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Santé - Page 5

  • Pourquoi la vie d'Indi Gregory vaut la peine d'être défendue

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    De Riccardo Cascioli sur la Nuova Bussola Quotidiana :

    Oui, la vie d'Indi Gregory vaut la peine d'être défendue

    Malgré l'espoir suscité par l'octroi de la nationalité italienne, le chemin reste ardu pour sauver la petite Anglaise de 8 mois que les médecins et les juges veulent laisser mourir. Mais la dignité de la personne exige que le combat pour la vie soit mené jusqu'au bout.

    7 novembre 2023

    Le 24 avril 2018, le Conseil des ministres, dirigé par le président Paolo Gentiloni, a accordé la nationalité italienne à Alfie Evans, dans une ultime tentative de sauver la vie de l'enfant gravement malade à qui les médecins et les juges anglais avaient décidé de retirer son respirateur artificiel. La semaine précédente, le 18 avril, le père d'Alfie, Thomas, avait été reçu en audience privée par le pape François, qui avait alors lancé un appel en faveur du petit garçon, à la suite duquel l'hôpital pour enfants Bambin Gesù du Vatican avait proposé d'accueillir Alfie. Cependant, les autorités britanniques n'ont pas tenu compte de la volonté de l'hôpital et de l'initiative du gouvernement italien, et Alfie est mort sans même avoir été autorisé à quitter l'hôpital le 28 avril suivant.

    Ces jours-ci - et après d'autres cas britanniques sensationnels de vies interrompues parce qu'elles étaient jugées indignes - quelque chose de similaire se produit à nouveau. Pas de visite du pape cette fois-ci, mais le gouvernement italien - désormais dirigé par Giorgia Meloni - a accordé hier, 6 novembre, la nationalité italienne à Indi Gregory, une petite fille de huit mois atteinte d'une maladie génétique rare et qui a besoin d'une assistance respiratoire pour vivre. La décision a été prise après que l'hôpital du Bambino Gesù a de nouveau accepté d'admettre la petite patiente.

    Son père, Dean, a raconté hier en exclusivité à la Bussola le calvaire d'Indi et de ses parents à l'hôpital et au tribunal pour défendre le droit de la petite fille à vivre jusqu'à sa mort naturelle.

    Tout en espérant et en luttant jusqu'au bout pour une issue différente, il y a vraiment peu de chances que l'histoire d'Indi ne se termine pas comme celle d'Alfie. La mise à disposition du Bambino Gesù et la citoyenneté italienne - obtenue grâce à la médiation de l'avocat et ancien sénateur Simone Pillon, à qui les avocats britanniques d'Indi avaient demandé de s'occuper de ses intérêts en Italie - ne sont que la première étape d'un processus difficile et semé d'embûches. Et si cette générosité italienne a redonné courage et force au père d'Indi - comme il l'a lui-même témoigné dans un message transmis à la Bussola - il se rend compte que la course contre la montre en cours fait le jeu des médecins de l'hôpital de Nottingham, qui étaient déjà prêts hier à débrancher le respirateur artificiel d'Indi.

    Alors qu'en Italie, la prochaine étape consistera pour un juge à décider qu'il est dans "l'intérêt supérieur" d'Indi d'être admis au Bambino Gesù, en Angleterre, une bataille judiciaire oppose les parents et les médecins pour savoir où Indi doit mourir. Les parents Dean et Claire souhaiteraient ramener Indi à la maison, sur la base d'une décision antérieure du juge qui laissait ouverte la possibilité de l'emmener mourir chez elle ou dans un hospice. Cependant, la solution du domicile est fortement contestée par les médecins, qui la jugent inappropriée et souhaitent qu'Indi quitte l'hôpital seule dans un cercueil. Hier après-midi, les deux parties se sont à nouveau affrontées devant le juge et le verdict est attendu ce matin, 7 novembre.

    Si elle est favorable aux médecins, il sera encore plus compliqué pour l'Italie d'arriver à temps pour convaincre les autorités sanitaires et politiques britanniques de laisser Indi partir pour Rome. À cet égard, il convient de rappeler que le Royaume-Uni ne s'est pas seulement opposé au transfert d'Alfie, mais que dans le cas de RS, un citoyen polonais également retenu en otage dans un hôpital britannique, c'est le gouvernement de Londres qui a dit non à celui de Varsovie. Une question de souveraineté et de fierté nationale.

    Compte tenu des précédents et du peu de temps disponible, on peut donc se demander s'il vaut la peine de s'engager dans cette succession d'appels et de recours pour arracher quelques jours à cette machine infernale qui finit de toute façon par atteindre son but : la mort.

    La réponse est certainement oui, et ce pour plusieurs raisons. La première, fondamentale, est que le combat pour la vérité, et donc pour la vie, doit toujours être mené quelle qu'en soit l'issue. La vraie victoire est l'affirmation de la dignité de l'homme, qui a une valeur sacrée, irréductible, qui ne dépend que de Dieu, et dont la vie et la mort ne peuvent donc pas être déléguées à l'État. Et il est frappant de constater que la plupart de ceux qui s'engagent dans ce corps à corps contre le Système sont des gens simples, souvent éloignés de la religion, mais capables de reconnaître et de vivre la loi naturelle, courageux dans le combat pour la justice. Alors que même de nombreux catholiques "éduqués" se cachent derrière des sophismes et des distinctions pour se plier au pouvoir.

    La deuxième raison est que, grâce à ces batailles, de plus en plus de gens prennent conscience de ce qui se passe et de la manière dont l'État tend à prendre le contrôle de la vie de tous les citoyens. Il ne s'agit pas seulement d'un problème britannique, mais d'une tendance totalitaire qui touche l'ensemble de l'Occident. Et sur le front de la fin de vie, on peut presque se réjouir qu'au Royaume-Uni il y ait au moins la possibilité d'une confrontation publique avec les autorités sanitaires : on peut se demander si en Italie, par exemple, elles ne procèdent pas "ex officio", discrètement, ou par une utilisation nonchalante des soins palliatifs.

    Troisième raison : nous avons vu comment des batailles de ce genre obligent de nombreuses personnes à se poser des questions sur le sens de la vie et à découvrir, également à travers le témoignage d'avocats dont le travail est consacré à ces cas, la foi chrétienne. Les propos du doyen Gregory à la Bussola sont à cet égard exemplaires : Indi a été baptisée parce que son père, au tribunal, avait la perception de l'existence de l'enfer et voulait donc garantir le paradis à sa fille. C'est ce qu'il veut maintenant faire avec son autre fille. Le corps d'Indi n'est peut-être pas sauvé, mais le salut de son âme est un objectif encore plus important.

  • En souvenir de Wanda Półtawska, un modèle de génie féminin dans le monde postmoderne

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    De Solène Tadié sur le National Catholic Register :

    En souvenir de Wanda Półtawska, un modèle de génie féminin dans le monde postmoderne

    La vie de l'amie proche de Jean-Paul II, qui a influencé nombre de ses écrits et qui est décédée ce mois-ci à près de 102 ans, s'inscrit dans la longue tradition de l'héroïsme féminin dans l'Église.

    Wanda Półtawska.Wanda Półtawska. (photo : photographe Eustachy Kossakowski ; numérisé à partir de Poland monthly, juin 1963, Interpress Publishers, Varsovie, Pologne / Domaine public)

    31 octobre 2023

    Résumer la vie et l'œuvre d'une figure telle que Wanda Półtawska n'est pas chose aisée. Une chose est sûre : La dernière survivante des "cobayes" du camp de concentration de Ravensbrück restera l'un des principaux visages de la résistance à la déshumanisation du monde occidental, défiguré par les totalitarismes du XXe siècle.

    Née Wanda Wiktoria Wojtasik le 2 novembre 1921 à Lublin, en Pologne, elle était l'épouse du philosophe Andrzej Półtawski et la mère de quatre enfants. Elle est décédée dans la soirée du 24 octobre 2023, peu avant son 102e anniversaire. "Pour beaucoup de gens, je suis un peu une pièce de musée !", avait-elle plaisanté en accueillant le Register dans son appartement de la célèbre place du marché de Cracovie à l'occasion de son 100e anniversaire en 2021.

    Connue pour son franc-parler, son tempérament vif et son caractère intransigeant - il n'en fallait pas moins pour survivre aux atrocités indicibles qu'elle a subies à l'âge de 20 ans seulement pour ses activités de résistance contre l'occupant nazi en Pologne - elle a eu un impact considérable sur la vie intellectuelle de l'Église au tournant du nouveau millénaire, notamment sur les écrits de saint Jean-Paul II, dont elle était l'une des amies les plus proches et qu'il appelait sa sœur.

    Dans le monde intellectuel progressiste, généralement enclin à célébrer les survivants de la fureur génocidaire de l'Allemagne nazie, elle est toujours apparue comme une figure quelque peu gênante, car elle allait à l'encontre de tous les courants de pensée relativistes qui prévalaient dans la seconde moitié du 20e siècle.

    Défendre la vie contre la "civilisation de la mort

    L'épreuve de sa jeunesse, qu'elle a racontée dans son mémorable ouvrage And I'm Afraid of My Dreams, a en effet fait d'elle une ardente défenseuse de la vie, de sa conception à sa fin naturelle. Il s'agissait d'une position difficile à adopter en matière de libération sexuelle en Occident, qui avait fait de l'avortement et des contraceptifs les outils de l'émancipation individuelle.

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  • Euthanasie : comment le "modèle belge" est devenu en vingt ans un système de mort programmée

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    De Pierre Jova  sur Aleteia.org :

    Euthanasie : la loi belge ignore que l’homme est « un tissu de relations »

     

    28/10/23

    Dans "Peut-on programmer la mort ?" (Seuil), le journaliste Pierre Jova publie les résultats de son enquête sur la pratique de l'euthanasie en Belgique. Alors qu'un projet de loi sera présenté en décembre 2023 en France, l'auteur révèle l’envers du "modèle belge", devenu en vingt ans un système de mort programmée.

    « La mort n’est pas qu’une affaire individuelle, mais bien collective », telle est bien la conviction de Pierre Jova qui a vérifié combien le recours à l’euthanasie laisse des traces indélébiles dans les familles. Il montre aussi que l’expérience de la légalisation est une course sans fin : après les malades incurables, les mineurs, les déments, les cas sociaux… « Une société a besoin de multiplier et étendre l’euthanasie pour se persuader qu’elle est normale » observe-t-il, comme dans d’autres pays comme la Suisse ou le Canada. Au nom d’une liberté absolue et de la toute puissance de la technique, mais aussi de la logique marchande, c’est un monde insatiable et sans limite qui se prépare. Et pourtant, soutient Pierre Jova, on ne peut « étouffer éternellement la casse humaine créée par l’euthanasie ».

    Lire l'interview sur Aleteia.org

  • Expériences de mort imminente (EMI) : quand la mort transforme la vie (Patrick Theillier)

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    D'Ecologie Humaine sur youtube :

  • Le médecin qui a euthanasié Tine Nys ne devra payer aucun dommage ni intérêt

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    Une synthèse de presse de gènéthique.org :

    Belgique : aucun dommage et intérêt contre le médecin qui a euthanasié Tine Nys

    24 octobre 2023

    Le 24 octobre, le tribunal correctionnel de Termonde a décidé que Joris Van Hove, le médecin qui a euthanasié Tine Nys, une femme belge de 38 ans, ne devra payer aucun dommage et intérêt (cf. Belgique : Tine Nys, l’euthanasie pour souffrance psychique en procès). Il n’a « pas commis d’erreur » violant la loi sur l’euthanasie, estime-t-il.

    Tine Nys a été euthanasiée le 27 avril 2010 pour souffrances psychiques. L’année suivante, une des sœurs de la défunte a porté plainte avec constitution de partie civile contre le Dr Van Hove qui a administré l’injection létale à Tine Nys et deux autres médecins. Elle affirme qu’ils n’ont pas respecté les termes de la loi sur l’euthanasie.

    L’enquête ouverte a été classée sans suite sur requête du procureur du roi. Et, en 2016, la chambre du conseil de Termonde a prononcé un non-lieu. Mais la partie civile a fait appel. En 2018, la chambre des mises en accusation de Gand a renvoyé les trois médecins devant la Cour d’assises pour empoisonnement (cf. En Belgique, trois médecins poursuivis pour empoisonnement après l’euthanasie d’une jeune femme pour souffrances psychiques). Ils ont été acquittés dans la nuit du 30 au 31 janvier 2020 (cf. Euthanasie de Tine Nys : le médecin exécuteur auditionné). La famille de Tine Nys s’est alors pourvue en cassation et en septembre 2020, la plus haute juridiction du pays a ordonné un nouveau procès contre le Dr Van Hove car l’arrêt d’acquittement n’était pas suffisamment motivé (cf. Tine Nys : la loi euthanasie devant la Cour constitutionnelle).

    Source : 7 sur 7

  • "Deuil caché" : réhabiliter la souffrance des femmes qui ont avorté

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    De gènéthique magazine :

    « Deuil caché » : « une réhabilitation de la souffrance » des femmes qui ont avorté

    23 octobre 2023
     

    La journaliste Cecylia Rançon a réalisé le documentaire « Le deuil caché » (cf. « Le deuil caché » : un documentaire pour libérer la parole des femmes ayant vécu une IVG), récemment diffusé par la chaine KTO qui l’a également coproduit avec Maryel Devera de la société 11Screen. Il est désormais disponible sur YouTube. Un film dans lequel elle part à la rencontre de femmes qui ont avorté pour écouter leurs souffrances. En leur donnant librement la parole, elle permet que la question du « deuil caché » puisse être abordée. Cecylia Rançon a accepté de répondre aux questions de Gènéthique.

    Gènéthique : Pouvez-vous nous parler de votre parcours ? Pourquoi avoir voulu réaliser un film sur les conséquences liées à l’avortement ? Quel message aimeriez-vous faire passer à travers votre documentaire ?

    Cecylia Rançon : J’ai débuté ma carrière de journaliste en radio avant de me tourner vers la télévision. J’ai réalisé un premier documentaire sur « les nouveaux convertis ». Cette expérience m’a donné envie de poursuivre la réalisation de documentaires. Je souhaite provoquer la réflexion par le biais de l’image et la force du témoignage.

    Les hasards de la vie m’ont fait rencontrer une femme qui avait avorté et avait relaté son parcours dans un livre. J’ai été touchée par sa souffrance. Par la suite, j’ai voulu lire ce qui avait été écrit sur le sujet. J’ai constaté que peu de gens en parlaient, alors que pourtant le mal-être des femmes ayant avorté n’est pas rare. J’ai compris en les écoutant que leur parole est presque taboue, et qu’elles s’autocensurent.

    Mon métier n’est pas de faire les lois, ni de mettre en avant mes opinions personnelles. Avec ce nouveau documentaire, j’ai voulu proposer un recueil de témoignages pour que la question du « deuil caché » de ces femmes puisse être abordée, et qu’elles puissent être aidées. Il y a une dimension spirituelle dans mon film, mais ce n’est qu’une des portes d’entrée au cœur de cette problématique.

    G : Qu’avez-vous appris au contact des différentes personnes que vous avez rencontrées ? A-t-il été facile de recueillir leurs voix ? Qu’en retenez-vous ?

    CR : J’ai fait en sorte que la parole des femmes interrogées ne soit pas un discours militant, mais des propos libres de femmes aux opinions très diverses. Il était important pour moi d’interroger des femmes de divers milieux, croyantes ou non, jeunes ou moins jeunes, et ayant des opinions différentes. L’avortement peut concerner toutes sortes de femmes.

    Je me suis rapprochée d’Agapa, une association qui les écoute et les accompagne après un deuil périnatal ou une interruption de grossesse, qu’elle soit accidentelle ou volontaire. Parmi la quinzaine de femmes qui ont souhaité témoigner, j’ai choisi Marion, qui a avorté deux fois, et Charlène qui parle de son expérience avec le planning familial. J’ai aussi donné la parole à Sylvie et Alexandra, croisées par hasard. Une seconde Alexandra, qui a rejoint « Mères de miséricorde », une association catholique qui accompagne les souffrances liée à l’accueil de la vie, a également été interviewée.

    J’ai par ailleurs sollicité le planning familial, plusieurs associations féministes pro-avortement, ainsi qu’un gynécologue obstétricien favorable au prolongement du délai légal de l’IVG. Je voulais entendre leurs voix, mais aucun ne m’a répondu. Dans mon enquête, je n’ai pas non plus réussi à avoir de chiffres.

    Je retiens des témoignages recueillis qu’il est possible de surmonter sa douleur et ses traumatismes, mais qu’il est important que la parole soit libérée. Il est possible de se reconstruire en étant écoutée et accompagnée, en reconnaissant que l’avortement n’est pas anodin. Toutes disent qu’elles guérissent de la blessure de l’avortement, mais qu’elles ne l’oublient pas.

    Certaines femmes posent une plaque en souvenir de l’enfant qu’elles ont avorté. Cela leur permet de commencer leur deuil. Cette pratique existe au Japon où il y a des mémoriaux pour enfants non nés, et notamment avortés.

    G : De quelles séquelles les femmes que vous avez rencontrées souffrent-elles ?

    CR : Les femmes que j’ai écoutées disent pleurer, avoir des idées noires, une tristesse latente, une souffrance insupportable lorsqu’elles voient d’autres bébés. Elles ont également témoigné de la culpabilité qui existe en elles, de la déprime qui se tisse au fil des années. Le chamboulement intime est autant psychologique que physiologique.

    On retrouve chez ces femmes les symptômes du deuil, mais un deuil qu’elles n’arrivent pas à exprimer car la société leur dit que « ce n’est rien ». Comment faire le deuil de quelque chose qui n’existe pas aux yeux de la collectivité ? Elles somatisent, elles gardent tout en elles. En outre, dans IVG le « V » signifie « volontaire », elles ne comprennent pas pourquoi elles souffrent de quelque chose qu’elles ont « voulu ». Enfin, il y a aussi cette idée qu’on ne se plaint pas d’un droit difficilement obtenu.

    Ne pas formuler une souffrance peut se répercuter des années après. C’est par exemple le cas de Sylvie qui a eu trois enfants après son avortement. On pourrait se dire elle est heureuse avec son mari et ses enfants, mais pourtant 40 ans après elle n’a pas oublié et y repense.

    Pour autant, comme le dit une psychologue qui intervient dans le documentaire, toutes les femmes qui ont avorté ne parlent pas de séquelles post-avortement.

    G : Accepte-t-on de reconnaitre les conséquences liées à l’avortement et d’en parler ? Laisse-t-on encore aux femmes la possibilité de dire ce qu’elles ont vécu ? Ou ce sujet est-il « tabou » ?

    CR : Oui, je pense que le sujet est « tabou », mais je refuse d’en faire un « tabou ». Le refus de parler de ce sujet justifie le film que j’ai réalisé. Les femmes parlent d’une souffrance, on ne peut pas remettre en cause leur mal-être sous prétexte que ça dérange, et que cela pourrait remettre en cause l’avortement.

    Il y a des faits, une souffrance, mais on l’entend peu dans les médias. Refuser de parler des choses par peur de la récupération n’est pas acceptable. Ne pas en parler, c’est tomber dans un piège pour l’avenir, car les faits cachés ressurgissent, et d’une manière plus violente, non maitrisée.

    Mon but a donc été de donner librement la parole à des femmes qui ne sont pas écoutées. C’est une « réhabilitation » de la souffrance qui vient répondre à un déni de traumatisme. Je trouve dommage de s’interdire d’aborder un sujet sous prétexte qu’il peut être récupéré. On parle beaucoup de « libération de la parole », cela doit s’appliquer à tout le monde.

  • « Le deuil caché » : un documentaire libére la parole des femmes ayant vécu une IVG

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    De gènéthique.org :

    « Le deuil caché » : un documentaire pour libérer la parole des femmes ayant vécu une IVG

    10 octobre 2023
     

    « Comment je pouvais être en deuil d’un enfant que je n’avais pas voulu ? » Marion a avorté à deux reprises. Alors que sa petite fille a quatre mois, elle découvre qu’elle est enceinte. Elle choisit d’avorter. Quelques mois plus tard, elle découvre une nouvelle grossesse. Et avorte encore. Maintenant elle attend son « bébé arc-en-ciel ». « Après la pluie vient le beau temps. »

    Avec beaucoup de délicatesse, « le deuil caché », documentaire de Cécylia Rançon raconte la culpabilité, la souffrance qu’on ne peut pas dire.

    Une volonté de « clore le débat »

    Charlène a aussi avorté deux fois : à 16 et 26 ans. « J’ai l’impression que mon consentement a été extorqué », témoigne-t-elle. Face au Planning familial qui ne veut pas entendre le refus d’avorter d’un « tas de cellules » et qui a pris le parti de son compagnon, elle n’est pas parvenue à se faire entendre.

    « Dans le souci de clore le débat », « on ne s’autorise pas à admettre que l’avortement laisse une trace », regrette Alexandra qui a avorté après une agression sexuelle. Ayant avorté à 17 ans, Sylvie évoque « tout un ébranlement intime ». Elle croyait que l’avortement « règlerait ce problème ». « Sauf que je ne suis jamais redevenue comme avant », explique-t-elle.

    Avorter, « ça fait mal »

    « Attention, aujourd’hui l’avortement est banalisé. Or, avorter, même si c’est pour les meilleures raisons du monde, même si on a toutes les raisons de le faire -et moi apparemment à 17 ans, j’avais toutes les raisons de le faire – et bien n’empêche que ça fait mal », prévient Sylvie. « Ca blesse, ça blesse le corps, ça blesse le psychisme et ça blesse l’âme ». Et « cette blessure elle va rester. »

    Des histoires différentes, touchantes, de femmes qui, même si certaines défendent la loi Veil, témoignent de leur blessure, profonde, intime, dont personne ne leur avait parlé. Des femmes en quête d’une guérison psychologique, parfois spirituelle. Mais à l’heure où l’on proclame un « droit » à l’avortement destiné à devenir constitutionnel, voudra-t-on les entendre ? Diffusé sur KTO TV hier, le documentaire est désormais disponible sur YouTube.

  • Quand un évêque belge considère que "l'euthanasie n'est pas nécessairement un mal en soi"

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    De Jonah McKeown sur le National Catholic Register :

    L'évêque belge : L'euthanasie n'est pas nécessairement un mal en soi

    Le prélat belge a déjà suscité la controverse en prenant des mesures et en exprimant des points de vue qui semblent en contradiction avec l'enseignement de l'Église.

    9 octobre 2023

    L'évêque Johan Bonny d'Anvers, en Belgique, a semblé rejeter l'enseignement de l'Église catholique sur l'euthanasie dans une récente interview, déclarant qu'il ne croit pas que la pratique, contrairement à l'enseignement de l'Église, soit "mauvaise en tant que telle".

    Dans une interview accordée le 28 septembre au journal belge La Libre, Mgr Bonny a déclaré que l'enseignement de l'Église selon lequel l'euthanasie est un mal intrinsèque est "une réponse trop simple qui ne laisse pas de place au discernement".

    "La philosophie m'a appris à ne jamais me contenter de réponses génériques en noir et blanc. Toutes les questions méritent des réponses adaptées à une situation : un jugement moral doit toujours être prononcé en fonction de la situation concrète, de la culture, des circonstances, du contexte", aurait déclaré Mgr Bonny. 

    Mgr Bonny a poursuivi en déclarant : "Nous devons apprendre à mieux définir les concepts : "Nous devons apprendre à mieux définir les concepts et à mieux distinguer les situations.

    "Nous nous opposerons toujours au souhait de certains de mettre fin à une vie trop prématurément, mais nous devons reconnaître que la demande d'euthanasie d'un jeune homme de 40 ans n'est pas équivalente à celle d'une personne de 90 ans confrontée à une maladie incurable", a-t-il déclaré. 

    Selon le Catéchisme de l'Église catholique, "l'euthanasie intentionnelle, quels qu'en soient les formes et les motifs, est un meurtre" et "gravement contraire à la dignité de la personne humaine et au respect dû au Dieu vivant, son Créateur" (n° 2324). Cet enseignement a été réaffirmé en 2020 dans le document du Vatican Samaritanus Bonus, qui dénonce fermement l'euthanasie comme un "acte intrinsèquement mauvais, dans toutes les situations ou circonstances [...] un grave péché contre la vie humaine". 

    Le bureau de l'évêque Bonny n'a pas répondu à une demande de CNA vendredi pour plus d'informations sur les opinions de l'évêque. 

    Le prélat belge a déjà suscité la controverse en prenant des mesures et en exprimant des points de vue qui semblent en désaccord avec l'enseignement de l'Église, en particulier en ce qui concerne ses nombreux appels à une plus grande acceptation des relations homosexuelles au sein de l'Église. 

    Mgr Bonny et les autres évêques flamands de Belgique ont introduit une bénédiction des couples de même sexe en septembre 2022, bien que le bureau de doctrine du Vatican, avec l'approbation du pape François, ait confirmé que l'Église n'a pas le pouvoir de donner des bénédictions aux unions de personnes du même sexe. L'évêque Bonny s'est ensuite adressé en mars, en tant qu'invité de marque, à la très controversée assemblée allemande de la Voie synodale, qui s'est ouvertement opposée à plusieurs points de l'enseignement de l'Église.

    Le suicide assisté n'est pas la même chose que l'euthanasie, bien que les deux expressions soient souvent utilisées de manière interchangeable. Selon le code d'éthique de l'American Medical Association, l'euthanasie implique nécessairement "l'administration d'un agent létal par une autre personne à un patient", ce qui signifie que la personne qui pratique l'euthanasie (par exemple, un médecin) est directement responsable de mettre fin à la vie du patient. 

    Le suicide assisté, quant à lui, tel que défini par le bioéthicien catholique William May, consiste à mettre les moyens de se suicider à la disposition du patient, qui passe ensuite à l'acte de son propre chef. Dans de nombreux cas, un médecin ou un autre professionnel de la santé habilité sera autorisé à prescrire au patient une dose létale de médicament, que le patient s'administrera lui-même. 

    La Belgique et ses voisins néerlandais ont été les premiers à proposer et à développer l'euthanasie et le suicide assisté, et les médecins qui s'opposent personnellement à cette pratique doivent toujours y envoyer des patients. Selon la loi belge, l'euthanasie est autorisée lorsqu'un "état médicalement futile de souffrance physique ou mentale constante et insupportable" résultant d'une affection grave et incurable causée par une maladie ou un accident ne peut être soulagé.

    L'euthanasie des enfants a été légalisée en Belgique en 2014, après l'avoir été pour les adultes en 2002. La loi belge permet aux mineurs de tout âge en phase terminale de demander l'euthanasie, bien que le consentement des parents, ainsi que l'accord des médecins et des psychiatres, soient requis. En 2016 et 2017, trois mineurs ont eu recours à la procédure et ont été euthanasiés, selon un rapport du gouvernement, bien qu'un rapport ultérieur affirme qu'aucun mineur n'a eu recours à la loi sur l'euthanasie du pays en 2020 ou 2021.  

    Le nombre de décès déclarés pour cause d'euthanasie en 2022 s'élevait à près de 3 000, soit 2,5 % de l'ensemble des décès en Belgique, selon le même rapport. 

    Au lieu du suicide assisté ou de l'euthanasie, l'Église catholique soutient les soins palliatifs, c'est-à-dire l'accompagnement des patients vers la fin de leur vie par des méthodes telles que la gestion de la douleur, sans rien faire pour accélérer le processus de la mort. 

    L'enseignement catholique stipule que les patients et les médecins ne sont pas tenus de faire tout ce qui est possible pour éviter la mort, mais si une vie a atteint son terme naturel et qu'une intervention médicale ne serait pas bénéfique, la décision de "renoncer à des moyens extraordinaires ou disproportionnés" pour maintenir un mourant en vie n'est pas de l'euthanasie, comme l'a noté saint Jean-Paul II dans Evangelium Vitae.

    Le pape François a condamné l'euthanasie tout au long de son pontificat, et plus récemment en septembre de cette année, en la qualifiant notamment de "péché contre Dieu". Il s'est également montré ferme sur la nécessité de fournir des soins palliatifs aux personnes très malades et mourantes.

    Aux États-Unis, sept États et le district de Columbia autorisent le suicide assisté, c'est-à-dire que le médecin fournit au patient un moyen de se suicider. L'euthanasie, en revanche, reste interdite sur l'ensemble du territoire américain (à l'inverse, le Canada a légalisé l'euthanasie en 2016).

  • Fin de vie : que dit l'Eglise ?

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    De Pierre-Olivier Arduin sur le site de La Nef :

    Que dit l’Église sur la fin de vie ?

    L’Église catholique est bien seule, en nos temps de postmodernité, à maintenir une vision anthropologique stable et cohérente et, ainsi, à éclairer les âmes de bonne volonté, notamment par son enseignement sur la fin de vie. Que dit donc l’Église sur la fin de vie ?

    Les tentatives d’adoption de lois légitimant des formes de suicide assisté et d’euthanasie des malades les plus vulnérables se multiplient, n’épargnant aucun pays, y compris la France où leurs promoteurs demeurent actifs et comptent bien parvenir à leurs fins lors du prochain quinquennat. Le président Macron ne s’en cache pas ; après le saccage des lois de bioéthique, l’allongement du délai de l’IVG et la volonté d’inscrire le droit à l’avortement dans la Charte européenne des droits fondamentaux, ce sera le dernier chantier « sociétal » de l’actuelle majorité.

    Face à de telles dérives qui ébranleraient tous les fondements de la médecine hippocratique occidentale, l’enseignement de l’Église constitue non seulement une boussole fiable, rappelant sans ambiguïté le devoir de protéger la vie des patients jusque dans les phases les plus critiques de la maladie, mais également un GPS particulièrement élaboré pour éviter les chemins de traverse qui fragilisent l’interdit de tuer. La promulgation le 14 juillet 2020 par la Congrégation pour la Doctrine de la foi (CDF) de la Lettre Samaritanus bonus « sur le soin des personnes en phase terminale de la vie » représente à ce titre un aboutissement du Magistère sur ce thème (1). Le pape François qui a suivi de près les travaux préparatoires a ordonné la publication d’un texte qui développe et éclaire une réflexion de l’Église courant sur soixante-cinq années, depuis l’allocution fondatrice du pape Pie XII en février 1957 à des médecins sur les bonnes pratiques analgésiques en fin de vie.

    Il est toutefois étonnant de constater que Samaritanus bonus (SB) qui constitue un véritable vade-mecum n’a toujours pas reçu l’accueil qu’il mériterait en France, tant ce document d’une richesse exceptionnelle peut éclairer tous ceux qui ont à cœur le respect de la vie des malades. Aussi voudrions-nous ici en présenter les lignes de force pour donner le goût de l’étudier, de le mettre en pratique et de le faire connaître, y compris au sein de cercles non ecclésiaux.

    Un jugement sévère sur l’euthanasie

    Premier fait d’importance à rappeler, qui peut sembler couler de source, la sévérité du jugement de l’Église sur l’euthanasie, SB affirmant sans la moindre équivoque qu’elle est « un crime contre la vie humaine », un « acte meurtrier intrinsèquement mauvais, quelles que soient les circonstances », qu’« aucune fin ne peut légitimer et qui ne tolère aucune forme de complicité ou de collaboration, active ou passive » (V, 1). Il ne s’agit pas que de mots. Cette fermeté a trouvé une traduction concrète dans une affaire peu connue qu’a eue à trancher la Congrégation pour la Doctrine de la foi il y a quelques mois, alors même qu’elle avait pratiquement achevé la rédaction de la Lettre.

    En mars 2017, sur le site de la branche belge de la Congrégation des Frères de la Charité, un document était publié admettant à certaines conditions la pratique de l’euthanasie des malades accueillis dans leurs structures hospitalières psychiatriques. On le sait, la Belgique est l’un des premiers États au monde à avoir légalisé le suicide assisté et l’euthanasie des malades, des enfants, des personnes âgées et handicapées, et avoir instauré une « société de l’euthanasie » dont souhaiteraient s’inspirer de nombreux responsables politiques. Dès le mois de mai 2017, la CDF avait alerté le Saint-Père de la gravité du cas qui avait alors demandé au supérieur général des Frères de la Charité des éclaircissements urgents. Entre juin 2017 et mars 2020, pas moins de huit réunions rassemblant les représentants des Frères avec les préfets et secrétaires des dicastères concernés eurent lieu à Rome, sans compter les échanges épistolaires et la nomination d’un visiteur apostolique, leur demandant de récrire leur charte et de réaffirmer leur « adhésion sincère aux principes de sacralité de la vie humaine avec comme conséquence l’impossibilité de collaborer avec les institutions civiles belges, l’inacceptabilité de l’euthanasie et le refus absolu de l’exécuter dans les institutions qui dépendent d’eux » (2). Aucun pas en avant n’ayant été effectué, les religieux belges s’obstinant à envisager le meurtre de leurs patients « psychiatriques », la CDF avec l’approbation du pape François a dès lors signifié à la province belge des Frères de la Charité qu’ils « ne pourront plus, dorénavant, se considérer comme des institutions catholiques ».

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  • L’injustice du droit à l’égard des enfants à naître décédés du fait d’un accident

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    De Lucie Pacherie sur gènéthique.org :

    Homicide involontaire du fœtus : quand le droit crée l’injustice

    28 septembre 2023

    L’« affaire Pierre Palmade » fait ressurgir le débat sur le statut juridique des fœtus. Lucie Pacherie, titulaire du certificat d’aptitude à la profession d’avocat, spécialiste en droit de la santé et responsable du plaidoyer France de la Fondation Jérôme Lejeune, dénonce l’injustice du droit à l’égard des enfants à naître décédés du fait d’un accident.

    Nouveau rebondissement dans l’« affaire Pierre Palmade », qui a percuté, sous l’emprise de stupéfiants, une voiture qui transportait une femme enceinte de sept mois. L’enfant qu’elle portait est mort du fait de l’accident, le lien de causalité est certain. Mais une deuxième expertise vient cette semaine relativiser les faits puisqu’elle conclut, contrairement à la première, que l’enfant serait mort-né : il n’aurait pas respiré. La conséquence juridique tombe comme un couperet : l’homicide involontaire de l’enfant à naître ne sera pas reconnu (cf. Si l’atteinte par accident à la vie d’un enfant non encore né n’est pas un homicide involontaire, qu’est-ce donc ?). Le drame des parents d’avoir perdu leur enfant par la faute d’un tiers drogué n’aura aucune traduction pénale. Même conclusion pour les parents de Jade, mort-née, cet été. Alors qu’ils sont sur la route de la maternité, à 4 jours du terme, l’accident de voiture dont ils sont victimes tue leur petite fille in utero (cf. Un fœtus meurt dans un accident, « à 4 jours du terme, il n’existe pas »). 

    Dans ces deux drames, comme dans d’autres qui les ont précédés, l’évidence tragique ne sera pas réprimée. Car l’enfant est un « fœtus », soumis à une jurisprudence « idéologique»  qui rend la loi injuste. 

    Droit versus réalité : l’idéologie de l’avortement est à l’œuvre

    S’il fallait le rappeler, l’article L 221-6 du Code pénal incrimine l’homicide involontaire d’« autrui ». Trois décisions de la chambre criminelle de la Cour de cassation, prononcées en 1999, 2001 et 2002, ont considéré que le fœtus qui n’est pas né vivant est exclu du terme « autrui », en raison de deux principes du droit français : « la loi pénale est d’interprétation stricte » et « les dispositions spéciales dérogent aux dispositions générales ». Les juges considèrent ainsi que le fœtus mort-né, n’ayant pas de personnalité juridique, ne peut être protégé par la loi pénale, et qu’il relève de dispositions spéciales (en l’espèce inexistantes) qui le font échapper au droit commun (celui de l’homicide involontaire).

    Comme le dit Jean Paulhan, « il est de la nature de l’évidence qu’elle passe inaperçue ». C’est ici un cas de flagrant délit. Qui oserait nier que ces parents ont perdu leur enfant ? Que cet enfant est un « autre » qui ne sera pas ? Qu’il ait respiré ou pas.

    En maintenant une telle jurisprudence, les juges piétinent l’évidence. Ils s’accrochent à une logique juridique théorique, gangrenée par l’idéologie de l’avortement. La crainte d’être accusés de remettre en cause l’interruption volontaire de grossesse leur fait perdre tout bon sens. L’enfant à naître gêne. Pire, il est abordé par le prisme de ce prétendu « droit » à l’avortement qui est en fait une exception à la protection de l’être humain dès le commencement de sa vie. L’avortement est devenu une matrice de pensée. Une obsession. La Cour de cassation n’a pu s’en défaire en 2002. Il y a peu de chance qu’elle s’en défasse en 2023 où les revendications persistent. La dernière en date étant l’inscription dans la Constitution. 

    Quand le droit est injuste, il faut agir

    La conséquence de cette jurisprudence tenace depuis plus de 20 ans est double. 

    Les juges participent à la perte de conscience collective de l’être humain. De l’embryon, à l’adulte, l’être humain qui se développe ne change pas de nature, qu’il naisse ou pas. Il appartient à l’espèce humaine et poursuit dès son origine une croissance continue. La Fondation Jérôme Lejeune ne cesse de le dire et d’agir pour le défendre. Pourquoi le fœtus mort-né échapperait à toute protection pénale quand on sait que l’embryon humain, le fœtus né vivant, les personnes physiques, les personnes morales, les personnes décédées, ou même les animaux en bénéficient ?

    Les juges, en créant une dichotomie entre réalité humaine et réalité juridique, engendrent l’injustice. Les victimes de l’accident ne sont pas pénalement des victimes. Le fœtus n’est pas victime puisqu’il n’a pas vécu, donc ses parents non plus. Cette négation est une double peine. 

    Les mots de Saint Augustin résonnent : « on ne peut tenir pour loi une loi qui n’est pas juste ». Même s’il s’agit, en l’espèce, d’une jurisprudence injuste qui fait loi, l’idée s’applique. On ne peut en rester là. Des juges, courageux, se sont déjà levés en 2014. Le tribunal correctionnel de Tarbes avait pris, dans un drame similaire, une décision respectueuse de la dignité du fœtus mort-né en reconnaissant l’homicide involontaire à son égard. L’auteur de l’accident en était lui-même d’accord, par souci de réparation. Mais le procureur a fait appel (cf. Un fœtus victime d’un homicide involontaire : le Tribunal correctionnel de Tarbes retrouve le chemin du bon sens). 

    En son temps, un député avait tenté, lui aussi, de mettre fin à l’injustice en proposant un « délit d’interruption involontaire de grossesse ». Cela s’est soldé par un échec pour les mêmes raisons idéologiques. Le législateur a pourtant toute sa place. Il l’a bien fait pour les actes d’enfants nés sans vie, la reconnaissance juridique des fausses couches spontanées, etc. (cf. Le Parlement vote la possibilité de donner un nom de famille aux enfants nés sans vie Fausses couches : la proposition de loi définitivement votée).   

    Aujourd’hui, ce sont les parents de Jade qui s’engagent dans une « bataille judiciaire » pour faire reconnaître l’homicide involontaire de leur enfant. Pour eux-mêmes et pour tous les autres. Ils peuvent faire émerger l’évidence, et rendre au droit la justice.

    Cette tribune de Lucie Pacherie a été initialement publiée par Famille Chrétienne.

    Lucie Pacherie est titulaire du certificat d’aptitude à la profession d’avocat. Elle s’est spécialisée en droit de la santé et responsabilité médicale et est juriste de la fondation Jérôme Lejeune depuis 2010. Elle est co-auteur du livre Les sacrifiés de la recherche publié en 2020.
  • Quand Mgr Bonny prend fait et cause en faveur de l'euthanasie

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    De La Libre (Bosco d’Otreppe et Jacques Hermans) du 28 septembre 2023, pp. 4 et 5 :

    "Les générations précédentes n’ont pas pu assumer leurs responsabilités face aux abus"

    L’évêque d’Anvers, Mgr Johan Bonny, regrette que les générations précédentes n’aient pas pu assumer leurs responsabilités en la matière. Le prélat considère aussi que l’euthanasie "n’est pas nécessairement un mal en tant que tel".

    Johan Bonny, évêque d’Anvers, référendaire sur la question des abus, réagit aux révélations sur les abus sexuels commis au sein de l’Église que la série documentaire Godvergeten, les "Oubliés de Dieu", a mis en avant ces dernières semaines sur la chaîne flamande VRT Canvas. En vue du synode (une large réflexion) sur l’avenir de l’Église qui s’ouvre à Rome ce 4 octobre, nous l’avons également interrogé sur la question du pouvoir dans l’Église et sur les positionnements éthiques de cette dernière.

    Pourquoi l’Église n’a-t-elle pas réalisé l’ampleur des abus sexuels commis en son sein ? N’a-t-elle pas voulu ou n’a-t-elle pas pu s’en rendre compte ?

    Si on avait la réponse… Je suis déçu. Je déplore que les générations précédentes n’aient pas pu assumer leurs responsabilités, n’aient pas réagi avec le discernement ni avec l’efficacité qu’il fallait. Les évêques de l’époque savaient bien que ces abus étaient un mal, mais ils n’ont pas prêté aux victimes l’attention nécessaire. En conférence épiscopale, ils évoquaient le cas des abuseurs, ce qu’il fallait faire avec eux, mais ils ne parlaient pas des victimes ni de l’attention qu’il était nécessaire de leur accorder. Quand des victimes arrivaient auprès du cardinal Danneels, ce dernier ne savait pas quoi faire, il ne savait pas réagir, il n’avait ni les bonnes attitudes ni les bonnes
    intuitions pour écouter de tels cas. Les victimes n’ont donc pas pu avoir ce contact direct avec les responsables de l’Église, et cette absence de contact a fait que trop peu a été réalisé avec eux ou pour eux. Notre génération d’évêques est dès lors confrontée à un problème qui aurait dû être réglé il y a 20 ou 30 ans.

    Vous allez rencontrer les victimes ?

    Oui, pour entendre ce qu’elles attendent de l’Église. Il ne serait pas bon que nous, évêques, arrivions directement avec des réponses sans les avoir écoutées préalablement. Il y a eu des systèmes d’écoute, de médiation et de compensation, mais nous devons comprendre leurs attentes ultérieures pour qu’émergent des pistes de solutions. Alors qu’à Rome va s’ouvrir la semaine prochaine le synode (une grande réflexion, NdlR) sur l’avenir de l’Église, nous devons aussi pouvoir les entendre sur les réformes structurelles dont l’Église a besoin à leurs yeux. Il ne faut cependant pas attendre des solutions universelles à ces problèmes locaux. Chaque conférence épiscopale doit réagir sans attendre que Rome décide de tout. Sinon, ce serait le meilleur moyen d’étouffer l’affaire.

    Jusqu’ici, l’essentiel des décisions se prend au Vatican. Souhaitez-vous que les évêques locaux aient plus de pouvoir, comme le désire le pape François ? N’y aurait-il pas un risque pour l’unité de l’Église ?

    Non, je trouve cette idée tout à fait positive : les réalités sont tellement différentes d’une région à l’autre qu’il faut donner beaucoup plus de responsabilités aux évêques locaux. Nous ne pouvons plus attendre que toutes les réponses s’appliquent partout de la même manière et soient décidées depuis Rome. Nous devons donc réfléchir à une méthodologie qui nous permettra d’articuler les différentes responsabilités dans l’Église : celles du Pape, celles des évêques et celles des fidèles.

    Quelles responsabilités nouvelles pourrait-on accorder aux évêques dans leur pays respectif ?

    La possibilité d’ordonner prêtre des hommes mariés, ainsi que celle de donner telle ou telle responsabilité aux femmes. Mais aussi la capacité de répondre à certaines questions éthiques ou familiales : bénir les unions homosexuelles qui s’inscrivent dans la fidélité et l’amour mutuel (c’est ce que souhaitent les évêques en Belgique), offrir des réponses adaptées aux demandes d’euthanasie.

    L’Église pourrait donc adopter des positions différentes quant à la question de l’euthanasie ? Cela voudrait-il dire, qu’aux yeux de l’Église, la valeur de la vie varie en fonction des régions du monde ?

    La philosophie m’a appris à ne jamais me satisfaire des réponses génériques en noir et blanc. Toutes les questions méritent des réponses adaptées à une situation : un jugement moral doit toujours être prononcé en fonction de la situation concrète, de la culture, des circonstances, du contexte.

    Pour vous, l’euthanasie n’est donc pas nécessairement un mal ?

    Non, pas nécessairement en tant que tel.

    C’est la première fois qu’on entend un évêque dire cela…

    Nous serons toujours en faveur des soins palliatifs et nous prônons constamment le respect de la vie, mais je regrette que, depuis le Vatican, la congrégation pour la doctrine de la foi affirme que l’euthanasie est toujours un mal intrinsèque, quelle que soit la circonstance. C’est une réponse trop simple qui ne laisse pas de place au discernement. Nous nous opposerons toujours au souhait de certains d’arrêter une vie trop prématurément, mais nous devons reconnaître qu’une demande d’euthanasie d’un jeune homme de 40 ans n’est pas équivalente à celle d’une personne de 90 ans qui fait face à une maladie incurable. Nous devons apprendre à mieux définir les notions et à mieux distinguer les situations.

    Les "dix commandements" de la Bible - dont "tu ne tueras point" - sont catégoriques et semblent concerner toutes les situations. La Bible est-elle contre la philosophie et le discernement ?

    Il est bon de rappeler que l’on ne peut tuer, et je suis contre tous les meurtres. Mais qu’est-ce que tuer, qu’est-ce qu’un meurtre ? Que dites-vous à quelqu’un qui tue un ennemi au nom de la légitime défense ? Que dites-vous à quelqu’un qui est touché par une maladie incurable depuis des années et qui a décidé de demander une euthanasie après en avoir parlé à sa famille, son médecin, ses proches ? Il faut toujours faire référence à la Bible, mais rien n’est plus difficile que de l’interpréter et de l’appliquer à une situation particulière sans tomber dans du fondamentalisme. Dieu compte sur notre intelligence pour bien comprendre sa parole.

    Êtes-vous satisfait de la loi belge en matière d’euthanasie ?

    Ce n’est pas à un évêque de juger de la loi. Je considère plutôt son application sur le terrain, et c’est clair que tous nous craignons que cette application soit trop libérale et qu’il y ait trop de glissements : que des demandes soient trop vite acceptées sans qu’une solution alternative ne soit recherchée. Mais la réponse a ce glissement ne peut être un carton rouge émis à l’encontre de toutes les euthanasies.

  • Le "droit de vivre jusqu'au bout" : Michel Laigle, 73 ans, porteur d’une maladie auto-immune handicapante et sans rémission possible témoigne

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    De gènéthique.org :

    « Un sommet à conquérir »

    27 septembre 2023

    Fin février, 110 citoyens handicapés, malades ou âgés ont signé un manifeste publié dans le Figaro demandant que soit respecté leur « droit de vivre, de vivre jusqu’au bout » et d’exister tels qu’ils sont (cf. « Manifeste des 110 » : « laissez-nous le droit d’exister, d’exister tels que nous sommes »). Michel Laigle, 73 ans, porteur d’une maladie auto-immune handicapante et sans rémission possible, est l’un d’eux. Il livre à Gènéthique le témoignage de sa vie avec la maladie et nous invite à le suivre.

    Avant la fin de la vie, il y a le chemin, plus ou moins long ou douloureux, qui y mène.

    Je pars ici d’un cancer qui s’est déclaré vers l’âge de 50 ans, il y a maintenant plus de vingt ans, alors que j’exerçais comme instituteur dans une école publique. Cancer qui a été traité par une greffe de sang, anciennement appelé greffe de moelle, nécessitant une longue et quelquefois difficile hospitalisation, et surtout l’abandon de mon poste d’enseignant que je n’ai jamais pu reprendre à temps complet.

    Regarder « l’objectif comme un sommet à conquérir »

    En général, je n’ai pas peur des efforts, ni même de certaines souffrances, ayant connu les dépassements de moi-même par le sport, la randonnée en particulier, et surtout la haute montagne. Je n’ai jamais consenti à ces efforts pour le plaisir de la souffrance en elle-même. Je l’ai toujours limitée à ce que je pouvais supporter. J’ai consenti à ces efforts pour la joie de la conquête d’un sommet, d’un paysage, d’une ambiance, et de ce qu’il y a de sublime dans le dépassement de soi-même. J’y ai consenti pour la conquête de l’inutile, comme certains disent à propos d’admirables alpinistes et amoureux de la montagne.

    C’est dans cet esprit que j’ai abordé ces traitements. En regardant l’objectif comme un sommet à conquérir, un sommet appelé la vie.

    Certes, je n’avais pas le choix, mais aucun résultat n’est jamais vraiment garanti. On sait quand on rentre à l’hôpital, on ne sait pas quand, ni comment on en sortira. Abdiquer ? La pensée même ne m’a pas effleuré. Pendant plus de sept mois, j’ai vécu dans un autre monde, avec ma famille comme seul lien à la vie (cf. « La fin de vie n’est pas avant tout un sujet de liberté individuelle mais de solidarité collective »).

    « Être là » et « regarder le présent »

    Le plus dur est l’aujourd’hui, car les effets secondaires indésirables sont handicapants et m’isolent. Ils m’empêchent totalement de pratiquer la montagne, ne serait-ce qu’en randonnée de moyenne altitude, car le souffle ne tient plus. Je ne peux plus pratiquer le chant choral pour la même raison, mais aussi du fait d’une sécheresse buccale totale. J’ai perdu les glandes salivaires.

    Mais il ne faut pas s’inquiéter pour moi. A l’occasion d’un apéritif ou d’un buffet froid entre amis, je trouve mon plaisir à être là au milieu d’eux, avec un simple verre d’eau (cf. « La lourdeur du jour, comme la joie des petits riens »). Pour les repas, il me faut accepter de demander quelques aménagements, et surtout un peu de patience, car il me faut beaucoup plus de temps que tout le monde pour manger.

    Je n’ai pas d’explication à cette sorte de résilience, dont je ne mesure pas le degré, car c’est non mesurable. Pourtant, elle est bien là. Je crois que cela fait partie de la vie, la vie tout-court, parce qu’elle est la vie. En altitude, dans des parois de granit, je m’étonnais de la présence de papillons et de fleurs à butiner. Combien de splendides reportages nous montrent les prouesses de la vie par l’adaptation d’animaux dans les recoins les plus inhospitaliers ?

    Autour de moi chacun respecte, sans chercher à les commenter, ces difficultés quotidiennes, devenues existentielles. J’en parle peu, et mes proches restent discrets, mais toujours prêts au coup de main (cf. « La mort ne sera jamais la solution. La solution c’est la relation »). Le passé en bonne santé revient de temps en temps, mais la puissance de l’esprit c’est de pouvoir s’en détacher, et donc de ne pas sombrer dans quelconque nostalgie ou regret de celui-ci. Regarder le présent tout en essayant d’organiser le futur, qui de toute façon arrivera !

    « Il faut de l’endurance »

    Il m’est arrivé d’aider une personne à franchir le cap de l’hospitalisation. Une femme attendait, comme moi, un rendez-vous dans une salle d’attente. L’air grave, elle regardait par la fenêtre, elle ne s’était pas assise. La conversation s’est engagée malgré tout, et au détour d’une phrase, elle m’a subitement interrompu. « Si vous aviez à refaire les chimiothérapies, les referiez-vous ? » m’a-t-elle demandé. « Bien sûr ! » lui ai-je répondu, « et plus qu’une fois s’il le fallait ! ». Après un court instant, celle-ci m’a dit, et se l’est dit à elle-même autant qu’à moi : « il fallait que je vous rencontre ». La providence a voulu que je la revoie plusieurs années après. Elle était rayonnante, mais je n’ai pas cherché à me faire reconnaître.

    Je ne veux pas pour autant idéaliser ma situation. Certains moments, comme des retours en hospitalisation et des soins lors d’un suivi, font que le quotidien devient de plus en plus dur. J’ai alors l’impression que le sommet est toujours plus loin, comme cela se passe quelquefois en montagne. Il semble s’éloigner. Il faut de l’endurance, mais la partie, je crois, en vaut la peine, et je n’évoque pas l’idée d’interrompre le chemin. J’aurais l’impression d’un abandon de ce qui m’est le plus cher : vivre.

    Salutaire résilience

    Certains disent croire aux forces de l’esprit. C’est ce que je vis chaque jour, jour après jour, sans aucune monotonie, car aucun jour ne ressemble au précédent. Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir, dit-on, et mes amis sont les témoins de cette espérance.

    Sans ôter aucune souffrance, cette résilience salutaire installe une paix qui n’a pas d’équivalent, et qui aide au quotidien. Elle est nécessaire, et à la fois tout à fait étrangère à ce que je pourrais faire par moi-même. Vivre quotidiennement, un pied en dehors de la vie et l’autre pied dedans.

    Lire également : La rencontre de notre vulnérabilité : première étape, pour devenir humain !