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Débats - Page 123

  • "Et le Verbe s'est fait idéologie". Au Synode : une Église falsifiée

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    De Luisella Scrosati sur la Nuova Bussola Quotidiana :

    "Et le Verbe s'est fait idéologie". Au Synode, une Église falsifiée

    7-11-2022

    Le document de travail pour le Synode sur la synodalité, présenté le 27 octobre, est une répétition de la formulation typique de l'idéologie pseudo-chrétienne avec laquelle les hiérarchies ecclésiastiques martèlent continuellement les fidèles : inclusion, Église sans portes, rejet de la division entre croyants et non-croyants.

    Le 27 octobre, le cardinal Mario Grech, secrétaire général du Secrétariat général du Synode, a été le premier à prendre la parole lors de la conférence de presse présentant le document de travail pour la phase continentale du Synode, un document résumant les résultats des consultations. En fait, "Élargissez l'espace de votre tente", le titre du document, est la synthèse des synthèses. Les différentes réponses des fidèles ont en effet été envoyées par les diocèses respectifs à la conférence épiscopale compétente, qui a préparé un premier recueil. Ces résumés ont ensuite été envoyés au Secrétariat du Synode, qui, par l'intermédiaire d'un groupe d'"experts", a préparé un autre résumé, c'est-à-dire le document qui a été rendu public. Selon le cardinal Jean-Claude Hollerich, 112 des 115 conférences épiscopales, 15 églises catholiques orientales, 17 dicastères romains, l'Union des supérieurs majeurs et quelques mouvements et associations ont répondu. Rien n'a été dit sur le nombre de catholiques en chair et en os qui ont envoyé des commentaires.

    Le cardinal Grech a exprimé sa surprise et celle du "groupe qui a collaboré à la lecture de la synthèse et à la rédaction du Document" en raison de la "convergence singulière sur de nombreux points de contributions provenant de contextes ecclésiaux et culturels très différents". Mais ce qui est plus suspect que surprenant, c'est l'uniformité expressive, dans un strict "synodalisme", des citations citées. Grech s'avance en reconnaissant que "le Document a été rédigé à partir des synthèses des Conférences épiscopales et non pas directement à partir des contributions des Églises particulières" ; mais en même temps il revendique la fidélité aux contributions originales, excluant catégoriquement la possibilité "que toutes les Conférences épiscopales aient volontairement étouffé la prophétie du Peuple de Dieu", un soupçon qui serait "tout aussi idéologique que de supposer le contraire". Une déclaration qui implique, et peut-être que le Cardinal ne s'en est pas rendu compte, que même l'hypothèse qu'il n'y a pas eu de falsification est idéologique.

    En effet, l'hypothèse la plus probable, si l'on considère les résumés rapportés, est qu'une falsification substantielle et profonde est en cours dans l'Église dans deux directions : de l'institution vers les fidèles (ou au moins une partie d'entre eux), et de ces derniers vers l'institution. Le cardinal Grech l'appelle la "dynamique de restitution" ; en substance, un passage continu : "en écoutant le Peuple de Dieu, chaque évêque pourra vérifier si et dans quelle mesure son Église se reconnaît dans le Document ; les éventuelles observations sur le Document pourront être envoyées par les Églises individuelles aux Conférences épiscopales, qui pourront à leur tour produire une synthèse plus organique, qui contribuera au discernement de l'Assemblée continentale".

    Pourquoi s'agit-il d'un processus de falsification ? Parce que de nombreux membres du peuple de Dieu, en particulier ceux qui sont "engagés", ont été atteints non pas par la prédication de l'Évangile, mais par la formulation typique de l'idéologie pseudo-chrétienne. On renvoie donc à leurs pasteurs les désirs qui ont été en fait préalablement induits par le martelage idéologique des pasteurs eux-mêmes (à quelques exceptions près) et de leurs diverses commissions diocésaines et paroissiales. Les pasteurs ont ensuite envoyé aux bureaux concernés des conférences épiscopales ces réponses, qui ont été convenablement synthétisées, c'est-à-dire mieux amalgamées à l'idéologie ecclésiale dominante. Ainsi reformulés, ils retourneront vers les pasteurs et le peuple, afin qu'ils puissent encore mieux "intérioriser" l'idéologie et sa phraséologie. Et ainsi de suite, dans une dynamique que l'on appelle " dynamique circulaire de prophétie-discernement ", selon précisément un vocabulaire idéologique désormais bien rodé.

    Ce qui émerge, par conséquent, n'est pas du tout le sensus fidei, comme le suggère le document au n. 9, c'est-à-dire le consentement des fidèles, en vertu de la vertu théologale de la foi, infusée en eux au baptême, mais plutôt une consultatio fidelium, menée et rapportée de manière idéologique.

    Voyons concrètement quelques exemples de l'idéologie à l'œuvre, en citant certaines de ces citations qui, selon le document, "tentent de donner une idée de la richesse des matériaux reçus, faisant résonner la voix du Peuple de Dieu de toutes les parties du monde".

    Commençons par une citation de la synthèse proposée par la Conférence des Evêques d'Italie, qui serait l'une des voix appelant à l'inclusion totale dans l'Église : " La maison-Église n'a pas de portes qui se ferment, mais un périmètre qui s'élargit continuellement ". Ou encore, celle de la CE portugaise : "Le monde a besoin d'une 'Église sortante', qui rejette la division entre croyants et non-croyants, qui tourne son regard vers l'humanité et lui offre, plutôt qu'une doctrine ou une stratégie, une expérience de salut, un 'débordement du don' qui répond au cri de l'humanité et de la nature". Ou encore cette formulation alambiquée de la CE argentine : " Il est important de construire un modèle institutionnel synodal comme paradigme ecclésial de déconstruction du pouvoir pyramidal qui favorise la gestion unipersonnelle.

    Face à de telles formulations, il n'y a que deux possibilités : soit les réponses initiales ont été largement déformées pour se conformer à la formulation actuelle de l'église synodale, soit les réponses sont authentiques, mais proviennent de cette infime partie de catholiques engagés (que l'on trouve pourtant - toujours eux - dans tous les conseils pastoraux, conseils diocésains, commissions, etc.) suffisamment idéologisés. Cette " portion élue " qui, pour être clair, soutient l'autorisation de l'avortement, mais enseigne le catéchisme ; est un ministre extraordinaire, mais ne croit pas à la transsubstantiation ; retourne la paroisse pour enlever les cierges de cire et sauver la planète du réchauffement climatique, mais garde au moins 24 degrés dans la maison.

    Un autre aspect omniprésent dans le document est le martèlement de l'inclusivité. Au §13, il est affirmé que " l'Église synodale [...] apprend de l'écoute comment renouveler sa mission évangélisatrice à la lumière des signes des temps, afin de continuer à offrir à l'humanité une manière d'être et de vivre dans laquelle tous peuvent se sentir inclus et protagonistes ". Qui sont les exclus qui doivent être "inclus et protagonistes" ? Qui sont ceux qui ne se sentent pas représentés dans l'Église ? La lecture du § 39 soulève plus que le soupçon qu'il s'agit de personnes qui vivent et pensent d'une manière qui contredit la foi sur des aspects substantiels ; et qui n'ont pas l'intention de changer, mais attendent plutôt un changement de la part de l'Église, afin qu'elle puisse reconnaître comme inspiré par l'Esprit Saint, comme une voix prophétique, ou un signe des temps - selon la phraséologie synodale déjà plus qu'éprouvée - ce qui exprime simplement un sentiment, un désir, un mode de vie qui doit être corrigé et purifié : "Parmi ceux qui demandent un dialogue plus incisif et un espace plus accueillant, nous trouvons également ceux qui, pour diverses raisons, ressentent une tension entre l'appartenance à l'Église et leurs propres relations affectives, comme par exemple : les divorcés remariés, les parents isolés, les personnes vivant dans un mariage polygame, les personnes LGBTQ, etc. " Indication accompagnée d'une citation du résumé idéologiquement correct envoyé par la CE des USA : "Les gens exigent que l'Eglise soit un refuge pour les blessés et les brisés, et non une institution pour les parfaits. Ils veulent que l'Église rencontre les gens là où ils sont, qu'elle marche avec eux plutôt que de les juger, et qu'elle établisse de vraies relations grâce à la bienveillance et à l'authenticité, et non à un sentiment de supériorité".

    Dans la même veine, on trouve les paragraphes consacrés à la question de l'exclusion présumée des femmes de la vie de l'Église : " De nombreuses synthèses [...] demandent à l'Église de poursuivre son discernement sur certaines questions spécifiques : le rôle actif des femmes dans les structures de gouvernance des organismes ecclésiaux, la possibilité pour les femmes ayant une formation adéquate de prêcher dans le cadre paroissial, le diaconat féminin ". Des positions beaucoup plus diversifiées sont exprimées en ce qui concerne l'ordination sacerdotale des femmes, que certaines synthèses souhaitent, tandis que d'autres considèrent qu'il s'agit d'une question fermée " (§ 64). La contribution des instituts de vie consacrée sonne la charge : " Dans les processus de décision et le langage de l'Église, le sexisme est répandu [...]. En conséquence, les femmes sont exclues des rôles importants dans la vie de l'Église et souffrent de discrimination parce qu'elles ne reçoivent pas un salaire équitable pour les tâches et les services qu'elles accomplissent. [...] Dans certaines Eglises, il y a une tendance à exclure les femmes et à confier les tâches ecclésiales aux diacres permanents ; et aussi à sous-évaluer la vie consacrée sans habit".

    Qui sait si la sous-estimation de la vie consacrée sans habit est le principal problème de l'Église aujourd'hui. Il est certainement logique que le document soit silencieux sur ce qui est maintenant sous les yeux des plus aveugles parmi les aveugles : l'apostasie de masse, les liturgies régurgitées, l'effondrement des vocations sacerdotales et religieuses, le mépris de la vie humaine, les familles brisées. Et un pontificat qui est de plus en plus la cause de la désorientation des fidèles.

  • Le processus synodal comme instrument de changement de l’Église ? Dieu n’est pas présent dans ce processus synodal accablant

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    paus_straalt_hoop_uit.jpgLu sur le web de « Riposte catholique » : sur son blogue, Mgr Rob Mutsaerts, évêque auxiliaire de Bois-le-Duc (Pays-Bas), dénonce le processus synodal :

    « Le jeudi 27 octobre, le Secrétariat du Synode des évêques à Rome a présenté le document de travail pour la phase continentale du synode “Pour une Église synodale : communio, participatio, missio”. Cette déclaration a été faite lors d’une conférence de presse présidée par le cardinal Grech et tenue au centre de presse du Saint-Siège à Rome. Le document était intitulé “Augmente l’espace de ta tente” (Esaïe 54:2). Sur la base de tous les documents finaux des réunions dans les différents Continents, le Secrétariat du Synode des Évêques compile ensuite l’Instrumentum Laboris, le document de travail pour les réunions synodales de 2023 et 2024.

    Le mantra du processus est : écouter. Qui ? Tout le monde. Le document de travail contient un bon nombre de citations.

    “Ces citations ont été choisies parce qu’elles expriment de manière particulièrement puissante, belle ou précise des sentiments qui sont exprimés plus généralement dans de nombreux rapports. L’expérience synodale peut être lue comme une voie de reconnaissance pour ceux qui ne se sentent pas suffisamment reconnus dans l’Église.”

    Les contours du processus synodal sont de plus en plus clairs. Il fournit un mégaphone pour les opinions non religieuses. Le document indique où le chemin synodal devrait finalement mener :

    “Cela signifie une Église qui apprend en écoutant comment renouveler sa mission évangélisatrice à la lumière des signes des temps, afin de continuer à offrir à l’humanité une manière d’être et de vivre dans laquelle tous peuvent se sentir inclus comme protagonistes”.

    Qui sont ceux qui se sentent exclus. Par. 39 :

    ” Parmi ceux qui appellent à un dialogue plus significatif et à un espace plus accueillant, nous trouvons aussi ceux qui, pour diverses raisons, ressentent une tension entre l’appartenance à l’Église et leurs propres relations d’amour, comme : les divorcés remariés, les parents isolés, les personnes vivant dans des mariages polygames, les personnes LGBTQ, etc. “.

    En bref, ceux qui ne sont pas d’accord avec les enseignements de l’Église catholique. Ce que le document de travail semble suggérer, c’est que nous établissions une liste de plaintes et que nous en débattions ensuite. La mission de l’Église est différente. Ce qui n’est pas : examiner toutes les opinions et ensuite arriver à un accord. Jésus nous a commandé autre chose : annoncer la vérité ; c’est la vérité qui vous rendra libres. Le commentaire selon lequel l’Église ne prête aucune attention à la polygamie est particulièrement curieux. D’ailleurs, le document n’accorde aucune attention aux traditionalistes. Ceux-ci se sentent également exclus. En effet, le pape François les considère littéralement comme tels (Traditionis Custodes). Apparemment, il n’y a aucune empathie pour ce groupe.

    Jusqu’à présent, le processus synodal ressemble davantage à une expérience sociologique et n’a pas grand-chose à voir avec l’Esprit Saint censé résonner à travers tous les bruits. On peut presque dire que c’est un blasphème. Ce qui apparaît de plus en plus clairement, c’est que le processus synodal va être utilisé pour modifier un certain nombre de positions de l’Église, le Saint-Esprit étant alors également jeté dans la mêlée en tant que défenseur, même si le Saint-Esprit a réellement insufflé quelque chose de contre-intuitif au cours des siècles. Ce que l’on peut surtout retenir des séances d’écoute, c’est une foi évaporée, qui n’est plus pratiquée et qui n’accepte pas les positions de l’Eglise. Les gens se plaignent que l’Église n’accepte pas leurs points de vue. D’ailleurs, ce n’est pas tout à fait vrai. Les évêques flamands et allemands vont loin avec eux, ce qui est en fait beaucoup plus tragique. Ils ne veulent plus appeler le péché péché. Ainsi, la conversion et la repentance ne sont plus discutées.

    Comme on pouvait s’y attendre, les appels à l’admission des femmes à la prêtrise comprennent

    “le rôle actif des femmes dans les structures de direction des organismes ecclésiastiques, la possibilité pour les femmes ayant une formation adéquate de prêcher dans les paroisses, ainsi qu’un diaconat et un sacerdoce féminins”.

    Un exercice inutile étant donné que les trois derniers pontificats ont explicitement déclaré que c’était une impossibilité. En politique, tout est ouvert à la discussion et au débat. Ce n’est pas le cas dans l’Église. Il existe une chose telle que la doctrine de l’Église qui n’est pas soumise au temps et au lieu. Mais le document de travail semble vraiment tout remettre en question. Ainsi, nous lisons au paragraphe 60 :

    ” L’appel à la conversion de la culture ecclésiale, pour le salut du monde, est concrètement lié à la possibilité d’établir une nouvelle culture, avec de nouvelles pratiques et structures. “

    Et puis ça.

    “Il est demandé aux évêques de trouver les moyens appropriés pour mener à bien leur tâche de validation et d’approbation du document final et de veiller à ce qu’il soit le fruit d’un authentique parcours synodal, respectueux du processus qui s’est déroulé et fidèle aux différentes voix du peuple de Dieu dans chaque continent.”

    Apparemment, la fonction d’évêque est réduite à la simple mise en œuvre de ce qui est finalement le plus grand dénominateur commun comme résultat d’un tirage au sort d’opinions. L’éventuelle phase finale du processus synodal ne peut que ressembler à une journée champêtre. Comme on pouvait s’y attendre, tous ceux qui n’obtiennent pas ce qu’ils veulent diront qu’ils sont exclus. À l’avance, c’est une recette pour le désastre. Si tout le monde obtient ce qu’il veut – ce qui n’est pas vraiment possible – le désastre est complet. L’Église se sera alors reniée et aura dilapidé son identité.

    Lors de la présentation du document de travail, le cardinal Grech a beaucoup insisté sur le fait que la tâche de l’Église est d’agir comme un amplificateur de tout son venant de l’intérieur de l’Église, même s’il est contraire à ce que l’Église a toujours proclamé. C’était différent autrefois. À l’époque de la Contre-Réforme, l’Église ne laissait rien à désirer en termes de clarté de ses opinions. Vous convainquez les gens en défendant la foi catholique de manière argumentée et avec une pleine conviction. Vous ne convainquez personne en vous contentant d’écouter et d’en rester là. Ce qui est ennuyeux, c’est que les évêques ont reçu l’instruction d’écouter et de documenter ce qui a été dit. Ces rapports étaient ensuite collectés au niveau des églises-provinces, puis transmis à Rome. Rapports contenant les hérésies nécessaires avec la signature de la conférence des évêques. Nous ne pouvions pas faire autrement, mais je n’en suis absolument pas heureux. De nombreux cardinaux, d’ailleurs, ont également ventilé ce son à Rome, demandant encore une fois ce qu’est réellement la synodalité. Il n’y a pas eu de réponse claire.

    Jésus a adopté une approche différente. Il a écouté les deux disciples déçus sur le chemin d’Emmaüs. Mais à un moment donné, il a pris la parole et leur a fait comprendre qu’ils s’égaraient. Cela les a amenés à faire demi-tour et à retourner à Jérusalem. Si nous ne faisons pas demi-tour, nous nous retrouverons à Emmaüs et serons encore plus loin de chez nous que nous ne le sommes déjà.

    Une chose est claire pour moi. Dieu n’est pas présent dans ce processus synodal accablant. Le Saint-Esprit n’a absolument rien à voir avec cela. Parmi les protagonistes de ce processus, on trouve à mon sens un peu trop de défenseurs du mariage homosexuel, des gens qui ne pensent pas vraiment que l’avortement est un problème et ne se montrent jamais vraiment défenseurs du riche credo de l’église, voulant avant tout être aimés par leur entourage laïc. Quel manque de pastorale, quel manque d’amour. Les gens veulent des réponses sincères. Ils ne veulent pas rentrer chez eux avec plus de questions. Vous éloignez les gens du salut. J’ai depuis abandonné le processus synodal. »

  • Comment surmonter la polarisation dans l'Eglise ?

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    De Carlo Lancellotti  sur le National Catholic Register :

    La polarisation dans l'Eglise : Comment la surmonter ?

    Le serviteur de Dieu Luigi Giussani peut nous aider à voir que le chemin pour dépasser la division ecclésiale ne passe pas par une sorte de compromis politique, mais par une conscience plus profonde du cœur de notre foi.

    5 novembre 2022

    Dans sa récente homélie commémorant le début du concile Vatican II en 1962, le pape François a regretté la " polarisation " de certains catholiques à la suite du concile. "Combien de fois ont-ils préféré encourager leur propre parti plutôt que d'être les serviteurs de tous ?" a-t-il demandé. "Être progressistes ou conservateurs plutôt que d'être frères et sœurs ? Être à 'droite' ou à 'gauche' plutôt que d'être avec Jésus ?" 

    La polarisation a en effet été une blessure douloureuse et, franchement, un scandale, qui a considérablement entravé la mission de l'Église à notre époque. Elle touche surtout ce que l'on pourrait appeler le "visage public" de l'Église : ses écrivains et ses intellectuels, mais aussi de nombreux membres du clergé, catéchistes et éducateurs. 

    Si beaucoup de gens reconnaissent le problème, les remèdes proposés semblent souvent génériques et inefficaces. Les appels à la civilité ou à une plus grande charité ne résoudront pas les divisions qui découlent, en fin de compte, de visions radicalement divergentes de la situation de l'Église dans le monde d'aujourd'hui.

    D'un côté, de nombreux catholiques "libéraux" aspirent à une Église non autoritaire. Au fond, ils pensent que l'Église doit aujourd'hui minimiser les enseignements "dépassés", qui étaient appropriés dans le passé mais qui sont incompréhensibles pour nos contemporains. Elle doit cesser d'être obsédée par des questions de morale individuelle (notamment sexuelle) et rejoindre les grands combats moralo-politiques de notre temps : contre la pauvreté, le réchauffement climatique, le racisme, la traite des êtres humains, la peine de mort, etc. 

    Autant de causes louables, bien sûr, sauf qu'on ne voit pas bien pourquoi il faut être catholique pour se battre pour elles. Le rôle de l'Église est-il simplement de donner un "encouragement moral" à un monde qui n'a pas besoin d'elle ? Et son magistère doit-il vraiment "s'adapter" afin de tenir compte des priorités éphémères des différentes périodes historiques ? 

    De l'autre côté, les "conservateurs" catholiques répondent à la "fluidité doctrinale" des libéraux en réaffirmant la recta doctrina (l'enseignement correct), avec un accent particulier sur les enseignements qui ont été sapés par la révolution sexuelle (sur l'avortement, le mariage, la contraception, etc.). 

    C'est une réponse compréhensible, mais est-elle suffisante ? L'orthodoxie est-elle en soi ce que le christianisme apporte au monde ? En fait, on pourrait soutenir que notre problème aujourd'hui n'est pas tant un simple rejet de la vérité, mais que la vérité et la vie sont divisées. Soit la vie est affirmée comme valeur première, soit la vérité est affirmée dans l'abstrait, mais a du mal à devenir vie, à être vérifiée comme vérité dans l'expérience. Personnellement, je soupçonne que c'est la raison pour laquelle de nombreuses personnes trouvent de l'aide dans la liturgie traditionnelle, car la vérité chrétienne s'y manifeste dans le geste, le son, la vision et l'expérience. Mais encore une fois, est-ce suffisant ?

    Lorsque ces questions surgissent, je pense souvent à Mgr Luigi Giussani (1922-2005), prêtre et éducateur italien dont le centenaire de la naissance vient de se produire le 15 octobre. Il est surtout connu comme le fondateur du mouvement ecclésial Communion et Libération (auquel je dois ma propre éducation à la foi), mais nombre de ses intuitions sont précieuses pour toute l'Église. 

    Je veux ici en rappeler une en particulier : L'insistance inébranlable de Mgr Giussani sur le fait que l'Église doit s'approcher du monde en suivant la méthode propre à Dieu, qui est résumée dans le mystère de l'Incarnation. 

    Au début du christianisme, Jésus n'a pas d'abord proposé un ensemble de doctrines ou une liste de principes moraux. Il s'est avant tout proposé comme "le Chemin, la Vérité et la Vie". Les disciples n'ont pas seulement rencontré un enseignant et un modèle moral, ils ont rencontré Dieu en chair et en os. 

    Pour souligner ce point, Mgr Giussani (inspiré par le poète français Charles Péguy) a utilisé le mot "événement" : Avant toute chose, le christianisme a été (et est) un événement, un fait ; Jésus-Christ est entré dans l'histoire et l'a bouleversée. Ceux qui ont vécu cet événement ont dû lui donner un sens, ce qui a généré une doctrine. Ils ont dû vivre à la lumière de cet événement, ce qui a donné lieu à une moralité. Mais tant la doctrine que la morale étaient existentiellement en aval, pour ainsi dire, de l'événement de l'Incarnation.

    L'intuition simple mais profonde de Mgr Giussani était que l'expérience des premiers disciples reste le paradigme du christianisme à chaque époque. La nature de l'Église est d'être la continuation de l'Incarnation, et sa fonction est de nous montrer le Christ ressuscité, qui reste notre contemporain "chaque jour jusqu'à la fin du monde". Elle le fait par la liturgie et les sacrements, mais aussi par le simple fait d'être là, en tant qu'ecclesia (assemblée) humaine, dans laquelle on peut faire l'expérience de la promesse de Jésus : "Quand deux ou trois d'entre vous seront réunis en mon nom, je serai au milieu d'eux." 

    Nous considérons souvent cela comme allant de soi, mais Mgr Giussani le prenait très au sérieux. Jeune professeur de religion dans un lycée public très laïc, il s'est rendu compte que le signe objectif par lequel il pouvait suivre le Christ était l'unité de la petite bande de "perdants" qui avait commencé à le suivre. Il s'est rendu compte que, avant toute chose, l'Église apporte au monde le Christ lui-même et qu'elle le fait simplement en étant présente, en existant simplement au milieu du monde, remplie de la mémoire de l'événement de l'Incarnation. 

    Si l'on prend cette affirmation au sérieux et que l'on en vérifie la véracité par soi-même, de nombreux problèmes se dissipent, ou du moins se relativisent. Parmi eux, la polarisation idéologique, qui est souvent le signe que le christianisme s'est "désincarné", qu'il s'est réduit à un ensemble d'idées religieuses et de principes éthiques, sans lien avec l'expérience de la présence émouvante du Christ sous le manteau des signes sacramentels. La foi est alors de plus en plus considérée comme allant de soi, et les différentes préférences intellectuelles, éthiques et même politiques des personnes (qui, en soi, sont tout à fait naturelles) se figent en agendas et en viennent à dominer la vie de l'Église. 

    À l'inverse, lorsque les gens aiment et vivent l'unité de l'Église comme le signe de la présence du Christ, les autres désaccords (y compris les désaccords politiques) deviennent relatifs, et un véritable élan missionnaire est possible. Les préoccupations politiques ou théologiques des gens ne dominent pas leur attention parce que leur attention est concentrée sur "quelque chose qui vient avant", comme le disait Mgr Giussani. 

    Aujourd'hui, il nous dirait certainement que la voie qui permet de dépasser la polarisation ne passe pas par une sorte de compromis politique, mais par une conscience plus profonde de ce qu'est notre foi. Comme c'est souvent le cas, on ne peut aller de l'avant qu'en allant plus en profondeur. 

    Carlo Lancellotti est professeur de mathématiques au College of Staten Island et membre de la faculté du programme de physique du CUNY Graduate Center. Outre ses travaux d'érudition en physique, il a traduit en anglais et publié trois volumes d'œuvres du philosophe italien Augusto Del Noce. M. Lancellotti a également écrit ses propres essais sur Del Noce et d'autres sujets, qui ont été publiés dans Communio, Public Discourse et Church Life Journal.

  • Il n'est pas vrai que la liturgie réformée soit la seule forme valide du rite romain

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    D'Edward Pentin sur le National Catholic Register :

    Le cardinal Burke et l'évêque Schneider réitèrent leurs inquiétudes quant aux restrictions imposées à la liturgie traditionnelle

    Cardinal Raymond Burke (l) and Bishop Athanasius Schneider

    Le cardinal et l'évêque ont offert leurs commentaires pour une conférence que l'auteur a donnée récemment à Londres.

    4 novembre 2022

    Le cardinal Raymond Burke a remis en question le fondement des efforts menés par le pape pour restreindre et finalement éliminer la messe traditionnelle en latin, tandis que l'évêque Athanasius Schneider a déclaré que le " trésor millénaire " ne peut pas être détruit, car il est l'œuvre du Saint-Esprit.

    Le cardinal et l'évêque ont aimablement partagé leurs commentaires dans le cadre d'une conférence que j'ai donnée à la Latin Mass Society à Londres le 21 octobre.

    Alors que les nouvelles restrictions du pontificat concernant la liturgie traditionnelle suscitent de plus en plus d'inquiétudes, le cardinal Burke a déclaré que "dans la mesure où la raison et la saine théologie prévaudront, la sauvegarde et la promotion de l'Usus Antiquior [l'ancienne liturgie en usage avant les réformes de 1970] se poursuivront". 

    Le préfet émérite de la signature apostolique a déclaré que cela se passait "malgré les difficultés et même la persécution" inspirées par Traditionis Custodes, la lettre apostolique du pape François de 2021 publiée motu proprio (décret) restreignant l'ancienne liturgie, et les Responsa ad Dubia, les directives sur la mise en œuvre du décret publiées cinq mois plus tard.

    Mais le cardinal Burke a souligné qu'en tant que "motu proprio", Traditionis Custodes n'a pas une force suffisante car il n'a d'autorité que dans la mesure où il est fondé sur des motifs justes. Il a ajouté que les motifs du décret, et la lettre du pape François aux évêques qui l'accompagnait, "ne sont pas vrais et justes" lorsqu'ils sont pris ensemble, et il a donné ses raisons.

    La première, a-t-il dit, est qu'il n'est "tout simplement pas vrai" que la liturgie réformée est la seule forme valide du rite romain. Il a souligné que, comme l'ont reconnu les papes Saint-Paul VI, Jean-Paul II et Benoît XVI, l'Usus Antiquior n'a "jamais été supprimé" et, en fait, a continué à être célébré depuis l'époque de la promulgation du Missel du pape Saint-Paul VI.

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  • Qui est l’homme de François au sein de l’Académie pontificale pour la Vie ?

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    Un article de Sandro Magister, vaticaniste à L’Espresso, en traduction française sur Diakonos.be :

    Il y a encore un autre jésuite dans l’équipe de François. À l’Académie pour la vie, on le connaît bien

    Dans cette escouade de jésuites que le Pape François a installé aux manettes de l’Église, dont pas moins de trois sont cardinaux, il faut encore ajouter un nom, que Settimo Cielo a coupablement omis dans son article précédent.

    C’est un nom qui circule peu. Et personne ne l’a cité, ces derniers jours, au plus fort des critiques qui se sont abattues sur l’Académie pontificale pour la Vie, alors que la personne qui porte ce nom en était en fait à l’origine.

    La polémique avait éclaté à la suite de la nomination, faite par le Pape le 15 octobre, de nouveaux membres de l’Académie, dont certains ne correspondaient que peu, voire pas du tout avec la finalité « pro vie » de l’Académie elle-même.

    La nomination la plus contestée avait été celle de l’économique américaine Mariana Mazzucato, ouvertement « pro choice » en matière d’avortement. Mais ensuite également d’un autre Américain, Alberto Dell’Oro, de Sheila Dinotshe Tlou du Botswana et du jésuite argentin Humberto Miguel Yáñez, professeur à l’Université pontificale grégorienne. C’est à ce dernier, spécialiste en pastorale de la famille, qu’on a reproché en particulier la désobéissance à l’encyclique « Humanae vitae » de Paul VI qui interdit le recours aux contraceptifs artificiels.

    Face à ces critiques, l’Académie pontificale pour la Vie, présidée par l’archevêque Vincenzo Paglia, membre historique de la Communauté de Sant’Egidio, a réagi le 19 octobre par un communiqué pour s’autojustifier, à l’enseigne du « dialogue » et de la « confrontation » entre thèses différentes, et ensuite une fois encore par un autre communiqué dans lequel on faisait savoir que Paglia, reçu en audience par le Pape François le jour même, avait reçu de lui « une pleine appréciation ».

    Aucun doute, en fait, que Paglia et le Pape soient en fait à l’origine de ces nominations. Par ailleurs, l’appréciation personnelle de Jorge Mario Bergoglio pour les positions de Mme Mazzucato en économie sont de notoriété publique.

    Mais bien peu savent qu’à l’Académie pontificale pour la Vie, il y a un autre jésuite qui, pour le Pape François, vaut et pèse bien plus que Paglia. Il se nomme Carlo Casalone. Il a 66 ans. Entre 1995 et 2008, il a été rédacteur de la revue des jésuites de Milan « Aggiornamenti Sociali » et de 2008 à 2014 supérieur de la Province d’Italie de la Compagnie de Jésus. Il enseigne aujourd’hui la théologie morale et la bioéthique à l’Université pontificale grégorienne et depuis 2013, il est Président de la Fondation Carlo Maria Martini, le célèbre jésuite et cardinal qui dans son dernier livre n’avait pas hésité à accuser « Humanae vitae » d’avoir, par son interdiction de la contraception artificielle, causé « un grand dommage » à l’Église, alors qu’il aurait fallu en revanche « une nouvelle culture de la tendresse et une approche de la sexualité plus libérée des idées préconçues ».

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  • Une théologie fracturée dans une Eglise polarisée

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    Une interview de Peter John McGregor par Carl E. Olson sur The Catholic World Report :

    La fracture de la théologie dans une Église polarisée

    La "séparation entre la foi et la raison", déclare Peter John McGregor, co-éditeur de Healing Fractures in Contemporary Theology, "est une séparation du divin et de l'humain dans la théologie. C'est le Saint-Esprit qui peut ramener ces deux éléments à l'harmonie."

    4 novembre 2022 

    Peter John McGregor est maître de conférences en théologie dogmatique et spiritualité à l'Institut catholique de Sydney, en Australie. Lui et Tracey Rowland - qui est titulaire de la chaire de théologie Saint-Paul II à l'université de Notre Dame (Australie) et a reçu le prix Ratzinger en 2020 - sont coéditeurs de Healing Fractures in Contemporary Theology (Cascade Books, 2022).

    McGregor a récemment correspondu avec Carl E. Olson, rédacteur en chef de Catholic World Report, au sujet de la fracture de la théologie, de la polarisation dans l'Église, de l'importance et de la place de la pensée de Joseph Ratzinger/Benoît XVI, des tensions sur la liturgie et de sujets connexes.

    CWR : Dès le début, dans le titre du livre et dans l'introduction, vous soulignez la nature fracturée de la théologie aujourd'hui. Comment la théologie est-elle fracturée ? Est-ce qu'une partie du problème est une dispute, ou des désaccords, sur la nature de la théologie elle-même ?

    McGregor : La "fracture" est une métaphore. C'est l'image d'une certaine "désintégration" de la théologie, une désintégration qui, je pense, est en cours depuis au moins la fin du Moyen Âge, bien que l'on puisse peut-être identifier cette tendance tout au long de l'histoire de l'Église.

    En disant que la théologie est "fracturée", je ne veux pas dire qu'il existe différentes "écoles" théologiques. Le mystère de Dieu et de notre relation avec lui est si grand qu'il ne peut y avoir une seule école, un théologien parfait et complet. Les deux seuls qui peuvent prétendre être des "théologiens" parfaits sont Jésus et Marie. Jésus est le Theou Logos, le Verbe de Dieu, la théologie incarnée, et Marie est celle qui a parfaitement médité tout ce que Dieu lui a révélé. Tous les autres, même les grands saints érudits, sont des théologiens moins que parfaits.

    Cela dit, je pense que certaines "écoles" ont plus de problèmes que d'autres, et que certaines sont fatalement défectueuses. Je placerais dans cette dernière catégorie ce que j'appelle les écoles orthopratiques de personnes comme Edward Schillebeeckx. Sur ce point, je répéterais l'adage selon lequel "toutes les métaphores boitent". Je suis donc d'accord avec ce que le père Aidan Nichols a dit dans sa critique parue sur First Things, à savoir qu'il ne s'agit pas seulement de "guérir des fractures". Plutôt, si l'on changeait la métaphore pour reconstituer un puzzle, certaines pièces du puzzle sont irrémédiablement endommagées.

    Je pense que la question théologique fondamentale depuis Vatican II est : "Qu'est-ce que la théologie ?" Alors, oui, cette dispute fait partie du problème, c'est une exacerbation du problème. Mais le problème est bien plus ancien que Vatican II.

    Je considérerais ce que font certains théologiens récents et contemporains comme n'étant pas du tout de la théologie, mais autre chose. Par exemple, je travaille actuellement sur ce qui sera, je l'espère, un livre critiquant la théologie d'un certain théologien "postmoderne" et j'ai conclu que ce que cette personne fait n'est pas du tout de la théologie, mais une sorte de philosophie du langage. Les raisons en sont que, pour lui, tous les problèmes humains, y compris la relation entre l'homme et le divin, sont réduits à des problèmes linguistiques, mais, plus important encore, l'Esprit Saint ne joue absolument aucun rôle ni dans sa méthode ni dans son contenu, c'est-à-dire dans la manière dont il théologise et sur quoi il théologise.

    Mais comment peut-on théologiser sans que le Saint-Esprit y soit pour quelque chose ?

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  • RDC : Avec « L’Empire du silence », deux soirées pour dénoncer l’impunité autour du martyre du peuple congolais

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    Lu dans la « Libre Afrique » :

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    « Le dernier film du cinéaste belge Thierry Michel est au cœur de deux soirées spéciales : l’une ce mercredi à 20h25 sur La Une RTBF et l’autre, le 14 novembre à Bozar (Bruxelles).

    Ni repos, ni répit. Depuis près de 25 ans, des hordes de belligérants s’abattent par vagues successives sur le territoire congolais. Dans l’Est de la RDC particulièrement, la population est soumise à une insécurité permanente. Ce martyre silencieux est au cœur du dernier film de Thierry Michel.

    En trente ans de voyage au Congo, le cinéaste a accumulé une somme de témoignages, d’images d’archives et d’analyses sur le pays-continent dont le destin fut longtemps lié à la Belgique. Dans L’Empire du silence, le réalisateur belge dénonce le chaos en cours au Congo et l’insoutenable impunité de ses auteurs. Depuis plus de vingt ans, les effets dévastateurs de la guerre s’y sont étendus sans que jamais ses instigateurs nationaux et internationaux ne soient inquiétés. C’est contre cette impunité que s’érige le film relayant notamment la voix du prix Nobel de la paix congolais, le Dr Denis Mukwege.

    Le Congo face à l’appétit du Rwanda et de l’Ouganda

    La première vertu de L’Empire du silence*** est sa formidable clarté. Même un public néophyte, qui ne connaîtrait rien des méandres de l’histoire congolaise, y retrouvera son chemin. De 1990 à nos jours, le cinéaste retrace le tragique destin d’une population soumise aux exactions sans fin des innombrables factions rebelles et troupes en présence depuis plus de vingt ans sur son territoire. Singulièrement depuis 1994 et le déclenchement du génocide des Tutsis dans le Rwanda voisin, entraînant l’exode de centaines de milliers de Hutus rwandais sur les terres congolaises.

    Le cinéaste croise les témoignages d’officiels de nationalités multiples ayant œuvré au sein des Nations Unies et du Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR), mais aussi de civils et témoins (journalistes et responsables de la Croix Rouge congolais) pris en étau dans les territoires de l’Est du Congo convoités pour leur incroyable richesse géologique. Il met ainsi en lumière les mécanismes prédateurs qui maintiennent la population dans la terreur et ont permis à d’anciens chefs de guerre de se frayer un chemin jusqu’aux postes les plus élevés de l’armée régulière congolaise. Car si les troupes étrangères, principalement rwandaises et ougandaises, sont responsables d’attaques, pillages et actes de barbarie par milliers sur le territoire de la RDC, les troupes gouvernementales et groupes armés congolais ont également commis d’innombrables crimes de guerre en Ituri, dans le Kivu et au Kasaï.

    Le film cite souvent le rapport Mapping, réalisé en 2010, documentant plus de 600 violations, les plus graves, des droits de l’Homme et du droit international commises en RDC entre mars 1993 et juin 2003. Un rapport qui, à ce jour, est toujours « resté enfoui dans un tiroir » de l’Onu.

    Parcours de cinéma, de Charleroi à Kinshasa

    Thierry Michel connaît bien le pays pour l’avoir arpenté en long et en large depuis Le Cycle du serpent (1992) en passant par Mobutu Roi du Zaïre (1999) jusqu’à son avant-dernier film sur le Docteur Denis Mukwege rebaptisé L’homme qui répare les femmes (2015). C’est dans le sillage du combat du célèbre médecin et prix Nobel de la paix 2018 que s’inscrit L’Empire du Silence***.

    Ce onzième film, réalisé au Congo par Thierry Michel, prend la forme d’un plaidoyer en faveur de la justice transitionnelle afin que soient jugés les responsables de crimes de guerre et reconnu le droit des victimes. Il pointe le silence international, l’inaction des autorités congolaises et la complicité de nombreuses compagnies étrangères exploitant les précieux minerais congolais. Après sa présentation dans divers festivals et au cours d’une tournée au Congo organisée fin août – début septembre à Kinshasa, Bukavu, Goma et Kisangani, le film sera visible ce mercredi à 20h25 sur La Une. Sa diffusion sera suivie d’un débat à 22h15. Dans la foulée (23h25), on pourra également revoir un autre film de Thierry Michel, Enfants du hasard, tourné dans sa région natale.

    Cette soirée préfigure la participation du cinéaste aux Grandes conférences catholiques le 14 novembre à Bozar. Soirée au cours de laquelle sera retracé son parcours, de Charleroi à Kinshasa, en passant par le Brésil et l’Iran.

    Karin Tshidimba »

    Ref. RDC : Avec « L’Empire du silence », deux soirées pour dénoncer l’impunité autour du martyre du peuple congolais

    ...Dans une éternelle série na balokuta, de poker menteurs : nationale, transfrontalière et internationale, entretenant  un imbroglio dont on n’aperçoit hélàs pas la fin (JPSC).

  • Le président Biden, l'archevêque Paglia et la mortification de l'Église

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    De George Weigel sur The Catholic World Report :

    Le président Biden, l'archevêque Paglia et la mortification de l'Église

    Allons-nous maintenant avoir des hérétiques qui nient la divinité du Christ nommés comme membres du Dicastère pour la Doctrine de la Foi, au nom du "dialogue" ?

    2 novembre 2022

    Aucune personne qui a travaillé à Washington pendant plus de quatre décennies, comme moi, ne peut imaginer Joseph Robinette Biden, Jr, comme l'un des couteaux les plus tranchants du tiroir. Même avec le recul de 31 ans, sa tentative d'enseigner la théorie du droit naturel au futur juge Clarence Thomas lors des auditions de confirmation de ce dernier est toujours aussi répugnante. Il s'est autodétruit lors de plusieurs campagnes présidentielles à cause de gaffes verbales (et de plagiats). Tout récit honnête de son succès dans l'obtention de la nomination démocrate de 2020 concédera qu'il a été plus ou moins consacré par la crainte que Bernie Sanders, le socialiste du Vermont qui a passé sa lune de miel dans le Moscou de la guerre froide, ne conduise le parti au bord du précipice.

    Aujourd'hui, il est évident pour toute personne ayant la moindre connaissance de la médecine gériatrique que M. Biden est atteint de troubles cognitifs. Le fardeau de l'âge s'est donc superposé à l'incapacité intellectuelle, et l'habituelle fanfaronnade de M. Biden n'est plus qu'une mince couverture pour le dysfonctionnement, l'indiscrétion et une malpropreté après l'autre. Compte tenu de ces réalités, les éthiciens peuvent débattre du degré de culpabilité morale de M. Biden pour sa politique incessante en faveur de l'avortement, qui s'est intensifiée depuis que la Cour suprême a, à juste titre, jeté Roe v. Wade à la poubelle de l'histoire jurisprudentielle en juin dernier. Objectivement parlant, cependant, M. Biden est devenu non seulement un embarras pour l'Église, mais un contre-témoin de l'Évangile que l'Église proclame.

    Sentant, avec d'autres démocrates, que les vents politiques soufflaient dans une direction défavorable alors que les élections de mi-mandat de 2022 entraient dans la dernière ligne droite, l'homme qui claironne effrontément qu'il enfoncera son chapelet dans la gorge de quiconque mettra en doute sa bonne foi catholique a annoncé que sa première action, si les démocrates contrôlaient à la fois la Chambre et le Sénat en janvier 2023, serait de "codifier" Roe v. Wade par voie législative.

    En fait, ce que M. Biden et ses partisans proposent est l'attaque la plus draconienne que l'on puisse imaginer contre le droit à la vie : une licence d'avortement à l'échelle nationale qui, au nom de menaces non spécifiées pour la "santé" maternelle, légaliserait le démembrement d'un enfant à naître jusqu'à la naissance. Le projet de loi proposé par Biden et les démocrates laisse la définition de la "santé" si vague qu'elle autorise les avortements tardifs, en cas de problèmes de "santé mentale" qui peuvent être pratiquement tout et n'importe quoi.

    En promouvant un permis de tuer pratiquement sans restriction, M. Biden s'est déclaré en dehors de la pleine communion de l'Église. Les prêtres et autres personnes qui ont dit à cet homme superficiel et mal catéchisé que sa position sur l'avortement pouvait être conciliée avec la pleine communion avec l'Église catholique portent le plus lourd fardeau de la responsabilité morale - tout comme les évêques appelés à exercer un soin pastoral pour M. Biden. Mais il ne fait aucun doute que, objectivement, le président Biden s'est mis dans une position de communion diminuée, défectueuse, avec l'Église qu'il aime. Ce qui est dommage, c'est que ce qu'il aime, il ne le connaît pas. Et l'amour sans la connaissance est un simple sentiment.

    Il y a aussi Mgr Vincenzo Paglia, président de l'Académie pontificale pour la vie. Nous étions, j'imagine, amis autrefois. Au milieu des années 1990, nous avons travaillé avec le regretté cardinal William Keeler pour faire ériger un mémorial au cardinal James Gibbons de Baltimore dans la basilique de Santa Maria in Trastevere, dont Mgr Paglia était alors le recteur. En 1887, le cardinal Gibbons a prononcé dans cette vénérable basilique, qui venait de devenir son église romaine "titulaire", un sermon qui anticipait l'enseignement du Concile Vatican II sur l'Église et l'État. Keeler et moi avons pensé que ce moment devait être commémoré, et Paglia n'aurait pas pu être plus utile pour faire aboutir le projet, suggérant même que le mémorial Gibbons soit mis en parallèle dans le sanctuaire de la basilique avec un mémorial à un autre grand défenseur de la liberté religieuse, le cardinal polonais Stefan Wyszyński, aujourd'hui béatifié.

    Mais c'était à l'époque, et nous sommes aujourd'hui. Et l'archevêque, qui a présidé à la déconstruction de l'Académie Pontificale de la Vie telle que le Pape Saint Jean Paul II l'avait créée, n'est plus l'homme que j'ai connu il y a trois décennies. Ainsi, Mgr Paglia a récemment accepté la nomination du professeur Mariana Mazzucato, une économiste pro-avortement, comme membre de l'académie pontificale, au nom d'un "dialogue interdisciplinaire, interculturel et interreligieux fructueux."

    Il s'agit là d'une absurdité des plus superficielles, voire d'une duplicité. Devons-nous maintenant avoir des hérétiques qui nient la divinité du Christ nommés comme membres du Dicastère pour la Doctrine de la Foi, au nom du "dialogue" ? Ou des antisémites appelés à des postes officiels au Vatican au nom d'un "dialogue" sur le judaïsme ?

    La mortification de l'Église se poursuit. Elle nous renforcera dans la vérité, en fin de compte. Mais c'est tout de même une mortification.

    George Weigel est Distinguished Senior Fellow du Ethics and Public Policy Center de Washington, où il est titulaire de la chaire William E. Simon en études catholiques. Il est l'auteur de plus de vingt livres, dont Witness to Hope : The Biography of Pope John Paul II (1999), The End and the Beginning : Le pape Jean-Paul II - La victoire de la liberté, les dernières années, l'héritage (2010), et L'ironie de l'histoire catholique moderne : How the Church Rediscovered Itself and Challenged the Modern World to Reform (2010). Ses livres les plus récents sont The Next Pope : The Office of Peter and a Church in Mission (2020), et Not Forgotten : Elegies for, and Reminiscences of, a Diverse Cast of Characters, Most of Them Admirable (Ignatius, 2021).

  • Koekelberg : une pétition demande le maintien du Père Marc Leroy

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    Une nouvelle pétition contre une décision de Mgr Kockerols à Bruxelles mobilise des centaines de fidèles :

    "Un curé qui rassemble, un curé qui se bat contre les injustices, un curé qui parle aux jeunes.

    Pourquoi nous en priver ?

    Pourquoi ne nous a-t-on pas demandé notre avis ? Pourquoi ne nous a-t-on pas consulté alors même que l'Eglise nous invite, en plein chemin synodal, à davantage de coresponsabilité dans les paroisses... ?

    Pourquoi une telle décision de nous retirer celui grâce à qui notre Unité pastorale est ce qu'elle est ? Une UP vivante, joyeuse, pleine de projets... Une UP qui rassemble les uns et les autres au-delà des différences. Un pôle spirituel au coeur de la Ville.

    Nous souhaitons que le Père Marc reste notre berger !"

  • Euthanasie : quand le Père Abbé de Fontgombault monte au créneau

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    L'homélie du Très Révérend Père Dom Jean PATEAU, Abbé de Notre-Dame de Fontgombault, pour la Toussaint (source) :

    (Fontgombault, le 1er novembre 2022)

    Venite benedicti patris mei
    Venez les bénis de mon Père
    (Mt 25,34)

    Chers Frères et Sœurs,
    Mes très chers Fils,

    Deux foules peuplent les horizons de la liturgie de ce matin de Toussaint. L’épître nous associe à la joie du voyant de l’Apocalypse devant la cité céleste. La voix puissante d’un ange énumère le nombre des élus parmi les douze tribus d’Israël. Puis voici, une foule innombrable de toutes races, peuples, nations et langues qui se tiennent devant le trône de Dieu. L’évangile nous fait entendre une autre voix, celle du Seigneur, plus douce, qui invite ses contemporains, et qui nous invite, à la mise en œuvre des béatitudes comme la porte ouvrant vers une grande récompense dans les cieux.

    Comment ne pas rappeler cet autre enseignement du Seigneur évoquant le jugement de la fin des temps, et dont saint Matthieu s’est souvenu à la fin de son évangile :

    Quand le Fils de l’homme viendra dans sa gloire… toutes les nations seront rassemblées devant lui ; il séparera les hommes les uns des autres, comme le berger sépare les brebis des boucs : il placera les brebis à sa droite, et les boucs à gauche. Alors le Roi dira à ceux qui seront à sa droite : « Venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la fondation du monde. » (25,31-34)

    Et quel sera le critère du discernement ?

    J’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli ; j’étais nu, et vous m’avez habillé ; j’étais malade, et vous m’avez visité ; j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi ! (ib. 35-36)

    La pratique des œuvres de miséricorde attire la bénédiction de Dieu : ce que vous « avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » (v.40) Heureux donc les pauvres de cœur, les doux, les miséricordieux, les cœurs purs, les artisans de paix. Heureux ceux qui offrent à manger et à boire à l’indigent, qui accueillent l’étranger, qui soignent et visitent le malade et le prisonnier. En mettant en œuvre sans relâche, jour après jour, l’enseignement du Seigneur, ils indiquent à leurs frères le chemin qui, de la vie dans l’éphémère temps présent, conduit à la Jérusalem céleste.

    L’accompagnement du malade, l’accès aux soins palliatifs est devenu une question importante alors que de nombreux États ont autorisé ou se préparent à rendre légale l’euthanasie. Ce faisant, l’État providence, en offrant à ses citoyens une « mort heureuse », prétend se substituer à la Providence divine qui dispose toute chose, et en particulier le moment de la mort, avec justice et amour.

    Il y a un peu plus de deux ans, la Congrégation pour la doctrine de la foi a publié un document intitulé Samaritatus bonus (1) , « Le Bon Samaritain », consacré au soin des personnes en phases critiques et terminales de vie. Je vous invite vivement à le relire intégralement et à le faire connaître. Je crois de mon devoir aussi de le citer un peu longuement ce matin dans le cadre de cette homélie.

    Ce document rappelle que :

    L’Église considère... comme un enseignement définitif que l'euthanasie est un crime contre la vie humaine parce que, par un tel acte, l'homme choisit de causer directement la mort d'un autre être humain innocent. Ceux qui adoptent des lois sur l'euthanasie et le suicide assisté sont donc complices du grave péché que d'autres commettront. Ils sont également coupables de scandale car ces lois contribuent à déformer la conscience, même des fidèles. (Cf. Catéchisme de l’Église Catholique, n. 2286.) « les supplications de très grands malades demandant parfois la mort ne doivent pas être comprises comme l’expression d’une vraie volonté d’euthanasie ; elles sont en effet presque toujours des demandes angoissées d’aide et d’affection... » (Cong. pour la Doctrine de la Foi, Décl. Iura et bona (5 mai 1980))

    Les lois qui approuvent l'euthanasie « non seulement ne créent aucune obligation pour la conscience, mais elles entraînent une obligation grave et précise de s'y opposer par l'objection de conscience...“il faut obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes” (Ac 5, 29) ». (Jean-Paul II, Evangelium vitae (25 mars 1995), n. 73)

    La Congrégation veut aussi répondre à l’objection que l’opposition à une telle loi tiendrait aux convictions religieuses de l’individu. Il n’en est rien :

    Le droit à l'objection de conscience ne doit pas nous faire oublier que les chrétiens ne rejettent pas ces lois en vertu d'une conviction religieuse privée, mais en vertu d'un droit fondamental et inviolable de chaque personne, essentiel au bien commun de toute la société. Il s'agit en effet de lois contraires au droit naturel, dans la mesure où elles sapent les fondements mêmes de la dignité humaine et d'une vie en commun fondée sur la justice.

    Enfin, le document précise que pour conférer le sacrement de réconciliation, le confesseur doit veiller à ce que le pénitent ait une contrition. Aussi, une personne inscrite auprès d'une association pour recevoir l'euthanasie ou le suicide assisté doit montrer son intention d'annuler cette inscription avant de recevoir les sacrements. Dans le cas où le patient serait inconscient, le prêtre pourrait administrer les sacrements sous condition et seulement si le repentir peut être présumé à partir d'un signe donné précédemment par la personne malade. Ceux qui assistent spirituellement les malades ne pourraient en aucun cas rester présents au moment de l’acte, ce qui ne pourrait être interprété que comme une complicité au mal.

    Alors que l’Église nous convie à méditer en ce jour sur la beauté du Corps mystique du Christ, elle nous rappelle que nous ne sommes pas seulement les profiteurs d’un admirable échange où la sainteté des uns profite aux autres. Les âmes au purgatoire, nos frères de la terre, et tout particulièrement ceux qui sont dans l’épreuve, implorent l’aumône de notre prière. Cheminant au cœur de l’Église militante, nous avons le devoir de nous entraîner les uns les autres vers la cité céleste, d’être comme un bon ange pour notre frère. Qui comprend la sainteté de la cité céleste, n’a de cesse d’y mener son prochain.

    Que Marie, Mère de Dieu, Reine des Anges et des Saints, Mère de miséricorde et Refuge des pécheurs, intercède pour nous. Amen.

    (1) https://www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/documents/rc_con_cfaith_doc_20200714_samaritanus-bonus_fr.html

    CDF_Samaritanus_bonus.pdf

  • Le métagénisme ou la supercherie du genre

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    Du site de la librairie en ligne Via Romana :

    La supercherie du Genre

    La supercherie du Genre

    Abbé Renaud de Sainte Marie

    10,00 € TTC
     
    Vient de paraître, en librairie le 10 novembre.

    Disponible dès maintenant sur ce site.

    Beaucoup d’opposants au Mariage pour tous le savaient. L’adoption de la loi Taubira était l’arbre qui cachait la forêt. Depuis lors, dans ces domaines qui touchent à la définition des sexes, à leur place dans la société, à la définition de la famille s’accumulent les bouleversements, certains diront les déconstructions.

    Pour inquiétant qu’il soit, ce spectacle n’est pas sans cohérence. Ce petit livre a pour ambition de dévoiler l’arrière-fond philosophique du chaos général soutenu institutionnellement à grand renfort de lois et de propagande par les gouvernements successifs de notre pays et par les institutions internationales.

    L’attaque que subissent les nations humaines est générale, et sa malice en quelque sorte inédite. Les premières victimes de cette offensive sont les plus jeunes générations, celles qui à l’école sont devenues les souris de laboratoire de théoriciens promouvant une égalité pas encore atteinte malgré cent cinquante ans de démocratie. On découvrira par ce livre pourquoi les luttes contre les discriminations sont devenues intersectionnelles.

    Face au mal qui progresse, nous ne pouvons pas rester inactifs. Mais avant d’agir, il faut comprendre, nommer. Sous nos yeux inquiets se dévoile un courant de pensée qui ne disait pas son nom, nous lui en avons donné un : le métagénisme.

    Prêtre, l’abbé Renaud de Sainte Marie a été ordonné en 2006. Titulaire d’un doctorat en philosophie, il a déjà publié La sensibilité dans la vie morale (Clovis 2009) et Le désir du bien (Téqui 2021).

  • Quelle sortie de crise peut-on imaginer pour l'Eglise ?

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    De l'abbé Claude sur Res Novae :

    Imaginer une sortie de crise pour l’Église

    novembre 2022

    De grandes échéances approchent inéluctablement. La décomposition du catholicisme va s’accélérant, et pas seulement en Allemagne. De ce fait, la mise en évidence d’un schisme de fait s’accroît entre un catholicisme de conservation (au sens où Yann Raison Du Cleuziou parle de catholiques qui ont maintenu une sorte de « conservatoire ») et un catholicisme libéral-conciliaire. De grandes secousses peuvent donner l’occasion, aux évêques qui en auront la volonté, suscitée par la toute puissante Providence, d’amorcer le dur combat d’une renaissance. Se trouvera-t-il de tels Successeurs des Apôtres ?

    Un salut qui ne peut être que hiérarchique

    L’Église, du fait de l’événement Vatican II, est plongée dans une crise d’un type totalement atypique où le fonctionnement habituel du magistère est comme enrayé. Cela tient aux novations enseignées par ce concile et à cette sorte de démission que constitue la sortie du magistère infaillible, au moins comme référence, et son remplacement par l’enseignement pastoral. Le signe le plus visible de cette ère nouvelle étant une liturgie elle-même pastorale, affaiblie, parfois considérablement, du point de vue de sa signification théologique.

    La divine constitution de l’Église étant fondée sur le pape et les évêques, la sortie de crise, à terme, ne peut être qu’une reprise en main par le pape et les évêques unis à lui. Ils devront nécessairement se consacrer à un renversement ecclésiologique dans le cadre d’une société catholique, aujourd’hui minoritaire. L’Église retrouvera la conscience d’être la totalité surnaturelle de son Corps mystique sur la terre, dans la pauvreté des moyens que lui impose une situation de persécution idéologique du monde moderne[1].

    Tel est le terme. Auparavant les fidèles de l’Église (jadis, on aurait pu y ajouter les princes chrétiens), animés par le sensus fidelium, peuvent certes œuvrer grandement en cette direction, notamment par la conservation de la lex orandi traditionnelle. Mais la préparation adéquate au retournement dont nous parlons serait – ou est déjà, quoique bien faiblement encore – l’action réformatrice de Successeurs des Apôtres en communion prévenante avec le pape devenu restaurateur. 

    Il ne faut pas se cacher que si la confession intégrale de la foi catholique redevient un jour, comme il est de règle, le critère d’appartenance à l’Église, la brisure latente de l’unité qui existe depuis cinquante ans entre catholiques[2] va nécessairement se transformer en schisme ouvert. Et cela ne pourra intervenir que « dans le sang et dans les larmes » moralement parlant. Mais ce sera en même temps libérateur, la vérité étant par essence salvatrice, y compris pour les schismatiques appelés au choix et à la conversion. Car on ne peut malheureusement pas prévoir de solutions gentillettes à une crise de cette profondeur.

    Sortir d’un catholicisme « allégé », revenir à un catholicisme « entier »

    Quel programme peut-on imaginer pour la hiérarchie du futur, et dans un plus proche avenir pour ces évêques anticipant et préparant le relèvement de l’Église ? Nous évoquerons dans de prochaines livraisons un certain nombre de thèmes de réforme, et auparavant de prolégomènes à la réforme, comme la recomposition de la liturgie, le retour à la prédication sur les fins dernières, la restauration de la discipline de la communion, l’enseignement de ce qu’on pourrait appeler le catéchisme tout simplement, la morale et spécialement la morale conjugale, la formation des prêtres.

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