Lu dans « Famille chrétienne » :
Voici la méditation du vendredi 20 mars de la Neuvaine pour la France, écrite par l’Abbé Le Pivain.
À l’entrée de la quinzaine de la Passion, nous nous préparons à méditer cette phrase de Jésus devant Pilate interloqué, qui dit tout sur le sens de sa mission, laquelle culmine dans l’offrande de sa vie : « Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la Vérité. » (Jn 18, 37) L’on pourrait multiplier les citations où Jésus soit se présente lui-même comme la Vérité, soit exhorte ses auditeurs à la vérité.
Dans une vie humaine, dans celle d’une communauté humaine, la perte du sens de la Vérité est un handicap terrible, qui précède aussi bien la décadence morale que l’aveuglement spirituel. Ce qui signifie qu’il ne suffit pas de « moraliser » – à force de slogans – ou de « spiritualiser » – à coup de sentiments – pour endiguer ce mouvement. « Plein de grâce et de vérité » (Jn 1, 14) : c’est la mise en valeur du primat de la grâce comme de la vérité qui seule peut (re)donner accès au sens de Dieu, comme à celui de l’homme, révélé sur le visage du Verbe incarné. De là peut jaillir une culture chrétienne authentique, avec cette paisible joie missionnaire qui en est la marque caractéristique.
Voici le dilemme auquel est aujourd’hui confronté l’Occident en général, notre pays, la France, en particulier, qui de ce point de vue garde une vocation particulière. Saint Jean-Paul II remarquait, dans sa Lettre aux familles, en 1994 : « Qui pourrait nier que notre époque est une époque de grave crise qui se manifeste en premier lieu sous la forme d’une profonde ‘crise de la vérité’ ? »
Dans un petit livre lumineux, intitulé Scandaleuse vérité, le Cardinal Daniélou analysait les causes de cette désaffection pour la vérité – nous sommes en 1961, mais un demi-siècle plus tard, ce diagnostic n’a rien perdu de sa valeur, bien au contraire. Aujourd’hui, ce n’est pas seulement la vérité, mais l’existence même du concept de vérité qui dérange ; parler de vérité, ce serait aller contre la tolérance ou la liberté de conscience.