Dans le n° 256, février 2014 du mensuel « La Nef », Christophe Geffroy interroge Jean-Marie Le Méné, président de la Fondation Jérôme Lejeune, qui est aux avant-postes des combats pro vie. Un langage fort et de vérité. Extraits :
« -La Nef : Depuis l’élection présidentielle, il y a eu une accélération de la « déconstruction » des repères traditionnels par une inflation de lois « sociétales » : pourquoi un tel empressement ?
-Jean-Marie Le Méné : (…) Sur aucun des sujets que vous citez, la droite n’a de position solide, claire et unifiée, à la différence de la gauche pour laquelle il s’agit de valeurs symboliques de rassemblement. Toutes les transgressions dites sociétales ont été initiées puis votées sous la droite : contraception, divorce, avortement, PMA, tri des embryons, recherche détruisant l’embryon… Ces réformes ont bien sûr été votées avec la complicité de la gauche.(…). La gauche a fait la moisson idéologique de ce qui a été semé en termes de relativisme, de libéralisme, d’utilitarisme, depuis plus de quarante ans par une droite désinvolte sur le plan philosophique.
-La mobilisation contre le « mariage pour tous » a été un événement historique sans précédent et cependant la loi est quand même passée : sur les questions éthiques et anthropologiques, nous ne cessons de dégringoler sans guère de victoire à notre actif, est-il donc impossible de renverser ce mouvement fou ?
-Le bilan est contrasté d’une mobilisation populaire très forte qui nous réjouit mais d’une mobilisation faible des autorités politiques et morales qui reste préoccupante parce qu’elle ne permet pas de passer à la vitesse supérieure (…).
On peut aussi regretter qu’en dehors de quelques prises de positions individuelles admirables, la communication de l’Église de France sur ces questions ne soit pas à la hauteur ni des enjeux, ni des menaces actuelles, ni des exigences du calendrier politique. Le résultat est un sentiment paradoxal de grande détermination populaire et de divorce entre le peuple et ses élites(…).
Quel projet politique pour demain ? Pour le moment, il est urgent de travailler à la « conversion » morale et politique de ceux qui sont en charge formellement du bien commun, ce qui déclenchera le mouvement.
-La loi naturelle n’étant plus la norme commune, et la répression contre les lois iniques avançant à grands pas (cf. avec l’avortement), menaçant gravement les libertés de conscience et d’expression, le système démocratique actuel donnant tout pouvoir à la majorité électorale est-il encore adapté à nos sociétés… et y a-t-il une alternative ?
-Nous sommes les premiers dans l’histoire du monde à vivre l’abolition de l’homme. Je fais référence à un titre de C.S. Lewis en 1943. Il y a un rejet de l’homme, un rejet de l’attention portée à l’homme, un rejet de l’humanisme. On ne se demande plus comment promouvoir l’humain, mais pourquoi promouvoir l’humain ? À quoi bon ?