Feu le professeur Marcel De Corte, un esprit peu conventionnel qui nous enseigna jadis les rudiments de la philosophie à l’Université de Liège, avait coutume de se moquer notamment des certitudes aussi péremptoires que successives des théories cosmogoniques et cosmologiques. Un livre récent s’inscrit dans la même veine iconoclaste. Sur son M blog, le journaliste Pierre Barthélémy s’en fait l’écho. Extraits de son entrevue avec l’astrophysicien Jean-Marc Bonnet-Bidaut :
« Jean-Marc Bonnet-Bidaud est astrophysicien au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), spécialiste de l'astronomie des hautes énergies et des étoiles en fin de vie. Avec l'historien et philosophe des sciences Thomas Lepeltier, il a co-dirigé la publication de l'ouvrage collectif Un autre cosmos ? qui vient de paraître dans la collection "Philosophie des sciences" de l'éditeur Vuibert (150 p., 19 €). L'idée centrale du livre est d'inciter les chercheurs à se pencher sur des modèles cosmologiques alternatifs à celui du Big Bang. Celui-ci suppose notamment l'existence d'une matière et d'une énergie dites noires, qui composent à elles seules plus de 95 % du contenu de l'Univers, et dont la nature reste inconnue à ce jour. La matière ordinaire dont sont faits les étoiles, les planètes et ce qui se trouve à leur surface ne compte en effet, selon ce modèle, que pour moins de 5 % du total
(…) Ce modèle standard de la cosmologie comprend 95 % d'inconnues. Est-ce que cela ne fait pas beaucoup ?
Cela me paraît vraiment beaucoup pour dire, comme l'affirment certains, que nous avons pratiquement tout résolu et que la cosmologie est devenue désormais une science de précision. Pour le physicien que je suis, ces inconnues fragilisent le modèle que l'on a de l'Univers. C’est la raison pour laquelle nous voulons, par ce livre collectif, essayer d’ouvrir d’autres horizons.