpétré un massacre si sanglant que les images satellites révèlent des traces de violence. Un véritable génocide. Connaissez-vous Al-Fashir ? Savez-vous où elle se situe et depuis combien de temps dure cette tragédie ?

    Depuis des mois, cette ville antique est assiégée. Des quartiers entiers ont été rasés, des villages réduits en cendres, et des dizaines de milliers de personnes sont mortes de faim dans le désert. Selon les estimations des Nations Unies, près de 25 millions de Soudanais sont confrontés à une famine aiguë, et plus d'un demi-million d'enfants ont déjà péri dans cette famine provoquée par la guerre. Des milices islamistes, armées de drones iraniens, d'armes turques et d'une certitude morale qu'elles prétendent divine, ont transformé la guerre civile soudanaise en un théâtre d'extermination. Des images montrent des soldats dévorant le cœur de leurs victimes. C'est une horreur sans pareille ; non pas primitive, mais absolue ; non pas ancestrale, mais moderne.

    Et pourtant, le tumulte moral du monde demeure étrangement silencieux. Aucune grande manifestation à New York ou à Londres, aucun cri de protestation de la part d'universitaires « anticolonialistes » ou de militants des droits de l'homme, pas même le faible écho des hashtags. Seulement un silence, dense et délibéré, un silence d'autoprotection plutôt que d'ignorance.

    L'esthétique du silence de la gauche

    Ce silence n'est pas l'ignorance ; c'est un mécanisme de défense. La gauche moderne s'est forgée une image de gardienne de la conscience morale, de voix éternelle contre la domination et l'oppression. Mais la souffrance du Soudan ne correspond pas à cette image. Il n'y a pas d'« oppresseur blanc » à condamner, pas de figure coloniale malfaisante à ressusciter. Les coupables sont des islamistes, des Africains, et se positionnent idéologiquement comme victimes de l'Occident. Le cadre moral s'effondre, et la gauche se réfugie dans le silence.

    Il ne s'agit pas d'une simple hypocrisie politique ; c'est une question existentielle. La conscience de l'Occident progressiste ne fonctionne que dans le cadre d'une équation bien connue : la souffrance n'a de sens que lorsqu'elle est liée à une culpabilité. Sans ce lien, l'empathie vacille. Le Soudan est insupportable non pas parce qu'il est lointain, mais parce qu'il est idéologiquement inutilisable. La gauche ne peut absorber ce genre de souffrance ; elle ne peut l'intégrer à son discours moral. Reconnaître le Soudan reviendrait à affronter le mal sans le miroir du péché impérial, et cela exigerait une honnêteté que peu sont prêts à risquer.

    À notre époque, l'indignation est devenue une forme de monnaie d'échange. La souffrance doit être visible, commercialisable et symbolique pour être reconnue. C'est pourquoi la Palestine est devenue sacrée dans l'économie morale de la gauche occidentale : elle offre des images à consommer, des méchants clairement identifiés et un récit simpliste de la vertu. L'enfant palestinien, le soldat israélien, la démocratie blanche, tous soigneusement mis en scène.

    Le Soudan n'offre pas une telle clarté. Point de scènes cinématographiques, point de victimes éloquentes maîtrisant l'anglais, point d'empire commode à accuser. C'est une obscurité sans auteur occidental, et par conséquent, dans l'économie émotionnelle de la gauche, elle ne rapporte aucun profit. L'empathie contemporaine fonctionne comme un capital : elle doit engendrer un retour sur investissement moral. L'indignation doit affirmer l'identité, la pitié doit être un signe de vertu, et le silence devient le prix de la cohérence idéologique.

    Ainsi, le massacre d'Al-Fashir, visible depuis l'espace, passe presque inaperçu. Le sang qu'on ne peut instrumentaliser politiquement est ignoré.

    La théologie du postcolonialisme

    Derrière cette paralysie se cache la théologie de la pensée postcoloniale : la conviction que toutes les souffrances dans les pays du Sud sont une conséquence de la domination occidentale. Cette doctrine, née dans les séminaires des universités occidentales, a substitué la culpabilité à la théologie et le ressentiment à la politique. Elle est incapable d’expliquer pourquoi des musulmans massacrent d’autres musulmans, pourquoi des milices noires persécutent des civils noirs, ou pourquoi des islamistes arabisés réduisent des Africains en esclavage au Darfour.

    La même idéologie qui a idéalisé Che Guevara sanctifie aujourd'hui le Hamas. Le silence sur le Soudan est la conséquence logique de cette vision du monde. La gauche occidentale ne peut condamner les auteurs de ces actes sans renier ses propres principes. Le même mécanisme intellectuel qui excuse la violence djihadiste contre les Israéliens l'aveugle désormais face aux atrocités islamistes en Afrique.

    C’est ce que la gauche postcoloniale appelle « les opprimés ». Il s’agit d’un renversement complet de l’ordre moral : le bourreau devient victime, le fanatique devient révolutionnaire et la barbarie devient résistance. La boussole morale de toute une culture politique tourne en rond, ne pointant nulle part ailleurs que vers l’intérieur.

    Au Soudan, ce qui meurt, ce n'est pas seulement des vies humaines, mais aussi la crédibilité du discours moral occidental. Les intellectuels qui ont consacré leur carrière à condamner l'impérialisme occidental se retrouvent aujourd'hui muets face au racisme arabe, à la suprématie islamique et au despotisme africain. Ce même vocabulaire moral qui prétendait jadis défendre les faibles est devenu un instrument d'aveuglement sélectif.

    L'éthique de la gauche ne vise plus la vérité, mais la cohérence narrative. Le mal n'est reconnu que lorsqu'il s'exprime en anglais, l'oppression que lorsqu'elle peut être imputée à l'Europe. L'universalisme a toujours été conditionnel, et la solidarité toujours de façade. Le Soudan révèle cette supercherie : un théâtre de l'empathie dont la scène s'effondre lorsque la réalité refuse de s'y conformer.

    Un monde sans témoins

    Le plus terrifiant concernant Al-Fashir, ce n'est pas seulement son déclin, mais le fait qu'il se déroule sans témoins. La gauche, jadis obsédée par le langage de la conscience, ne peut même plus feindre d'en posséder un. Elle a troqué le réalisme moral contre une théâtralité morale, faisant de la compassion un costume qu'elle ne porte que par opportunisme.

    Quand la famine fauche un demi-million d'enfants, quand des milices islamistes dévorent les corps de leurs victimes, quand le sang tache la terre au point d'être visible depuis l'orbite, la conscience autoproclamée de l'humanité détourne le regard. Non par ignorance, mais par incapacité à croire.

    Le silence de la gauche dans l'affaire Al-Fashir n'est pas une absence de parole ; c'est l'effondrement du sens.

     
    Ali Bordbar Jahantighi est un étudiant et essayiste politique germano-iranien actuellement basé à New York.
  • Le Vatican va publier un nouveau document sur la polygamie en Afrique

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    De Niwa Limbu sur le Catholic Herald :

    6 novembre 2025

    Le Vatican va publier un nouveau document sur la polygamie en Afrique

    Le Vatican va publier un nouveau document sur le mariage à la fin du mois, abordant la question de la polygamie en Afrique dans un contexte de débat pastoral et culturel continu.

    Le Dicastère pour la doctrine de la foi a annoncé que le texte, intitulé « Nous deux : Éloge de la monogamie. Note doctrinale sur la valeur du mariage, la communion exclusive et l'appartenance mutuelle », sera publié à la fin du mois de novembre.

    Le père Armando Matteo, secrétaire du dicastère, a déclaré mardi que ce document faisait suite à une demande spécifique formulée lors du Synode sur la synodalité, invitant les évêques africains à préparer une déclaration sur le sujet. Une conférence de presse aura lieu au Bureau de presse du Saint-Siège lors de la présentation de la note.

    Les discussions précédentes lors des synodes sur la famille de 2014 et 2015 ont été dominées par les questions du divorce et du remariage, plusieurs évêques africains évoquant les défis particuliers auxquels ils sont confrontés dans des régions où la polygamie reste très répandue.

    De nombreux commentateurs et observateurs du Vatican ont suggéré que, contrairement au récent document sur la corédemptrice publié par la DDF, qui a suscité la controverse en ligne et parmi les laïcs, la question de la polygamie permet une réponse plus directe. Elle nécessite un document simple, car la doctrine catholique sur le sujet est déjà clairement définie.

    L'Église a toujours enseigné que le mariage est une alliance à vie entre un homme et une femme, un partenariat fondé sur la fidélité, l'ouverture à la vie et le don mutuel de soi. Le Catéchisme décrit la polygamie comme une pratique « contraire à l'amour conjugal, qui est indivisible » et incompatible avec l'union exclusive voulue par Dieu.

    Dans la théologie catholique, le mariage reflète l'amour fidèle du Christ pour son Église, un lien de communion exclusive et d'appartenance mutuelle qui ne peut être rompu.

    Cependant, bien que rare à l'échelle mondiale, la polygamie reste profondément ancrée dans le tissu social de nombreuses sociétés africaines. Depuis des générations, les mariages multiples sont liés à la lignée, au statut social et à la survie économique. Un rapport publié en 2020 par le Pew Research Center révèle qu'environ 11 % de la population d'Afrique subsaharienne vit dans des foyers où au moins un membre a plus d'un conjoint ou partenaire. En réponse à cela, l'Église en Afrique développe activement des cadres pastoraux pour ceux qui vivent dans des unions polygames, tout en réaffirmant l'idéal chrétien du mariage monogame.

    Les dirigeants de l'Église ont expliqué que, bien que le mariage monogame reste la norme doctrinale, de nombreux convertis au catholicisme entrent dans l'Église après avoir vécu dans des contextes polygames. Dans de tels cas, les évêques et les prêtres ont cherché des moyens d'intégrer les familles dans la communauté religieuse sans compromettre l'enseignement de l'Église sur l'unité et l'exclusivité du mariage.

    Selon le Symposium des conférences épiscopales d'Afrique et de Madagascar (SECAM), six propositions pastorales ont été approuvées « pour l'accompagnement des personnes en situation de polygamie », mettant l'accent sur « l'écoute, la proximité et l'accompagnement » des hommes et des femmes dans ce type de relations. Ces propositions consistent notamment à accueillir les personnes en situation de polygamie dans l'Église, à leur faire sentir qu'elles font partie de l'Église, à prendre des initiatives en faveur des veuves, à mettre l'accent sur la conversion comme objectif premier, à passer d'une conception étroite de la fécondité comme descendance biologique à une conception plus large de la charité, et à promouvoir un apostolat familial caractérisé par la catéchèse sur l'Église et les sacrements.

    Le document à venir devrait réaffirmer ce principe tout en offrant des éclaircissements et des orientations pastorales aux évêques et aux fidèles des régions où la polygamie persiste. Sa publication à la fin du mois de novembre sera suivie de près dans toute l'Afrique et au-delà.

  • John Henry Newman et la mission de l'Église

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    Une dépêche de l'Agence Fides (Marie Symington) :

    John Henry Newman et la mission de l'Église

    6 novembre 2025
     

    Rome (Agence Fides) - Saint John Henry Newman a récemment été proclamé Docteur de l'Église, puis nommé saint patron de l'Université Pontificale Urbanienne, qui fait partie intégrante du Dicastère pour l'évangélisation.

    En tant que Docteur de l'Église et saint patron de cette université, on attend naturellement de Newman qu'il soit à la hauteur de ces distinctions.

    En effet, la recherche de la Vérité a guidé Newman tout au long de sa vie, depuis ses années d'anglicanisme fervent à l'université d'Oxford jusqu'à celles qui ont suivi sa conversion au catholicisme en 1845. La révélation de la Vérité anime de la même manière l'Église dans sa mission de proclamation de l'Évangile. Comme l'explique Newman dans son discours « The Salvation of the Hearer the Motive of the Preacher » (Le salut de l'auditeur est la motivation du prédicateur) : « Mes chers frères, si nous sommes certains que le Très Saint Rédempteur a versé son sang pour tous les hommes, il s'ensuit clairement et simplement que nous, ses serviteurs, ses frères, ses prêtres, ne devrions pas être disposés à voir ce sang versé en vain [...] Quelle incitation à la prédication est plus puissante que la ferme conviction qu'il s'agit de la prédication de la vérité ? [...] Quelle plus grande persuasion pour amener les hommes à l'Église que la conviction qu'elle est le moyen spécial par lequel Dieu opère le salut de ceux que le monde éduque au péché et à l'incrédulité ? ».

    Aussi décourageant que cela puisse paraître pour les catholiques, la conversion des cœurs est au cœur de la mission de l'Église, comme le démontrent à la fois la Tradition et la dynamique même du catholicisme.

    Dans son discours « Prospects of the Catholic Missioner » (Perspectives du missionnaire catholique), Newman souligne le grand héritage que les catholiques ont reçu depuis l'époque de saint Pierre – une histoire qui a résisté à toutes les épreuves au cours des siècles – pour encourager les fidèles dans leur vocation : « Nous sommes confiants, zélés et inflexibles, car nous sommes les héritiers de saint Pierre, saint Grégoire de Nazianze, saint Grégoire le Grand et tous les autres saints et fidèles qui, en leur temps, par leurs paroles, leurs actions ou leurs prières, ont promu la cause catholique ». Tout comme les Anglo-Saxons païens à l'époque du pape Grégoire Ier ont connu la joie de la Bonne Nouvelle lorsqu'il a envoyé des missionnaires en Grande-Bretagne, les catholiques d'aujourd'hui sont également appelés à partager cette même joie en diffusant la Parole.

    L'annonce de l'Évangile reste la mission essentielle de l'Église. En effet, l'appel universel à diffuser la Parole dans le monde entier est conforme à la nature même de l'Église catholique (kataholos, en grec, signifie « selon le tout » ou « universel »).

    Comme le rappelait Newman, « Nous agissons selon notre nom ; les catholiques sont chez eux en tout temps et en tout lieu, dans tous les états de la société, dans toutes les classes de la communauté, à tous les stades de la culture ».

    Cela dit, le grand zèle qui pousse les missionnaires catholiques à défendre la Vérité ne devrait jamais prendre le pas sur la gentillesse et la compassion avec lesquelles ils sont appelés à prêcher. L'amour de Dieu englobe l'amour pour Sa création, pour l'humanité, même dans sa faiblesse.

    Newman a réfléchi à cette vertu de la compassion dans son sermon « St. Paul’s Gift of Sympathy » (Le don de la compassion de saint Paul), la décrivant comme un don possédé par les saints, fondé « sur une expérience intime de ce qu'est réellement la nature humaine, dans son irritabilité et sa sensibilité, dans son découragement et sa versatilité, dans sa maladie, dans son aveuglement et dans son impuissance ». Cet amour pour l'humanité cherche à refléter l'amour infini de Dieu pour son peuple. Comme l'explique Newman, « Tout comme Dieu Tout-Puissant lui-même a la compassion d'un père envers ses enfants, car il connaît notre nature, il se souvient que nous sommes poussière ; ainsi, suivant son exemple, nous sommes appelés à aimer la vertu de l'humanité, comme on pourrait l'appeler. Une vertu qui découle de sa grâce surnaturelle et qui est cultivée pour son amour, bien que son objet soit la nature humaine vue en elle-même, dans son intelligence, ses affections et son histoire ».

    Par conséquent, la défense de la Vérité ne doit jamais être caractérisée par l'arrogance ou le jugement, mais fondée sur l'humilité et la compassion, dans la reconnaissance de notre nature humaine commune et imparfaite. Newman a fait remarquer que l'on peut considérer l'apôtre Paul comme un exemple, car il était « pleinement conscient d'être un homme [...] il est pour lui-même simplement un homme fragile qui parle à des hommes fragiles, et il est tendre envers les faibles parce qu'il a conscience de sa propre faiblesse ».

    Les missionnaires catholiques peuvent faire de même, en plaçant leur foi dans la grâce de Dieu comme source de force.

    Au-delà de la compréhension des faiblesses communes à tous les êtres humains, Newman reconnaissait que chaque personne est façonnée par un passé unique et des dispositions distinctes. Bien que la proclamation de l'Évangile reste la mission universelle de l'Église, elle est avant tout enracinée dans une relation personnelle avec Dieu qui embrasse l'individualité de chaque personne.
    Newman était profondément conscient de cette dimension intime. Dans sa conférence intitulée Logical Inconsistency of the Protestant View (Incohérence logique de la vision protestante), il a souligné que l'Église se répand « à travers les conversions individuelles, l'exercice du jugement privé, la communication entre les esprits à travers le conflit d'opinions, le zèle des convertis et au milieu de la persécution ; non pas à travers un plan d'action général ou un mouvement politique ». De plus, tout comme recevoir l'Évangile est un acte profondément personnel, le proclamer l'est également. La mission de chaque catholique est façonnée par son histoire et son caractère ; il n'existe pas deux vocations identiques.

    Dans ses « Méditations sur la doctrine chrétienne », Newman réfléchit à la vocation unique que Dieu lui a confiée, suggérant que chaque personne est appelée par Dieu à une mission qui lui est propre : « J'ai été créé pour faire quelque chose ou pour être quelque chose pour lequel personne d'autre n'a été créé ; J'ai une place dans les conseils de Dieu, dans le monde de Dieu, que personne d'autre n'a ; que je sois riche ou pauvre, méprisé ou estimé par les hommes, Dieu me connaît et m'appelle par mon nom [...] Dieu m'a créé pour lui rendre un service précis ; il m'a confié une tâche qu'il n'a confiée à personne d'autre. J'ai ma mission ».

    La devise épiscopale de Saint John Henry Newman, « Cor ad cor loquitur » (Le cœur parle au cœur), résume magnifiquement l'essence de la mission catholique : avant toute autre chose, la conversion commence par une rencontre sincère entre deux personnes. C'est à travers cette rencontre que Dieu peut toucher et convertir le cœur de Ses créatures. (Agence Fides 6/11/2025)

  • Une co-rédemption « inconvenante » ? Alors, il faut réprimander les saints et les docteurs...

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    De Luisella Scrosati sur la NBQ :

    Une co-rédemption « inconvenante » ? Réprimandez les saints et les docteurs.

    Pour le directeur de la Société mariologique allemande, le titre de « Co-rédemptrice » ne prête pas à confusion quant à la médiation unique du salut par le Christ. Si tel était le cas, il conviendrait de se référer aux écrits de Newman et de Jean-Paul II.

    6/11/2025

    Nous avons sollicité l'avis du Père Manfred Hauke, professeur de dogmatique à la Faculté de théologie de Lugano, membre de l'Académie pontificale mariale internationale et directeur de la Société mariologique allemande, sur certains points critiques de la Note doctrinale Mater Populi Fidelis.

    Cette note semble principalement souligner que certains titres mariaux, tels que Co-Rédemptrice et Médiatrice de toutes les grâces, occultent l'unicité de la médiation salvifique du Christ. À votre avis, ce risque est-il réel ?

    Selon moi, ce risque est inexistant dans un contexte catéchétique et théologique sain. Qui pourrait accuser, par exemple, saint Jean-Paul II, qui a employé à plusieurs reprises les deux titres mentionnés, d'être déséquilibré ? La Note elle-même rappelle qu'il a utilisé le titre de « Co-Rédemptrice » « à au moins sept reprises » (n° 18). Faut-il déchoir le cardinal John Henry Newman, proclamé docteur de l'Église par le pape Léon XIV le 1er novembre dernier, de son titre, car ce converti anglais a défendu le titre de « Co-Rédemptrice » contre l'anglican Edward Pusey ? Devrions-nous intervenir contre les écrits de saint Alphonse de Liguori, lui aussi docteur de l'Église ? Devrions-nous nous opposer à de nombreux saints, dont sainte Edith Stein et sainte Thérèse de Calcutta ? Les titres mariaux de « seconde Ève », « mère de la vie » et « Mère de Dieu », selon Newman, sont bien plus puissants que le titre critiqué (Lettre à Pusey) ? Ou bien devrions-nous blâmer le pape Léon XIII, loué par le Souverain Pontife régnant pour le choix de son nom pontifical, d'avoir accordé une indulgence à une prière utilisant le titre marial (en italien) de « Co-Rédemptrice du Monde » ( Acta Sanctæ Sedis 18, 93) ?

    Les malentendus sont plus susceptibles de surgir dans le monde protestant, qui nie la coopération de l'homme au salut par le principe de la sola gratia. C'est pourquoi la Commission théologique de Vatican II a omis « certaines expressions et certains termes employés par les Souverains Pontifes qui, bien que tout à fait vrais en eux-mêmes, ne pouvaient qu'être difficiles à comprendre pour les frères séparés (en l'occurrence, les protestants). Parmi ces termes… “Co-Rédemptrice du genre humain” » ( Acta synodalia , I, 99). Est-il juste de sacrifier une expression qui, en soi, est « tout à fait vraie » pour des raisons œcuméniques ? Quoi qu'il en soit, pour les protestants, se pose non seulement le problème du terme, mais aussi celui de la doctrine enseignée par Vatican II sur la coopération singulière de Marie à la rédemption. Un faux œcuménisme peut nuire à la doctrine catholique, qui doit être professée dans toute sa richesse. Si l'Église devait supprimer toutes les expressions qui déplaisent aux protestants, elle devrait également supprimer le titre de Mère de Dieu (Theotokos). Comme mentionné dans la Note (n° 9, 11, 15), ce titre pourrait prêter à confusion, notamment chez les personnes peu catéchisées.

    Aujourd'hui, presque tous les journaux, y compris catholiques, titrent que Marie n'est pas corédemptrice. Il est donc surprenant de constater que la Note déclare soudainement « inapproprié » et « inconvenant » un titre comme celui de corédemptrice, pourtant entré dans le vocabulaire théologique et l'enseignement des papes.

    Le titre de « corédemptrice » est l'expression la plus concise pour exprimer la coopération unique de Marie à la rédemption. Le risque de mettre Marie sur le même plan que Jésus est évité en précisant que sa coopération dépend entièrement du Christ et lui est subordonnée. Interdire un titre aussi bref, qui exprime une vérité centrale clairement exposée par Vatican II, serait une tâche ardue. Prenons toutefois en compte la précision apportée par le cardinal Fernández lors de la présentation initiale : « Il ne s’agit pas de corriger la piété du peuple fidèle de Dieu… ». Parmi les croyants, les expressions « Co-Rédemptrice du genre humain » sont répandues (par exemple dans les Appels au message de Fatima  de la Servante de Dieu, sœur Lucie) et plus encore « Médiatrice de toutes les grâces » ; cette dernière invocation reprend le titre de la fête liturgique instituée par le pape Benoît XV en 1921 et a même été utilisée par les papes Benoît XVI (Lettre du 10 janvier 2013 à l’archevêque Sigismondo Zimowski) et François : « L’un des titres anciens par lesquels les chrétiens ont invoqué la Vierge Marie est précisément “Médiatrice de toutes les grâces”. Confiez-lui vos aspirations et les bonnes intentions qui vous sont chères ; « Puisse-t-elle vous imprégner de la joie de suivre le Christ et de le servir avec humilité et docilité au sein de l’Église… » (Message à Mgr Gian Franco Saba, archevêque de Sassari, Sardaigne, 13 mai 2023).

    Selon vous, la Note visait-elle uniquement à rejeter le titre de Corédemptrice ou également des aspects importants de la coopération singulière de Marie à l’œuvre de Rédemption ?

    Malgré les observations critiques formulées à l’égard des deux titres, la Note rapporte la doctrine du magistère conciliaire et pontifical (n° 4-15), notamment concernant la « coopération singulière de Marie au plan du salut » (n° 3 ; voir aussi n° 36 et 42). Le document cite également le texte le plus clair sur ce point, la catéchèse mariale de saint Jean-Paul II du 9 avril 1997, qui distingue la participation de Marie à la rédemption objective accomplie par le Christ sur terre de notre coopération au processus de salut (n° 3, 37b).

    Saint Pie X ( Ad diem illum ) enseignait que la Vierge Marie, en vertu de sa sainteté singulière et de son association à l'œuvre de Rédemption, « nous obtient par mérite de convenance ( de congruo comme on le dit, ce que le Christ nous a acquis par le mérite de la justice ( de condigno ). Dans la Note, il semble y avoir un ralentissement, voire un revirement, à cet égard, lorsqu'il est affirmé que « seuls les mérites de Jésus-Christ […] sont appliqués à notre justification » (n° 47). Qu'en pensez-vous ?

    L'importante distinction de Pie X n'est pas citée, mais il semble y avoir une allusion – malheureusement presque voilée – à la distinction entre le mérite de la justice du Christ et celui de la justice de Marie (n° 47 et suivants). Pour parler d'une extension universelle de la médiation maternelle de Marie dans le Christ, une référence à ce type de mérite est essentielle.

    Dans les derniers paragraphes de la Note, un thème très controversé est de nouveau abordé : Marie, la Très Sainte, selon les paroles du pape François, « est plus disciple que mère » (n° 73). Quelle est la part de vérité dans cette affirmation et quels en sont les écueils ?

    Selon saint Augustin, Marie a conçu le Verbe de Dieu d'abord dans son cœur, puis dans son sein ( Sermon 215, 4). Par ailleurs, il est impossible de dissocier sa qualité de disciple de son ministère de Mère de Dieu, ainsi que de « Mère du peuple des fidèles ». La dignité spécifique de Marie découle précisément de sa mission de Mère de Dieu, qui a donné naissance à la nature humaine du Sauveur. C'est là aussi le fondement de toute son œuvre de salut.

  • 180 routiers belges des Scouts d'Europe ont participé au 50e pèlerinage à Vézelay

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    De Jean Lannoy sur 1RCF Belgique :

    Vézelay : 180 routiers belges pour le 50ᵉ pèlerinage des Scouts d’Europe

    3 novembre 2025 - Modifié le 6 novembre 2025

    Témoins - RCF Belgique Des jeunes routiers belges au 50e pèlerinage scouts d'Europe de Vezelay

    écouter (53 min)

    Ils étaient 180 routiers belges à rejoindre Vézelay ce week-end pour le 50ᵉ pèlerinage des Scouts d’Europe, au cœur d’un rassemblement qui a réuni 3 600 jeunes venus de toute l’Europe. Pendant quatre jours, ils ont marché sur les chemins bourguignons, alternant silence, prière, fraternité et veillées, avant de rejoindre la basilique Sainte-Marie-Madeleine pour une grande célébration. Un pèlerinage devenu un rendez-vous marquant pour une génération belge en quête de sens, de profondeur et d’espérance.

    Les routiers belges ayant participé à Vezelay 2025 se sont retrouvés à l'issue du rassemblement final pour une photo ensemble. Photo : Koen ThomeerLes routiers belges ayant participé à Vezelay 2025 se sont retrouvés à l'issue du rassemblement final pour une photo ensemble. Photo : Koen Thomeer

    Cela fait une quarantaine d'années que des routiers belges participent à ce rassemblement organisé par l'association sœur française des Guides et Scouts d'Europe, sur les hauteurs de Vézelay. Découvert par un routier belge en service Outre-Quiévrain, une délégation de plus en plus nombreuse rejoint ce pèlerinage de Toussaint. Invités chaleureusement pour la 50e édition de l'évènement, les Belges constituent la plus grande délégation internationale. 

    Pour eux, Vézelay n’est pas seulement un rassemblement : c’est une route, vécue par tronçons, en équipe, avec la marche, le feu, les chants, l’adoration et la messe quotidienne dans les paroisses alentour. Martin de Villeneuve, commissaire national route en France, décrit ce temps si particulier : "À l’heure route, on a une heure par jour où chaque routier est invité à se poser, contempler la nature et se demander quelles sont les questions de sa vie. C’est une heure sans notification… pour un jeune de 17 à 19 ans, ça n’existe plus. On vient apporter un calme qui leur permet de se ressourcer. C’est une aventure intérieure."

    Pierre-Marie, chef à Arlon, revient avec ses chefs avec enthousiasme :"On est toujours très contents de venir. Pour nous c’est vivre vraiment la communauté d’hommes, se ressourcer, avoir de l’énergie pour reprendre notre boulot, notre famille, nos amis en revenant en Belgique." Cette expérience commune franchit aussi la frontière linguistique. David, routier flamand, raconte :"Il n’y a pas vraiment un équivalent en Belgique à la hauteur de Vézelay. On s’inspire beaucoup de la France. Et entendre ces chants, chanter avec eux… ça nous fait chaud au cœur."

    Le pèlerinage de Vézelay n’a pas toujours été accessible aux Belges. En 2019, la Basilique de Vezelay ne peut plus accueillir autant de monde et les belges créent leur route de Toussaint à Avioth, basilique non loin de la frontière. L'expérience est reconduite en 2021, et les belges reviennent à Vézelay suite à la fin progressive des travaux de la basilique en 2022.

  • 7 novembre : saint Willibrord, l'apôtre du BENELUX

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    Un site est consacré à ce grand évangélisateur de nos régions et ami de saint Lambert. On y trouve la biographie reproduite ci-dessous : http://www.willibrord.lu/

    "Saint Willibrord naquit en Northumbrie en 658 de parents récemment convertis au christianisme. Son père Wilgils remit le jeune enfant comme oblat au monastère de Ripon et se retira comme ermite sur le promontoire du fleuve Humber. Willibrord grandit sous l’influence de St Wilfrid, évêque d’York, qui avait réussi à imposer le respect des traditions romaines vis-à-vis du particularisme insulaire. A l’âge de 20 ans, Willibrord passa à Rathmelsigi en Irlande, «l’île des saints», pour s’astreindre, sous l’autorité de son maître Egbert, à une dure ascèse avant de recevoir l’ordination sacerdotale en 688. Imprégné du goût de la «peregrinatio», cette mystique qui préconisait le renoncement à la patrie terrestre pour aller prêcher l’Évangile aux populations païennes, Willibrord partit en 690 sur le continent avec 11 compagnons pour évangéliser les Frisons, peuple assez rebelle jusque là à toute conversion.

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