Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Islam - Page 43

  • «En Russie, le religieux est indissociable de l'identité nationale»

    IMPRIMER

     Cyrille Poutine XVM05ffd2ce-2b94-11e8-9709-eaffb3fc87d1.jpg

    Florent Parmentier dresse pour FigaroVox le portrait de la Russie religieuse. Celle-ci, très marquée par un regain spirituel consécutif à la chute du système soviétique, intègre la religion à sa politique d'infuence régionale. Le nationalisme permet également la cohabitation entre chrétiens et musulmans :

    « FIGAROVOX.- Vu depuis la France, le fait religieux en Russie semble indissociable de la vie politique. Est-ce la réalité, ou bien existe-t-il une relative autonomie du religieux par rapport à l'État

    Florent PARMENTIER.- Le fait religieux est en Russie indissociable de l'identité nationale de la population majoritaire, christianisée depuis le Xe siècle. Moscou s'est revendiquée au cours de son histoire comme une «troisième Rome», après Rome et Byzance, ce qui permettait de justifier le pouvoir absolu - ce qui n'a pas empêché l'empire de s'agrandir dans des territoires dominés par d'autres religions. Après 1917, l'athéisme radical, scientifique, devient la norme, la religion orthodoxe étant plus particulièrement ciblée, mais cela n'a pas empêché Staline de mettre une pause à cette politique anticléricale après le début de l'opération Barbarossa de l'Allemagne nazie en 1941.

    Aujourd'hui, sans être une religion d'État, la religion orthodoxe bénéficie d'une série de privilèges par rapport aux autres cultes, du fait de ses relations avec le pouvoir politique. Mais, malgré tout, tant le pouvoir que l'Église sont conscients qu'une trop grande proximité peut nuire à chacune des parties.

    Les Russes sont quatre fois plus nombreux aujourd'hui à se dire croyants que sous l'URSS. Comment expliquez-vous ce retour massif à la religion?

    Deux phénomènes permettent d'expliquer ce chiffre extrêmement évocateur: d'une part la nécessité de retrouver des repères dans une société qui avait perdu les siens ; la «fin de l'Homme rouge», pour reprendre l'expression de Svetlana Alexievitch, appelait à un nouvel horizon de sens. La religion a pu jouer ce rôle, fournissant une explication aux difficultés en cours.

    La « fin de l'Homme rouge » appelait à un nouvel horizon de sens.

    D'autre part, il existait une pratique religieuse souterraine du temps de l'URSS, qui a pu sortir au grand jour avec la chute de l'Union soviétique. La nature de l'Orthodoxie, dont le pouvoir ecclésiastique est lié au pouvoir politique, peut expliquer cet état de fait. Dans ce contexte, l'appel des dirigeants politiques, notamment les présidents Eltsine et Poutine, à renouer avec une vie spirituelle prend tout son sens.

    Lire la suite

  • On évoque trop peu la conversion des musulmans au christianisme

    IMPRIMER

    De Youna Rivallain sur le site "Le Monde des Religions" :

    PERSÉCUTIONS RELIGIEUSES

    « La conversion des musulmans au christianisme est trop peu évoquée »

    Algérien, le père Paul-Élie Cheknoun est un ancien musulman devenu catholique, et il accompagne de nombreux musulmans désirant se convertir. Il est l’un des invités de la 10e Nuit des Témoins, qui accueille jusqu’au 19 mars des fidèles de pays où les chrétiens sont victimes de persécutions.

    Jusqu’au 19 mars 2018 a lieu la Nuit des Témoins organisée par l'Aide à l'Église en détresse. Des veillées de prière sont dédiées à ceux qui souffrent de persécution à cause de leur foi. Pour cette dixième édition – organisée cette année à Montpellier, Paris, La Roche-sur-Yon, Rouen, au Luxembourg et à Rome –, l'organisation œuvrant dans 150 pays a invité trois témoins venus du Mexique, d’Égypte et d’Algérie.

    Originaire de ce dernier pays, le père Paul-Élie Cheknoun est un ancien musulman devenu évangélique, puis catholique et ordonné prêtre en 2016. Aujourd'hui prêtre du diocèse de Fréjus-Toulon, la vie du père Cheknoun s'organise entre la France, où il évangélise parmi les musulmans, et l'Algérie, où il accompagne les convertis de l'islam vers le christianisme. «Un phénomène trop peu évoqué», d'après lui.

    Comment se déroule une conversion de l'islam vers le christianisme en Algérie ? Quels sont les obstacles ?

    Ils sont nombreux. Officiellement, l'islam est la religion d'État, mais la République d'Algérie est laïque, autorisant la liberté de culte, et donc l'apostasie. Cependant, nombre de décideurs politiques sont musulmans et tendent à privilégier la loi islamique.

    Le phénomène de conversion de l'islam vers le christianisme est massif : les Églises évangéliques, qui enregistrent le plus de conversions, parlent aujourd'hui de dizaines de milliers de convertis, bien que les chiffres restent très peu précis.

    De fait, le gouvernement a réagi à ce phénomène. Par exemple, une loi de 2006 a eu pour objectif d'endiguer les conversions : tous les missionnaires du pays ont été expulsés. Ainsi, si l'État garantit officiellement la liberté de confession, la réalité du terrain est bien différente : conformément à la sharia, les apostats sont rejetés par leur famille, menacés de mort ou de mise en quarantaine, et doivent fuir.

    Ma mission est tant que prêtre est d'accompagner ces convertis rejetés par les leurs et dispersés dans tout le pays, à travers l'administration des sacrements, les enseignements, la célébration de la messe en kabyle ou en arabe… Une fois par an, l'Église d'Algérie organise également des rassemblements, afin de les regrouper et de les accompagner dans leur conversion. Cependant, nous conseillons à tous les convertis d'être discrets et de ne pas exposer leur religion de manière visible. Certains, en Algérie, ne supportent même pas la vue d'une croix.

    Vous évangélisez également les musulmans en France. Comment êtes-vous accueilli?

    La proportion de musulmans intégristes en France est plus importante que dans les pays dits musulmans, pour la simple et bonne raison que pour les fidèles issus de l'immigration, l'islam est devenu une identité. La plupart des djihadistes ayant rejoint l'État islamique sont d'ailleurs originaires d'Europe ! Beaucoup se convertissent également en Europe, et il est bien connu que les convertis sont souvent plus radicaux que les musulmans dits « de souche ».

    Je fais partie de la Fraternité missionnaire Jean-Paul II à Fréjus, et nous faisons souvent de l'évangélisation directe, c'est-à-dire dans la rue, sur la plage, etc. Nous rencontrons beaucoup de musulmans. Je suis souvent trahi par mon « faciès » : nombre de ceux que je rencontre perçoivent que je suis d'origine maghrébine. Lorsque je dis que je suis algérien, ils comprennent alors que je suis apostat, et me rappellent que l'apostasie est punie de mort. Je dirais donc que l'évangélisation des musulmans marche mieux avec mes frères prêtres de la communauté qu'avec moi. Je participe en revanche à de nombreuses conférences ou enseignements, où je témoigne de mon expérience en tant que converti.

    Vous avez été évangélique avant de vous convertir au catholicisme. Les évangéliques ont-ils plus de facilité à diffuser le message de l'Évangile en Algérie ?

    On évoque souvent les difficultés de l'Église catholique en termes d'évangélisation, face à des évangéliques plus zélés. L'Église catholique est une institution officielle, hiérarchisée et surtout très visible, ce à quoi échappent les évangéliques qui bénéficient de structures indépendantes et parsemées qui les rendent plus discrets. Tandis que pour devenir prêtre, un catholique doit faire dix ans d'études, les évangéliques ont bien plus de facilité à former rapidement et discrètement la population locale. Ce type de formation s'est avéré très utile lorsque que la loi contre le «prosélytisme» en Algérie a été votée en 2006 : tous les missionnaires ayant été chassés du pays, les évangéliques ont repris la direction de leurs lieux de culte, tout en restant discrets.

    Ainsi, lorsque les islamistes décident de tuer des chrétiens, ils tuent des catholiques car ils représentent les chrétiens « visibles » : nous avons des églises, des diocèses… Cependant, la situation des évangéliques a aussi empiré dernièrement : clandestins dans les années 90, leurs lieux de culte étaient autorisés depuis cinq ou six ans. Hélas, depuis un mois, l'État algérien a entrepris de fermer les temples un par un.

    Avez-vous pu témoigner du phénomène des conversions en France ?

    Tous les ans, nous organisons des rassemblements de convertis en France, et nous pouvons rendre compte de centaines de musulmans dans ce cas. C'est un phénomène de plus en plus répandu : beaucoup de musulmans rejoignent des Églises évangéliques, ainsi que l'Église catholique – même s'ils sont moins nombreux. Cependant, on ne parle pas de ce phénomène : je pense que c'est parce que ce n'est pas politiquement correct d'aborder cette question.

    À Toulon, la proportion de personnes issues de l'islam est en augmentation constante parmi les catéchumènes adultes, et ce chaque année – de l'ordre de 10 à 15 %. Mais, encore une fois, ce phénomène n'est jamais abordé. C'est pour ça qu'il était important pour moi de participer à la Nuit des Témoins : je veux témoigner de ma conversion.

    Quel regard les chrétiens d'Algérie portent-ils sur la béatification, annoncée récemment, des 19 religieux et religieuses assassinés dans le pays entre 1994 et 1996, dont les 7 moines de Tibhirine ?

    Pour nous, c'est une grande fête ! Nous sommes en train de chercher un lieu pour la célébrer. Les béatifications devraient se dérouler à Oran, à l'automne, en présence du pape. Nous sommes actuellement en négociation avec le gouvernement algérien qui, si la cérémonie a lieu en Algérie, souhaiterait insérer ces béatifications dans le cadre de commémorations en mémoire des 200 000 victimes de la guerre civile algérienne, chrétiennes et musulmanes – 99 imams avaient notamment été assassinés pour avoir refusé de justifier la violence. En cas de refus du gouvernement, cet événement devrait avoir lieu en France.

    Comment voyez-vous l'avenir de l'Église catholique en Algérie ? Pensez-vous que le traitement des apostats s'améliorera ?

    Il est pour moi essentiel que chacun puisse vivre sa foi aussi librement que possible et découvre l'amour de Dieu. Ma mission est de soutenir les chrétiens, convertis ou non.

  • Accompagner les néophytes issus de l’islam

    IMPRIMER

    De Samuel Pruvot sur le site de l'hebdomadaire "Famille Chrétienne" :

    Mgr Philippe Barbarin : « Il faut accompagner les néophytes issus de l’islam »

    Le cardinal Barbarin est intervenu le 17 mars à Lyon lors du forum « Jésus le Messie ». Devant diverses associations œuvrant à l’accueil et l’évangélisation des musulmans en France, il a insisté sur la nécessité d’une pastorale spécifique à leur égard.

    Est-il nécessaire d’inventer quelque chose de spécifique pour les chrétiens qui viennent de l’islam ?

    Après le catéchuménat et l’immense joie du baptême, on imagine que ces nouveaux chrétiens trouvent sans difficulté leur place dans l’Eglise. C’est assez naïf. L’expérience prouve qu’il faut leur porter une attention particulière. Ils sont les premiers à exprimer leur reconnaissance, parce qu’on s’est bien occupé d’eux pendant les deux années de préparation. « Mais maintenant, disent-ils, nous nous sentons abandonnés au milieu du troupeau ! » Ils ont reçu une présentation solide de la Bible une bonne explication du Credo et des quatre piliers de la foi, mais il y a encore beaucoup à faire pour accompagner leurs premiers pas dans l’Eglise. Bien des diocèses en ressentent la nécessité.

    Evangéliser les musulmans qui sont en France, cela n’est-il pas contraire au dialogue ?

    Evangéliser, c’est l’ultime consigne que Jésus nous laisse : « Allez, de toutes les nations faites des disciples. » Il me paraît évident que nous devons lui obéir, dans l’amour, l’écoute et le respect de l’autre. On se souvient du magnifique cri de saint Paul : « Malheur à moi si je n’annonçais pas l’Evangile ! » Par ailleurs, les musulmans comprennent très bien notre souci d’accompagner avec attention les néophytes originaires de l’islam. Un jour, je visitais une mosquée avec  Azzedine Gaci (NDLR : ancien président du conseil régional du culte musulman) et il m’a confié que dans la plupart des mosquées, on mettait en place des groupes d’accompagnement pour les musulmans nouvellement arrivés du christianisme. Au fond, c’est le même souci : est-ce que les nouveaux venus sont bien accueillis, accompagnés ? Il faut du temps à un musulman devenu chrétien pour comprendre ce que veut dire « Parole de Dieu ». Nous ne sommes pas une « religion du Livre », mais du « Verbe fait chair ». Il y a un continuel va et vient entre le corps de Jésus, l’Eucharistie et la Parole de Dieu. On doit aussi éclairer la notion de prophète, expliquer l’anthropologie chrétienne (corps, âme et esprit). Saint Paul dit que nos corps sont des « temples de l’Esprit Saint » et il ajoute : « Rendez gloire à Dieu dans votre corps ». Cela peut nous amener à proposer un éclairage sur la sexualité, le sport ou la danse…. Le chrétien venu de l’Islam a aussi besoin d’explications pour comprendre notre engagement dans la vie sociale et politique. L’essentiel, bien sûr, c’est  d’abord le Mystère de Dieu, sa paternité, la Trinité… un approfondissement qui va l’aider à changer en profondeur sa manière de prier.

    Qu’est-ce que ces chrétiens issus de l’islam peuvent apporter à l’Eglise ?

    Les musulmans venus au christianisme vont nous apporter des cadeaux inattendus. Il faudra du temps pour voir émerger cette nouvelle manière de vivre  la foi chrétienne. Ils vont offrir bien des points de renouveau culturel et spirituel à la grande famille de l’Eglise. Quand j’étais à Madagascar, j’ai reçu des séminaristes que j’avais mission de former sur des paroles vraiment nouvelles sur le Christ. Elles venaient du fond de leur culture, évangélisée depuis à peine plus d’un siècle. C’est la fécondité, le travail intérieur de la Parole de Dieu, toujours vivante, tranchante, comme dit l’épitre aux Hébreux ! Aujourd’hui, beaucoup de maghrébins, de kabyles ou d’iraniens sont devenus chrétiens en France, et ils nous apportent des regards inattendus sur Jésus et sur la Révélation chrétienne. C’est ainsi que l’Evangile est et sera toujours en train de renouveler l’Eglise.

  • De Nasser à al-Sissi : le destin des dhimmis en Egypte

    IMPRIMER

    De Dominique Decherf sur le site de France Catholique :

    Égypte : de Nasser à al-Sissi

    Le destin des dhimmis

    L’histoire d’une vie vaut mieux que tous les discours. À ceux qui s’étaient gaussés de l’invention d’une mythique «  Eurabia  » (Eurabia. L’axe franco-arabe, Jean-Cyrille Godefroy, 2006, et Eurabia et le spectre du califat, Les Provinciales, 2010) dénonçant la compromission des États européens avec les régimes islamiques au Maghreb et au Machrek, manquait tout un arrière-plan historique qui aurait permis de dépasser la polémique et l’invective et de débattre en toute connaissance de cause. Il faut rendre hommage à Olivier Véron éditeur des Provinciales d’avoir demandé et de publier une autobiographie de l’auteur de ces prétendues élucubrations conspirationnistes, l’Anglo-Italo-Égytienne juive Bat Ye’or (Fille du Nil), pseudonyme de Gisèle Orebi.

    À l’entendre, au long de ces années, défendre le statut des minorités religieuses ou ethniques, on en oubliait combien le combat de l’intéressée – et de son mari David Littman (1933-2012) auquel elle consacre de magnifiques pages d’un grand amour – ne s’était jamais tant adressé à l’islam ou aux potentats dans les pays musulmans dont elle fut la victime dans l’Égypte nationaliste nassérienne, qu’aux minorités elles-mêmes qu’elles soient juives ou chrétiennes. On sait que la cause des juifs dits orientaux ou sépharades n’a été reconnue en Israël même qu’après de nombreuses années. Le Likoud qui les représentait n’obtint la majorité qu’en 1978. Longtemps ils ne seront considérés que comme des citoyens de seconde zone par leurs coreligionnaires, au motif qu’ils avaient moins souffert des sultans et des émirs que les ashkénazes des cosaques et des nazis. Le reproche majoritaire adressé à l’Europe y concernait la destruction des communautés en Europe, la Shoah, et non celui d’une complicité avec des régimes arabes qui ne sera avancée plus tard que sous forme d’appendice au drame central.

    Les chrétiens furent les plus réticents à entrer dans la problématique de Bat Ye’or. D’abord les chrétiens orientaux. Bat Ye’or consacre plusieurs pages à la guerre du Liban et à sa proximité avec Bachar Gemayel (assassiné en 1982). Au cœur du drame, la question des réfugiés palestiniens. On a presque oublié aujourd’hui la popularité de la cause palestinienne parmi les chrétiens tant orientaux qu’occidentaux. Une proportion certes minoritaire mais hyperactive des Palestiniens autour de Yasser Arafat et dans des formations encore plus radicales (FPLP, FDPLP) étaient des chrétiens. D’Orient le préjugé victimaire pro-palestinien avait gagné les milieux militants chrétiens d’Occident. Israël perdrait la guerre de la communication. La question palestinienne préempterait pour longtemps – c’est loin d’être fini – le dialogue entre juifs et chrétiens.

    Finalement dans tout ceci il n’est pas question d’islam mais d’Israël. C’est la guerre de 1948 et Nasser qui ont rendu la vie impossible aux juifs égyptiens mais aussi aux Grecs, aux Italiens, aux Levantins qui y avaient prospéré au temps du protectorat britannique. Pas les Frères musulmans que Nasser ferait pendre. C’est la guerre de 1967 qui a imposé la question des Palestiniens, pas une querelle religieuse. On s’entendra pour rapporter tout cela à une forme de post-colonialisme. La reconnaissance d’un État palestinien et le respect des droits de l’homme (et de la femme) de­vaient suffire à rétablir l’harmonie entre Arabes et Israéliens, musulmans, juifs et chrétiens. C’est là où Bat Ye’or répond : non. En terre musulmane, en droit musulman (charia), il ne peut y avoir égalité entre musulmans et non-musulmans. Peu à peu, certains régimes se sont orientés vers une forme de laïcité qui permet d’envisager d’aller vers cette égalité devant la loi. Le djihadisme est revenu en force pour réaffirmer les fondamentaux, redonnant tout son crédit à la thèse initiale de Bat Ye’or sur le dhimmi (le protégé ou l’opprimé selon les traductions), travail novateur datant de 1980 que les Provinciales rééditent en même temps que son autobiographie, avec la préface de Jacques Ellul, historien, sociologue et théologien protestant, mort en 1994 (voir Islam et judéo-christianisme, PUF, 2004, préface d’Alain Besançon).

    Les faits ayant donné raison à Bat Ye’or, il reste maintenant à s’attaquer tous ensemble, juifs, chrétiens, musulmans, à la racine du mal : la charia. La boucle est bouclée : partie du Caire sous Nasser, elle attend de son lointain successeur Al-Sissi (qui devrait être réélu lors des élections de la fin mars en Égypte) et des oulémas d’Al-Azhar la garantie d’un réel changement religieux.

    — -

    Bat Ye’or, Autobiographie politique. De la découverte du dhimmi à Eurabia, Les Provinciales, 352 pages, 24 e – réédition de Le dhimmi. Profil de l’opprimé en Orient et en Afrique du Nord depuis la conquête arabe, Les Provinciales, 160 pages, 15 euros.

  • La victoire posthume des martyrs coptes en Égypte

    IMPRIMER

    Trois ans jour pour jour après la mise à mort de 21 coptes égyptiens, le 15 février 2018, une église dédiée à leur mémoire a été inaugurée en Égypte. De Paul de Dinechin sur le site « Aleteia » :

    martyrs coptes.jpg

    Les images avaient fait le tour de monde : le 15 février 2015, 21 otages coptes, en combinaison orange sur une plage libyenne, étaient assassinés par les djihadistes du groupe État islamique, après avoir été enlevés quelques semaines auparavant.

    Mais en voulant théâtraliser leur crime, les islamistes n’ont pas anticipé qu’ils allaient contribuer à semer un tout autre sentiment chez les chrétiens : l’admiration. Et à développer une vertu : l’Espérance. Cette graine du martyre, trois ans plus tard, a produit un fruit durable : une grande église copte, en hommage à ces martyrs « de la foi et de la Patrie », a été érigée dans le village d’al Our, non loin de la ville de Samalut dans la province de Minya. Treize des vingt-et-une victimes étaient originaires de cette région, à 200 kilomètres au sud du Caire.

    Lire aussi : D’où vient le courage des coptes en Égypte ?

    Jeudi 15 février, à la date anniversaire du martyre des vingt-et-un coptes, après des mois de construction, la nouvelle église dite « de la foi » a été inaugurée en présence de la famille des victimes, mais aussi de certains officiels du pays, ainsi que des autorités locales et religieuses. La date choisie correspond également à la fête de la Présentation de Jésus au temple dans le calendrier copte.

    Victimes glorieuses

    Ainsi, pour tous les Égyptiens, cette mort innocente et acceptée des martyrs les a de fait élevés au rang de héros. Religieux en premier lieu, car selon Mgr Kyrillos William Samaan, évêque du plus grand diocèse copte catholique du pays, le martyre représente « le plus haut degré » de la sainteté. Ces 21 chrétiens ont accepté de mourir plutôt que de renier le Christ. En 2015, par décision de Tawadros II, Patriarche copte orthodoxe, leur nom a ainsi été inscrit au livre des martyrs de l’Église copte.

    Héros nationaux également, puisque l’État égyptien a décidé de montrer sa sollicitude envers les coptes, en finançant les travaux de l’église. Selon Mgr Samaan, cette inauguration — la cinquième dans son diocèse — se révèle dès lors hautement symbolique. Elle constitue la consécration d’une promesse « bienveillante » de la part du président égyptien qui avait « ordonné » de la construction de cette église.

    Lire aussi : Attentat en Égypte : Pourquoi les Coptes sont-ils visés ?

    Ainsi, au-delà du souvenir que ce lieu de culte ravive dans la mémoire collective, elle devient un symbole pour « l’espérance » et encourage les chrétiens à persévérer dans leur foi. « Même si cela nous demande de verser notre sang », rajoute Mgr Samaan.

    Face à leurs bourreaux, les victimes avaient prononcé le nom de « Jésus-Christ ». Avec détermination, ils avaient accepté cette mort avec une foi profonde. Au moment où ces paroles étaient prononcées, elles scellaient paradoxalement leur victoire sur les terroristes islamistes. 

    Ref. La victoire posthume des martyrs coptes en Egypte

    JPSC

  • Nous serions à l’heure des premières conversions massives de musulmans au christianisme

    IMPRIMER
    La conversion des musulmans au christianisme serait le fait des… islamistes

    Pour le Père Mitch Pacwa S.J., c’est une certitude, « Nous sommes à l’heure des premières conversions massives de musulmans » au christianisme. Le National Catholic Register qui a mené l’interview, n’est pas allé chercher un quidam pour cette assertion, mais un prêtre jésuite, multilingue, expert sur le Moyen-Orient (co-auteur du livre Inside Islam : A Guide for Catholics). Et c’est pour lui la violence de l’islam abouti, sous sa forme la plus poussée, celui des islamistes, qui serait à l’origine de ces défections individuelles qui se multiplient.

    Et qui arrivent souvent dans des pays où toute abjuration équivaut à une mise à mort.

    Conversions : « Dieu fait un travail puissant parmi eux » – et les islamistes

    Le Père Pacwa raconte qu’il a commencé à entendre parler de ces conversions au christianisme vers 2005 sur Al-Jazeera, la chaîne de télévision la plus regardée du monde arabe qui cumule plusieurs dizaines de millions de téléspectateurs – une chaîne pourtant souvent jugée trop favorable aux islamistes, comme quoi tout arrive.

    « Ils faisaient des reportages sur les conversions massives de Musulmans – jusqu’à 6-8 millions – en Afrique subsaharienne, et, chaque année, ils répétaient cet avertissement (…) Je l’ai confirmé avec des Africains que je connais qui m’ont fait part, à plusieurs reprises, de conversions dans des endroits comme le Nigeria, l’Ouganda, le Mali…

    « C’est la raison pour laquelle Boko Haram est devenu si actif. Ils essayent de les terroriser. Mais l’acte même de terroriser les gens a fini par les rendre dégoûtés par l’islam ». Comme l’a dit un dirigeant évangélique soudanais, « Les gens ont vu le véritable islam ». Le Père Pacwa soupçonne la religion musulmane d’être au bord d’un effondrement, au moment même où on ne l’a jamais autant vu sur le devant de la scène.

    Tortures et peines de mort

    Et pourtant, les menaces pour les convertis sont bien réelles. Les Américains chrétiens capturés dans les pays musulmans sont généralement expulsés mais pour les autochtones, c’est différent…

    « Les vendredis après les prières de midi sont le jour où ils coupent les mains et les têtes des voleurs, les adultères – les femmes seulement – et les gens qui commettent le blasphème, qui inclurait la conversion au christianisme (…)

    « J’ai lu l’histoire d’un garçon esclave qui s’est échappé pour prier le Vendredi Saint et qui a été crucifié pour cela (…) J’ai aussi entendu parler de deux servantes philippines qu’on a attrapées en possession du Nouveau Testament et qu’on a décapitées ».

    Près de 10 millions de musulmans convertis au christianisme aujourd’hui

    Malgré cette réalité, les pays fondamentalistes abritent des conversions. Un article publié dans le Journal interdisciplinaire de recherche sur la religion a affirmé récemment que les musulmans ont quitté la foi depuis les années 1960 à des taux croissants. Les données « montrent clairement une augmentation de moins de 200.000 [chrétiens qui se sont convertis de l’islam] dans le monde en 1960, à près de 10 millions aujourd’hui. »

    Mieux, comme l’a montré un rapport, en 2013, du « Center for the Study of Global Christianity », 11 des 20 pays qui ont le pourcentage AAGR (note moyenne annuelle de croissance du christianisme) le plus élevé, sont musulmans... Les autres sont hindouistes ou bouddhistes.

    Le site chretiens.info le rappelle, l’Afghanistan est passé de 17 convertis chrétiens en 2001 à plus de 250.000. L’Ouzbékistan, de zéro en 1990 à 350.000, selon Open Doors. L’Iran de moins de 500 chrétiens en 1979, à 200.000. L’Indonésie verrait deux millions de conversions par an. Des chiffres auxquels il faut ajouter tous ceux qui se convertissent mais gardent extérieurement les habitudes des musulmans, par peur des représailles : selon le site web Muslim Statistics, près de 350 millions de musulmans seraient des chrétiens « dans le privé ».

    « Un grand nombre de musulmans reçoivent des visions de Jésus et de la Bienheureuse Vierge Marie qui les ont conduits à se convertir » et ils en témoignent, explique le Père Pacwa. Et de citer également les prêches de ce prêtre copte orthodoxe exilé d’Egypte, le Père Zakaria Botros, probablement l’islamologue le plus célèbre du Moyen-Orient dont le programme hebdomadaire sur la chaîne Al Hayatt est suivi par quelque 60 millions de musulmans… et pour la tête duquel, Al Qaeda a promis 60 millions de dollars !

    Les chrétiens doivent faire comme les lapins, dixit la Pologne

    Pour David Garrison aussi, chrétien baptiste américain qui a parcouru le monde pendant trois ans à la recherche des convertis de l’islam, il y a un souffle dans cette maison, un souffle qui a pris de l’envergure aux XXe et XXIe siècles et qui ne fait qu’augmenter – il faut s’en réjouir.
    Mais gardons à l’esprit que la population musulmane augmente de concert, en Afrique sub-saharienne comme en Europe.

    Car ce sont eux qui gardent jusque-là, la démographie la plus forte – une étude récente du Pew Research Center le démontrait encore (s’il y a besoin de le faire). Le taux de fécondité est de 3,1 enfants par femme, dans le monde musulman, contre 2,3 pour tous les autres groupes combinés. Et les musulmans sont aussi les plus jeunes de tous les principaux groupes religieux. D’ici à 2050, on devrait compter 10 % de musulmans dans l’ensemble de l’Europe.

    Il faudra que les chrétiens se remettent à avoir des enfants…

  • France : pourquoi un « concordat » avec l'islam est impossible

    IMPRIMER

    Pour réformer l’islam de France, Emmanuel Macron veut s’inspirer du régime napoléonien qui prévaut en Alsace-Moselle. Baroque. Un article de Henrik Lindel et Pascale Tournier sur le site de « La Vie » :

    concordat Pie VII.jpg

    « Chirac, Sarkozy, Hollande… Tous les présidents ont voulu réorganiser l’islam de France. Et tous ont échoué. Créé en 2003 par Nicolas Sarkozy, le Conseil français du culte musulman (CFCM), dont les membres du bureau doivent être réélus en 2019, est un échec cuisant. Miné par les divisions internes, affaibli par son absence de représentativité, placé sous l'influence politique et économique des pays étrangers, le CFCM fait figure de repoussoir… Emmanuel Macron peut-il déjouer la malédiction ? 

    Dans le Journal du Dimanche du 11 février, le chef de l'État a une nouvelle fois assuré qu'il réfléchissait à ce dossier brûlant. Voulant « poser les jalons de toute l'organisation de l'islam de France » durant ce premier semestre 2018, il considère qu'il faut « s'inspirer fortement de notre histoire, de l'histoire des catholiques et de celle des protestants ». Le but étant d'améliorer la relation entre l’État et l’islam pour mieux combattre l’islam radical. Encore faut-il inventer une structure représentative qui tienne la route.

    Un « nouveau concordat »...

    Pour sortir de l’impasse, Emmanuel Macron envisage un « nouveau concordat ». Une idée qui a largement de quoi surprendre. D'abord parce qu'au sens strict, le terme renvoie à un régime spécifique, uniquement en vigueur en Alsace et en Moselle. Il y reconnaît et y organise actuellement les cultes catholique, luthérien, réforme et israélite. Les évêques de Metz et Strasbourg sont nommés par décret du président de la République après accord du Saint-Siège, les grands rabbins et les pasteurs sont nommés par le Premier ministre et ils ont un statut de fonctionnaires. Ce régime permet de salarier les ministres des cultes. L’État a ainsi une possibilité d'exiger une sorte de contrepartie des cultes ainsi reconnus. L'islam, lui, a seulement un statut d'association de droit local alsacien-mosellan, qui lui permet quand même de bénéficier de fonds publics, par exemple pour construire des mosquées, ce qui est impossible dans le reste de la France.

    On pourrait sans doute étendre ce statut privilégié à l'islam en Alsace et Moselle (si on trouve une organisation musulmane représentative), mais on voit mal comment imposer un concordat à nouveau à l'échelle de la France. Et le faire seulement pour l'islam. Il semble en effet difficile d'imaginer que les imams de France soient salariés par une république qui, selon la loi de 1905… ne reconnaît aucun culte.

    Lire la suite

  • 17-18 février : forum Jésus le Messie à Lille

    IMPRIMER

    17-18 février : forum Jésus le Messie à Lille

    Affiche Lille 2018 Voici le programme et le lien pour s'inscrire.

  • Pour comprendre les chrétiens d’Orient

    IMPRIMER

    Les Chrétiens d’Orient n’ont pas pour vocation de se fondre dans la culture occidentale  sécularisée, hédoniste, matérialiste et individualiste. Envisager l’avenir des chrétiens d’Orient à l’aune de cette  contre-culture  revient à les priver de leur raison d’être et contribue à accélérer l’effacement du christianisme. D’Annie Laurent, dans le n° 100 du mensuel « La Nef » (février 2018) :

    Enfants-Alep©SOSCO-620x330.jpg" Aujourd’hui, les chrétiens du Proche-Orient sont confrontés à des défis si redoutables qu’on peut les qualifier d’existentiels car c’est la survie du christianisme lui-même dans les territoires marqués par l’histoire biblique qui est en jeu. Face à ces épreuves, nos frères orientaux manifestent à la face du monde un héroïsme impressionnant et admirable. Les témoignages abondent. Des familles entières et nombre de religieux ont préféré tout quitter, tout perdre, y compris parfois la vie, pour ne pas renier leur foi en Jésus-Christ. Les médias nous renvoient les images d’une ferveur inhabituelle. Le contraste est frappant avec l’atrophie spirituelle de l’Europe post-chrétienne.
    Cependant, dans un contexte aussi cruel, les Églises présentes au Levant ont aussi leurs fragilités, lesquelles sont largement héritées d’une longue histoire tourmentée. Celle-ci a souvent engendré la prédominance de la confessionnalité comme critère d’identité, ce qui, pour les chrétiens, peut nuire aux exigences du baptême. C’est d’ailleurs pour susciter une réflexion en profondeur chez les Orientaux en vue de remédier à ces faiblesses que le pape Benoît XVI a réuni à Rome, en octobre 2010, un Synode spécial sur ce programme significatif : « L’Église catholique au Moyen-Orient : communion et témoignage ».

    LES PREMIÈRES RUPTURES
    Deux facteurs principaux ont abouti à la situation actuelle, si compliquée et déconcertante pour l’esprit rationnel et cartésien de l’Occident. Il y eut d’abord, du IVe au XIe siècle, l’éclatement de l’Église indivise des origines, peu à peu ravagée par les hérésies, les malentendus théologiques, voire culturels, et même par des calculs politiques, puis des schismes. Le ralliement à Rome d’une partie des Orientaux séparés, effectif à partir du XVIIIe siècle, n’a pas entraîné le retour à l’unité de tous les baptisés. Entre-temps, à partir du VIIe siècle, l’irruption de l’islam, qui a profité de la faiblesse des peuples chrétiens, a accru les clivages. L’instauration de la dhimmitude (protection-sujétion) a poussé de nombreux chrétiens à se faire musulmans pour échapper à ce régime humiliant. Quant au millet (nation confessionnelle en turc) mis en place par l’Empire ottoman, tout en permettant aux communautés chrétiennes de survivre autour de leurs hiérarchies et de leur droit personnel propre, il a accru les rivalités et la méfiance des Églises entre elles, dans un rapport malsain à l’autorité musulmane. Tout cela a engendré les mentalités confessionnelles et la perte du souci missionnaire qui caractérisent le christianisme oriental.
    Mais, à notre époque, les Églises du Levant prennent conscience de l’urgence qu’il y a à remédier à ces défauts en se réappropriant leur âme orientale, dans la conviction qu’elles ne peuvent pas priver les peuples de la région (arabes, turc, iranien, israélien) des bienfaits de l’Évangile : créativité, promotion de la liberté religieuse, formation de la conscience, respect de la personne en tant qu’être créé à l’image de Dieu, culture de la gratuité, refus de la vengeance, de la violence et du sectarisme. C’est pourquoi elles refusent d’être classées dans la catégorie des « minorités », dévalorisante à leurs yeux, comme s’il s’agissait d’un état de nature alors que leur déclin numérique – une évidence que l’on ne peut certes pas nier –, résulte d’abord des vicissitudes de l’histoire, comme on l’a vu. Le Synode de 2010 leur a aussi demandé de bannir toute imitation servile des mœurs occidentales qui donnent un contre-témoignage aux musulmans, particulièrement mal venu au moment où ces derniers connaissent une crise religieuse d’une gravité sans précédent. Par ailleurs, même si les divisions entre Églises perdurent, des progrès encourageants sont accomplis pour bâtir une fraternité plus authentique, qui n’exclut pas la riche diversité des rites.

    LA VOCATION DES CHRÉTIENS D’ORIENT
    Ce regard réaliste doit cependant s’abstenir de tout jugement dépréciatif. Car, dans un contexte très difficile, les chrétiens d’Orient ont dû consentir de lourds sacrifices et leur histoire est jalonnée d’exemples de saints et de martyrs qui l’honorent et la fécondent.
    Puisque l’Europe redécouvre la présence chrétienne orientale, bien oubliée au cours des dernières décennies, et répète qu’elle veut l’aider et la protéger, elle doit prendre en considération sa vocation dans ce qu’elle a de plus essentiel car celle-ci s’enracine dans la grâce du baptême et non dans une culture sécularisée, hédoniste, matérialiste et individualiste. Envisager l’avenir des chrétiens d’Orient à l’aune de la culture occidentale revient à les priver de leur raison d’être et contribue à accélérer l’effacement du christianisme. C’est contre cet écueil, dangereux pour nous aussi qui sommes dé­sormais confrontés au défi de l’islam, que j’ai souhaité attirer l’attention de mes lecteurs.

    Annie Laurent"

    Ref. Comprendre les chrétiens d’Orient

    Spécialiste du Proche-Orient, des chrétiens d’Orient et de l’islam, Annie Laurent est à l’origine de l’association Clarifier et est l’auteur notamment de"L’Islam, pour tous ceux qui veulent en parler (mais ne le connaissent pas encore)" (Artège, 2017), "L’islam peut-il rendre l’homme heureux" (Artège, 2012), "Les chrétiens d’Orient vont-ils disparaître ?" (Salvator, 2017). Elle collabore régulièrement à La Nef.

    Questions à Mgr Gollnisch, directeur général de l’œuvre d’Orient :

    JPSC

  • La violence de l'islamisme doit-elle conduire à jeter l'opprobre sur toutes les religions ?

    IMPRIMER

    Michel De Jaeghere : Quand Rémi Brague pulvérise les dogmes relativistes

    FIGAROVOX/CHRONIQUE - Rémi Brague explore le sophisme qui tend à confondre toutes les religions dans une même réprobation en projetant sur elles la violence de l'islamisme.

    Michel De Jaeghere est directeur du Figaro Histoire et du Figaro Hors-Série. Dans le Figaro Histoire de février-mars 2018, il signe sa chronique «À livre ouvert» sur le dernier essai de Rémi Brague, Sur la religion. À commander en ligne sur la boutique du Figaro.

    Rémi Brague n'a pas de chance, et il doit lui arriver de ressentir comme une fatalité sa situation. Philosophe, servi par une érudition immense, une acuité dans l'analyse que colore un regard d'une humanité profonde, il s'efforce depuis quarante ans d'affiner de manière toujours plus juste et plus subtile nos connaissances sur l'interaction de la métaphysique et de la culture, la place des traditions religieuses dans l'essor des civilisations, l'actualité de la pensée antique et médiévale, les dangers que représentent les ruptures de la modernité. Venu trop tard dans un monde trop vieux, il doit confronter sa pensée avec les slogans, les idées toutes faites que répandent à foison des leaders d'opinion peu curieux de ces subtilités.

    La nocivité générale du «fait religieux», sa propension à susciter intolérance, guerre et persécutions, à maintenir dans l'obscurantisme des peuples qui ne demanderaient, sans lui, qu'à s'épanouir au soleil de la raison pure et au paradis de la consommation de masse, fait partie de ces évidences indéfiniment ressassées. C'est à elle qu'il s'attaque dans Sur la religion , son dernier essai, en montrant qu'elle relève de la paresse intellectuelle ou de l'ignorance, quand elle ne sert pas de paravent à notre lâcheté: «Pour fuir la peur que [l'islam] suscite, remarque-t-il, une tactique commode, mais magique, consiste à ne pas le nommer, et à parler, au pluriel, des religions. C'est de la même façon que, il y a quelques dizaines d'années, on préférait, y compris dans le milieu clérical, évoquer les dangers que représentaient “les idéologies” pour ne pas avoir à nommer le marxisme-léninisme.»

    Que d'autres religions que l'islam aient été parfois associées à la violence, Rémi Brague se garde certes de le nier. Que le meurtre et la guerre soient les inévitables conséquences de la croyance en un Dieu créateur auquel on rende un culte et qu'on s'efforce de prier dans l'espérance d'un salut qui dépasse notre condition mortelle, voilà qui demande des distinctions plus exigeantes. Explorant les relations de ceux que l'on désigne, non sans ambiguïtés, comme les trois grands monothéismes - le judaïsme, le christianisme et l'islam - avec la raison, la violence et la liberté, scrutant les textes saints et les fondements du droit, évaluant les pratiques (le crime d'un adepte n'engage pas nécessairement sa croyance, s'il l'a commis pour d'autres motifs, ou des motifs mêlés, ou en violation manifeste de la morale qu'induit la religion injustement incriminée), il montre au prix de quels amalgames on est parvenu à jeter le discrédit sur une aspiration qui est au fond de l'âme humaine et dont on a le témoignage depuis quelque trois cent mille ans.

    Dans la multiplicité des pistes de réflexion ouvertes par ce livre provocateur - au meilleur sens du terme -, l'une des plus fécondes se trouve sans doute dans la comparaison qu'il risque, après Benoît XVI, des relations entre foi et raison dans le christianisme et l'islam. Le premier, souligne-t-il, admet avec Pascal que si la raison permet de pressentir l'existence d'un Dieu créateur, elle est, seule, incapable d'accéder à des vérités qui la dépassent. Il lui faut le secours de la grâce: ce qu'on appelle la foi. Mais le chrétien peut et doit ensuite faire usage de sa raison pour ce qui relève de son ordre: la connaissance des choses et le choix des actions conformes à la justice, à l'accomplissement de sa nature, sous le regard de sa conscience. Pour le musulman, nous dit-il, c'est l'inverse. L'existence de Dieu a le caractère d'une évidence, que la raison devrait suffire à attester: cela rend inexcusable l'incrédulité. La raison est en revanche impuissante à découvrir par elle-même les comportements que ce Dieu transcendant, muet, inatteignable attend de sa créature. Elle devra dès lors s'en remettre aveuglément à la loi qu'Il a lui-même dictée à son prophète dans le Livre où a été recueillie une parole incréée, irréformable, indiscutable. La première conception fonde le droit naturel, clé de voûte de notre liberté face à l'arbitraire, dans la mesure où il déduit, de notre condition de fils de Dieu, les droits et les devoirs qui s'attachent à la créature. La seconde justifie l'application - toujours et partout - de règles de comportement conçues pour des Bédouins illettrés dans l'Arabie du VIIe siècle: la charia.

    La facilité qui conduit trop souvent, sous couvert de neutralité, intellectuels et responsables à traiter des différentes religions comme d'un phénomène interchangeable et, après en avoir utilisé les dérives pour disqualifier le christianisme, à se les représenter avec ses catégories pour plaquer sur l'islam des caractères qui lui sont profondément étrangers ne se révèle plus seulement, à la lecture de ce livre, comme une manifestation de pusillanimité: bien plutôt comme une utopie mortifère.

     

    Sur la religion , de Rémi Brague, Flammarion, 256 pages, 19 €.

  • Le pape interpellé au sujet de son attitude à l'égard de l'islam

    IMPRIMER

    Nous avions reproduit ici une lettre censée émaner de musulmans convertis mais, sur le site où elle figure, nous avons constaté que l'adresse de contact (salut.misericorde@gmail.com) est en fait celle du site "Islam et Vérité" de l'abbé Guy Pagès. Nous aurions sans doute dû nous montrer plus circonspects dès le départ et résister aux sollicitations d'amis qui nous ont incité à relayer cette initiative sur belgicatho. En effet, sans vouloir porter de jugement sur qui que ce soit, nous préférons garder nos distances à l'égard de prises de position dont le sens de la nuance et la modération semblent exclues.

  • L’Église catholique ne veut pas tirer les conclusions de 50 ans d’échec du dialogue avec l'islam

    IMPRIMER

    D'Yves Casgrain sur presence-info.ca :

    Entrevue avec le jésuite Henri Boulad

    Dialogue islamo-chrétien: «50 ans d'échec»

    Selon le père Henri Boulad, le pape François fait fausse route en encourageant l'immigration.
    Selon le père Henri Boulad, le pape François fait fausse route en encourageant l'immigration.   (Présence/Yves Casgrain)

    Son nom est synonyme de controverse. Le père jésuite Henri Boulad a la critique dure et n’a pas peur de froisser, qu’il s’agisse de l’Église catholique, de judaïsme ou de l’islam. À 86 ans, l’homme qui se dit désormais persona non grata au sein de sa propre communauté s’en prend désormais à la politique d’ouverture du pape François envers les réfugiés musulmans.

    Lors de son passage à Montréal il y a quelques jours afin de sensibiliser les catholiques au sort des chrétiens d’Orient, il a rappelé son opposition à cette «l’idéologie des portes ouvertes». Il en veut particulièrement au pape d’avoir adopté cette vision.

    «J’ai fait part au pape François de mon opposition quant à sa position sur l’immigration massive en Europe qu’il encourage de façon systématique. Il ne comprend pas. Il adopte une idéologie libérale sud-américaine pour qui l’islam c’est très bien. Ceux qui ont vécu sous l’islam savent de quoi il s’agit.»

    Selon le polémiste, l’avenir des chrétiens d’Orient passe en partie par un changement d’attitude de l’Occident et de l’Église catholique envers l’islam. Il est temps, croit-il, que l’Église se questionne sur son dialogue avec l’islam.

    «Je suis tout à fait pour [ce dialogue]. Cependant, lorsque le dialogue occulte les vrais problèmes, nous ne sommes plus dans la vérité. Un homme comme Benoît XVI a voulu mettre au cœur du dialogue la vérité et la raison. Il s’est fait virer, d’une certaine manière. Il a démissionné, car il a été soumis à toutes sortes de pression», a-t-il fait valoir en entrevue.

    Le jésuite cite la taqîya pour développer son point de vue. Il s’agit d’un concept coranique qui évoque la dissimulation de sa foi, principalement pour éviter une persécution. Mais depuis deux décennies, elle est souvent invoquée pour critiquer l’islam et est brandie dans des discours islamophobes qui laissent entendre que des fidèles musulmans mentent pour faire avancer la cause de l’islam. C’est à cette seconde lecture que fait référence le père Boulad.

    «L’Église catholique ne veut pas comprendre cela. Elle ne veut pas tirer les conclusions de 50 ans d’échec du dialogue.»

    «L’Église catholique ne veut pas comprendre cela. Elle ne veut pas tirer les conclusions de 50 ans d’échec du dialogue», a-t-il insisté. Mais l’homme originaire d’Alexandrie se défend bien d’être atteint du «virus de l’islamophobie». Pour lui, il s’agit d’une étiquette apposée par le courant islamo-gauchiste sur ceux qui osent critiquer l’islam. «Ce courant est issu d’une alliance entre l’islam et la gauche. Derrière l’islam et la gauche, il y a les mondialistes qui manipulent la planète entière pour des intérêts économiques. Les islamo-gauchistes instrumentalisent la gauche.»

    Henri Boulad reconnaît volontiers qu’il dérange et qu’il est aujourd’hui «classé, étiqueté, ostracisé» pour ses propos. Sa défense des chrétiens d’Orient continue cependant d’être considérée attentivement.

    «L’Orient, qui a été le berceau du christianisme, risque d’être vidé de sa présence chrétienne. Au début du siècle dernier, les chrétiens représentaient 20 % de la population, maintenant ils représentent 2 % de la population. C’est une chute vertigineuse.»

    Devant ces sombres statistiques, le père Boulad reste optimiste, car il croit que «malgré les apparences, l’islam est en train d’imploser».

    «Les musulmans radicaux ont le verbe haut et beaucoup d’argent. Toutefois, l’islam est en lutte contre lui-même. Les chiites sont en guerre contre les sunnites, les libéraux contre les traditionnels. Ce sont des plaques tectoniques qui s’entrechoquent. Dans ce contexte, nul ne peut prédire l’avenir des chrétiens dans cette région.»