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Idées - Page 103

  • Nous ne sommes pas de "bons petits soldats"

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    On nous a reproché vivement d'avoir relayé sur ce blog un article mettant en cause l'attitude de Vatican II à l'égard du communisme que ce concile se serait abstenu de condamner. Nous sommes même accusés de manquer de sens de l'Eglise ("sensus Ecclesiae") et de donner des arguments à ceux qui songent à s'éloigner de l'Eglise.

    Il serait donc requis, de la part des catholiques, d'adhérer sans aucune liberté critique à tous les textes de Vatican II ainsi qu'à toutes les prises de position des papes depuis un demi-siècle sous peine d'être considérés comme des gens néfastes alimentant la zizanie et les divisions au sein de l'Eglise. Bref, d'être de bons petits soldats et de nous taire même lorsque notre conscience nous dicte le contraire. Ceux qui nous en intiment l'ordre sont en même temps les premiers à considérer que les libertés de conscience et d'expression sont de grands acquis qu'il faut défendre. Allez comprendre.

    Pourtant, à propos de Gaudium et Spes, dont on nous dit qu'il contient (implicitement, mais de manière évidente) une critique sans appel du communisme, Benoît XVI lui-même formule certaines réserves ainsi que le souligne l'historien Philippe Chenaux, peu suspect d'intégrisme :

    Benoît XVI était notamment très critique sur Gaudium et Spes. Avec d'autres, il jugeait le texte trop optimiste, trop ouvert, théologiquement faible et ne prenant pas en compte la dimension eschatologique du christianisme : l'espérance du christianisme ne se confond pas avec le progrès technique ou la défense des droits de l'homme, car il porte un message de salut, de vie supranaturelle. Longtemps, discuter de Vatican II a été tabou. Il y avait une position positive du concile, à part chez les intégristes. Ce tabou est levé. Aujourd'hui, des appréciations plus critiques du concile et de ses effets se font jour, notamment dans les milieux conservateurs.

    Toujours à propos de Gaudium et Spes, le même historien, professeur d'histoire de l'Eglise moderne et contemporaine à l'Université du Latran (Rome) et directeur d'un centre de recherche sur le concile Vatican II, s'exprime ainsi :

    L'un des textes les plus importants et les plus novateurs, Gaudium et Spes, définit les rapports de l'Eglise au monde et lui adresse un message. Il va devenir l'un des axes majeurs du débat conciliaire, alors qu'il n'avait même pas fait l'objet de travaux préparatoires ! C'est le concile qui va créer cette nécessité. Ce texte, d'inspiration française, part des attentes du monde, des "signes des temps". Il faut le resituer dans le contexte des années 1960, marqué par une sorte d'euphorie avec l'émergence de la société de consommation, la conquête de l'espace, les évolutions culturelles... On y retrouve cet optimisme, que certains peuvent aujourd'hui trouver un peu naïf et daté.

    La lecture de cette interview donnée par Philippe Chenaux à Stéphanie Le Bars (dans Le Monde du 11 octobre dernier) est d'ailleurs très éclairante, même s'il se positionne de façon très favorable à l'égard dudit concile, sur la complexité face à laquelle se trouve celui qui veut retracer l'histoire de Vatican II, et davantage encore celui qui se risque dans son  interprétation.

    Quant à nous, il nous semble (est-ce péché que de le dire ?) que, lors du dernier concile, l'Eglise a voulu se mettre au diapason du monde moderne et qu'elle a ainsi donné le signal d'une "revisitation" de sa doctrine et de son mode d'être; de la sorte se sont ouvertes toutes grandes les vannes qui ont donné libre cours à une mentalité réformatrice, provoquant une crise majeure dont on aura bien du mal à se remettre.

  • Faites de belgicatho votre blog...

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    Ces derniers jours, le taux de fréquentation de belgicatho a battu tous ses records ; il est vrai que nous nous sommes postés sur toute une série de « fronts ». Nous avons emboité le pas aux adversaires français du « mariage pour tous », nous avons dénoncé un « traquenard » médiatique dans lequel la RTBF aurait attiré des jeunes « pro life », nous avons attiré l’attention sur des actes d’hostilité visant les chrétiens dans de nombreux pays, nous avons pointé des dérives dans l’enseignement et l’éducation, etc.

    A tout moment en effet, en circulant d’un site ou d’un blog à l’autre, il y a moyen de trouver un nouveau fait, un nouveau contenu, de nouveaux échos susceptibles d’être relayés. Et cela jusqu’à notre dernier souffle ou jusqu’à une catastrophe qui nous priverait de l’Internet. Au risque de se laisser complètement accaparer par cette course à l’info et de déserter le monde concret où se joue notre existence, là où nous sommes impliqués au cœur des réalités quotidiennes : familiales, professionnelles, sociales, paroissiales, etc.

    Bien sûr on  ne peut imaginer abandonner le champ de l’information à ceux qui le labourent quotidiennement pour en extirper ce qui reste encore de notre culture chrétienne et y semer inlassablement les germes d’une mentalité individualiste, matérialiste, relativiste, etc. Il est donc bon que nous continuions à faire ce travail, tout particulièrement dans un contexte belge où, en-dehors des "médias catholiques" officiels, il n’existe pas grand-chose pour exprimer un point de vue catholique, en toute liberté et toute indépendance.

    C’est d’autant plus urgent que, comme nous y avons déjà insisté, le monde médiatique francophone de Belgique se nourrit d’un consensualisme uniforme sans que personne ne vienne en perturber la troublante harmonie. Sur les questions de société, on ne trouve quasiment aucune discordance entre les discours tenus sur la RTBF, sur RTL, dans le Soir, dans la Libre ou dans le Vif. Nous vivons, plus sans doute que partout ailleurs, dans un contexte médiatique parfaitement homogène, tout à fait unilatéral, régi par la pensée unique, où toute prise de position discordante fait illico l’objet de dénonciations unanimes auxquelles l’establishment politique se joindra aussitôt. On se souvient encore de ces protestations émises officiellement par nos « responsables » politiques contre des positions du pape à propos du préservatif ou de l’homosexualité.

    Mais s’il faut poursuivre ce travail, il faut aussi éviter de se laisser manger par lui au point de ne plus avoir de temps à consacrer à autre chose. Si nos visiteurs, et ils sont de plus en plus nombreux, apprécient notre travail, nous les invitons à y participer, à être moins consommateurs et davantage acteurs. Il leur suffit de nous adresser leurs commentaires, leurs suggestions, les infos dont nous ne disposons pas, leurs réflexions et leurs propositions. Ils contribueront ainsi à rendre ce blog plus vivant et plus attractif. Nous les attendons ; tout message adressé à belgicatho@gmail.com sera le bienvenu.

  • Non, l'homme n'est pas unidimensionnel

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    Massimo Introvigne, dans la Bussola Nuova Quotidiana, consacre un article à Gilbert Durand (1921-2012), « un des plus grands anthropologues du XXe siècle », décédé le 6 décembre dernier. Mais pourquoi s’intéresser à son œuvre scientifique ? Tout d’abord parce que Gilbert Durand, qui fut par ailleurs un grand résistant, a contribué à donner ses lettres de noblesse à une approche anthropologique qui s’intéressait aux mythes et aux symboles, leur conférant le statut de « légitimes objets d’étude ».

    Sa rencontre avec Gaston Bachelard a été décisive ; en effet, celui-ci avait ouvert la voie en commençant à étudier les images et les symboles, « mais très influencé par le positivisme et la psychanalyse freudienne ».  Enseignant la sociologie à l’Université de Grenoble, Durand a étudié les sociologues des XIXe et XXe siècles et a constaté que l’étude des mythes et des symboles faisait totalement défaut dans leur approche. Grâce notamment à une nouvelle rencontre, celle Roger Bastide qui a exploré les religions afro-brésiliennes, il approfondit sa démarche anthropologique et publie en 1960 « Les structures anthropologiques de l’imaginaire ». Il fonde ensuite un centre de recherche sur l’imaginaire qui assure la notoriété de « l’école de Grenoble ». D’autres rencontres seront décisives : celles de l’islamologue Henri Corbin « qui à son tour le présente à l'historien des religions Mircea Eliade (1907-1986) et l'introduit au Cercle d'Eranos, un lieu de rencontre pour l'étude des mythologies de toutes les époques et de tous les pays, cercle qui se réunit à Ascona et où le psychanalyste Carl Gustav Jung (1875 - 1961) a joué un rôle central » (bien que Jung était déjà mort quand Durand est entré dans ce cercle). Durand s’est ouvert davantage aux formes symboliques non occidentales, surtout après son mariage avec une jeune Chinoise, ce qui l'a amené à étudier le riche patrimoine des mythes et des symboles de la Chine.

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  • Sur la pensée unique

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    Du blog de Bernard Romain :

    Le matérialisme pratique ambiant nous imprègne tous, et cela pose question, un jour ou l’autre, à tout un chacun.

    Nombreux, heureusement, sont ceux qui ressentent l’urgence de réagir à cet impérialisme sous-jacent qui veut ‘’formater’’ les comportements quotidiens et, par voie de conséquence, les esprits, selon une pensée unique.

    Le style de vie occidental qui fait tache d’huile de par le monde – car il est attirant par bien des côtés – est encore largement fondé sur la prédominance de l’argent, la consommation de masse et la publicité, pour tenir en haleine les consommateurs par la recherche du ‘’mieux paraître’’ !

    L’accent est mis sur l’individualisme, la prééminence du ‘’moi’’ et l’indifférence envers toute règle de conduite héritée du passé.

    Autant dire qu’il s’agit d’une course à l’avoir, à la compétition, à la vanité et à l’attachement du moment, à la recherche des plaisirs futiles, à la captation de l’autre égoïste et à la domination orgueilleuse, qui cache à beaucoup l’importance que revêt pour tout homme digne de ce nom la quête de l’être et du sens de l’existence.

    Sur un plan philosophique, on peut dire que l’utilité (personnelle et sociale) est davantage du côté de l’avoir, et la gratuité du côté de l’être.

    Certes, l’utilité est nécessaire pour faire face aux besoins du quotidien, mais ceux-ci ne valent d’être comblés que pour libérer l’homme et le rendre capable de s’ouvrir à des choses plus hautes et plus profondes, seul ressort qui vaille dans l’existence.

  • A CONTRETEMPS : REGARDS POLITIQUEMENT INCORRECTS

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    Le 21 janvier 2011, nous avions signalé la parution du livre suivant :

    Mutien-Omer Houziaux. À contretemps. Regards politiquement incorrects, 288 pp., 15x20,50 cm., Editions Mols, coll. Autres regards. Wavre, 2010,  prix librairie  22,50 €

    Quelques exemplaires de ce livre qui n'a rien perdu de son actualité sont encore disponibles et seront adressés aux amateurs, dédicacés par l'auteur, aux conditions figurant au bas de cette note.

    C’est du belge. Et même du liégeois. Mutien-Omer Houziaux, romaniste, ancien maître de conférence à l’Université de Liège, auteur de nombreuses publications touchant à la linguistique, à l’informatique appliquée, à la pédagogie et à la musicologie (il fut titulaire des orgues de la cathédrale de Liège) vient de publier aux éditions Mols (diffusion Desclée en France) un essai critique des mœurs contemporaines : un autre regard sur la bioéthique, la spiritualité et le scientisme ambiants.

    Familles recomposées, homoparentalité, mort dans la dignité, la parole est aujourd'hui au politiquement correct. Né en 1980, au pays de l'american way of life, le politiquement correct n'a pas tardé à franchir l'Atlantique. Son discours, qui se réclame de la démocratie, est -en réalité- l'arme principale d'une pensée dominante, voire unique. Arme redoutable, la parole, notait déjà Talleyrand, a été donnée à l'homme pour déguiser sa pensée.

    Sous prétexte de promouvoir le "vivre ensemble", la société, qui prône le libre arbitre individuel, devient en réalité liberticide. Pis encore, de contrainte sociétale, le politiquement correct se mue parfois, sournoisement, en contrainte légale: toute opinion politiquement incorrecte est alors bâillonnée par un pouvoir civil "démocratique".

    Avec un humour parfois corrosif, Mutien-Omer Houziaux dénonce sans détour quelques-uns des effets délétères d'une dictature qui s'avance sous le masque du dialogue et de la tolérance comme dans le « meilleur des mondes » prédit par Aldous Huxley.

    La préface de l’ouvrage a été rédigée, peu avant sa mort, par le regretté Mgr Michel Dangoisse,  Elle condense excellemment la portée de cet ouvrage lucide et impertinent.

    L’Union, Cercle royal des étudiants catholiques de Liège, tél.+32 (0)4.344.10.89 ou +32 (0)4.223.54.11, a contribué à cette publication et met l'ouvrage en vente au prix de faveur de 22,50 euros (port compris)Pour le recevoir à votre adresse postale, il suffit de verser cette somme au compte IBAN BE15 2400 0748 1330  BIC GEBABEBB de l'Union, Cercle Royal des Etudiants Catholiques de Liège asbl, Rue Vinâve d'île, 20 bte 64 à B- 4000 Liège, avec la mention "A contretemps".

  • Non, les religions monothéistes ne sont pas des vecteurs de violence

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    LE MONOTHEISME N'EST PAS PORTEUR DE VIOLENCE (VIS - Vatican Information Service)

    Le Saint-Père a reçu ce matin (7 décembre) la Commission théologique internationale, qui s'apprête à tenir sa session plénière, remerciant tout d'abord ses membres de leur message pour l'Année de la foi. Il exprime bien, a dit Benoît XVI à ses hôtes, "la manière spécifique qu'ont les théologiens de participer à l'élan évangélique de l'Eglise en servant fidèlement la vérité de la foi". Il reprend les thèmes du document intitulé "La théologie aujourd'hui, critères et perspectives." (...) Ainsi le document clarifie-t-il les critères d'une théologie authentiquement catholique, capable par conséquent de contribuer à la mission de l'Eglise.

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  • Parier avec Pascal

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    couv9665g_260.jpg"Parier avec Pascal" est le livre que l'abbé de Tanoüarn vient de publier, dans le but, affirme-t-il, de "faire comprendre que le pari n'est pas un calcul de probabilité mais une quête de l'évidence de Dieu..."

    François Bousquet, dans le numéro de novembre de Spectacle du monde, rencontre l'auteur :

    Prêtre traditionaliste, philosophe et homme de foi, directeur du Centre Saint-Paul, l’abbé Guillaume de Tanoüarn publie aux éditions du Cerf (318 pages, 28 €), un Parier avec Pascal.

    Pourquoi Pascal est-il si crucial ?

    Il l’est parce qu’il a en quelque sorte ressenti à l’avance, comme aucun autre, la montée en puissance du rationalisme moderne. Son but dans les Pensées ? Trouver une parade à ce rationalisme, au nom de la plus grande intelligence. Du fond de son scepticisme naturel, c’est la raison elle-même qu’il va scruter - les pouvoirs de la raison - en distinguant d’un côté l’esprit de géométrie, fondée sur le principe d’identité, et de l’autre l’esprit de finesse, fondée sur « la grande pensée de la ressemblance ». Que peut dire Pascal à Monsieur Homais, le pharmacien ratiocineur de Flaubert ? La raison ne fonctionne pas uniquement à travers le principe d’identité, il ne suffit pas d’écrire : A = B, B = C, donc A= C ; la raison n’est pas seulement mesurante, elle s’exerce aussi à travers des intuitions et des ressemblances ; nous dirions : des analogies. Pour Pascal, Dieu – l’Infini - est la plus évidente de ces intuitions. Le problème qui se pose à lui, c’est que cette évidence de Dieu n’est pas assez forte dans nos vies. D’où le pari par lequel il veut donner force à l’évidence de Dieu.

    Mais réduit à sa plus simple expression, en quoi consiste le pari ?

    Ce que l’on appelle pari est en réalité un fragment – un manuscrit de quatre page, raturé et annoté - que Pascal a intitulé : « Infini-rien ». Pascal est hanté par cette idée de l’infini, cette idée des deux infinis, le grand et le petit, si disproportionnés au regard de l’homme. Le pari, stricto sensu, c’est qu’il vaut toujours mieux vivre pour l’infini que de vivre sans l’infini. Pascal le présente comme un calcul, mais on est au-delà du calcul. Il dit d’ailleurs - comme Platon au fond - que si Dieu n’existait pas, il vaudrait mieux être un homme de bien de toutes les façons que de s’être laissé porter par nos désirs.

    Peut-on dire de l’œuvre de Pascal qu’elle est un dialogue entre la foi et scepticisme, entre lui et Montaigne ?

    On peut évidemment penser que c’est un dialogue entre la foi et le scepticisme, Montaigne n’étant pas uniquement du côté du scepticisme, mais aussi du côté de la foi, puisqu’il meurt au cours d’une messe célébrée dans sa chambre, dans une sorte d’étonnante extase au moment de la consécration. Montaigne et Pascal ont en commun d’avoir posé la relation du scepticisme et de la foi. C’est parce que la raison humaine est impuissante que la foi est nécessaire. Dit autrement : le scepticisme ouvre le vaste champ de la foi.

    Quel est le génie de Pascal ?

    On pourrait dire du génie de Pascal que c’est celui de la vérité contraire. Vous savez qu’il dit à propos de l’hérésie qu’elle n’est pas le contraire de la vérité, mais l’oubli de la vérité contraire. Il donne ainsi une image de la foi catholique faite de deux vérités contraires. Par exemple, la grâce et la liberté humaine sont les deux vérités contraires autour desquelles, en tant que janséniste, Pascal a tourné, sans jamais sacrifier l’une à l’autre.

    Une sorte de dialectique pré-hégélienne ?

    Non, parce que la dialectique hégélienne produit une synthèse qui n’est, Dieu me pardonne, qu’une foutaise, alors que Pascal laisse ouverte la dualité de toute approche. Avec lui, le choix n’est jamais fermé. Ainsi cela reste-t-il un pari.

  • « Comme dans des bâtiments en béton sans fenêtres »

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    Un message magnifique de Benoît XVI au « Parvis des Gentils » (référence au parvis du temple de Jérusalem qui dans l'antiquité était accessible aux païens), une structure vaticane voulue par Benoît XVI et destinée à faire dialoguer croyants et non croyants, Dans un contexte de forte sécularisation. Cette  structure est pilotée par le cardinal Gianfranco Ravasi, président du conseil pontifical de la culture,

    « Chers amis,

    C’est avec une vive gratitude et avec affection que je salue tous les participants au "Parvis des gentils" qui va avoir lieu au Portugal, les 16 et 17 novembre 2012, et qui réunira des croyants et des incroyants autour de l’aspiration commune à affirmer la valeur de la vie humaine face à la vague montante de la culture de la mort.

    En réalité, la conscience du caractère sacré de la vie qui nous a été confiée, non pas comme quelque chose dont on peut disposer librement mais comme un don qu’il faut garder fidèlement, appartient à l’héritage moral de l’humanité. "Malgré les difficultés et les incertitudes, tout homme sincèrement ouvert à la vérité et au bien peut, avec la lumière de la raison et sans oublier le travail secret de la grâce, arriver à reconnaître dans la loi naturelle inscrite dans les cœurs (cf. Rm 2, 14-15) la valeur sacrée de la vie humaine depuis son commencement jusqu’à son terme" (Encyclique "Evangelium vitæ", n° 2). Nous ne sommes pas un produit accidentel de l’évolution, mais chacun d’entre nous est le fruit d’une pensée de Dieu : nous sommes aimés par Lui.

    Cependant, si la raison peut percevoir cette valeur de la vie, pourquoi mettre Dieu en cause ? Je réponds en citant une expérience humaine. La mort d’une personne aimée est, pour ceux qui l’aiment, l’événement le plus absurde que l’on puisse imaginer : cette personne est inconditionnellement digne de vivre, il est bon et beau qu’elle existe (l’être, le bien, le beau, comme le dirait un métaphysicien, sont transcendantalement équivalents). Mais en même temps, la mort de cette même personne apparaît, aux yeux de ceux qui ne l’aiment pas, comme un événement naturel, logique (pas absurde). Qui a raison ? Celui qui aime ("la mort de cette personne est absurde") ou celui qui n’aime pas ("la mort de cette personne est logique") ?

    Le premier point de vue n’est défendable que si toute personne est aimée par un Pouvoir infini ; c’est là la raison pour laquelle il a été nécessaire de faire appel à Dieu. Effectivement, ceux qui aiment ne veulent pas que la personne aimée meure ; et, s’ils le pouvaient, ils l’empêcheraient toujours. S’ils le pouvaient... L’amour fini est impuissant ; l’Amour infini est tout-puissant. Eh bien, c’est cette certitude que l’Église annonce : "Oui, Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, pour que tout homme qui croit en lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle" (Jn 3, 16). Oui ! Dieu aime chaque personne et celle-ci, de ce fait, est inconditionnellement digne de vivre. "Le sang du Christ, qui révèle la grandeur de l’amour du Père, manifeste que l’homme est précieux aux yeux de Dieu et que la valeur de sa vie est inestimable". (Encyclique "Evangelium vitae", n° 25).

    Mais, à l’époque moderne, l’homme a voulu se soustraire au regard créateur et rédempteur du Père (cf. Jn 4, 14), en se fondant sur lui-même et non sur le Pouvoir divin. C’est presque la même chose que dans les bâtiments en béton armé dépourvus de fenêtres, où c’est l’homme qui assure l’aération et la lumière ; et, semblablement, même dans un tel monde auto-construit, on puise dans les "ressources" de Dieu, qui sont transformées en produits qui sont les nôtres. Que dire, alors ? Il est nécessaire de rouvrir les fenêtres, de voir à nouveau l’immensité du monde, le ciel et la terre, et d’apprendre à utiliser tout cela comme il faut.

    En effet, la valeur de la vie ne devient évidente que si Dieu existe. C’est pourquoi il serait beau que les incroyants veuillent vivre "comme si Dieu existait". Même s’ils n’ont pas la force de croire, ils devraient vivre sur la base de cette hypothèse ; dans le cas contraire, le monde ne fonctionne pas. Il y a beaucoup de problèmes qui doivent être résolus, mais ils ne le seront jamais complètement si l’on ne place pas Dieu au centre de tout, si Dieu ne devient pas de nouveau visible dans le monde et déterminant dans notre vie. Celui qui s’ouvre à Dieu ne s’éloigne pas du monde et des hommes, mais il trouve des frères : en Dieu nos murs de séparation tombent, nous sommes tous frères, nous faisons partie les uns des autres.

    Mes amis, je voudrais conclure par cette phrase du concile Vatican II destinée aux penseurs et aux hommes de science : "Heureux ceux qui, possédant la vérité, continuent à la chercher pour la renouveler, pour l’approfondir, pour en faire don aux autres" (Message, 8 décembre 1965). C’est là l’esprit et la raison d’être du "Parvis des gentils". À vous qui êtes engagés de diverses manières dans cette initiative significative, j’exprime mon soutien et j’adresse mes encouragements les plus sincères. Que mon affection et ma bénédiction vous accompagnent aujourd’hui et à l’avenir.

     BENEDICTUS PP XVI , Au Vatican, le 13 novembre 2012 »

     Ici :  "COMME DANS DES BÂTIMENTS EN BÉTON SANS FENÊTRES..."

    Puisse cette "structure" de dialogue (une de plus) s'en inspirer dans ses initiatives...

  • "Le secret le mieux gardé de l'Eglise" doit être dévoilé

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    De Natalia Trouiller sur le site de “La Vie” aujourd’hui:

    “Interrogé par nos confrères de Radio Vatican, le cardinal Peter Tukson, archevêque ghanéen président du Conseil pontifical Justice et Paix, est revenu sur... la doctrine sociale de l'Eglise catholique.

    Faire sortir la doctrine sociale catholique des cercles spécialisés et lui donner un grand coup de projecteur, tel est le but que propose le cardinal ghanéen Peter Turkson dans une interview à Radio Vatican. S'exprimant au nom du Conseil pontifical Justice et Paix dont il est le président, il est revenu sur les objectifs du millénaire pour le développement, pris en l'an 2000 et qui visent à réduire de moitié la pauvreté d'ici à 2015. Le succès de cette campagne bien amorcée ne lui fait pas oublier que la pauvreté, définie par l'ONU  comme le fait de vivre avec moins de 1$ par jour. "Nous avons une réflexion sur cette définition qui ne parle pas d'accès aux soins, à l'éducation, à une vie décente", a-t-il expliqué.

     Et pour améliorer cette définition, le cardinal Turkson propose de se baser sur la doctrine sociale de l'Eglise, qui prône "le sens fondamental de la dignité humaine, lequel génère diverses formes de droits de l'homme, le droit à une vie décente, aux soins de santé, à un salaire équitable et, dernièrement, nous y avons inclus le droit à l'énergie et à l'eau propre. Je suis fondamentalement heureux que nous soyons invités à élargir ce concept à ce qui fait une vie saine, ce qui ne concerne pas seulement ce que vous avez dans votre poche ... Nous avons maintenant l'accès à la communication aussi - je viens de parler à un évêque qui se plaignait de l'absence d'accès à internet dans sa partie du Congo, la plus grande chose dont ils souffrent c'est le faible développement des réseaux de communication, il ya donc la question de l'accès à la communication qui est un facteur important".
     Mais pour cela, les gens doivent se familiariser avec la vision catholique de l'homme, expliquée dans la doctrine sociale: "Elle ne devrait plus être un secret - dans certains cas, c'est un secret négligé, les maisons de formation savent très peu de choses dessus. Dans le passé, nous avons examiné l'Église comme corps mystique du Christ, l'accent était mis sur les relations spirituelles, puis le Concile Vatican II a ouvert cette place, il nous a amenés à reconnaître que nous sommes une famille, le sens de l'Eglise en termes d'engagements sociaux ...  Il n'y a personne qui nierait que nous sommes des êtres sociaux ... nous devons donc étudier les implications de la vie en société. La meilleure définition de la doctrine sociale de l'Église est: ce que je suis, avec ma foi chrétienne, invité à témoigner de l'amour du Christ, comment puis-je l'engager dans l'ordre social, la vie politique et économique".

    Commentaire de Belgicatho:

    Pas toujours si secret, ce trésor: en 2009, c’est le premier ministre belge et actuel président du Conseil européen,  Herman Van Rompuy, accompagné de Rocco Buttilione (alors vice-président de la chambre des députés italiens) italien) et de Mgr Michel Schooyans (professeur à l’université de Louvain, membre fondateur de l’Académie pontificale des sciences sociales) qui a présenté lui-même l’encyclique de Benoît XVI « Caritas in Veritate » (cliquez ici :) Devant plus de 500 personnes  et de très nombreuses personnalités politiques réunies dans la salle académique de l’Université de Liège, institution publique s'il en est…

  • Ce que deviennent les mots polémiques

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    « Les mots employés à des fins polémiques perdent leur qualité de parole : ils se transforment en clichés.

    La part que les clichés se sont taillés dans notre langage quotidien et les débats de tous les jours  pourrait bien mesurer à quel point nous nous sommes dépouillés de notre faculté de parole mais aussi préparés à user des moyens violents  pour régler nos différends. »

    (Hannah Arendt ‘Compréhension et politique’)

    (sur le Blog de Bernard Romain)

  • Monseigneur Léonard : une réflexion sur la « nature »

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    A propos de la nature des origines, à laquelle nous avons fait allusion ici :La nature a bon dos on peut rappeler la thèse que Mgr Léonard, a  présentée dans son livre d’apologétique : « Les raisons de croire », paru  chez Fayard, en 1987 déjà.

    Mgr Léonard part de « cette intégrité originelle de l’homme et du cosmos » (p. 205) et constate que « Dieu n’a pas fait la mort » (p. 206). « Mais, objectera-t-on, la mort et même le péché ne font-ils pas manifestement partie des « lois de la nature » ? » (p. 207).

    Est-ce que les choses « meurent » ? Le grain de blé qui tombe en terre pour y pourrir et permettre le germe d’un blé nouveau « meurt » t-il ? Peut-on parler de « péché » de la nature, des choses ?

    Monseigneur Léonard écrit notamment que si nous voulons maintenir l’affirmation chrétienne de l’intégrité originelle de l’homme et de l’univers tout en prenant acte du caractère naturel du mal dans le monde présent, il nous faut logiquement conclure que c’est l’ensemble du monde présent, avec ses lois inexorables, qui n’est pas naturel (…) La création telle qu’elle est sortie des mains de Dieu était intègre (…) la corruption du monde présent s’est inscrite jusque dans les lois de la nature (…) la contagion du péché, porteuse de mort, s’est installée jusqu’au cœur de la nature, jusque dans les lois de fonctionnement, qui acheminent désormais tout être vivant vers sa mort (…) La rupture causée par le premier péché n’est donc pas une variation comparable aux modifications survenues dans l’univers présent au cours de son évolution cosmologique, géologique, climatologique ou historique. Il s’agit d’une altération qui, tout en préservant son identité foncière, atteint cependant sa qualité d’être, sa condition ontologique ou, en termes plus simples, son niveau ou son degré d’existence (…) Notre monde est bien le même que connut le premier Adam avant la chute, et notre humanité présente reste substantiellement identique à la sienne. Cependant, entre lui et nous, comme entre la création originelle et le cosmos présent, il y a aussi une discontinuité, une rupture qualitative (…) A ce point de notre réflexion, une conclusion décisive se dégage : il ne faut donc pas se représenter la chute originelle comme se produisant à l’intérieur du monde présent (…) Autrement dit, le péché originel n’a pas été commis par les premiers hominisés de l’évolution biologique (…). Dans cette perspective, le passage du monde réel avant la chute au monde réel après la chute est tout aussi irreprésentable par l’imagination, ou même par la science, que le passage de ce monde-ci au monde nouveau de la Résurrection (p. 207-211)…

    Source : L’alternative historique de la création de Mgr Léonard

  • Un nouveau "Big Brother" ?

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    Nous trouvons ICI le compte-rendu d'un essai de Jean-Claude Michéa qui vient de paraître:

    Dans un nouvel essai à contre-courant, Jean-Claude Michéa décrit l’étonnante alliance qui s’est peu à peu formée au-delà des années 1980 entre l’intelligentsia de gauche et le capitalisme mondialisé. Cette convergence, difficilement imaginable trente ans plus tôt, en pleine guerre froide, dans les années 1950, avait déjà été étudiée de façon précoce par la philosophe Flora Montcorbier (Le Communisme de marché. De l’utopie marxiste à l’utopie mondialiste, L’Âge d’Homme, 2000). Ce phénomène n’avait pas échappé non plus à La Nouvelle Revue d’Histoirequi l’avait analysé dans son n° 44 (septembre-octobre 2009) à l’occasion d’un article intituléViolence et “doux commerce” .

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