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Débats - Page 47

  • Franc-maçonnerie, le double langage du président de l'Académie pontificale de théologie

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    De Riccardo Cascioli sur la Nuova Bussola Quotidiana :

    Franc-maçonnerie, le double langage de Staglianò

    Pressé par l'article de Bussola, le président de l'Académie pontificale de théologie publie le discours qu'il a prononcé à la conférence de Milan sur l'Église et la franc-maçonnerie. Il devient ainsi encore plus clair qu'il indique la solution Fiducia Supplicans pour les francs-maçons.

    27_02_2024

    Il aura fallu un article de La Bussola pour que soit publiée l'intégralité du discours de Monseigneur Antonio Staglianò lors du séminaire "Eglise et franc-maçonnerie" organisé par le GRIS (Gruppo di Ricerca e Informazione Socio-religiosa) à Milan le 16 février dernier. Les révélations de la Bussola sur les ambiguïtés de Staglianò, président de l'Académie pontificale de théologie, ont dû provoquer quelques maux d'estomac au Vatican, au point qu'il convenait de prendre des mesures correctives. Une action intelligente, cependant : la mise en ligne, le 26 février, de la vidéo intégrale du discours a été précédée, le 24 février, d'une interview "commandée" aux médias du Vatican, dans laquelle Staglianò explique pourquoi l'Église et la franc-maçonnerie "sont profondément irréconciliables".

    Le but évident est de se montrer parfaitement en phase avec près de 300 ans de Magistère de l'Église sur la franc-maçonnerie et de réfuter ce qui a été publié par la Boussole, en comptant aussi sur le fait qu'après avoir lu la courte interview, très peu iront écouter les 46 minutes d'un discours enregistré. Mais dans l'interview, Staglianò ne fait que répéter certains des concepts exprimés lors de la conférence de Milan, laissant de côté les concepts les plus douteux, dont certains ont été rapportés par La Bussola (chacun peut vérifier l'exactitude de nos citations).

    La tactique est toujours la même : les mots disent que la doctrine ne change pas, mais il y a la vie, qui est toujours plus grande que la doctrine. C'est exactement le sens du discours de Staglianò à Milan.
    Nous trouvons donc d'une part l'affirmation de la profonde diversité entre le Dieu chrétien et la conception maçonnique du Grand Architecte, mais d'autre part le dépassement de l'obstacle doctrinal avec le concept d'amour et de miséricorde, qui englobe tout.

    Mais avant tout, il faut considérer le contexte du discours de Monseigneur Staglianò. Il s'exprimait lors d'une conférence avec les Grands Maîtres des trois principales loges italiennes, accompagnés de dizaines d'autres "frères". Les dirigeants francs-maçons, avec des nuances différentes, ont tous affirmé deux choses en particulier : premièrement, qu'il peut y avoir compatibilité entre l'Église et la franc-maçonnerie ; deuxièmement, ils ont demandé explicitement de ne plus considérer l'appartenance à la franc-maçonnerie comme un obstacle à l'accès aux sacrements ; et dans un premier temps (le Grand Maître de la Grande Loge Régulière d'Italie, Fabio Venzi, l'a dit), il faut faire une distinction entre les loges, en reconnaissant au moins celles qui sont fondées sur des rites chrétiens.

    Quelle a été la réponse de Staglianò ? En ce qui concerne la doctrine, il n'y a pas grand-chose à faire, la différence entre l'Église et la franc-maçonnerie est trop évidente. Mais il y a la vie et surtout la miséricorde de Dieu, dont la bénédiction "tombe sur les justes et les injustes" : c'est alors que Dieu jugera en dernier ressort de la manière dont nous l'avons reçue. Ce n'est pas pour rien que le Grand Maître du Grand Orient d'Italie, Stefano Bisi, avait évoqué l'ouverture aux couples homosexuels et aux divorcés remariés ; et Staglianò a pris l'exemple de Fiducia Supplicans avec la bénédiction des couples homosexuels pour expliquer la question de la Miséricorde qui s'applique à tous.

    D'autre part, il faut dire que d'un point de vue logique, le discours de Bisi ne fait pas un pli : si nous sommes tous pécheurs et que tous doivent être accueillis dans l'Église avec tous les droits, pourquoi les couples irréguliers sont-ils oui et les francs-maçons non ? Comme pour les unions homosexuelles, on pourrait toujours dire que ce n'est pas la franc-maçonnerie qui est bénie mais les francs-maçons individuellement. En fait, Staglianò ne défend pas cette discrimination, mais prépare le terrain pour la surmonter. Y compris l'invocation finale d'une "saine théologie sapientielle" qui va au-delà de l'approche doctrinale dont est encore imprégné le dernier document du Dicastère pour la Doctrine de la Foi publié en novembre dernier.

    Si l'on a la patience - et la volonté de se sacrifier - d'écouter l'intégralité du discours de Mgr Staglianò et de le contextualiser, on ne manquera pas de remarquer l'importante ouverture faite, qui culmine avec la proposition du cardinal Coccopalmerio de créer une "table permanente" Église-Maçonnerie. En bref, le schéma désormais familier se répète : l'idéologie du genre est condamnée, mais des groupes organisés de gays et de transsexuels sont chez eux au Vatican ; le diaconat des femmes est rejeté, mais des commissions sont créées pour l'étudier et aucune mesure n'est prise dans les pays européens où les femmes sont également curées ; l'importance du maintien du célibat des prêtres est affirmée, mais il est ensuite convenu d'en discuter. Et ainsi de suite.

    C'est maintenant au tour de la franc-maçonnerie. C'est ici que Staglianò devrait donner une explication convaincante : s'il croit vraiment que l'Église et la franc-maçonnerie "sont profondément irréconciliables", pourquoi s'est-il engagé depuis des années dans ce dialogue, qu'il voudrait même maintenant élever à un niveau supérieur ? Quel est l'intérêt de continuer à organiser des conférences et même une "table permanente" pour se dire que nous sommes irréconciliables et que l'Église a raison de condamner la franc-maçonnerie ?

  • Bénédictions : pourquoi Rome a-t-elle recouru à la technique du fait accompli ?

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    Une tribune de Jean-François Chiron, théologien, sur le site du journal La Croix :

    Bénédiction des couples homosexuels : « Pourquoi Rome a voulu mettre devant le fait accompli »

    Le théologien Jean-François Chiron revient sur le texte Fiducia supplicans, qui autorise la bénédiction des couples homosexuels. Il s’interroge sur les circonstances de sa publication surprise, et sur ce qu’elle dit de la pratique du pouvoir de François dans un contexte de Synode.

    Qu’ajouter à tout ce qui est dit sur la déclaration Fiducia supplicans ? Il reste possible de s’interroger sur la façon dont le document vient perturber le jeu de la synodalité, voire le « fragiliser », comme l’a écrit La Croix. La synodalité, c’est la valorisation du rôle, dans l’Église, à tous les niveaux, des « quelques-uns » par rapport au « un seul ». Comment la prise de position d’« un seul », le pape, s’insère-t-elle dans l’action de « quelques-uns », les évêques ?

    Reconnaissons que les circonstances de la publication n’honorent pas le b.a.-ba de la démarche synodale : pas même de consultation du dicastère romain concerné, ni des autres dicastères de la Curie… Sans doute a-t-on voulu éviter les fuites, inévitables sur un sujet aussi sensible. Mais cette préoccupation ne suffit pas à justifier un tel procédé. Comment, du moins, l’expliquer ?

    Rappelons un élément fondamental : en catholicisme, la dialectique synodale se joue à trois termes, « un seul »- « quelques-uns »- « tous ». On ne peut faire l’impasse sur le « un seul », en l’occurrence le rôle du pape, faute de quoi on sortirait de la tradition catholique. Mais c’est aussi une question de tempérament. Le théologien Yves Congar l’avait dit en son temps : « Je pense qu’une théorie assez monarchique pratiquée par Jean XXIII serait très collégiale, tandis qu’une théorie collégiale pratiquée par Pie X ou Pie XI serait très monarchique. » La synodalité mise en œuvre par un pape François aura toujours, reconnaissons-le, quelque chose de « monarchique »…

    Devant le fait accompli

    Il est vraisemblable, aussi, que les instances romaines aient voulu évacuer une question qui pouvait parasiter les débats lors de la session d’octobre 2024, comme cela avait été le cas pour l’ordination d’hommes mariés lors du Synode sur l’Amazonie : l’arbre d’une question particulière en était venu à cacher la forêt de la synodalité.

    Allons plus loin, et risquons une hypothèse : Rome a voulu mettre devant le fait accompli. Car il était prévisible qu’un débat aurait empêché l’évolution souhaitée sur cette question par le pape. C’est encore la controverse sur l’ordination d’hommes mariés lors du Synode sur l’Amazonie qui a pu constituer un précédent : l’opposition catégorique de quelques-uns avait interdit tout consensus, et donc toute évolution. Alors qu’on aime rappeler l’adage « seul on va plus vite, ensemble on va plus loin », force est de reconnaître qu’être ensemble peut empêcher d’avancer…

    Déminer le terrain

    Sans doute les instances romaines pensaient-elles avoir suffisamment « déminé le terrain » en distinguant entre bénédictions, en soulignant que le mariage n’était pas en cause. Cela n’aura pas suffi à endiguer la diversité des réactions, et parfois leur virulence. Sur le mode du « cachez ce couple que je ne saurais voir », des évêques auront, en France, déclaré s’en tenir à la bénédiction des individus, récusant ainsi ce qu’autorise un document romain à dimension normative (qu’en sera-t-il si des prêtres suivent Rome plutôt que leur évêque ?).

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  • Ratzinger invoqué pour justifier Fiducia Supplicans

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    D'Andrea Tornielli* sur Vatican News :

    Fiducia supplicans, les bénédictions et la distinction de Joseph Ratzinger

    Une instruction publiée en 2000 par le préfet de la congrégation pour la Doctrine de la foi de l'époque distinguait les prières de guérison, rituelles et incluses dans les livres liturgiques, des prières pastorales ou spontanées. Le même critère est utilisé aujourd'hui pour admettre la possibilité de bénir les couples irréguliers.

    La déclaration Fiducia supplicans, publiée par le dicastère pour la Doctrine de la Foi en décembre dernier, de fait et comme beaucoup l'ont souligné, ne change pas la doctrine traditionnelle sur le mariage qui prévoit la bénédiction nuptiale uniquement dans le cas d’un homme et d’une femme qui se marient. Ce qui est approfondi par le document, qui admet la possibilité de simples bénédictions spontanées également pour les couples irréguliers ou de même sexe sans que cela signifie bénir leur union ou approuver leur conduite de vie, c'est plutôt la nature des bénédictions. Fiducia supplicans distingue en effet les bénédictions liturgiques ou rituelles des bénédictions spontanées ou pastorales. En ce qui concerne les premières, les bénédictions liturgiques, il y a deux façons de les comprendre: un sens large, qui considère toute prière faite par un ministre ordonné comme "liturgique", même si elle est donnée sans forme rituelle et sans suivre un texte officiel; et un sens plus étroit, selon lequel une prière ou une invocation sur des personnes n'est "liturgique" que lorsqu'elle est accomplie "rituellement", et plus précisément lorsqu'elle se base sur un texte approuvé par l'autorité ecclésiastique.

    Certains des critiques qui ont remis en question la récente déclaration ne considèrent en fait licite que le sens large et ne retiennent donc pas comme acceptable la distinction entre les prières ou bénédictions "rituelles" et "liturgiques", et les prières ou bénédictions "pastorales" et "spontanées". Prenons en exemple certaines objections défendant que la liturgie a également une importance pastorale. Mais à cet égard, il convient de noter que Fiducia supplicans attribue au mot "pastoral" un sens spécifique: celui d'une attention particulièrement orientée vers l'accompagnement de ceux à qui la bénédiction est offerte; à l'image du "bon pasteur" qui ne se tranquillise pas tant qu'il n'a pas retrouvé tous ceux qui se sont égarés. D'autres objections soutiennent que toutes les prières seraient "liturgiques" et qu'elles seraient donc toutes soumises aux exigences de la liturgie de l'Église. Le Pape François lui-même a répondu à cette objection dans son discours aux participants à l'assemblée plénière du dicastère pour la Doctrine de la foi, le 26 janvier, en insistant sur l'existence de bénédictions pastorales ou spontanées qui, «en dehors de tout contexte et de forme de caractère liturgique», expliquait-il, «n’exigent pas une perfection morale pour être reçues». Les paroles du Souverain pontife confirment ainsi l'orientation qui consiste à considérer le sens le plus strict des bénédictions liturgiques.

    Un précédent important, à propos de la distinction entre ce qui est liturgique et ce qui ne l'est pas, peut-être trouvé dans une instruction de l'année 2000, publiée par l'alors congrégation pour la Doctrine de la foi, signée par le cardinal Joseph Ratzinger et approuvée par Jean-Paul II.

    Cette instruction porte sur les prières pour obtenir de Dieu la guérison. Au point numéro deux de la première partie du document, il est rappelé que «le De benedictionibus du Rituale Romanum comporte un Ordo benedictionis infirmorum, dans lequel se trouvent divers textes de prières qui implorent la guérison». Dans la dernière partie de l'instruction, consacrée aux dispositions disciplinaires, il y a ensuite un article (2) qui dit ceci: «Les prières de guérison sont considérées comme liturgiques, si elles se trouvent dans les livres liturgiques approuvés par l'autorité compétente de l'Eglise; autrement, elles sont non-liturgiques». Il y a donc des prières de guérison liturgiques ou rituelles, et d'autres qui ne le sont pas, mais qui sont légitimement permises. L'article suivant rappelle que celles qui sont «liturgiques se célèbrent selon le rite prescrit et avec les vêtements sacrés indiqués dans l'Ordo benedictionis infirmorum du Rituel romain». Ces citations du texte signé par le cardinal Joseph Ratzinger et approuvé par le Pape Karol Wojtyla montrent que le sens du terme "liturgique" utilisé dans Fiducia supplicans pour définir les bénédictions rituelles, différentes des bénédictions pastorales, représente certes une évolution, mais qui s’insère dans le sillon du magistère de ces dernières décennies.

    Il existe également d'autres distinctions entre les bénédictions: certaines représentent des consécrations, ou le scellement du sacrement célébré par le couple (dans le cas de la bénédiction nuptiale); d'autres représentent des prières d'invocation qui, d’en bas, s'élèvent vers Dieu; d'autres encore (dans le cas des exorcismes) sont destinées à conjurer le mal. Fiducia supplicans précise à plusieurs reprises que le fait de donner une bénédiction pastorale ou spontanée -sans aucun élément nuptial- à un couple "irrégulier" qui s'adresse à un prêtre ou à un diacre ne signifie pas et ne peut en aucun cas représenter une forme d'approbation de l'union entre les deux. Elle ne peut, selon le document, «offrir une forme de légitimité morale à une union qui se présente comme un mariage ou à une pratique sexuelle extra maritale». La bénédiction pastorale ou spontanée représente une invocation à Dieu pour qu'il permette aux semences du bien de croître dans la direction qu’il désire.

    *Directeur éditorial des médias du Vatican

  • Troubles et divisions dans l’Église

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    Lu cet éditorial de la revue mensuelle « La Nef » de février 2024 :

     « La Déclaration portant sur la bénédiction des « couples en situation irrégulière » a fait couler beaucoup d’encre. Pire, elle a semé troubles et divisions dans l’Église, créant une situation sans beaucoup de précédents. Ce qui ne laisse pas de nous étonner – et nous attriste –, c’est, face à ces réactions honnêtes venues d’une large partie du troupeau, la désinvolture qui semble régner en maître à la tête de l’Église.

    La déclaration du Dicastère pour la Doctrine de la foi, Fiducia supplicans, « sur la signification pastorale des bénédictions », publiée le 18 décembre dernier, a choqué un grand nombre de chrétiens et ne cesse, depuis, de semer un trouble certain dans l’Église, malgré les précisions du 4 janvier de ce même Dicastère qui n’éclairent pas grand-chose. Jamais un texte romain n’avait soulevé une telle opposition, particulièrement de nombreux évêques et de conférences épiscopales entières.

    Bergoglio images (28).jpgOn sait que le pape François porte en lui le souci d’aller aux « périphéries existentielles », afin de toucher les âmes éloignées du message évangélique. Quand on observe la sociologie du catholicisme français, dont les forces vives résident aujourd’hui principalement dans une bourgeoisie relativement aisée – honneur à elle d’avoir su conserver le flambeau et le transmettre –, on comprend l’urgence de s’adresser aux classes populaires et à cette « France périphérique » si délaissée par nos élites parisiennes. Il est en effet anormal que l’Église, qui honore tant la figure du pauvre, ne parvienne pas en France à toucher davantage les milieux les plus défavorisés, exception faite, il est vrai, de nombreux Antillais et Africains catholiques particulièrement fervents.

    Corollaire de ce souci, le pape veut manifester l’amour inconditionnel de Dieu pour chaque homme, et ainsi donner la priorité au témoignage d’amour et de miséricorde de Dieu pour tous, et plus particulièrement pour les pécheurs – que nous sommes tous – comme le Christ en a lui-même montré l’exemple. Cette double préoccupation nous semble prophétique dans un monde qui a largement rejeté Dieu – ainsi beaucoup de nos contemporains sont indifférents à la question religieuse plus par ignorance que par une hostilité consciente et raisonnée envers le christianisme.

    Amour, miséricorde et vérité

    Dans l’Évangile, néanmoins, l’amour et la miséricorde infinis du Christ touchent le pécheur, mais jamais pour le conforter dans le péché, toujours pour l’en délivrer et le conduire vers une voie de sainteté. Approcher le pécheur avec amour et miséricorde est nécessaire, mais est-ce amour et miséricorde que de ne pas lui expliquer son péché ? La vérité n’est-elle pas la première des charités ? Et le monde lui-même, n’attend-il pas de l’Église cette parole de vérité ?

    Or, si de bons théologiens peuvent sauver la rectitude doctrinale de Fiducia supplicans au prix de subtiles arguties, il est clair que le commun des mortels comme les grands médias ont compris que, dé­sormais, l’Église permettait la bénédiction des « couples homosexuels » ou « divorcés remariés », leur conférant ainsi une légitimité de fait. Car la grande faiblesse de ce texte est son ambiguïté, son manque de clarté pourtant indispensable sur un sujet aussi controversé. Certes, la déclaration romaine affirme la stricte continuité de la doctrine catholique sur le mariage, mais n’explique pas deux points fondamentaux : comment passe-t-on d’une bénédiction de personnes homosexuelles ou divorcées remariées (qui se pratique déjà et ne pose aucun problème, nul besoin d’un texte pour cela) à une bénédiction du « couple » en tant que tel ? Et comment définir la différence entre une « union », qu’il n’est pas possible de bénir quand elle est irrégulière, et un « couple », tout aussi irrégulier, qui pourrait recevoir, lui, cette bénédiction ?

    Ambiguïté et désinvolture

    En n’ayant pas répondu à ces deux questions clés, Rome entretient une ambiguïté délétère qui sème troubles et divisions dans l’Église. Et c’est là sans doute le plus choquant : malgré le désarroi d’un grand nombre, bien que cette problématique ne concerne dans les faits que l’Occident déchristianisé, Rome n’explicite pas davantage son propos, et poursuit ainsi sa route avec une désinvolture désarmante, malgré les dégâts occasionnés, révélant au passage une certaine condescendance envers les Africains qui ne seraient pas encore parvenus au niveau de sophistication de la culture occidentale pro-LGBT. François, qui impose ses vues particulières avec autoritarisme (loin de l’esprit « synodal »), semble se moquer de ses opposants lorsqu’il affirme que, « dans la plupart des cas, quand on n’accepte pas les décisions, c’est parce que l’on ne connaît pas » (1), comme si ceux qui critiquent Fiducia supplicans ne l’avaient pas lue et n’y avaient pas réfléchi. Cette désinvolture à la tête de l’Église est une pratique qui nous attriste. C’était déjà le cas avec Amoris laetitia (2016), lorsque le pape a refusé de répondre aux dubia de quatre cardinaux, ou encore avec Traditionis custodes (2021), qui punit sévèrement toute une mouvance dynamique pour la déviance d’une minorité. De telles attitudes sont difficilement compréhensibles, alors que le pape est notre père, gardien de l’unité (Jn 17, 21) et chargé d’affermir la foi des fidèles (Lc 22, 32) »

    Christophe Geffroy

    (1) Cité par Jean-Marie Guénois, site du Figaro, le 4 janvier 2024.

     

     Bref, on conclut sans conclure :

    « Rome entretient une ambiguïté délétère qui sème troubles et divisions dans l’Église. De telles attitudes sont difficilement compréhensibles, alors que le pape est notre père, gardien de l’unité (Jn 17, 21) et chargé d’affermir la foi des fidèles (Lc 22, 32) »

     Mais alors ? (NdRed).

  • Controverses : pourquoi la guerre d'Israël contre le Hamas serait-elle "proportionnée" ?

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    De Sandro Magister sur Settimo Cielo (Diakonos.be) :

    Questions controversées. La guerre d’Israël contre le Hamas est-elle « proportionnée » ? Voici les raisons du oui.

    (s.m.) L’article du professeur Pietro De Marco sur la guerre entre Israël et le Hamas, publiée aujourd’hui par Settimo Cielo, dénote clairement par rapport à l’opinion générale, y compris au sein de l’Église.

    Mais même ceux qui ne sont pas d’accord ne peuvent pas se priver d’y prêter attention. Parce que De Marco met précisément le doigt sur ce qui échappe au plus grand nombre, c’est-à-dire la nature très particulière de la « guerre moderne » mise en œuvre par le Hamas, non seulement aujourd’hui mais depuis des années, et dont la logique est très éloignée, si pas opposée, à cet engagement en faveur des populations palestiniennes affligées, exilées, réfugiées, qui anime en revanche les cultures politiques et religieuses de l’Occident et qui fonde le jugement répandu sur la « disproportionnalité » de la réaction armée d’Israël à Gaza.

    La question de l’avenir politique des Palestiniens est en effet une question qui devrait être éclaircie. La solution « deux peuples, deux États » énoncée avec une cadence quasi rituelle par les chancelleries, n’est en réalité partagée ni par l’écrasante majorité des Juifs israéliens et encore moins par le Hamas, comme l’a reconnu Aluf Benn, directeur du principal quotidien d’opposition au gouvernement de Benjamin Netanyahu, « Haaretz », dans un important essai publié dans « Foreign Affairs » du 7 février intégralement traduit et publié en italien par la revue « Il Regno ».

    La solution souhaitée par M. Benn pour le conflit doit être recherchée dans l’avertissement lancé par Moshe Dayan après le meurtre en 1956 d’un jeune Juif par un Palestinien : « Ne jetons pas la faute sur les assassins. Pendant huit ans, ils sont restés dans les camps de réfugiés de Gaza pendant que sous leurs yeux nous avons accaparé les terres et les villages où eux et leurs pères habitaient ».

    Dayan faisait allusion à la « nakba », la « carastrophe », c’est-à-dire l’éviction de leurs terres à laquelle les Palestiniens ont été contraint après avoir perdu la guerre de 1948 contre l’État d’Israël qui venait de naître. Sauf que ces réfugiés qui étaient à l’origine sept cent mille sont aujourd’hui plus de cinq millions, toujours classés comme « réfugiés », financée par les Nations Unies, et qu’ils continuent à revendiquer le droit de retourner dans leurs lieux d’origine, délégitimant par la même occasion l’existence même de l’État d’Israël.

    L’historien Ernesto Galli della Loggia a rédigé un éditorial très éclairant dans le « Corriere della Sera » du 18 février pour expliquer comment cette revendication du retour des « réfugiés » palestiniens rend inapplicable la solution « deux peuples, deux États », à moins de garanties préalables concertées dont on ne voit pas la trace aujourd’hui.

    Mais laissons la parole au professeur De Marco, ancien professeur de sociologie de la religion à l’Université de Florence et à la Faculté théologique d’Italie centrale.

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  • Le cardinal Sarah met en garde contre la désunion des chrétiens, qu'il considère comme un contre-témoignage

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    De Catholic News Agency :

    Le cardinal Sarah met en garde contre la désunion des chrétiens, qu'il considère comme un contre-témoignage

    26 février 2024

    La désunion entre les disciples du Christ est contre-productive pour la mission de témoignage du message évangélique et d'évangélisation, a récemment déclaré le cardinal Robert Sarah lors d'un symposium au Kenya. 

    Le cardinal Sarah, qui a été préfet du Dicastère pour le culte divin et la discipline des sacrements de 2014 à 2021, a prononcé le discours principal lors du Symposium théologique 2024 organisé par l'École de théologie du Tangaza University College (TUC), basé au Kenya, et a averti que les divisions entre les chrétiens les exposaient à l'"exploitation".

    "Si nous ne sommes pas un, si nous sommes divisés, alors notre témoignage du Christ est divisé et le monde ne croira pas en l'Évangile", a déclaré Sarah le 22 février, le premier jour de cet événement de deux jours.

    Sarah a exhorté les disciples de Jésus-Christ en Afrique à donner la priorité à leur adhésion au message de l'Évangile, en permettant aux principes de la foi chrétienne de l'emporter sur toutes les autres identités, y compris la tribu, la nationalité et la race, entre autres affiliations.

    Cherchez l'unité d'abord dans la foi chrétienne, puis avec nos compatriotes et nos frères africains", a-t-il déclaré dans son discours intitulé "Faites de toutes les nations des disciples" : Le mandat missionnaire du Christ".

    Pour souligner la nécessité de l'unité entre les disciples de Jésus-Christ, le cardinal de 78 ans, d'origine guinéenne, a mis en garde contre les divisions qui rendent les chrétiens "vulnérables à l'exploitation".

    "Si nous ne nous efforçons pas de parvenir à l'unité dans le Christ, notre situation sera encore pire. Les divisions entre nous - religieuses, ethniques et politiques - sont vulnérables à l'exploitation ; elles peuvent être exploitées par des politiciens corrompus ou même par des puissances étrangères", a-t-il déclaré. 

    Sarah a déjà exprimé son opposition à Fiducia Supplicans, la déclaration du Dicastère du Vatican pour la Doctrine de la Foi (DDF) qui a suscité des réactions mitigées et de profondes divisions au sein du peuple de Dieu en général et des évêques catholiques du monde entier en particulier depuis sa publication le 18 décembre 2023.

    Dans une réflexion du 6 janvier qu'il a partagée avec Settimo Cielo, un blog italien, Sarah a maintenu sa position précédente de ne pas s'opposer au Saint-Père.

    "Nous ne nous opposons pas au pape François, mais nous nous opposons fermement et radicalement à une hérésie qui mine gravement l'Église, le corps du Christ", a déclaré Mgr Sarah, précisant son opposition aux recommandations de Fiducia Supplicans, qui autorisent les membres du clergé à bénir les "couples de même sexe" et les couples se trouvant dans d'autres "situations irrégulières".

    Les personnes pratiquant l'homosexualité sont "dans la prison" du péché et ont besoin de la vérité de "la parole de Dieu" pour les libérer, a-t-il ajouté : "La vérité est la première des miséricordes que Jésus offre au pécheur".

    "La liberté que nous devons offrir aux personnes vivant dans des unions homosexuelles réside dans la vérité de la parole de Dieu", a-t-il déclaré. "Comment oserions-nous leur faire croire qu'il serait bon et voulu par Dieu qu'elles restent dans la prison de leur péché ? 

    Le manque de clarté de la déclaration du DDF "n'a fait qu'amplifier la confusion qui règne dans les cœurs, et certains s'en sont même emparés pour appuyer leur tentative de manipulation", a écrit Sarah dans sa réflexion du 6 janvier, faisant référence aux divisions causées par les recommandations de Fiducia Supplicans.

    Dans son discours du 22 février au Kenya, Sarah a établi un lien entre l'unité des disciples de Jésus-Christ et le progrès. "Ce n'est qu'ensemble que nous pourrons prospérer", a-t-il déclaré.

    Selon lui, les défis qui entravent la mission de témoignage du message de l'Évangile et le ministère d'évangélisation peuvent être relevés "en se tournant vers Dieu dans la prière et le jeûne".

    "En nous tournant vers le Seigneur dans la prière et le jeûne, Dieu nous élève. Il nous libère de l'égoïsme et de l'étroitesse et se révèle à nous d'une manière ou d'une autre. Il nous discipline afin que nous ne laissions pas de légères différences nous empêcher de travailler ensemble de toutes les manières possibles", a-t-il déclaré. 

    Le cardinal a ensuite souligné la nécessité de combiner la prière et le jeûne, deux des trois piliers du Carême, avec la charité par l'aumône. 

    "L'évangélisation doit impliquer la prière et le jeûne ensemble, même avec ceux d'autres traditions religieuses, en réponse à des maux que nous reconnaissons ensemble. En priant et en jeûnant, les obstacles à l'évangélisation seront surmontés", a déclaré Sarah.

    Ce récit a d'abord été publiée par ACI Africa, le partenaire d'information de CNA en Afrique, et a été adaptée par CNA.

    ACI Africa (www.aciafricanews.com) est un service de EWTN News Inc. (www.ewtnnews.com) et de Catholic News Agency. Elle a été officiellement inaugurée le 17 août 2019 en tant qu'agence de presse catholique continentale au service de l'Église en Afrique. Basé dans la capitale du Kenya, Nairobi, cet apostolat médiatique s'efforcera de raconter les nouvelles de l'Afrique en fournissant une couverture médiatique des événements catholiques sur le continent africain et en donnant de la visibilité aux activités de l'Église à travers l'Afrique. Le rédacteur en chef d'ACI Africa est le père Don Bosco Onyalla.

  • La fin de l'ère des trois papes

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    D'Andrea Gagliarducci sur Korazym.org :

    La fin de l'ère des trois papes

    19 février 2024

    Il était une fois trois papes. L'un était le Pape Blanc, le Pontifex Maximus, Chef de l'Eglise catholique et Vicaire du Christ par-dessus tout. Ensuite, il y avait le Pape noir, le Général des Jésuites, qui avait entre autres un vœu spécial d'obéissance au Pape. Enfin, il y avait le pape rouge : le préfet de Propaganda Fide, plus tard appelé Congrégation pour l'évangélisation des peuples. Pourquoi étaient-ils tous "papes" ?

    Pour le pape blanc, il n'y a rien à dire, car tout le monde sait qu'il est le pape de Rome. Le pape noir a reçu ce surnom parce que sa charge était à vie et que ses pouvoirs dans l'Ordre étaient absolus. Le pape rouge a été appelé ainsi parce que Propaganda Fide était un dicastère sui generis, avec une autonomie financière et des terres de mission où il pouvait nommer des évêques - le seul cas où ce n'est pas le dicastère pour les évêques qui est chargé de choisir les candidats à l'épiscopat.

    Avec le pape François, cependant, les trois papes sont devenus un seul, le pape blanc. C'est-à-dire, tout simplement, lui.

    Le pape François est lui-même un jésuite et il est clair qu'il est un point de référence plus important pour les jésuites que le général actuel, bien que François prenne soin d'éviter de paraître influencer directement l'ordre des jésuites dont il est issu. Le pape François a d'ailleurs souligné son affiliation en rencontrant les jésuites locaux lorsqu'il y en avait lors de chacun de ses voyages, se comportant après tout un peu comme un supérieur de la Congrégation.

    En ce qui concerne le pape rouge, la situation reflète quelque peu ce qu'a été la réforme de la Curie sous le pape François jusqu'à présent. Le préfet de Propaganda Fide a été rétrogradé et s'appelle désormais Pro-préfet, car le pape est idéalement à la tête du dicastère. Le dicastère lui-même est le résultat de la fusion de deux dicastères différents, à savoir l'ancienne Congrégation pour l'évangélisation des peuples et le Conseil pontifical pour la promotion de la nouvelle évangélisation. Cela signifie qu'il existe d'autres domaines de compétence plus nuancés, car la section pour la nouvelle évangélisation n'a certainement rien à voir avec le choix des nominations épiscopales, pour lesquelles la section pour l'évangélisation des peuples est toujours compétente, du moins en terre de mission.

    Surtout, la réforme de la Curie a privé la Propaganda Fide de son autonomie financière. Tout est désormais sous le contrôle des auditeurs du Secrétariat pour l'économie, et le nouveau mot d'ordre semble être de louer des biens immobiliers, de tout professionnaliser, et de perdre ainsi les clients les plus importants, ou plutôt les premiers utilisateurs du dicastère : les pauvres et les religieux.

    L'effondrement du Pape rouge est révélateur d'une centralisation vaticane qui galope sans relâche et qui voit François engagé dans une grande lutte pour un changement de mentalité, un renouveau de l'esprit qui était alors représenté dans le Synode des évêques, célébré sur la communion, la participation et la mission.

    Le terme "synode" devient maintenant l'expression du renouveau, car l'idée qu'un synode puisse conduire à des décisions controversées effrayait les pères synodaux de tous bords.

    Cependant, le changement de mentalité sous le pape François semble voir le Saint-Siège traité comme n'importe quelle autre entreprise, dont le pape est le PDG. Dès le début, le pontificat a été caractérisé par l'avènement de commissaires, de commissions et de consultants externes qui, en plus d'alourdir les finances du Saint-Siège, n'ont eu d'autre solution à proposer que de traiter le Saint-Siège et l'État de la Cité du Vatican dans les faits comme des entreprises sur le marché financier.

    Ainsi, dans la quête d'un renouveau qui devrait être spirituel, le pape François accepte la sécularisation du Saint-Siège, dans un processus qui va de pair avec la vaticanisation du Saint-Siège.

    Avant le Saint-Siège, il y a l'État de la Cité du Vatican, qui semble tout contrôler, tout décider et avoir un pouvoir quasi illimité. Il suffit de noter comment le pape François a accordé des pouvoirs spéciaux aux magistrats du Vatican, avec quatre rescrits lors des enquêtes qui ont conduit au procès pour la gestion des fonds de la Secrétairerie d'État du Saint-Siège.

    Cette vaticanisation est liée à un autre sujet peu exploré : l'italianisation - ou la redynamisation - du Vatican et du Saint-Siège sous François. Il s'agit d'un retour au passé, car tous les travaux antérieurs visaient précisément à libérer le Saint-Siège de l'influence de son encombrant voisin italien. Lorsque l'Autorité de renseignement financier a été créée, elle a été immédiatement confiée à d'anciens fonctionnaires de la Banque d'Italie. Mais ensuite, on a changé d'orientation et on a créé un organisme plus international et moins dépendant des idées qui caractérisaient la structure de l'État.

    Si l'on y réfléchit bien, tous les récents scandales financiers du Vatican sont nés et ont évolué dans le contexte italien. Même le récent procès du Vatican, qui concernait principalement l'investissement dans une propriété à Londres, impliquait principalement des intermédiaires italiens, a fait l'objet d'enquêtes qui ont révélé des liens avec des politiciens, des gestionnaires ou même des services secrets italiens, et a été traité par des magistrats italiens ne travaillant au Vatican qu'à temps partiel - ce qui est un signe de la faiblesse du système judiciaire du Vatican, soulignée entre autres par la commission MONEYVAL du Conseil de l'Europe.

    Les signes sont nombreux.

    Le 15 février, le pape François a nommé le général à la retraite Salvatore Farina à la tête de la Direction des infrastructures et des services de l'État de la Cité du Vatican. Il est intéressant de noter que le général Farina prend la place d'un prêtre et que, dans la pratique, un ancien cadre supérieur de l'armée italienne est appelé à diriger la Direction des infrastructures et des services, qui a notamment un rôle dans le contrôle des appels d'offres conformément à la dernière loi sur les marchés publics du Vatican.

    En 2020, le pape François a nommé cinq gentilshommes de Sa Sainteté - ceux qui assistent et gèrent les visites des chefs d'État et des dignitaires au pape François - en les prenant dans les rangs des bureaux cérémoniels italiens. D'une certaine manière, c'est un signe de faiblesse, car le Saint-Siège a son propre langage cérémoniel, qui précède le langage italien et qui est de plus en plus mal compris.

    La centralisation du pouvoir dans le pape, avec la fin de l'ère des trois papes et l'omniprésence de l'intervention du pape dans les décisions, conduit paradoxalement à une vision opposée à celle mise en avant par le pape François : la structure de l'État prévaut sur celle du Saint-Siège, et donc la bureaucratie devient plus importante que la mission - ce qui a également été certifié lorsque le pape a transformé l'Elemosineria apostolique en Dicastère pour le service de la charité, éliminant un membre de la famille papale afin de bureaucratiser et de nationaliser la charité du pape.

    Mais si c'est l'État qui fait foi, et si l'État vit dans un "hôpital de campagne" réglementaire parce qu'il n'y a pas eu de véritable formation à la loi vaticane, alors il faut prendre des points de référence. Et le premier point de référence a toujours été l'Italie.

    Ainsi, un chemin de croissance et d'indépendance s'est en quelque sorte arrêté. Au nom des réformes nécessaires, nous nous trouvons aujourd'hui dans une situation de rupture substantielle avec le passé récent, visant à tout changer et à montrer le changement. Dans de nombreux cas, il y a un manque d'écoute des différentes demandes. Une vision est imposée, avec l'idée - cf. le débat sur Fiducia supplicans, la Déclaration du Dicastère pour la Doctrine de la Foi sur les bénédictions des couples irréguliers - que ceux qui critiquent la réforme ou soulignent ses côtés critiques, ne comprennent tout simplement pas ce qui est en train de se passer.

    En fin de compte, cela peut être lu comme une colonisation idéologique paradoxale et brutale réalisée alors que le Pape la dénonce.

  • Selon l'historien Richard Pipes, la Russie est fermement ancrée dans une tradition impérialiste et autoritaire

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    De Filip Mazurczak sur The European Conservative :

    Le problème permanent de la culture politique russe

    Selon l'historien Richard Pipes, la Russie est fermement ancrée dans une tradition impérialiste et autoritaire.

    24 février 2024
     
    Le 24 février 2022, le monde est choqué par l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Beaucoup pensaient naïvement qu'après le XXe siècle sanglant du Vieux Continent, une guerre d'agression était impensable en Europe. L'année dernière a marqué le centenaire de la naissance de l'historien polonais-juif-américain Richard Pipes ; il convient de rappeler sa vie et ses idées, en particulier son point de vue sur le passé, qui peut aider à mieux comprendre l'agression impérialiste brutale de Poutine.

    Échapper à l'Holocauste

    Ryszard Edgar Piepes est né dans une famille juive assimilée à Cieszyn, en Pologne, le 11 juillet 1923, cinq ans seulement après la résurrection de l'État polonais après plus d'un siècle de partition étrangère. À la fin du XVIIIe siècle, le Commonwealth polono-lituanien, qui s'étendait de la Baltique à la mer Noire et qui était autrefois le plus grand État d'Europe, a été englouti par ce que Herman Melville a judicieusement appelé les "trois puissances pirates", à savoir la Russie, la Prusse et l'Autriche, qui l'ont affaibli sur le plan interne. Cieszyn se retrouve sous la domination des Habsbourg ; des trois envahisseurs, la monarchie éclairée d'Autriche est la plus tolérante à l'égard des Juifs et accorde aux Polonais le plus grand degré d'autonomie.

    Les patriotes polonais voient dans la Première Guerre mondiale une occasion d'accéder à l'indépendance. Ainsi, une légion polonaise fut formée sous le commandement austro-hongrois ; les Autrichiens promirent aux Polonais l'indépendance en cas de victoire des Puissances centrales.

    L'un des légionnaires polonais était Marek Piepes, le père du futur historien. Bien que les Puissances centrales aient perdu la Grande Guerre face à l'Entente, un État polonais indépendant fut créé en vertu du traité de Versailles. Cieszyn se trouvait près de la frontière contestée entre la Pologne et la Tchécoslovaquie ; la rivière Olza séparait Cieszyn polonais de Český Těšín.

    Dans le Cieszyn d'après-guerre, Marek Piepes a fondé une chocolaterie appelée Dea. Il a fini par la vendre et a déménagé sa famille à Cracovie, mais en moins d'un an, elle s'est installée à Varsovie, où il a également travaillé dans l'industrie de la confiserie. Dea a depuis été rebaptisée Olza et produit la célèbre barre de gaufrettes Prince Polo, que l'on peut acheter dans n'importe quelle épicerie polonaise.

    Alors que l'entre-deux-guerres a été une période d'épanouissement culturel pour la minorité juive de Pologne, l'antisémitisme institutionnel et l'antisémitisme populaire violent se sont développés après la mort du dirigeant autocratique mais tolérant de la nation, Józef Piłsudski, en 1935. Cette évolution est conforme aux tendances observées ailleurs en Europe centrale et orientale ; l'évolution la plus inquiétante est celle de l'Allemagne voisine qui, depuis 1933, est gouvernée par le parti nazi. Outre son antisémitisme officiel, l'Allemagne menace de plus en plus d'envahir son voisin oriental, dont le ministre des affaires étrangères, le colonel Józef Beck, refuse de céder aux exigences territoriales d'Hitler.

    Le 1er septembre 1939, l'Allemagne nazie envahit la Pologne par l'ouest, suivie 16 jours plus tard par une invasion soviétique par l'est. Bien que l'armée polonaise se soit battue avec courage, elle n'a pas fait le poids face à la Wehrmacht, qui a commencé son occupation brutale de la Pologne, qui a duré six ans. Les Piepes ont rapidement compris que, dans ce qui se passait, le fait d'être juif pouvait s'avérer mortel. Varsovie, où vivait la famille Piepes, a été gravement endommagée par les bombardements allemands. Outre d'énormes dégâts matériels, 25 000 Varsoviens ont été tués en septembre 1939.

    Grâce à l'aide de vieilles connaissances des légions polonaises, dont certaines sont devenues des figures importantes de l'armée, du gouvernement et du corps diplomatique polonais, Marek Piepes et sa famille s'échappent de Cieszyn en passant par Breslau, en Allemagne, avant de se rendre en Italie et de s'installer finalement aux États-Unis.

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  • Inde : le projet de code civil unifié suscite l'opposition des minorités religieuses

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    De Vatican News :

    En Inde, le code civil de la discorde

    Le BJP, le parti du Premier ministre indien Narendra Modi, veut appliquer un code civil unifié à toute la population. S’il a déjà été adopté dans un des États de la fédération, son application au niveau national reste suspendue aux résultats des élections législatives du printemps. Mais ce projet suscite surtout l’opposition de la plupart des minorités religieuses du pays.

    Entretien réalisé par Xavier Sartre – Cité du Vatican

    Un code civil unifié (CCU), qui établit les mêmes lois pour tous les citoyens indiens, indépendamment de leur religion: c’est le sens de la loi adoptée ce mois-ci par le BJP, le parti du Premier ministre fédéral Narendra Modi, dans l’Uttarakhand, un des États de cet immense pays. Ce code régente ainsi entre autres, les mariages, les divorces, les héritages et les adoptions. Il a provoqué de vives critiques, principalement chez les musulmans, même si la polygamie n’est pas concernée par la nouvelle législation.

    Le débat pourrait maintenant devenir national, puisque dans deux mois, les Indiens seront appelés aux urnes pour élire leurs députés fédéraux et le BJP pourrait bien proposer d’appliquer ce code à l’ensemble du pays. Cette perspective parait logique s’agissant d’une des trois grandes promesses faites par Narendra Modi quand il est arrivé au pouvoir en 2014. Or, il a déjà tenu les deux premières: l’annulation de l’autonomie constitutionnelle du Cachemire, seul État complètement musulman du pays, et la consécration du temple d’Ayodhya sur le site d’une mosquée dont la destruction avait provoqué de sanglants affrontements entre hindous et musulmans.

    La politique nationaliste hindoue inquiète

    Pour le gouvernement Modi, l’adoption du code civil unifié serait par ailleurs un gage de modernité. «Cela permet au gouvernement de dire “nous sommes pour le même droit pour tous les citoyens, et nous sommes pour l’égalité des sexes”», explique Jean-Luc Racine, directeur de recherche émérite au CNRS et spécialiste de l’Inde. Les promoteurs de ce projet vantent en effet l’amélioration de la condition des femmes qui seraient davantage protégées, notamment en matière d’héritage, de mariage ou de divorce. Autant d’aspects qui entrent en opposition avec les droits existants jusqu’alors et qui respectent les lois religieuses des minorités.

    Mais l’opposition, notamment musulmane, au CCU est aussi motivée par les peurs provoquées par la politique nationaliste hindoue du gouvernement fédéral qui «peut légitimer les inquiétudes des musulmans» estime le chercheur. Les minorités tribales sont aussi très critiques, craignant que leurs particularités et leurs traditions ne soient remises en cause, alors qu’elles doivent déjà subir bien des avanies. Les critiques dépassent en outre le simple cadre communautaire, le parti du Congrès et les communistes étant aussi vent debout contre le projet.

    Un code prisonnier de la suspicion

    Un même droit pour tous contre des droits ancestraux, parfois discriminatoires, est-ce finalement la redite de la querelle des Modernes et des Anciens? «Il est inévitable que des mesures qui mériteraient attention soulèvent des controverses» dans un contexte où l’hégémonie hindoue s’affirme, relève Jean-Luc Racine. «On peut toujours penser qu’il y a des arrière-pensées derrière ce projet de réforme», reconnait-il. «Les choses pourraient être perçues différemment si elles étaient présentées par un gouvernement qui n’a pas la pratique du gouvernement de Narendra Modi à l’encontre des minorités religieuses», ajoute-t-il.

    Le fait que le Premier ministre en personne participe à des cérémonies religieuses hindoues crée de la confusion dans les réelles intentions du gouvernement et remet en question le sécularisme indien qui garantit une neutralité de l’État vis-à-vis des religions et la liberté religieuse à travers tout le pays, ainsi que la reconnaissance de certains droits traditionnels ou coutumes. La suspicion à l’encontre du BJP s’en trouve renforcée. Et les tensions intercommunautaires alimentées.

    Lire également : Adieu à l’Inde démocratique et multiculturelle où les chrétiens sont de plus en plus persécutés

  • A l’ONU, les pays du Sud  se sont opposés aux pays du Nord sur le langage de la famille

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    De zenit.org :

    ONU : Débats autour du statut de la famille

    Les pays pauvres défendent l’héritage de saint Jean-Paul II 

    22 février 2024

    Center for Family and Human Rights/New York, 19 février 2024 / Les États membres de l’ONU ont célébré le 30e anniversaire de l’Année internationale de la famille, mais dans une résolution adoptée par la Commission annuelle du développement social de l’ONU, les pays du Sud  se sont opposés aux pays du Nord sur le langage de la famille.

    La résolution réaffirme les accords antérieurs déclarant que la famille est « l’élément naturel et fondamental de la société », une définition qui fait référence au mariage entre un homme et une femme en tant que fondement de la société.

    « Comme indiqué il y a plus de trente ans dans la première résolution sur l’Année internationale de la famille (résolution 44/82), l’objectif de cette célébration était de sensibiliser les gouvernements, les décideurs politiques et le public à la famille en tant qu’unité naturelle et fondamentale de la société.

    Aujourd’hui, des forces puissantes tentent activement d’effacer cette prise de conscience », a déclaré un délégué du Nigeria.  « Je tiens à souligner que toute référence à la famille et à la politique familiale dans cette résolution doit être comprise en fonction de cet objectif », a-t-il insisté, soulignant que les efforts visant à s’opposer à la famille naturelle fondée sur le mariage entre un homme et une femme vont à l’encontre de ce que les accords des Nations Unies et le droit international contraignant disent depuis longtemps au sujet de la famille.

    Au cours de la deuxième semaine de février, des représentants de l’Union européenne et d’autres pays occidentaux avaient demandé la reconnaissance de « diverses formes de famille » ou la suppression des références à la famille dans la résolution. En réponse, la délégation du Saint-Siège s’est dite « profondément préoccupée par le fait que la famille est de plus en plus minimisée, voire dénigrée, dans les forums internationaux », dans une déclaration officielle. À l’issue de la réunion de la commission, un délégué du Saint-Siège a remercié la commission d’avoir dûment reconnu l’anniversaire dans la résolution et a appelé les pays à travailler ensemble pour promouvoir les politiques familiales dans les années à venir. 

    L’Année internationale de la famille, instituée en 1989 et célébrée pour la première fois en 1994, est l’une des nombreuses initiatives en faveur de la famille lancées par saint Jean-Paul II et le Synode du Vatican sur la famille de 1980. Les enseignements de Jean-Paul II ont incité toute une génération d’universitaires et d’hommes politiques catholiques à promouvoir des politiques favorables à la famille. L’intérêt particulier du Saint-Siège pour la politique familiale a été relayé par des délégations du monde entier, particulièrement en Afrique.

    Un délégué du Cameroun, s’exprimant au nom des 54 États membres du groupe africain, a déclaré : « Le point de vue du groupe africain est que le caractère central et indispensable de la famille en Afrique en tant qu’unité fondamentale de la société doit être renforcé et protégé afin qu’elle puisse jouer un rôle important. » 

    Les mêmes pays traditionnels qui ont salué la reconnaissance de l’Année internationale de la famille dans la résolution se sont plaints des tentatives visant à imposer la reconnaissance des questions liées à l’homosexualité et au transgenre au cours des négociations.  « Ma délégation reste préoccupée par la tentative de plusieurs délégations d’imposer un langage et des références qui ne correspondent à aucune réalité avec laquelle nous pourrions travailler au niveau national », a déclaré un délégué de l’Égypte. Il a ajouté qu’il était « vraiment regrettable » que les délégations occidentales se soient autant concentrées sur les « formes intersectionnelles de discrimination » (faisant par là référence aux questions relatives aux homosexuels et aux transsexuels) plutôt que sur des questions faisant l’objet d’un large consensus. Le délégué égyptien a mis en cause la délégation américaine. Le délégué américain s’est plaint que la résolution comprenait une mention sur le « droit au développement » et a déclaré que les résolutions de l’ONU n’étant pas contraignantes, elles ne modifiaient pas le droit international. « Je me demande pourquoi nous siégeons dans ce contexte pour négocier le langage que nous adopterons » a répondu le délégué égyptien.  Le Qatar, la Malaisie, la Libye, l’Iran, Djibouti, le Nigeria, le Mali et le Sénégal partagent les réticences de l’Égypte à l’égard des « formes intersectionnelles de discrimination ». 

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  • Avec un iman pakistanais psalmodiant le coran du haut de la tribune du Parlement bruxellois, une étape symbolique a été franchie

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    D'Alain Destexhe sur le site du Figaro via almendron.com :

    Comment la gauche belge s’est progressivement soumise à l’islamisme

    Même s'il n'en reprend pas les versets ouvertement antisémites, la sourate «Les coalisés» que récite l'imam n'est pas choisie au hasard. Elle raconte une guerre contre les «gens du livre» pour les tuer ou les faire prisonniers (verset 26). Le suivant annonce la couleur : Et Il vous a fait hériter leur terre, leurs demeures, leurs biens, et aussi une terre que vous n'aviez point foulée. Et Allah est Omnipotent. Le message subliminal semble clair. L'Europe est une terre de conquête et un jour vous en serez dépouillés et chassés. L'ambassadrice d'Israël à Bruxelles s'est dite «horrifiée», alors que les 18.000 juifs de Bruxelles connaissent déjà une montée de l'antisémitisme et de la peur. Cet imam rigoriste a reçu un prix de la secrétaire d'État belge Nawal Ben Hamou (PS) pour, cela ne s'invente pas, ses «succès académiques».

    Le député qui a couvert l'événement est le socialiste Hasan Koyuncu, d'origine turque. Il est le premier vice-président, non du Parlement bruxellois, mais du Parlement francophone bruxellois (bienvenue dans l'usine à gaz des institutions belges), et il sera tête de liste du PS à Schaerbeek, une des deux communes avec la plus forte communauté turque de Bruxelles, en octobre, pour les élections communales.

    73% des Turcs de Belgique, qui sont pour la plupart binationaux, ont voté pour Erdogan aux dernières élections présidentielles, bien davantage que les Turcs de Turquie (52%). Prompt à condamner Israël ou la Birmanie (pour les exactions contre les Rohyngas), le PS a toujours bloqué les tentatives de s'en prendre au régime turc qui détient des centaines de prisonniers politiques et muselle la presse.

    La conférence en question avait pour but de souligner les réussites et l'intégration économique et sociale (sic) de la nombreuse communauté pakistanaise de Bruxelles, mais la plupart des orateurs s'exprimaient en anglais ou en ourdou ! Moment cocasse : lorsque Nawal Ben Hamou, ministre d'une région francophone, monta à la tribune, elle demanda si elle pouvait parler en français !

    Si l'on ajoute le président du Parlement, ce sont trois élus socialistes qui sont concernés par cette dérive. Cet épisode ne constitue cependant qu'une étape de plus dans l'abandon de la laïcité par le PS. La liste des renoncements est longue : possibilité de porter le voile pour les employés de la STIB (l'équivalent de la RATP) et dans des administrations communales, enseignants confrontés aux atteintes à la neutralité livrés à eux-mêmes, signe de rabia, de ralliement aux Frères musulmans par un député de Molenbeek, acceptation de la non-mixité dans certaines piscines, cantines scolaires devenues de facto halal, poursuite de l'égorgement rituel à Bruxelles alors qu'il est interdit en Flandre et en Wallonie, et tolérance vis-à-vis de l'antisémitisme. Depuis le 7 octobre, le bourgmestre socialiste de Bruxelles, autorise des manifestations hebdomadaires où des slogans antisémites sont régulièrement scandés.

    En réalité, le PS est désormais soumis à l'islam. Une grande partie de ses élus au Parlement bruxellois, de véritables machines électorales, sont de religion ou de culture musulmane.

    Si, au PS, on s'accroche encore officiellement à une laïcité historiquement au cœur de l'identité du parti, du côté du parti Écolo, on affiche depuis longtemps un communautarisme sans complexe. Dans la commune du célèbre club de football d'Anderlecht, le parti a récemment fait voter une motion autorisant le port de signes convictionnels dans l'administration. La semaine dernière, Alain Maron, le chef de file des ministres écologistes à Bruxelles, a déclaré : «L'islam est pour l'égalité entre les hommes et les femmes et pour le droit à l'avortement». A-t-il déjà ouvert un coran ?

    Bruxelles, la capitale de l'Europe, est désormais une des villes les plus islamisées du continent. Selon Statbel, l'office de statistiques belge, 61% de la population bruxelloise n'est pas d'origine européenne et il n'y a plus que 23% de Belges d'origine belge, un cas unique pour une capitale européenne.

    Si la démographie c'est le destin, alors celui de Bruxelles n'est plus d'être une ville belge et européenne, mais un melting-pot sans culture commune. Avec la montée en puissance de l'islam, les Écolos et le PS, les deux premiers partis de la capitale, sont dans une surenchère permanente pour le prix de la soumission. D’où la nécessité de relire Houellebecq d’urgence.

    Alain Desthexe, médecin, sénateur honoraire belge, auteur de L'Occident commence en Terre sainte : de Jérusalem à Bruxelles, journal de bord (2013) et de Lettre aux progressistes qui flirtent avec l'islam reac (2008).

  • Demain : une Église à deux vitesses, post-synodale et décentralisée ?

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    D'Ed. Condon sur The Pillar :

    L'agenda de l'"Église à deux vitesses" pour le synode

    20 février 2024

    La deuxième session de la 16e Assemblée générale ordinaire du Synode des évêques se réunira le 2 octobre pour une nouvelle série de trois semaines de discussions et de débats. 

    Mais alors que cette deuxième session marathon à Rome est encore dans plusieurs mois, le processus synodal mondial continue de se dérouler en temps réel dans le monde entier. 

    La "synodalité" a ravivé de sérieuses questions sur l'émergence d'un programme synodal occidental visant à modifier l'enseignement et la discipline de l'Église, ce qui pourrait conduire à une confrontation ouverte lors de la prochaine assemblée et même menacer la communion mondiale de l'Église.

    -

    Lundi dernier, les évêques d'Allemagne se sont réunis en assemblée plénière à Augsbourg. A l'ordre du jour ne figurait pas le vote sur l'approbation des statuts d'un "comité synodal" controversé, organe destiné à ouvrir la voie à un "conseil synodal" permanent pour l'Eglise dans le pays.

    Le vote sur le comité synodal a été abandonné après une intervention du Saint-Siège le samedi, avertissant les Allemands qu'aller de l'avant avec le comité serait "contraire aux instructions du Saint-Siège" et risquerait d'avoir des "conséquences juridiques".

    Si les évêques allemands ont supprimé le vote de leur programme de lundi, ils ne se sont pas engagés à abandonner complètement le comité synodal. Au contraire, la question sera probablement réexaminée dans un avenir assez proche dans le cadre de la confrontation synodale entre l'Allemagne et Rome.

    Le cardinal Christoph Schönborn, archevêque de Vienne, a souligné les enjeux auxquels sont confrontés ses voisins lorsqu'il a averti lundi que les évêques allemands devraient se demander s'ils "veulent vraiment quitter la communion avec et sous le pape, ou plutôt l'accepter loyalement", et que le fait de ne pas s'aligner déclencherait un schisme.

    Mais l'impasse des évêques allemands avec Rome est un conflit curieux. 

    Dans le cadre de leur programme controversé de "voie synodale", les évêques et leur organisation partenaire, le Comité central des catholiques allemands (ZdK), ont demandé à plusieurs reprises la fin du célibat des clercs, l'ordination des femmes, la révision de l'enseignement de l'Église sur la moralité et la sexualité humaine, ainsi que la décentralisation de l'autorité de l'enseignement doctrinal par rapport au Saint-Siège. 

    Mais alors que les évêques allemands ont insisté à plusieurs reprises pour provoquer le Vatican avec une série de mesures procédurales et structurelles, comme la création du comité synodal et la poursuite des projets de conseil synodal, les évêques voisins ont appelé à leurs propres révisions radicales de l'enseignement et de la pratique de l'Église, sans pour autant contrarier le Saint-Siège.

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