De Denis Crouan sur Pro Liturgia (7 octobre) :
Que voit et expérimente aujourd’hui un catholique européen ?
Réponse : un exode massif hors des églises ; un esprit du temps anti-chrétien, « anti-divin »... Autant de bourrasques qui soufflent dans l’Église et balaient des feuilles fanées. En même temps, on observe le développement de ce qu’on pourrait appeler un « christianisme crypto-apostat ». Une réalité qui aurait été impensable... même sous les pires dictatures du 20e siècle.
Chose nouvelle : désormais, ce ne sont plus seulement les chrétiens tièdes et peu intéressés à la foi de leur baptême qui quittent l’Église ; ce sont aussi ceux qui souhaitent protester contre des structures ecclésiales qui n’ont jamais produit quoi que ce soit et qui sont aujourd’hui en ruine, sans aucun avenir. Ces structures tournent à vide sans inviter ceux qui en font partie à se soucier de ce que devrait être l’Église de Jésus-Christ.
Un bon nombre de fidèles sont actuellement déçus, perdus, ne reconnaissant plus l’Église qui leur était familière. Certains cherchent alors un havre spirituel dans les communautés davantage liées aux valeurs stables et sûres de la Tradition chrétienne ; pour autant, ils ne sont pas « traditionalistes » au sens où on l’entend actuellement.
Cette apostasie de masse et cette perte de la foi n’ont-elles pas été évoquées par Jésus lui-même lorsqu’il parlait de signes annonçant son retour imminent ? Il est évident que les germes du modernisme anti-chrétien et fondamentalement matérialiste sont à nouveau à l’œuvre. Au XXe siècle, les deux guerres mondiales et la résistance aux idéologies de l’époque n’avaient fait que ralentir les avancées de ce modernisme. Mais le voici de retour. Dans l’Église, il s’est manifesté en 1968, lors de la publication de l’encyclique « Humanae vitae » de Paul VI. Un grand nombre de théologiens alors bien en vue refusèrent immédiatement ce document qui abordait les questions fondamentale de l’amour humain. À y regarder de plus près, les prises de positions de ces théologiens correspondaient à l’incompréhension croissante du célibat sacerdotal : au nom de l’amour humain et de l’hédonisme, il n’était pas rare, à cette époque, de voir des assemblées paroissiales applaudir lorsqu’à la fin d’une messe le célébrant annonçait qu’il allait se marier ou « vivre en couple » avec son « petit ami ». Les Pays-Bas furent à la pointe de ces manifestations ; la Belgique et la France rejoignirent rapidement le mouvement alors qualifié de « printemps de l’Église ».
En même temps se produisit ce qui allait aboutir au chaos liturgique dénoncé par Jean-Paul II et par Benoît XVI et qui se manifestait à travers des célébrations où l’assemblée locale prenait la place de Dieu : dans un grand nombre d’église paroissiales et de séminaires diocésains, les livres liturgiques officiels devaient obligatoirement être remplacés par des publications douteuses, certains prêtres allant même jusqu’à imposer des célébrations eucharistiques dont les rites et les prières sortaient de leur propre imagination.
Revenaient alors à l’esprit des fidèles les plus avisés les paroles de Jésus à propos de « l’abomination de la désolation installée dans le lieu saint » (Mt 24, 15).
Aujourd’hui, les résultats de ces errances et les signes de la désolation se multiplient : certains pasteurs les découvrent à l’occasion du problème des prêtres pédophiles mis au devant de la scène. Au pire, ils se taisent ; au mieux ils se disent profondément choqués sans pour autant oser regarder du côté des origines de la crise actuelle.
Celle-ci, déjà en germe au XIXe siècle, a profité de Vatican II pour se déchainer : sécularisation des structures ecclésiastiques, abandon des sacrement, départ de nombreux prêtres, séminaires où l’on s’attachait à former des prêtres capables de contester tout ce que l’Église entendait enseigner aux fidèles... En parallèle, des prêtres demeurés en place et qui, gagnés par l’esprit des Lumières anti-chrétien, s’affirmaient éducateurs, responsables de paroisses, travailleurs sociaux, animateurs de « messes karaoké »... Reprenons les thèmes des homélies et des chants introduits dans la liturgie au cours des années post-conciliaires. Sous un mince glaçage de bons sentiments chrétiens, il n’y est bien souvent question que d’environnement, de migration, de sauvegarde de la forêt tropicale, du changement climatiques, des conflits sociaux... Mais que viennent faire ces sujets au cours d’une messe ? Est-il nécessaire d’aller à l’église pour entendre une énième fois les sanglots de la bien-pensance médiatique ?
Voilà pour l’actualité récente.


Les faits dénoncés sont déjà connus du public depuis plusieurs années. La nouveauté, c’est le diagnostic de leur ampleur, en France, et la publication de nombreux témoignages saisissants. Nouvelle, aussi, est la révélation de l’action prédatrice de nombreux laïques, comme aussi la mise en perspective des crimes de cette nature commis dans l’Église et dans le cadre d’autres institutions

