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  • "L'habit ne fait pas le moine" mais...

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    De Denis Crouan sur le site ProLiturgia.org :

    Le concile de Trente a déclaré : « Bien que l’habit ne rende pas l’homme plus religieux, il est toutefois nécessaire que les clercs portent toujours une tenue qui convienne à leur propre état. » (cf. Session XIV, chap. 6)
    Le dicton populaire dit que l’habit ne fait pas le moine. Autrement dit que la tenue vestimentaire d’une personne n’a pas grande importance dans la mesure où elle n’est pas un indicateur des dispositions intérieures de la personne en question. Ce n’est pourtant pas totalement exact. D’ailleurs les Allemands disent « Kleider machen Leute », ce qui peut se traduire en français par l’habit « fait l’homme ». Cette expression signifie que l’aspect extérieur d’une personne, ses habits, influencent l’image qu’elle veut donner d’elle et qu’on lui donne. L’expression française « l’habit ne fait pas le moine » pose le même constat tout en mettant l’accent sur le fait que l’apparence extérieure peut être trompeuse.

    Si le concile de Trente insiste sur la nécessité pour les clercs de porter une tenue « convenable » (qui « convient »), c’est parce que les vêtements que nous portons nous imposent une certaine attitude et, d’une manière certaine structurent nos comportements : ils aident à faire du clerc ce qu’il ce qu’il est ou du moins s’efforce d’être.

    Ce que nous portons - et que nous devons apprendre à porter correctement, dignement - nous forme. Le mot « habitude » et le mot « habit » ont d’ailleurs une origine commune. Aristote nous apprend que les vertus sont de bonnes habitudes. Or, comme nous ne sommes pas de purs esprits parfaits, nous savons que notre vertu intérieure s’acquiert par nos actions extérieures : celui qui désire être généreux doit commencer par accomplir des actions généreuses. S’il persiste à accomplir des actions généreuses, la générosité commencera à grandir dans son cœur : il deviendra « naturellement » généreux et finira par aimer faire des actions généreuses.

    Ainsi l’extérieur visible forme-t-il l’intime invisible. Le clerc devient véritablement ministre de l’Église du Seigneur par l’habitude de toujours porter un vêtement religieux et non des vêtements fantaisistes comme par exemple ces chemises à col romain noires, grises, bleues, blanches qui montrent une persistance, chez certains clercs, à vouloir afficher une originalité qui n’est pas toujours du meilleur goût.

    En septembre 1982, le pape Jean-Paul II écrivait au cardinal vicaire de Rome : « Envoyés par le Christ pour l’annonce de l’Évangile, nous avons un message à transmettre qui s’exprime soit par les paroles soit aussi par les signes extérieurs, surtout dans le monde d’aujourd’hui qui se montre si sensible au langage des images. L’habit ecclésiastique (...) a une signification particulière : pour le prêtre diocésain, il a principalement le caractère de signe qui le distingue du milieu séculier dans lequel il vit (...). En conséquence, l’habit est utile et convient aux fins de l’évangélisation ; il amène à réfléchir sur la réalité que nous représentons dans le monde et sur la primauté des valeurs spirituelles que nous affirmons dans l’existence de l’homme. Par le moyen de ce signe, il devient plus facile aux autres personnes d’arriver au Mystère dont nous sommes porteurs, à Celui auquel nous appartenons et que nous voulons annoncer avec tout notre être. »

    Beaucoup de tentations et de faux-pas sont évités par le prêtre qui porte l’habit ecclésiastique : il n’a déjà pas à penser à la tenue qu’il devra porter, à la cravate qu’il choisira de mettre ou de ne pas mettre, à l’harmonie des pièces vestimentaires qui le feront passer pour un vieux garçon un peu négligé ou pour un « cadre légèrement supérieur » (cf. André Frossard) ; il sera moins tenté par le « paraître » et ses paroles comme ses gestes seront comme canalisés par l’habit. Et s’il ne se sent pas à sa place quelque part, son habit lui rappellera utilement qu’il ne devrait pas être là où il se trouve. En ce sens, l’habit porté par le clerc est aussi pour lui-même un bon outil de discernement.

  • Belgique coloniale : Commission Vérité et réconciliation, un accord politique à la belge?

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    Vérité et réconciliation 70fcb77e6349f4467edd7227baa73222-1593630026.jpgConstituée, de façon discutable et discutée, dans le sillage international encore plus discuté du mouvement politique radical des Black Lifes Matter, cette commission parlementaire belge a pour prétention d’instruire le procès de la gestion du Congo par le Roi Léopold II (de 1885 à 1908) puis du Congo (1908-1960) et du Ruanda-Urundi (1923-1962) par la Belgique mais le drame transfrontalier des guerres ethniques post-coloniales s’est rapidement invité à la table des débats pour en faire dévier l’objet initial.

    C’est ce que constate ici un billet de Colette Braekmann, pour conclure : « Mais en Belgique, la vérité du fait colonial est-elle réellement cachée ? Et n’a-t-on pas confondu les revendications de la diaspora africaine, qui se réclame de l’héritage colonial, avec les sentiments des Congolais eux-mêmes ? En ce moment déjà, on constate beaucoup de divisions et de mécontentement : parmi les Rwandais, au sein des Belges ayant vécu au Congo et dont les associations n’ont pas été écoutées, sans parler des Congolais du Congo qui ne se sentent pas représentés et au sein de la diaspora elle-même… Vous avez dit réconciliation ? » JPSC :

    « Les accords de non belligérance entre les partis politiques belges, surtout s’ils viennent enfin de former une large coalition gouvernementale, valent sans doute plus que les chances de succès d’une commission qui, à propos de la colonisation, porte un nom déjà difficile : Vérité et réconciliation. En effet, alors que l’on s’attendait à une discussion de fond, portant entre autres sur la présence, parmi les experts, de Mme Laure Uwase, une avocate d’origine rwandaise, la réunion entre les parlementaires qui feront partie de la commission et les experts chargés de préparer le travail a été assez rapidement « expédiée » et aucun vote n’a été réclamé. L’historien Pierre- Luc Plasman (UCL) ayant présenté sa démission, arguant du manque de temps, comme avant lui un autre expert incontestable Guy Van Temsche, (VUB) une place s’est libérée au sein du groupe des experts. Ce qui a permis à Ecolo Groen et à Wouter De Vriendt qui préside la commission de proposer d’inviter, aux côtés de Laure Uwase, un historien rwandais, en l’occurence Paul Rutayisire (université de Kigali). Il ne faut pas être grand devin pour supposer que cette proposition sera déclinée, tant la présence de Mme Uwase est problématique. En effet, cette jeune avocate, fortement soutenue par le CDNv avait été invitée à la place de Filip Reyntjens (université d’Anvers). Ce dernier connaît incontestablement le Rwanda, mais il est très marqué par son hostilité radicale au Front patriotique rwandais. Mme Uwase, membre de l’asbl Jambo, n’est ni experte ni historienne et au sein du groupe d’experts elle assure le lien avec la diaspora africaine. Même si, en principe, son ascendance familiale ne devrait pas être une raison éliminatoire, il se fait qu’après un quart de siècle seulement ce facteur pèse encore très lourd aux yeux des victimes du génocide : son père, Anastase Nkundakozera,en Belgique depuis 1997 a comparu in absencia devant les tribunaux gaçaça, (ce que Jambo dément). Plus largement, l’asbl Jambo recrute largement au sein de la « deuxième génération », c’est-à-dire les enfants des auteurs du génocide réfugiés arrivés en Belgique à la fin des années 90 et n’a jamais démenti les thèses révisionnistes. Si une pétition rédigée par Jambo et soutenant Mme Uwase a recueilli 1124 signatures, d’autres lettres ouvertes ont pesé tout aussi lourd, le Parlement rwandais a protesté, l’asbl Ibuka représentant les victimes du génocide a refusé de participer à la commission et on peut douter de la venue d’un historien rwandais. La présence de Mme Uwase au sein du groupe d’experts est cependant, avant tout, une histoire belgo- belge : voici une semaine, la charge la plus dure contre elle a été menée par le député Anseeuw, ( NVA). Non pas au nom de l’ethnicité mais parce que, globalement, son parti est hostile à une commission qui pourrait faire le procès de la colonisation. Et lorsqu’il s’est agi de trancher, le suffrage des députés représentant l’actuelle majorité gouvernementale a été fondé sur le principe de l’équilibre ethnique entre Hutus et Tutsis. Même si on sait où a mené cette démarche.

    Le député George Dallemagne, dont le parti Cdh n’a pas droit de vote au sein de la commission, se montre déjà très critique, même si, selon le président Wouter Devriendt (Groen), les travaux de la commission avancent bien. Dallemagne rappelle que « la commission dite Vérité et Réconciliation a été créée dans la foulée du mouvement de protestation aux Etats Unis, Black Lifes Matter. Mais en Belgique, la vérité du fait colonial est-elle réellement cachée ? Et n’a-t-on pas confondu les revendications de la diaspora africaine, qui se réclame de l’héritage colonial, avec les sentiments des Congolais eux-mêmes ? En ce moment déjà, on constate beaucoup de divisions et de mécontentement : parmi les Rwandais, au sein des Belges ayant vécu au Congo et dont les associations n’ont pas été écoutées, sans parler des Congolais du Congo qui ne se sentent pas représentés et au sein de la diaspora elle-même… Vous avez dit réconciliation ? »

    Bref, un échec prévisible mérité pour un procès téméraire.

    JPSC

  • RTB(F) : une politisation inscrite dans les gènes de la radio-télévision de service public

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    De Paul Vaute sur le blog "Le Passé belge" :

    Service public et militantisme à la RTB(F)

    La politisation était inscrite dans les gènes de la radio-télévision de service public. Le pluralisme y a consisté en un partage d’influences entre les partis. Quand ceux-ci ont perdu un peu de leur emprise sur l’information, ce fut au profit d’un certain vent soixante-huitard , qui a soufflé sur tous les médias (1960-1977)

     L’épisode est resté célèbre. Le 26 mars 1955, une manifestation interdite a été néanmoins organisée pour la défense de l’enseignement catholique contre les projets scolaires portés par le ministre socialiste Léo Collard. Alors que 100.000 personnes défilent dans les rues de Bruxelles, l’INR, ancêtre de la RTBF et de la VRT, est sommée par le cabinet de l’Intérieur de diffuser à plusieurs reprises, notamment au journal parlé de 13 heures, un communiqué ministériel affirmant « qu’il n’y a pas eu de manifestation à Bruxelles » ! L’incident donnera lieu à plusieurs interpellations parlementaires.

       Ce n’est pas la première fois que la question de l’influence du politique sur le secteur audiovisuel est posée en Belgique. Et elle va rebondir souvent, jusqu’à nos jours inclus. Les travaux de Jean-Claude Burgelman (Vrije Universiteit Brussel) ont montré l’ampleur de ladite influence, même si elle ne fut pas la seule à s’exercer. Flore Plisnier, archiviste aux Archives générales du Royaume, traite en profondeur des problèmes du pluralisme, de l’autonomie et de la tutelle dans un ouvrage issu de sa thèse de doctorat, défendue en 2017 à l’Université libre de Bruxelles [1]. La chercheuse a elle-même inventorié les sources en provenance de la place Flagey ou du boulevard Reyers. Son étude s’étend plus précisément sur les années RTB (après l’INR et avant la RTBF), soit de 1960 à 1977.

    Lire la suite sur "Le Passé belge"... mais retenons déjà la conclusion de cette étude :

    Le paysage a-t-il changé depuis ? En partie oui, l’extrême gauche ayant perdu une grande partie du terrain. Demeure en revanche une doxa très largement socialisante, écologisante, laïciste, libertaire… qui ne singularise d’ailleurs pas la seule RTBF. Selon la dernière enquête nationale sur les journalistes belges, menée par des chercheurs des Universités de Bruxelles, Mons et Gand, la majorité d’entre eux, exactement 58,4 %, se positionnent à gauche de l’échiquier politique, contre seulement 26 % au centre et 15,6 % à droite. On ne relève pas de différences sur ce plan entre Flamands et francophones. Une autre étude, menée en 2013, allait plus loin encore, concluant que 80 % des journalistes belges se réclament de la gauche. Pour expliquer ces proportions, qui ne reflètent absolument pas les rapports de force existant au sein de l’électorat ou de la population en général, il faudrait au moins une autre thèse de doctorat.

  • Mexique : le président suggère au pape de demander pardon pour les crimes de la colonisation

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    De CARMEN MORÁN BREÑA sur le site du journal El Pais :

    M. López Obrador réitère dans une lettre au Pape que l'Église doit demander pardon pour les abus de la conquête

    L'épouse du président, Beatriz Gutiérrez, rencontre François au Vatican pour demander le prêt d'anciens codices mexicains pour les anniversaires patriotiques de 2021

    10 OCT 2020

    Andrés Manuel López Obrador a insisté, dans une lettre adressée au Pape Francisco, sur la pertinence pour l'Eglise de demander pardon pour les abus commis il y a 500 ans, lorsque les Espagnols ont conquis des terres américaines. Le président mexicain veut que la croix et l'épée de cette époque soient aujourd'hui l'objet d'une demande publique de pardon, grâce à laquelle il dit qu'on marchera vers la réconciliation. L'épouse du président, Beatriz Gutiérrez Müller, en visite en Europe pour demander des prêts culturels afin de célébrer la commémoration de cet événement historique et l'indépendance du Mexique en 2021, a été chargée de remettre la lettre au pape, avec lequel elle s'est entretenue au Vatican, comme l'exige le protocole, vêtue de noir et portant un voile de la même couleur.

    Dans la lettre, Lopez Obrador fait remarquer à François qu'il convient de demander pardon pour ces "atrocités honteuses" subies par les peuples indigènes, le pillage de leurs biens et de leurs terres et leur soumission culturelle et religieuse, "de la conquête au passé récent". "Je saisis cette occasion pour insister sur le fait qu'à l'occasion de ces événements, tant l'Église catholique que la monarchie espagnole et l'État mexicain doivent présenter des excuses publiques aux peuples d'origine".

    Le président adoucit ce qui peut être dur à avaler pour le pape, surtout lorsque la visite au Vatican est pour lui demander une faveur, et lui rappelle à quel point cet "acte d'humilité" peut être bénéfique : "Ce serait une grande chose pour l'Eglise catholique de justifier l'acte historique du Père de notre pays", Miguel Hidalgo y Costilla, le prêtre qui a mené la révolution mexicaine. "Ne pensez-vous pas qu'au lieu d'affecter l'Eglise catholique, une référence en son honneur à Hidalgo y Morelos l'exalterait et ferait le bonheur de la majorité des Mexicains ? Quelques lignes plus haut, la lettre rappelle que ce sont deux prêtres, Hidalgo et Javier Morelos y Pavón, qui ont pris les armes pour initier l'indépendance du Mexique. Beatriz Gutiérrez Müller a également remercié "Sa Sainteté" de l'avoir reçu et de pouvoir parler "des problèmes de notre temps, mais aussi des solutions".

    Le but de la visite de l'épouse du président est d'emprunter des codex et des pièces archéologiques pour les exposer au Mexique l'année prochaine pour la prochaine commémoration : 500 ans de la conquête et de la colonisation par les Espagnols et 200 ans de la révolution mexicaine contre le dictateur Porfirio Díaz. De nombreux trésors anciens du Mexique sont dispersés dans les musées du monde entier. C'est le cas de certaines pièces archéologiques qui ont été demandées à la France, de quelques codices des peuples originaux conservés en Italie et des codices qui sont maintenant empruntés au Vatican. La femme de López Obrador s'arrêtera également en Allemagne et en Autriche, où se trouve la fameuse plume que Moctezuma a donnée à Hernán Cortés en guise de preuve d'amitié. Son état est si délicat qu'il sera vain de demander son transfert.

    Le Vatican est notamment sollicité pour le Codex Vaticanus de la culture Nahuatl, le Codex Rios de la culture Toltecachochimeca et une carte de Tenochtitlan, l'actuel Mexique, dont la fondation sera célébrée il y a 700 ans.

    Il y a cinq ans, Lopez Obrador a salué personnellement le Pape à Rome et lui a également remis une lettre dans laquelle il exprimait son admiration pour le travail pastoral de François en faveur des pauvres et des humiliés du monde. Dans cette nouvelle lettre, il se souvient de lui et lui dit que son respect pour "ses idées et son comportement cohérent avec elles" reste intact, "en tant que chef religieux et chef d'État".

  • Finlande : la liberté religieuse mise en cause

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    De Kath.net :

    Persécution des chrétiens en Finlande - La liberté religieuse constamment attaquée

    13 octobre

    Une ancienne grande figure politique fait aujourd'hui l'objet de plusieurs poursuites pénales en raison de ses déclarations sur l'homosexualité fidèles à la Bible.

    L'année dernière, quatre procédures pénales pour incitation à la haine ont été ouvertes contre la politicienne finlandaise Päivi Räsänen parce qu'elle avait exprimé publiquement son point de vue biblique sur l'homosexualité. Ses opinions étaient déjà connues à l'époque où elle était ministre de l'intérieur démocrate-chrétien en Finlande et lui ont valu les critiques constantes des organisations LGBT. (...)

    La procédure est basée sur des déclarations faites à la radio et à la télévision, sur Twitter et dans un tract vieux de 16 ans ( !). Ceci malgré le fait que Räsänen ait récemment souligné dans un programme que tous les gens ont la même dignité devant Dieu, quelle que soit leur orientation sexuelle, mais que tous sont des pécheurs et ont donc besoin de la rédemption de Jésus pour leur salut éternel.

    Détail piquant : bien que la police - malgré des heures d'interrogatoire - n'ait pas voulu poursuivre les accusations criminelles, le ministère public a ordonné l'ouverture d'une procédure pénale. La peine peut aller jusqu'à deux ans d'emprisonnement, le procès pourrait s'éterniser pendant des années, une perspective désagréable. Selon Madame Räsänen, c'est également l'objectif des opérateurs de ces essais : les voix qui revendiquent la distinction des deux sexes et le mariage en tant qu'union d'un homme et d'une femme doivent être intimidées et réduites au silence.

  • L'audience accordée par le pape au cardinal George Pell : une réhabilitation publique

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    De Nico Spuntoni sur le site de la Nuova Bussola Quotidiana :

    Il cardinale Pell ricevuto dal Papa

    "Merci pour votre témoignage". Le pape embrasse Pell

    13-10-2020

    "Merci pour votre témoignage" : c'est ainsi que le pape s'est adressé au cardinal George Pell, qu'il a embrassé après trois ans d'épreuve judiciaire, dont plus d'un an de prison, avant d'être acquitté des accusations d'abus sexuels. La réunion est apparue comme une réhabilitation publique du cardinal.

    Le cardinal Pell reçu par le Pape

    "Merci pour votre témoignage". Quelques mots qui ont dû paraître aussi importants au cardinal George Pell que la sentence d'acquittement prononcée en avril dernier par la Haute Cour de Canberra. Le pape François les lui a adressées hier, le recevant pour la première fois en audience plus de trois ans après son départ de Rome. Ses yeux brillants et son regard fixé sur son interlocuteur suggèrent la participation émotionnelle du pontife à l'épreuve du cardinal australien.

    Et d'autre part, même s'il était conscient qu'il évoluait sur un terrain rendu glissant par des décennies de scandales pédophiles au sein de l'Eglise, Bergoglio n'avait pas abandonné "son" Ranger au moment le plus difficile, celui de l'acte d'accusation pour abus sexuels communiqué par la police de l'Etat de Victoria en la fête de Saint Pierre et Paul en 2017. Avant de s'embarquer pour l'Australie afin de faire face au procès, Pell s'était présenté au Pape avec une lettre de démission en tant que préfet du Secrétariat à l'économie du Vatican. François avait cependant refusé cette démission, se limitant à lui accorder une période de congé "pour se défendre" et avait pris soin, par l'intermédiaire du directeur du bureau de presse de l'époque, Greg Burke, de reconnaître "l'honnêteté du cardinal pendant les trois années de travail".

    Après l'acquittement qui a renversé les verdicts précédents en établissant l'existence d'"une possibilité significative qu'un innocent ait été condamné", Bergoglio avait indirectement fait référence à l'odyssée judiciaire de Pell dans son homélie du lendemain à Santa Marta, l'invitant à prier "pour tous ceux qui souffrent d'une sentence injuste, par acharnement" en les comparant au Christ qui "a été jugé avec fureur, avec acharnement, étant innocent".

    Une confirmation implicite que la pensée papale à cette occasion était dirigée précisément vers le cardinal de Ballarat (ville d'où est originaire le cardinal Pell) est arrivée hier avec les quelques images de la rencontre enregistrées et diffusées par les médias du Vatican. Le court métrage se termine par François qui, après avoir remercié Pell pour son "témoignage", mentionne la période passée en prison par un innocent ("plus d'un an"). 404 jours durant lesquels la conviction que le Pape était convaincu de son innocence a été d'un "grand soutien", comme l'a confié le préfet émérite du Secrétariat à l'économie au journaliste Andrew Bolt dans la première interview en tant qu'homme libre donnée sur Sky.

    Le film diffusé par les médias du Vatican ainsi qu'un article dans Vatican News destiné à reconstituer l'affaire judiciaire constituent deux éléments inhabituels dans les audiences papales accordées aux cardinaux. Il est difficile de ne pas lire derrière l'attention médiatique accordée par les canaux officiels à l'événement la volonté de réhabiliter publiquement l'image du cardinal australien même à l'intérieur des Palais Sacrés. Jusqu'à présent, en effet, outre l'homélie du Saint-Père sur le "peuple souffrant d'une sentence injuste", la seule réaction officielle à la sentence d'acquittement prononcée par la Haute Cour de Canberra a été une brève note du Bureau de presse du Saint-Siège.

    De retour à Rome il y a deux semaines, le cardinal a pu voir hier se réaliser l'espoir longtemps couvé dans les nuits passées à l'intérieur de la cellule des pénitenciers australiens dans laquelle il était injustement détenu : celui de s'agenouiller à nouveau devant le Successeur de Pierre.

    Lire aussi : https://www.vaticannews.va/fr/pape/news/2020-10/le-pape-francois-recoit-le-cardinal-george-pell.html

  • Fratelli tutti : un « autre christianisme », dans lequel « Jésus ne serait qu’un homme » ?

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    De Sandro Magister sur Settimo Cielo (traduction française sur Diakonos.be) :

    Tous frères, mais sans Dieu.  Un philosophe critique la dernière encyclique de François

    Quelques jours après sa publication, l’encyclique « Fratelli tutti » est déjà reléguée aux archives, étant donné l’absence dans cette dernière de la moindre nouveauté par rapport aux précédentes déclarations archiconnues du Pape François sur ces mêmes thèmes.

    Et si en fait cette prédication-fleuve franciscaine sur la « fraternité » donnait naissance à un « autre christianisme », dans lequel « Jésus ne serait qu’un homme » ?

    Voilà le très sérieux « dilemme » dans lequel le philosophe Salvatore Natoli voit l’Église plongée aujourd’hui, sous le pontificat de Jorge Mario Bergoglio.

    C’est la thèse qu’il défend dans un livre écrit à plusieurs mains qui commente « Fratelli tutti », sous la direction de l’évêque et théologien Bruno Forte, et qui est en vente depuis aujourd’hui à Rome et en Italie.

    Les experts appelés à commenter l’encyclique sont des pointures dans leurs domaines respectifs : le bibliste Piero Stefani, l’hébraïste Massimo Giuliani, l’islamologue Massimo Campanini, l’historien du christianisme Roberto Rusconi, la médiéviste Chiara Frugoni, l’historien de l’éducation Fulvio De Giorgi, l’épistémologue Mauro Ceruti, le pédagogue Pier Cesare Rivoltella, le poète et écrivain Arnoldo Mosca Mondadori.

    Natoli est l’un des plus grands philosophes italiens.  Il se dit non croyant, mais par sa formation et ses centres d’intérêts, il a toujours réfléchi à la frontière entre foi et raison, en portant une attention toute particulière à ce qui se passait dans l’Église catholique.

    En décembre 2019, au moment où le comité pour le « projet culturel » de l’Église italienne, sous la direction du cardinal Camillo Ruini, lançait un impressionnant congrès international sur ce thème crucial : « Dio oggi.  Con lui o senza di lui cambia tutto »  [Dieu aujourd’hui.  Avec ou sans lui, ça change tout], Natoli fut l’un des trois philosophes appelés à intervenir, aux côtés de l’allemand Robert Spaemann et de l’anglais Roger Scruton.

    Ce congrès ne consistait pas en une juxtaposition d’opinions diverses mais visait directement cette « priorité » qui, pour le pape de l’époque Benoît XVI, « était au-dessus de toutes les autres », aujourd’hui plus que jamais, à une époque « où dans de vastes régions du monde, la foi est en danger de s’éteindre comme une flamme privée de nourriture ».

    Donc – comme ce Pape l’avait écrit dans sa lettre aux évêques du 10 mars de cette même année – la priorité consistant à « rendre Dieu présent dans ce monde et à ouvrir aux hommes l’accès à Dieu.  Et pas à n’importe quel Dieu mais à ce Dieu qui a parlé sur le Sinaï ; à ce Dieu sur le visage duquel nous reconnaissons l’amour poussé jusqu’à l’extrême, en Jésus crucifié et ressuscité ».

    Or, il n’y a pas la moindre trace de cette urgence dramatique dans les 130 pages de « Fratelli tutti ».

    Mais donnons à présent la parole au philosophe Natoli, dans ce commentaire qu’il a rédigé sur l’encyclique.

    Un article de Sandro Magister, vaticaniste à L’Espresso.

    *

    « Et si Jésus n’était rien d’autre qu’un homme ? »

    de Salvatore Natoli

    La modernité a mené des débats acharnés sur l’existence de Dieu ; il suffit de penser à l’examen des preuves de l’existence de Dieu, de Descartes à Kant : peut-on la démontrer, est-ce impossible à démontrer ?  En fait, le conflit sur l’existence de Dieu démontrait clairement que Dieu était la question centrale de cette culture, aussi bien pour ses détracteurs que pour ses partisans.  C’était le thème dominant, dont il était impossible de ne pas parler.

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  • Toute vie pleinement vécue suppose un premier consentement à la mort

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    De Martin Steffens, philosophe, sur le site du journal la Croix :

    « Mort »

    «Mourons, et précipitons-nous au milieu des combats ! » Peut-être vais-je avoir l’honneur de vous apprendre un nouveau mot. Non pas le mot « mort », qui est l’objet de cette chronique et que, à défaut de ce qu’il désigne, tout le monde connaît. Mais le nom de la figure rhétorique du vers des Énéides de Virgile que je viens de citer. En quoi consiste-t-elle ? En ceci que le poète prend les choses à l’envers : mourir vient en premier, le combat arrive ensuite. C’est aussi étrange que cet autre vers, couché à la hâte dans un cahier tandis que son auteur, René Char, dirigeait une faction armée d’une dizaine d’hommes : « Agir en primitif et prévoir en stratège. »

    « Hystéron-protéron ». C’est ainsi que se nomme la chose. Littéralement : dernier-en-premier. Impossible à placer dans des mots croisés, difficile à glisser dans une conversation, ce mot semble toutefois utile pour exprimer ce qu’est l’engagement. Si René Char avait, pour être sûr de son choix, pris non le maquis, mais tout son temps, 1945 serait arrivé sans son secours – et ne serait peut-être pas arrivé si vite. De même concernant les ordres qu’il donnait à ses hommes : dans le feu de l’action, il ne s’agit pas tant de prendre la bonne décision, mais déjà d’en prendre une – de sortir d’une indécision mortifère… puis de travailler à faire que la première décision se révèle comme bonne. Il faut donc bien « agir en primitif » et, dans un second temps seulement, « prévoir en stratège ». La prudence n’a de sens qu’à l’intérieur de l’action qu’on ose, une fois qu’on l’a osée. Sinon, au nom de la prudence, on ne ferait plus rien. Les soldats de Virgile font de même, qui commencent par renoncer à leur vie (« Mourons… ») afin de mettre dans le combat l’ardeur qui permettra la victoire et, finalement, la survie de beaucoup. Qui craindrait de s’y lancer deviendrait une cible facile. Comme un marin coulera avec le navire si, par peur de se noyer, il refuse de se jeter à l’eau.

    Toute vie pleinement vécue, c’est-à-dire vraiment osée, tentée, suppose un premier consentement à la mort. Il meurt à un certain confort, l’enfant qui donne dans le secret de la chair maternelle l’impulsion de sa mise au monde. Qui d’entre nous n’a jamais fait ce saut à cause de quoi il perdra tout, peut-être, mais sans lequel toute croissance lui serait interdite ? « La bourse ou la vie ? » Ce n’est pas le bandit, au détour d’un chemin, c’est le Christ, à la croisée de tous les chemins, qui nous demande cette bourse où nous pensions pouvoir enfermer nos trésors en les y étouffant, et s’il nous la réclame, c’est pour nous donner la Vie.

    Quand on est chrétien, on oublie parfois ceci : morts, nous le sommes déjà. Les eaux du baptême ne sont pas de purification, comme celles du Gange. Mais de mortification. Plus exactement, pour entendre ce terme lavé de nos faux-sens, ces eaux racontent notre libération d’une vie captive d’elle-même – préoccupée seulement par sa conservation. Nous sommes morts, afin de pouvoir mieux la donner, cette vie, afin d’en être libres. Nul besoin, même, d’être tentés par le martyre puisque, vivant d’une vie déjà donnée, qui ne peut donc plus devenir l’objet d’un chantage, nous sommes prêts, non pas tant à préférer héroïquement la vérité à la vie (est-ce cela être martyr ?), mais à témoigner, dans tous les actes de notre vie, de ce que la vérité est Vie. Faisons donc mémoire que, un jour qui fut une grande fête, nous sommes morts – et jetons-nous joyeusement au milieu des grands et des petits combats de la vie.

  • Carlo Acutis : la figure d'un saint qui convainc et fascine

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    Du site de la Nuova Bussola Quotidiana :

    RITE DE BÉATIFICATION

    Acutis, à travers le nouveau Bienheureux, une Eglise qui attire

    12-10-2020

    Un type simple, gentil et normal. Mais aussi : amoureux exceptionnel de l'Eucharistie et dévoué à la Vierge. Génie de l'Internet et partisan des principes chrétiens, sans compromis. Du profil que le cardinal Agostino Vallini a tracé du nouveau bienheureux Carlo Acutis, se dégage toute la beauté d'une Église ancienne et toujours nouvelle. Capable plus que jamais d'attirer, car gouvernée par le seul Seigneur de l'Histoire : Jésus-Christ.

    Nous reproduisons le texte de l'homélie que le cardinal Agostino Vallini a prononcée le samedi 10 octobre lors de la Sainte Messe de béatification de Carlo Acutis, dans la Basilique supérieure de Saint François à Assise. Des mots qui esquissent la figure d'un saint qui convainc et fascine, parce que tout entier tourné vers le Christ et en même temps parfaitement capable de dialoguer avec les gens de notre temps. Le nouveau bienheureux montre à l'Église que l'Évangile est vivant dans la chair de ses enfants et l'Église, par le nouveau bienheureux, montre à ses enfants que seul Dieu tient son destin ultime entre ses mains.

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    "Celui qui demeure en moi et moi en lui porte beaucoup de fruits, car sans moi vous ne pouvez rien faire." (Jean 15:5)

    (...) Aujourd'hui, nous sommes particulièrement attirés et en admiration face à la vie et au témoignage de Carlo Acutis, que l'Église reconnaît comme un modèle et un exemple de vie chrétienne, en le proposant tout particulièrement aux jeunes. On se demande, bien sûr, ce que ce jeune homme de seulement quinze ans avait de si spécial ?

    En parcourant sa biographie, nous trouvons quelques repères qui le caractérisent déjà humainement.

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  • Considérer la science comme l’unique source de vérité revient à lui confier un job qui n’est pas le sien

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    Une chronique de Laura Rizzerio, professeure de philosophie à l’UNamur, parue sur la Libre dans la rubrique "opinions" :

    La grandeur de la science c’est qu’elle n’explique pas tout

    Contribution externe

    Si la science est essentielle pour donner accès à la connaissance du réel, la considérer comme l’unique source de vérité revient à lui confier un job qui n’est pas le sien.

    Parmi les aphorismes dont on a hérité de la culture médiévale il y a celui-ci : contra factum non valet argumentum (contre un fait il n’y a pas d’argumentation qui vaille). Les médiévaux souhaitaient ainsi rappeler qu’il existe une distance entre les faits et leurs interprétations et qu’il faut attribuer aux premiers une priorité sur les secondes. C’était leur manière de reconnaître la grandeur de la science et de l’homme qui la construit grâce aux arguments développés par son intelligence. Mais c’était aussi affirmer que le “fait” déborde toujours l’analyse scientifique (les argumenta).

    En cette période où différentes crises – sanitaire, climatique, sociale, politique – se succèdent et s’intensifient mutuellement, ouvrant inlassablement le débat entre citoyens, experts, scientifiques et hommes politiques, cet aphorisme me paraît retrouver son actualité.

    En effet, ce qui frappe dans les débats actuels c’est qu’on utilise souvent des arguments pour contester les faits – pourtant attestés par l’expérience, l’expérimentation et l’accumulation de données scientifiques – non pas en se confrontant à d’autres faits, mais en jugeant les argumentations d’autrui comme erronées simplement à partir de ses propres interprétations. C’est le cas par exemple des débats autour du climat.

    La lutte contre la pandémie n’a fait qu’amplifier le phénomène en suscitant aussi une animosité palpable entre “experts” et décideurs politiques.

    Le vrai scientifique connaît ses limites

    Ces attitudes témoignent d’une difficulté à prendre la science pour ce qu’elle est car, comme le souligne le philosophe Jean-Michel Besnier, s’il y a bien une distinction entre sciences et non-sciences, c’est que “les premières endurent l’épreuve de la réfutation, les secondes s’y soustraient” (Jean-Michel Besnier, “Les théories de la connaissance”, PUF, 2016, p. 57.). Ces attitudes inquiètent aussi, car elles fragilisent la responsabilité individuelle, l’action politique et l’organisation de la société.

    Le philosophe Dominique Lambert décrit la science comme un “ensemble de pratiques théoriques observationnelles et expérimentales visant à maîtriser divers champs de phénomènes” (Dominique Lambert, “Les trois niveaux de l’activité scientifique”, in “Science et Théologie. Les figures d’un dialogue”, Lessius/PUN, 1999, pp. 13-44.). Elle atteint la réalité en nous livrant une connaissance de celle-ci aussi bien au terme d’une reconstruction théorique – par modélisations, formalisations, simulations – qu’au terme d’une procédure empirique, à l’aide de l’expérimentation.

    La science serait donc une discipline apte à dire quelque chose de vrai sur la réalité mais à partir de la méthode qui est la sienne, dans une condition de révision perpétuelle. Cette méthode ouvre à la connaissance du réel au moyen d’une analyse (c’est l’argumentum des médiévaux) qui explique le complexe à partir de l’élémentaire, en “réduisant” méthodologiquement celui-là à celui-ci.

    Or, si telle est la condition de la science, il est alors évident que l’image de la réalité qu’elle nous livre ne peut prétendre épuiser complètement la vérité profonde des faits. La vision “réductionniste” qui caractérise sa méthode conduit inévitablement à mettre entre parenthèses la question du sens, d’une signification qui dépasse le cadre de l’expérimentation et de l’analyse scientifiques. Ce cadre est pourtant essentiel pour expliquer l’agir des êtres humains que nous sommes. Le véritable scientifique en est conscient et ne le nie pas. C’est ainsi que, par exemple, “réduire” la complexité de l’acte humain à des mécanismes moléculaires reviendrait à faire tort à la science ainsi qu’à mépriser l’humanité. Si donc l’expertise scientifique est essentielle pour donner accès à la connaissance du réel (les faits), la considérer comme l’unique source pour dire la vérité de celui-ci et comme le seul guide de notre agir, c’est confier à la science un job qui n’est pas le sien. C’est aussi méconnaître sa grandeur et celle de la liberté humaine.

    La responsabilité d’indiquer comment nous devons agir pour faire face aux crises revient en dernière instance à chacun, et à ceux qui ont la responsabilité de gérer la société, éclairés par l’expertise scientifique, mais pas déterminés par celle-ci.

    Voilà en quoi l’aphorisme médiéval conserve toute son actualité et fait même un clin d’œil, par-delà plusieurs siècles, à notre nouveau gouvernement.